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Direction de la séance |
Proposition de loi Exposition excessive et précoce aux écrans et méfaits des réseaux sociaux (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 202 , 201 ) |
N° 36 17 décembre 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme MORIN-DESAILLY au nom de la commission de la culture ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 6 |
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Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique est ainsi modifiée :
1° Après la section 3 du chapitre II, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section ...
« Protection des mineurs en ligne
« Art. 6-9. – I. – Les fournisseurs de services de réseaux sociaux en ligne exerçant leur activité en France refusent l’inscription à leurs services des mineurs de treize ans. Ils suspendent également, dans les meilleurs délais, les comptes déjà créés et détenus par ces mineurs.
« Ils refusent l’inscription à leurs services des mineurs de seize ans âgés de plus de treize ans, sauf si l’autorisation de cette inscription est donnée par l’un des titulaires de l’autorité parentale sur le mineur. Ils recueillent également, dans les mêmes conditions et dans les meilleurs délais, l’autorisation expresse de l’un des titulaires de l’autorité parentale relative aux comptes déjà créés et détenus par des mineurs de seize ans âgés de plus de treize ans.
« Lors de l’inscription, ces entreprises délivrent une information à l’utilisateur de moins de seize ans et aux titulaires de l’autorité parentale sur les risques liés aux usages numériques et les moyens de prévention de ces risques. Elles délivrent également à l’utilisateur de moins de seize ans une information claire et adaptée sur les conditions d’utilisation de ses données et de ses droits garantis par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
« L’un des titulaires de l’autorité parentale peut demander aux fournisseurs de services de réseaux sociaux en ligne la suspension du compte du mineur de seize ans.
« Lors de l’inscription d’un mineur, les fournisseurs de services de réseaux sociaux en ligne activent un dispositif permettant de contrôler le temps d’utilisation de leur service et informent régulièrement l’usager de cette durée par des notifications.
« Afin de vérifier l’âge des utilisateurs finaux et l’autorisation de l’un des titulaires de l’autorité parentale, les fournisseurs de services de réseaux sociaux en ligne utilisent des solutions techniques conformes à un référentiel élaboré par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, après consultation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
« II. – Lorsqu’il constate qu’un fournisseur de services de réseaux sociaux en ligne n’a pas mis en œuvre de solution technique certifiée pour vérifier l’âge des utilisateurs finaux et l’autorisation de l’un des titulaires de l’autorité parentale de l’inscription des mineurs de seize ans âgés de plus de treize ans, le président de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique adresse à ce fournisseur, par tout moyen propre à en établir la date de réception, une mise en demeure de prendre toutes les mesures requises pour satisfaire aux obligations prévues au I. Le fournisseur dispose d’un délai de quinze jours à compter de la mise en demeure pour présenter ses observations.
« III. – Lorsque le fournisseur concerné ne se conforme pas à la mise en demeure qui lui est adressée en application du II du présent article, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut prononcer une sanction pécuniaire dans les conditions prévues à l’article 42-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
« Le montant de la sanction prend en compte la nature, la gravité et la durée du manquement, les avantages tirés de ce manquement et les manquements commis précédemment.
« Le montant de la sanction ne peut excéder la somme de 150 000 euros ou 2 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé au cours de l’exercice précédent, le plus élevé des deux montants étant retenu. Ce maximum est porté à 300 000 euros ou à 4 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes, le plus élevé des deux montants étant retenu, en cas de réitération du manquement dans un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la première sanction est devenue définitive.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.
« IV. – Les obligations prévues au I ne s’appliquent ni aux encyclopédies en ligne à but non lucratif ni aux répertoires éducatifs ou scientifiques à but non lucratif.
« V. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. » ;
2° Le I de l’article 57 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « 1er à 12 » sont remplacés par les mots : « 1er à 6-8, 7 à 12 » ;
b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article 6-9 de la présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna dans sa rédaction résultant de la loi n° du visant à protéger les jeunes des risques liés à l’exposition aux écrans et des méfaits des réseaux sociaux, et à les accompagner vers un usage raisonné du numérique. »
Objet
Le législateur français a souhaité, en 2023, instaurer une majorité numérique française. Or, la loi n° 2023-566 du 7 juillet 2023 visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne (dite « loi Marcangeli » ) n’est jamais entrée en vigueur, puisqu’elle renvoyait cette entrée en vigueur à l’adoption d’un décret qui n’a jamais été pris par le Gouvernement, à la suite des observations de la Commission européenne qui soulevaient des questions d’articulation avec le droit de l’Union européenne.
Toutefois, le 14 juillet 2025, la Commission européenne a dévoilé ses lignes directrices sur l’application du RSN, tenant compte de l’appel de la France à mettre en mettre en œuvre une restriction d’accès aux réseaux sociaux. Il y est en effet indiqué que le recours à un dispositif de vérification de l’âge est approprié « lorsque […] le droit national […] prescrit un âge minimum pour accéder […] à une plateforme en ligne, y compris des catégories spécifiquement définies de services de médias sociaux en ligne ». Ainsi, elle a introduit la possibilité, pour chaque État, membre de fixer un âge minimal d’accès aux réseaux sociaux.
La Commission européenne a également dévoilé un prototype d’application dédié à la vérification de l’âge et fondé sur l’architecture du Portefeuille Européen d’Identité Numérique, en cours d’évaluation en partenariat avec les États membres (notamment la France) les plateformes en ligne et les utilisateurs finaux.
Mettant en œuvre cette nouvelle possibilité, le présent amendement tend à obliger les plateformes à interdire l’accès des réseaux sociaux aux mineurs de 13 ans et à mettre en place un système de vérification de l’âge robuste, conforme à un référentiel de l’Arcom, pour mettre en œuvre cette mesure. Plusieurs plateformes fixent déjà actuellement un tel âge minimal de 13 ans, mais elles ne vérifient pas réellement l’âge de leurs utilisateurs.
L’amendement prévoit par ailleurs que les mineurs ayant entre 13 ans et 16 ans devront recueillir l’autorisation parentale pour leur inscription sur un réseau social. Il s’agit ainsi de responsabiliser les parents et de leur permettre d’engager un dialogue avec leurs enfants sur leurs usages numériques.
Cet amendement est conforme à la position exprimée le 26 novembre 2025 en réunion plénière par le Parlement européen, qui a adopté le rapport d’initiative de Christel Schaldemose (S&D) sur la protection des mineurs. Il présent ainsi l’avantage de proposer une solution susceptible d’être adoptée dans l’ensemble de l’Union européenne, ce qui faciliterait considérablement son application.
Ce dispositif permettra ainsi de protéger les mineurs contre les effets négatifs des réseaux sociaux, qu’ils soient sanitaires, liés au cyberharcèlement ou à d’autres atteintes à leur sécurité ou à leur bien-être, tels que documentés par les nombreuses études scientifiques réalisées à ce jour.