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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

MISSION JUSTICE

(n° 138 , 139 , 145)

N° II-2229

9 décembre 2025


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

Mmes SOUYRIS et Mélanie VOGEL, MM. BENARROCHE et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mmes OLLIVIER et PONCET MONGE, M. SALMON et Mme SENÉE


Article 49 (crédits de la mission)

(État B)


Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

1 000 000

 

1 000 000

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

 

Objet

Ce présent amendement vise à renforcer les moyens dédiés à la réduction des risques et des dommages (RdRD) en milieu carcéral au sein du programme 107 « Administration pénitentiaire ».

La prévalence des addictions en détention est nettement supérieure à celle observée en milieu ouvert. Un tiers des personnes entrant en prison présente une problématique addictive hors tabac, et la quasi-totalité continue à consommer d'une manière ou d'une autre en détention. Selon une étude menée en 2017 à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas, près de 60 % des consommateurs de produits illicites hors cannabis auraient recours à l'inhalation et 30 % à l’injection. L'enquête ESSPRI (auquel la DAP a participé), réalisée en 2023, a mis en évidence la part importante de consommateurs de substances en détention, que ce soit le cannabis (49 % des détenus interrogés déclarent en avoir fumé au cours de leur détention), ou d'autres drogues (13 % déclarent avoir consommé de la cocaïne et 5,1 % de l'héroïne au cours de leur détention). Enfin, et selon cette même enquête, 4 détenus sur 100 rapportent avoir eu recours à l’injection d’une substance au moins une fois depuis leur incarcération. Dans un contexte où le matériel stérile d’inhalation ou d’injection n’est pas disponible, la prévalence du VIH et des hépatites virales y est de six à dix fois plus élevée que dans la population générale.

La loi du 26 janvier 2016 a pourtant étendu le principe d’équivalence des soins entre milieu ouvert et milieu fermé à la réduction des risques et des dommages. Bientôt 10 ans après, cette obligation reste très inégalement appliquée selon les établissements, ce qui crée de fortes disparités territoriales et une absence de pilotage national clair. La mise en œuvre de ces actions en milieu carcéral demeure largement insuffisante.

Les associations spécialisées et les acteurs de terrain soulignent que les dispositifs de réduction des risques prévus par la loi sont largement absents en détention et que leur existence dépend trop souvent de la volonté locale d’un établissement ou de la mobilisation ponctuelle d’équipes sanitaires. Là où des actions sont menées, comme à Villeneuve-lès-Maguelone, elles démontrent pourtant leur utilité sanitaire et sociale, jusqu’à être soutenues et promues jusqu'à l’Organisation mondiale de la santé. 

Le Gouvernement a esquissé des orientations sur ce sujet. La feuille de route « Santé pour les personnes placées sous main de justice », présenté au printemps 2025, appelle à inclure l’ensemble des enjeux des conduites addictives (avec substance et sans substances) et à proposer une démarche complète dans un continuum allant de la prévention aux soins/accompagnement en passant par une réduction des risques et des dommages, adaptée aux spécificités et aux contraintes du milieu carcéral.

Faisons en sorte que le principe d’équivalence des soins entre milieu ouvert et milieu fermé à la réduction des risques et des dommages soit enfin et réellement appliqué.

Cet abondement de crédits permettra de déployer dans les établissements pénitentiaires les dispositifs de réduction des risques prévus par la loi, d’améliorer l’accompagnement addictologique des personnes détenues, de soutenir et former les équipes chargées de ces actions, de renforcer la coopération entre l’administration pénitentiaire et les acteurs de santé, et de garantir un pilotage national assurant une mise en œuvre homogène sur le territoire.

Le présent amendement propose donc de renforcer à hauteur de 1 million les moyens dédiés au programme 107 – Administration pénitentiaire. Compte tenu des règles contraignantes de l'article 40 de la Constitution, la même somme sera prélevée sur le programme 310 – Conduite et pilotage de la politique de la justice. Nous demandons au Gouvernement de lever le gage.