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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 138 , 143, 144)

N° I-615

24 novembre 2025


En attente de recevabilité financière

 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

Mme ESPAGNAC


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 21


Après l'article 21

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À compter du 1er janvier 2026, les sociétés employant plus de deux cent cinquante personnes sont assujetties à une contribution climat en tant que chargeurs.

II. – Cette contribution est assise sur le montant total des dépenses engagées par la société, hors taxe sur la valeur ajoutée, pour le transport de marchandises, qu’il soit effectué pour compte propre ou dans le cadre d’une prestation de service, selon des modalités fixées par décret.

Les dépenses réalisées à des fins de transport de marchandises « zéro émission » ou via le fret fluvial ou ferroviaire ne sont pas prises en compte. Par « zéro émission » , sont entendus les transports effectués par des véhicules n’émettant pas de CO₂ à l’échappement, notamment les véhicules électriques à batterie ou les véhicules à pile à combustible (hydrogène), conformément au règlement (UE) 2019/1242 et ses amendements en faveur des technologies zéro émission.

Les dépenses réalisées à des fins de transport de marchandises dont l’origine ou la destination se situent hors du territoire national sont prises en compte.

III. – Le montant de la contribution est déterminé par le tableau suivant :

AnnéeTaux
A compter du 1er janvier 20260,5
A compter du 1er janvier 20281
A compter du 1er janvier 20302

Le taux est exprimé en pourcentage des dépenses éligibles en application du II.

IV. – Les personnes morales justifiant de dépenses consacrées à des fins de transport de marchandises « zéro émission » ou via le fret fluvial ou ferroviaire supérieures à 20 % de leurs dépenses totales de transport de marchandises, au sens du II du présent article, sont exonérées de la contribution climat exceptionnelle sur les chargeurs.

V. – La contribution est déclarée et liquidée par le redevable aux dates déterminées par arrêté du ministre chargé du budget. La périodicité des déclarations et paiements est au plus mensuelle et au moins annuelle.

En cas de cessation d’activité du redevable, le montant dû au titre de l’année de cessation d’activité est établi immédiatement. La contribution est déclarée, acquittée et, le cas échéant, régularisée selon les modalités prévues pour la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable ou, à défaut, dans les soixante jours suivant la cessation d’activité.

VI. – La contribution est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.

VII. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article.

VIII. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre du code des impositions sur les biens et services.

Objet

Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à instaurer une contribution climat des chargeurs, modulée en fonction de leurs volumes d’activité et de leur degré d’engagement dans la transition vers des transports à faibles émissions.

Cette contribution permettra à la fois d’inciter les acteurs à adopter des pratiques plus vertueuses et de générer des recettes destinées à accélérer la décarbonation du secteur.

Afin d’atteindre les objectifs climatiques fixés au niveau national et européen, la décarbonation du transport de marchandises constitue un enjeu prioritaire. Cette transition ne pourra être menée à bien sans une mobilisation équilibrée de l’ensemble des acteurs de la chaîne logistique.

Les transporteurs ont d’ores et déjà engagé leur mutation, notamment par le renouvellement progressif de leurs flottes vers des motorisations à faibles ou à zéro émission. Toutefois, les leviers de transformation ne peuvent reposer exclusivement sur eux. Les chargeurs, en tant que donneurs d’ordre et prescripteurs des solutions de transport, disposent d’un rôle déterminant pour orienter la demande vers des offres de fret décarboné, en contractualisant avec les transporteurs des objectifs clairs et mesurables en matière d’émissions.

Les entreprises de plus de 250 salariés représentent à elles seules près de 40 % des flux de marchandises transportés en France. Leur implication constitue donc un levier essentiel pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur.

Le présent amendement vise à instaurer une contribution climat des chargeurs, modulée en fonction de leurs volumes d’activité et de leur degré d’engagement dans la transition vers des transports à faibles émissions. Cette contribution permettra à la fois d’inciter les acteurs à adopter des pratiques plus vertueuses et de générer des recettes destinées à accélérer la décarbonation du secteur.

Le seuil de 20 % pour une exonération totale est incitatif et atteignable compte tenu de la marge de manœuvre des entreprises de plus de 250 salariés et du mix actuel du transport de marchandises en France (2 % de part de marché pour les poids lourds zéro émission, 10,4 % de part modale pour le ferroviaire et 2 % pour le fret).

Les conditions de mise en œuvre, notamment les modalités de calcul et les critères de modulation de la contribution, seront définies par décret, afin de permettre un dialogue constructif avec les acteurs économiques concernés et d’assurer une mise en place progressive et équitable de la mesure.

Selon les premières estimations établies par l’organisation Transport &amp ; Environment (T&amp ;E), cette contribution pourrait générer environ 190 millions d’euros par an. Ces recettes devront être intégralement fléchées vers des actions de soutien à la décarbonation du transport de marchandises, notamment :

· le soutien au fret ferroviaire et fluvial et au transport combiné.

· le financement de l’installation d’infrastructures de recharge électrique et hydrogène pour poids lourds ;

· le renforcement du programme Objectif CO₂ de l’ADEME, destiné à accompagner les transporteurs dans leur transition énergétique ;