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commission des lois

Projet de loi

Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires

(1ère lecture)

(n° 41 )

N° COM-49

14 décembre 2015


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

Le Gouvernement


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 24 N


Après l’article 24N, insérer l’article suivant :

 

 

« L’article L. 4122-2 du code de la défense est ainsi modifié :

 

1° Au premier alinéa avant les mots : « Les militaires », est insérée la mention : « I. – ».

 

2° Le cinquième alinéa est supprimé.

 

3° Au sixième alinéa, avant les mots : « ils peuvent » sont ajoutés les mots « Sous réserve des dispositions du III du présent article, ».

 

4° Au neuvième alinéa, les mots : « du présent article » sont remplacés par les mots : « des présentes dispositions ».

 

5° Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. Il appartient aux autorités de commandement de s’assurer du respect des obligations et des principes déontologiques dans les formations, directions et services placés sous leur autorité. Lorsqu’elles l’estiment nécessaire, les autorités de commandement peuvent saisir pour avis le référent déontologue mentionné au VII du présent article ».

Au sens du présent article, constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif des fonctions ».

Lorsqu’un militaire estime se trouver dans une situation de conflit d’intérêts, il en rend compte immédiatement à son supérieur hiérarchique, ou au supérieur immédiatement supérieur de ce dernier, qui apprécie :

- s’il y a lieu de confier le dossier, la décision ou la mission à une autre personne ;

- si le militaire doit s’abstenir d’user de la délégation de signature qui lui a été consentie ;

- si le militaire doit s’abstenir de siéger ou, le cas échéant, de délibérer, dans une instance collégiale au sein de laquelle il pourrait se trouver en situation de conflit d’intérêts ».

 

6° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :

« IV. Les militaires ne peuvent avoir par eux-mêmes ou par personne interposée, sous quelque forme que ce soit, lorsqu'ils sont en activité et pendant le délai fixé à l'article 432-13 du code pénal à compter de la cessation de leurs fonctions, des intérêts de nature à compromettre leur indépendance, dans les entreprises privées à l’égard desquelles ils ont été chargés, dans le cadre de leurs fonctions, soit d'assurer une surveillance ou un contrôle, soit de conclure des contrats de toute nature avec ces entreprises ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer directement à l'autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par ces entreprises ou de formuler un avis sur de telles décisions. 

L’interdiction s’étend à toute participation par travail, conseil ou capitaux dans une entreprise privée qui possède au moins 30 % de capital commun ou a conclu un contrat comportant une exclusivité de droit ou de fait avec l'une des entreprises mentionnées au premier alinéa.

Pour l'application des deux premiers alinéas, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé.

La mise en œuvre de ces dispositions est confiée à la commission de déontologie des militaires ».

 

7° Il est ajouté un V ainsi rédigé :

 « V. La nomination dans l’un des emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient mentionné sur une liste établie par décret en Conseil d’Etat est conditionnée à la transmission préalable par le militaire d’une déclaration d’intérêts à l’autorité investie du pouvoir de nomination. 

Dès la nomination du militaire dans l’un des emplois définis à l’alinéa précédent, l’autorité investie du pouvoir de nomination transmet la déclaration d’intérêt produite par le militaire à l’autorité hiérarchique dont il relève dans l’exercice de ses nouvelles fonctions.

Lorsque l’autorité hiérarchique constate que le militaire se trouver dans une situation de conflit d’intérêts au sens du II du présent article, elle prend les mesures nécessaires pour y mettre fin ou enjoint au militaire de faire cesser cette situation dans un délai qu’elle détermine.

Si l’autorité ne s’estime pas en mesure d’apprécier si le militaire se trouver en situation de conflit d’intérêts, elle peut saisir pour avis le référent déontologue mentionné au VII du présent article ».

Les modalités de mise en œuvre des dispositions du présent paragraphe sont fixées par décret. ».

 

8° Il est ajouté un VI ainsi rédigé :

La nomination dans l’un des emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient mentionnés sur une liste établie par décret en Conseil d’Etat est conditionnée par la transmission préalable par le militaire d’une déclaration de situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique prévue par la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.

Dans les deux mois qui suivent la cessation de leurs fonctions, les militaires soumis à l’alinéa précédent transmettent une nouvelle déclaration patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique précitée.

La Haute Autorité apprécie, dans un délai de six mois à compter de la réception de la déclaration, la variation de la situation patrimoniale de l’intéressé. Lorsque les évolutions patrimoniales constatées n’appellent pas d’observations ou lorsqu’elles sont justifiées, la Haute autorité en informe l’intéressé. Dans le cas où la Haute autorité, après une procédure contradictoire, constate des évolutions patrimoniales pour lesquelles elle ne dispose pas d’explications suffisantes, elle transmet le dossier de l’intéressé à l’administration fiscale et en informe l’intéressé.

La Haute autorité peut demander au militaire soumis à l’obligation prévue au présent paragraphe de produire une déclaration de situation patrimoniale toute explication nécessaire à l’exercice de sa mission de contrôle des déclarations de situation patrimoniale. En cas de déclaration incomplète ou lorsqu’il n’a pas été donné suite à une demande d’explication adressée par la Haute Autorité, cette dernière adresse à l’intéressé une injonction tendant à ce que la déclaration soit complétée ou que les explications lui soient transmises dans un délai d’un mois à compter de cette injonction ».

 

9° Il est ajouté un VI ainsi rédigé :

« Le fait, pour un militaire soumis à l’obligation prévues aux V et au VI du présent article d’omettre de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou de ses intérêts ou de fournir une évaluation mensongère de son patrimoine est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

Peuvent être prononcées, à titre complémentaire, l’interdiction des droits civiques, selon les modalités prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 du code pénal, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique selon les modalités prévues à l’article 131-27 du même code.

Le fait, pour un militaire de ne pas déférer à l’obligation prévue au paragraphe VI du présent article, de ne pas déférer aux injonctions de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ou de ne pas lui communiquer les informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Les modalités de mise en œuvre des dispositions du présent paragraphe sont fixées par décret. ».

 

10° Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :

« VI. Le rapporteur général de la commission de déontologie des militaires est le référent déontologue compétent pour conseiller les militaires qui le consultent sur le respect des obligations prévues par le présent article. Sa fonction de conseil s’exerce sans préjudice de la responsabilité et des prérogatives du supérieur hiérarchique ».

 

11° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :

«  VII Dans les deux mois suivant l’entrée en vigueur du V du présent l’article, le militaire qui occupe un emploi soumis à l’une au moins des obligations déclaratives mentionnées transmet à l’administration la ou les déclarations dont il est redevable. ».

Objet

Il s’agit de souligner le rôle des autorités de commandement dans la prévention des conflits d’intérêt et de responsabiliser les militaires dans cette obligation.

 

Afin que l’exercice de cette mission ne porte pas préjudice au militaire qui signalera l’existence d’un possible conflit d’intérêt, aucune mesure restrictive portant sur le déroulement de sa carrière ne pourra être prise à son encontre, au motif qu’il aurait porté des faits litigieux à la connaissance des autorités judiciaires ou administratives, dans les conditions précisées par l’amendement.

 

L’amendement propose donc une réécriture de l’article L.4122-2 afin que la commission de déontologie des militaires compétente pour examiner la situation des militaires fonde plus justement son appréciation. En cela, la rédaction retenue s’inspire de celle de l’article 432-13 du code pénal qui est le texte de référence du contrôle exercé par la commission précitée. La référence explicite à la commission compétente pour examiner la situation des militaires consacrera donc son existence législative.

 

Il est, par ailleurs, proposé de consacrer le paragraphe V de l’article L. 4122-2 modifié du code de la défense aux obligations déclaratives imposées aux militaires nommés dans un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient. Ces obligations seront applicables dans les deux mois suivant l’entrée en vigueur du présent amendement.

 

Enfin, la mission de référent déontologue compétent pour conseiller les militaires sur leurs obligations déontologiques sera confiée au rapporteur général de la commission compétente pour examiner la situation des militaires.