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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 138 , 143, 144)

N° I-1129

24 novembre 2025


En attente de recevabilité financière

 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

MM. MICHAU et DEVINAZ, Mme BÉLIM, MM. BOURGI, PLA et Michaël WEBER, Mme MATRAY, M. OMAR OILI et Mmes MONIER et ESPAGNAC


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 15


Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le livre VI du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° A son intitulé et à l’intitulé du titre VI, les mots : « et bioliquides » , sont remplacés par les mots : « , bioliquides et carburants de synthèse non fossiles » ;

2° L’article L. 661-1 est ainsi modifié :

a) A la première phrase du premier alinéa, les mots : « et bioliquides » , sont remplacés par les mots : « , bioliquides et carburants de synthèse non fossiles » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« 3° Carburant de synthèse non fossile : un carburant produit à partir d’électricité renouvelable ou décarbonée et de carbone non fossile, conforme à la définition figurant au 18 de l’article 2 du règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable. » ;

d) Après le chapitre I du titre VI, il est inséré un chapitre II ainsi rédigé comprenant les articles L. 661-3 à L 661-6 ainsi rétablis :

« Chapitre II : Fonds de provisionnement pour l’incorporation de carburants d’aviation de synthèse non fossiles

« Art. L. 661-3. – Il est créé un fonds de provisionnement pour l’incorporation de carburants d’aviation de synthèse non fossiles, géré par la Caisse des dépôts et consignations.

« Art. L. 661-4. – Les fournisseurs de carburants d’aviation assujettis aux obligations d’incorporation de carburants d’aviation de synthèse non fossiles prévues par à l’article 4 du règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable sont tenus de verser annuellement au fonds de provisionnement institué à l’article L. 661-3 une contribution calculée dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 661-5. – Les sommes versées sont restituées, en tout ou partie, dès lors que le redevable justifie la conclusion de contrats d’achat ferme de carburants d’aviation de synthèse non fossiles pour les volumes correspondant à ses obligations réglementaires. En cas de non-respect à l’échéance prévue, les sommes non restituées sont versées au budget de l’État.

« Art. L. 661-6. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent chapitre, notamment les conditions de versement, de restitution et de calcul de la contribution. Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie, des transports et du budget fixe les paramètres de calcul de la contribution annuelle. Le décret prévu au présent article est pris au plus tard le 1er septembre 2026. »

II. – Les sommes versées en application du chapitre II du titre VI du livre VI du code de l’énergie constituent des recettes de la Caisse des dépôts et consignations affectées à un compte spécifique.

III. – Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2026.

IV. – Les contributions exigibles lors de la mise en place du fonds mentionné à l’article L. 661-3 sont versées avant le 1er mars 2027.

 

Objet

La Stratégie nationale hydrogène révisée (SNHr – avril 2025) reconnait que les carburants aériens de synthèse (e-SAF) sont l’un des usages prioritaires de l’hydrogène renouvelable et bas-carbone produit par électrolyse. Des projets de production de e-SAF se structurent en France, et devraient constituer le premier poste de contribution à l’atteinte des objectifs de déploiement des capacités d’électrolyse fixés dans la SNHr, soit 4,5 gigawatts (GW) en 2030, et 8 GW en 2035. C’est notamment le cas des quatre projets lauréats de l’appel à projets CarbAero qui, lorsqu’ils prendront une décision finale d’investissement, devraient représenter un volume d’investissement d’environ 5 milliards d’euros.

Ce développement industriel est permis par le mandat d’incorporation croissant de kérosène de synthèse non-fossile à partir de 2030, prévu dans le règlement européen (UE) 2023/2405 relatif à la promotion de carburants d’aviation durables. Le cadre européen fait reposer l’obligation sur les fournisseurs de carburants aériens conventionnels.

Eu égard à leur complexité technologique et leur taille, ces projets de production de e-SAF doivent prendre des décisions d’investissements dans les deux prochaines années pour être mis en service en 2030, première année d’application de l’obligation d’incorporation d’e-SAF. Compte tenu de leur intensité capitalistique, la décision d’investissement est conditionnée à la contractualisation pluriannuelle des volumes de production.

Or, les fournisseurs de carburants aériens conventionnels, souvent en situation de monopoles ou duopoles locaux sur les grands aéroports, et pouvant avoir des intérêts contraires au développement d’une filière e-SAF, bloquent les processus de contractualisation. Cette stratégie bloque les projets de production essentiels à l’atteinte des objectifs industriels et climatiques nationaux et européens, et fait peser un risque politique de remise en cause du mandat d’incorporation, au motif que l’offre de production serait insuffisante.

Afin de lever ce verrou de marché et permettre la réalisation des projets les plus matures, le présent amendement institue un fond de provisionnement, alimenté de manière obligatoire par les fournisseurs de carburants d’aviation conventionnels, à hauteur des montants correspondant aux pénalités prévues en cas de non-respect de leurs obligations d’incorporation de e-SAF sur la première période d’application du règlement.

Les sommes versées seraient restituées dès la signature de contrats d’achat ferme sur les volumes anticipés. Ce dispositif rend opérationnel dès 2026 le signal économique du régime de pénalités applicable à partir de 2030, créant ainsi sur les fournisseurs une incitation forte à contractualiser sans retarder les investissements industriels. L’abondement du fonds étant prévu au premier trimestre de 2027, l’impact sur la trésorerie des acteurs concernés est anticipable.

Le fonds serait géré par la Caisse des dépôts et consignations, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Amendement travaillé avec France Hydrogène