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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

MISSION SANTÉ

(n° 138 , 139 , 142)

N° II-2056

8 décembre 2025


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

Mmes SOUYRIS et PONCET MONGE, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL


Article 49 (crédits de la mission)

(État B)


I. - Créer le programme :

Prévention du virus de l'immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles

II. -En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

3 000 000

3 000 000

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Prévention du virus de l'immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles

3 000 000

3 000 000

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

Objet

Les associations de lutte contre le VIH-Sida, les hépatites virales et les autres IST tirent la sonnette d’alarme. Act Up Paris a ainsi dénoncé dans son communiqué du 24/10/2025 le fait que le PLF 2026 “fragilise une nouvelle fois la prévention et l’accès au soin. En cause : des financements insuffisants [...] dont dépendent de nombreuses actions VIH/IST”. L’association souligne que cette décision politique menace la prévention, le dépistage, l’accès à la PrEP, la réduction des risques, l’accompagnement social et la santé sexuelle, notamment pour les publics les plus exposés (travailleuses et travailleurs du sexe, HSH, personnes migrantes, usager.e.s de drogues, jeunes LGBTQIA+, personnes incarcérées…).

En outre, l'association AIDES, première organisation française de lutte contre le VIH/sida, vient d'annoncer l'ouverture d'un plan de suppression de postes pour motif économique. Toutes les associations de lutte contre le VIH/sida comme Actions Traitements connaissent par ailleurs une baisse de subventions en 2025, qui pourrait se poursuivre en 2026, de 20% du financement par la Direction générale de la santé. Cette réduction s'inscrit pourtant dans un contexte où les besoins des usagers augmentent sensiblement (hausse du nombre de personnes accompagnées, notamment en éducation thérapeutique), et où les inégalités de santé liées au VIH persistent : comorbidités, isolement, précarité, discriminations.  

Le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et les infections sexuellement transmissibles (IST) demeurent pourtant de véritables problématiques de santé publique.

En effet, d'après le dernier bulletin de Santé publique France (23/10/25),”l’incidence des contaminations par le VIH ne diminue plus et s’est stabilisée à 3 400 cas depuis 2023. [...] Ces indicateurs soulignent la nécessité de poursuivre les efforts pour mieux répondre aux besoins des populations et des territoires les plus exposés, en déclinant les mesures de prévention combinée selon une approche d’universalisme proportionné, afin d’atteindre l’objectif d’élimination de l’infection par le VIH fixé par la stratégie nationale de santé sexuelle”.

La lutte contre l’épidémie de VIH/sida doit pourtant être une priorité nationale. La France a en effet fait sien l’objectif énoncé par le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) d’une éradication de l’épidémie d’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) d’ici 2030 (zéro nouvelle contamination au VIH, zéro nouveau cas de sida, zéro discrimination), objectif correspondant concrètement à moins de 50 nouvelles infections par an, chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes (HSH), objectif qu'il est à ce stade "peu probable" d'atteindre d'après les chercheur.e.s [1].

Pourtant, les outils nécessaires pour mettre fin à l’épidémie d’ici 2030 sont déja là : la PrEP (Prophylaxie ré-exposition), le TasP (Treatment as Prevention), les préservatifs internes et externes, le dépistage, le TPE (Traitement Post-Exposition), les centres de santé et de médiation en santé sexuelle. Des campagnes de grande ampleur doivent être déployées pour assurer leur promotion. 

A l’échelle mondiale, la lutte contre le VIH est menacée depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump aux Etats-Unis, du fait de coupes dans les financements de l’USAID et du PEPFAR, en particulier dans les pays à faible revenu où ces programmes représentent une part essentielle des budgets de prévention. Quant au rôle de la France, depuis 2024, l’aide publique au développement connaît une baisse structurelle, qui affecte également notre contribution au soutien à la lutte contre le VIH dans les pays qui en ont le plus besoin. Avec le projet de budget pour 2026, l’aide publique au développement aura perdu plus de la moitié de son budget en deux ans. Une France sans sida ne pourra se faire que dans un monde sans sida.

Pour en revenir au territoire national, le contrôle de l’épidémie de VIH suppose, en premier lieu, la réduction significative du nombre de personnes séropositives qui l’ignorent. C’est pourquoi, cet amendement vise à augmenter les crédits en faveur de la prévention du VIH et des IST à hauteur de 3 millions d’euros. Cet amendement appelle également le Gouvernement à clarifier sa position sur le subventionnement à un niveau au moins constant sinon en augmentation des associations de lutte contre le VIH/sida. 

Les associations, notamment communautaires, sont les derniers maillons du système. Elles sont là où l'Etat n'est pas : en lien avec les personnes migrantes, usagères de drogues, travailleuses du sexe. Elles sont le dernier kilomètre, et atteignent les personnes les plus éloignées du système de santé - celles que la précarité, la discrimination, les inégalités ou l'isolement rendent inaccessibles aux dispositifs classiques, alors même que tous ces facteurs exposent d'autant plus à l'épidémie.

Afin de respecter les exigences de l’article 40 de la Constitution et de la LOLF, les auteur.ice.s de cet amendement ont été contraint.e.s de compenser la dépense par un gage sur un autre programme de la mission concernée. Dans la mesure où il nous est impossible de gager sur le programme FRR, et non souhaitable de réduire le financement de l’AME, il convient de noter que cette proposition de mouvement de crédits depuis ceux du programme Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins est uniquement formelle, et nous appelons le gouvernement à lever le gage. 

[1]  Cambiano V, Miners A, Lampe FC, McCormack S, Gill ON, Hart G, et al. The effect of combination prevention strategies on HIV incidence among gay and bisexual men who have sex with men in the UK: A model-based analysis. Lancet HIV. 2023; 10(11):e713-e722