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Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2026 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 138 , 139 , 143, 144) |
N° I-2481 25 novembre 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. FERNIQUE, Grégory BLANC et DOSSUS, Mme SENÉE, MM. BENARROCHE, DANTEC et GONTARD, Mme GUHL, M. JADOT, Mme de MARCO, M. MELLOULI, Mmes OLLIVIER et PONCET MONGE, M. SALMON et Mmes SOUYRIS et Mélanie VOGEL ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 21 |
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Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 119-7 du code de la voirie routière est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« .... – Une majoration de la redevance d’infrastructure perçue sur des tronçons routiers régulièrement saturés ou dont l’utilisation par des véhicules de transports de marchandises de plus de 3,5 tonnes cause des dommages importants à l’environnement peut être appliquée.
« Les modalités de mise en place de cette majoration sont définies par décret, en conformité avec les dispositions de l’article 7 septies de la directive (UE) 2022/362 du Parlement européen et du Conseil du 24 février 2022 modifiant les directives 1999/62/CE, 1999/37/CE et (UE) 2019/520 en ce qui concerne la taxation des véhicules pour l’utilisation de certaines infrastructures. »
Objet
Le présent amendement vise à appliquer une majoration sur la redevance d’infrastructures perçue sur des tronçons autoroutiers concurrents des grands corridors de fret ferroviaire. En effet, bien que l’article 7 septies de la directive Eurovignette révisée de 2022 permette une majoration ciblée des péages routiers sur des tronçons spécifiques régulièrement saturés ou dont l’utilisation par des véhicules cause des dommages importants à l’environnement, cette possibilité n’a pas fait l’objet d’une transposition en droit français.
L’article 7 septies susmentionné offre un fondement juridique pertinent pour introduire un dispositif de sur-péage poids lourds qui porterait essentiellement sur des tronçons des grands axes autoroutiers à péages traversant la France, entre la Belgique et l’Allemagne d’une part, et l’Espagne d’autre part (par Bordeaux-Hendaye et par Montpellier-Perpignan). Ces axes correspondent à des corridors du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) identifiés comme prioritaires par la Commission européenne, où l’offre ferroviaire existe mais reste sous-exploitée par rapport à ses capacités réelles. Ces axes autoroutiers sont par ailleurs majoritairement empruntés par des poids lourds sous pavillon étranger, dont la part modale n’a cessé de croître au cours des dernières années et qui se ravitaillent en carburant aux frontières et échappent ainsi à l’accise sur les produits énergétiques.
Ce sur-péage poids lourds, qui représenterait une majoration de 15 % environ, se distingue de l’écotaxe de 2014 dans la mesure où il s’agit d’un dispositif ciblé sur certains tronçons, qui ne nécessite pas d’infrastructures dédiées, comme des portiques. Il constituerait dès à présent un moyen d’appliquer le principe du pollueur-payeur en renforçant la contribution des poids lourds pour compenser les externalités négatives générées par le transport routier. En effet, le transport routier génère un ensemble d’externalités négatives dont le coût pour la société est estimé à 69 milliards d’euros par an, selon une étude du Forum Vie Mobile de juin 2025. L’internalisation d’une partie de ces coûts par les transporteurs routiers permettrait de rétablir des conditions de concurrence plus équitables entre les modes et de laisser aux donneurs d’ordre le choix quant au mode de transport, éclairé par le signal prix.
Par ailleurs, ce dispositif pollueur-payeur est nécessaire dans un contexte où le transport routier constitue le principal mode d’acheminement des marchandises en France, représentant près de 89 % du volume total en 2023. Ce secteur est ainsi l’un des plus importants contributeurs aux émissions nationales de gaz à effet de serre, avec une part de 13 %. Afin de verdir le transport de marchandises, la troisième Stratégie nationale bas-carbone fixe l’objectif de doubler la part modale du fret ferroviaire d’ici 2030. Cet objectif, fixé à 18 %, apparaît réaliste au regard de la moyenne européenne, qui s’élevait à 17 % en 2024.
Au total, l’introduction de ce dispositif pourrait permettre de dégager environ 400 M € de ressources supplémentaires par an pour financer des investissements ferroviaires, en particulier sur les tronçons transfrontaliers. Ces ressources nouvelles constitueraient un apport significatif pour répondre aux besoins de financement des infrastructures de transport, identifiés par la conférence Ambition France Transport, qui s’élèvent à 3 milliards d’euros supplémentaires par an.