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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 138 , 143, 144)

N° I-933

24 novembre 2025


En attente de recevabilité financière

 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

Mme BLATRIX CONTAT


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 2


Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au premier alinéa du 3 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts, les mots : « , pour leur montant effectivement supporté » sont remplacés par les mots : « à hauteur de la rémunération de l’employé, incluant toute forme de cotisations sociales et à l’exclusion de toute rémunération d’intermédiaire de mise en relation ou de mandataire administratif et de tout frais de déplacement ».

II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2026.

III. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

 

Objet

Cet amendement vise à limiter l’assiette du crédit d’impôt « services à la personne » au seul salaire réellement perçu par le travailleur, afin d’empêcher la captation croissante de ce dispositif par les plateformes d’intermédiation.

Le Crédit d’impôt services à la personne a coûté 6,4 milliards d’euros à l’État en 2024, et devrait atteindre 7 milliards en 2025 puis 7,2 milliards en 2026. Conçu pour stimuler la demande de services et encourager le travail déclaré, il poursuit des objectifs que cet amendement ne remet pas en cause. Mais son fonctionnement actuel présente des dérives majeures, dont l’une des plus préoccupantes est l’accaparement du bénéfice de ce crédit par des plateformes mandataires, parfois détenues par des fonds d’investissement, au détriment des particuliers employeurs, des travailleurs et de l’État.

Une part croissante des prestations à domicile est en effet « intermédiée » par ces plateformes, qui se limitent à mettre en relation particuliers et travailleurs sans les employer. Dans ce modèle d’ « ubérisation » , deux problèmes majeurs apparaissent :

La précarité des travailleurs, particulièrement marquée dans les services à la personne : dépendance à la plateforme, impossibilité de prendre des congés sans perdre sa clientèle, forte asymétrie de pouvoir de négociation, etc.La captation du crédit d’impôt par les plateformes, qui prélèvent des frais importants. Pour une prestation de ménage facturée 50 € de l’heure — dont 25 € remboursés par le crédit d’impôt — le travailleur perçoit souvent moins de 15 €.

L’amendement ne modifie pas le taux du crédit d’impôt, mais recentre son assiette sur le salaire réellement versé au travailleur (cotisations incluses), en excluant les frais de plateforme et les frais de transport, ces derniers étant parfois utilisés pour verser du « salaire déguisé » hors cotisations.

Ainsi, dans l’exemple ci-dessus, le crédit d’impôt passerait de 25 € à 7,5 € (50 % des 15 € réellement versés), mais pourrait atteindre 20 € si la plateforme reversait effectivement 40 € au travailleur sur les 50 € facturés.

Ce recentrage permet un meilleur partage de la valeur, renforce la protection des travailleurs, préserve les fondements du crédit d’impôt et générerait par ailleurs plus de 200 millions d’euros d’économies pour l’État.