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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 138 , 143, 144)

N° I-584

24 novembre 2025


En attente de recevabilité financière

 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

M. MENONVILLE


ARTICLE 10


I. – Après l’alinéa 13

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le c, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« d) Au titre de l’exercice de survenance d’un aléa économique, qui s’entend :

« 1° Soit d’une baisse de la valeur ajoutée de l’exercice, par rapport à la moyenne des valeurs ajoutées des trois exercices précédents, supérieure à 10 % ;

« 2° Soit d’une baisse de la valeur ajoutée de l’exercice, par rapport à la moyenne des valeurs ajoutées des trois derniers exercices clos avant l’exercice précédent, supérieure à 15 %.

« Pour l’application du présent d), la valeur ajoutée s’entend de la différence entre, d’une part, la somme, hors taxes, des ventes, des variations d’inventaire, de la production immobilisée et autoconsommée et des indemnités et subventions d’exploitation et, d’autre part, la somme, hors taxes et sous déduction des transferts de charges d’exploitation affectés, du coût d’achat des marchandises vendues et de la consommation de l’exercice en provenance de tiers. La valeur ajoutée de l’exercice doit être réalisée dans des conditions comparables à celles des trois exercices de référence retenus pour apprécier la baisse de la valeur ajoutée.

« L’exonération partielle prévue au présent d est subordonnée à la condition :

« 1° Qu’un contrat d’assurance mentionné à l’article L. 361-4 du code rural et de la pêche maritime couvrant les pertes de l’exercice ait été souscrit,

« 2° Que le contribuable présente, à la demande de l’administration fiscale, une attestation soit d’un professionnel de l’expertise-comptable au sens de l’article 371 bis A de l’annexe II du code général des impôts, soit d’un centre de gestion agréé au sens de l’article 371 A de l’annexe II du code général des impôts, attestant de la réalité de la baisse de valeur ajoutée visée au 1° et au 2° du présent d ».

II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Objet

Cet amendement tend à étendre la réintégration de la déduction pour épargne de précaution (DEP) à fiscalisation partielle à la survenance d’aléas économiques.

En effet, l’épargne de précaution est un outil fiscal indispensable à la résilience des exploitations agricoles.Il permet lors des années favorables de déduire fiscalement une somme de son chiffre d’affaires annuel (maximum 50 000 €) et sous condition d’en épargner au moins la moitié sur un compte bancaire dédié. Lors des années difficiles, l’exploitant peut prélever sur ce compte bancaire les liquidités nécessaires pour surmonter les difficultés qu’il rencontre : acquisition de fourrage ou d’aliments pour animaux en cas de mauvaise récolte, besoin de trésorerie suite à la mévente de ses productions, ou toute autre dépense professionnelle. Cet outil simple et souple permet aux agriculteurs de gérer leurs aléas de revenus en pleine responsabilité.

Ce dispositif a été renforcé par la loi de finances pour 2025. Elle a permis en cas d’aléa climatique ou sanitaire impactant les récoltes ou les animaux (indemnisation par l’assurance récolte multirisque subventionnée, au titre de l’indemnité de solidarité, par le Fonds de mutualisation sanitaire et environnemental ou le Fonds des calamités agricoles), une imposition partielle à hauteur de 70 % des sommes déduites rapportées au résultat au titre de l’exercice de survenance de l’aléa ou de l’exercice suivant. L’effort d’épargne de l’agriculteur a été mieux accompagné et plus efficace.

Or, même si elle constitue une avancée importante, elle n’offre pas une garantie complète pour permettre aux agriculteurs de lutter contre les aléas d’ordre économique et préserver leur revenu : l’épargne de précaution rapportée au résultat doit pouvoir être taxée à hauteur de 70 % seulement en cas de chute de la valeur ajoutée produite par l’exploitation.

Il est ainsi proposé d’étendre la réintégration avec fiscalisation partielle de l’épargne de précaution à la survenance d’aléas économiques. La perte économique serait caractérisée soit par une perte de valeur ajoutée de l’exploitation de plus de 10 %, comparée à la moyenne des valeurs ajoutées des trois exercices précédents, soit par une perte de valeur ajoutée de plus de 15 %, comparée à la moyenne des valeurs ajoutées des trois derniers exercices clos avant l’exercice précédent. La référence à la valeur ajoutée avait déjà été retenue par l’administration dans l’ancien dispositif de déduction pour aléas, aujourd’hui abrogé, car elle ne permet aucun « pilotage » par l’exploitant et reflète la réalité de son exposition aux aléas économiques extérieurs.

La mesure sera toutefois conditionnée au fait que l’exploitant victime d’un aléa économique soit assuré, au préalable par un contrat d’assurance-récolte multirisques climatiques afin de ne couvrir que les pertes de valeur ajoutée liées à la hausse des prix des intrants ou la chute des cours des productions animales ou végétales. De plus, pour sécuriser le dispositif ainsi créé, une attestation délivrée par l’expert-comptable ou le centre de gestion agréé devra être fournie à l’administration fiscale à sa demande, à l’effet de certifier de la réalité de la perte de la valeur ajoutée subie.

L’utilisation de cette nouvelle faculté de réintégration permettrait de bénéficier de la fiscalisation partielle au cours des seuls exercices pour lesquels la réintégration au titre de l’indemnisation par l’assurance récolte n’est pas applicable, c’est-à-dire, environ une année sur trois.Le coût du dispositif, réservé aux seuls exploitants assurés contre les risques climatiques est estimé à 8 millions d’ €.