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commission des finances

Projet de loi organique

relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques

(1ère lecture)

(n° 43 )

N° COM-3

22 octobre 2012


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté avec modification

M. MARC, rapporteur


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 8


Après l’article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans ses avis, le Haut Conseil des finances publiques :

1° Publie sa méthodologie lorsqu’il se réfère à une estimation du produit intérieur brut potentiel différente de celle figurant dans le rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques. Il présente et justifie les différences éventuelles par rapport aux estimations de cette loi, du Gouvernement et de la Commission européenne ;

2° Lorsqu’il exprime un avis sur une prévision de croissance, tient compte des prévisions moyennes d’un ensemble d’organismes dont il a établi et rendu publique la liste.

Objet

Cet amendement a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles le Haut Conseil des finances publiques exprimera ses avis sur les prévisions macroéconomiques et la cohérence de l’ensemble des textes financiers nationaux et européens.

1. Dans la mesure où la règle budgétaire sera exprimée en termes de solde structurel, qui est une notion subjective et complexe, il importe que les termes du débat politiques soient posés le mieux possibles. Dans ces conditions, la multiplication des débats sur le  mode de calcul du solde structurel (et donc du PIB potentiel), qui constitue le « thermomètre », pourra provoquer une forme de cacophonie et donc réduire la lisibilité du débat sur la « température », c’est-à-dire le respect ou non des règles.

Dans ces conditions, il est utile de préciser que, si le Haut Conseil estime devoir se référer une hypothèse de PIB potentiel différente de celle figurant dans les lois de programmation (et sur laquelle il aura donné un avis, comme le prévoit l’amendement à l’article 9), il doit publier sa méthodologie et expliquer ses différences avec les approches figurant dans la programmation, avec les éventuelles nouvelles estimations du Gouvernement et avec les estimations de la Commission européenne.

 

2. Le débat sur le solde structurel ne doit pas faire oublier que l’équilibre des lois des finances repose largement sur l’hypothèse de croissance du PIB. Par ailleurs, le volet correctif du pacte de stabilité continue d’être fondé sur une trajectoire de solde effectif.

Le réalisme de l’hypothèse de croissance du PIB sur laquelle reposent les textes financiers constitue donc toujours un élément essentiel, sur lequel le Haut Conseil des finances publiques donnera systématiquement un avis.

Cet amendement propose que l’avis du Haut Conseil des finances publiques, exprimé en toute indépendance, tienne compte - quelle que soit la position qu’il prendra en définitive - des prévisions de croissance effectuées par un panel d’organismes. On peut penser que le Haut Conseil aurait procédé ainsi en tout état de cause. Il est néanmoins utile de marquer l’attachement du législateur à la fixation d’hypothèses de croissance réalistes et donc crédibles.

De cette façon, si le Haut Conseil décide de s’aligner sur le biais optimiste des prévisions gouvernementales, il devra en exposer les raisons.

En effet, en matière de prévisions de croissance, la création d’un organisme indépendant n’aboutit pas toujours à faire disparaître le biais optimiste des prévisions sur lesquelles sont fondées les programmations. Ainsi, l’expérience du Royaume-Uni montre que l’Office for Budget Responsibility retient systématiquement des hypothèses de croissance de l’ordre de 3 % pour les dernières années de la programmation.

En France, depuis la fin des années 1990, les prévisions de croissance pour l’année suivante associées aux projets de loi de finances ont été en moyenne supérieures de 0,3 point à la prévision du consensus des conjoncturistes, et de 0,7 point à la croissance observée. Les hypothèses de croissance associées aux trois années suivantes, couvertes par les programmes de stabilité, ont quant à elles été supérieures d’au moins 0,5 point à la croissance potentielle, telle qu’elle était alors habituellement évaluée. Ce biais optimiste systématique a faussé la sincérité globale des textes financiers et des programmations de la décennie écoulée.

On observe par ailleurs que le « consensus des conjoncturistes », qui est constitué de la moyenne des prévisions des organismes publiant des prévisions de croissance, n’a pas de biais optimiste ou pessimiste. Si au cours de la décennie écoulée il a surestimé la croissance d’environ 0,4 point en moyenne, c’est à cause de la récession de 2009.