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commission des lois

Projet de loi

Immigration, droit d'asile et intégration

(1ère lecture)

(n° 464 )

N° COM-293 rect.

5 juin 2018


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. BUFFET, rapporteur


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 26 TER (NOUVEAU)


Après l'article 26 ter (nouveau)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 611-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 611-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 611-6-1. - Afin de garantir la protection de l’enfance aux mineurs étrangers privés temporairement ou définitivement de leur famille et de lutter contre l’entrée et le séjour irrégulier en France, le ministère de l’intérieur est autorisé à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel collectées au cours de l’accueil et de la prise en charge des étrangers reconnus majeurs  par les services départementaux en charge de la protection de l’enfance.

« Ce traitement automatisé de données comprend :

« 1° Les résultats de l’évaluation sociale mentionnée à l’article L. 221-2-2 du code de l’action sociale et des familles ;

« 2° Les empreintes digitales ainsi qu’une photographie des personnes concernées, qui peuvent être relevées et mémorisées ;

« 3° Le cas échéant, les résultats des examens radiologiques réalisés sur décision judiciaire en application du deuxième alinéa de l’article 388 du code civil.

« Le consentement de l’étranger évalué au relevé de ses empreintes digitales et photographiques est recueilli, dans une langue comprise par l’intéressé, ou dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend. 

« Le traitement de données ne comporte pas de dispositif de reconnaissance faciale à partir de la photographie.

« Dans le cas où le juge des enfants reconnaît la minorité de l’étranger en application de l’article 375 du code civil, il est procédé à l’effacement immédiat des données de la personne concernée du traitement automatisé de données.

« Un décret en Conseil d’État, pris après avis publié et motivé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les modalités d’application du présent article. Il précise notamment les catégories de personnes pouvant être destinataires des données et avoir accès au traitement mentionné au présent article, les modalités d’exercice des droits des personnes concernées et la durée de conservation desdites données. »

Objet

Le présent amendement tend à créer un fichier national biométrique des étrangers ayant sollicité la protection de l’enfance mais qui ont été reconnus majeurs au terme de la procédure prévue par les textes.

Les mineurs non accompagnés (MNA), également désignés comme mineurs isolés étrangers (MIE), se définissent comme les jeunes étrangers de moins de 18 ans privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille. Il est du devoir de la France d’assurer leur protection.

En charge de la protection de l’enfance, les départements sont en première ligne de cette politique. Les conseils départementaux auraient ainsi effectué plus de 54 000 évaluations sociales, préalable à la confirmation de la minorité.

D’après les données du ministère de la justice, presque 15 000 nouveaux mineurs non accompagnés ont été confiés aux départements sur décision judiciaire en 2017. Le nombre de MNA intégrant les dispositifs de la protection de l’enfance a triplé entre 2014 et 2017.

Récemment, le rapport d’information du Sénat de Mme Élisabeth Doineau et M. Jean-Pierre Godefroy sur la prise en charge des mineurs isolés étrangers signalait une situation d’urgence, et proposait plusieurs réformes ambitieuses, dont aucune n’a pour l’instant été mise en œuvre. Il soulignait notamment que les coûts imposés aux départements lors de la phase d'évaluation de la minorité étaient très supérieurs à la compensation accordée par l'État.

À l’Assemblée nationale, le Gouvernement s’est constamment opposé à l’insertion dans ce texte de mesures, pourtant indispensables, sur les MNA.

De même, un rapport de trois inspections générales de l’État (IGAS, IGA et IGJ) et de l’Assemblée des départements de France (ADF) publié cette année, met en évidence l’absence d’harmonisation des méthodes d’évaluation d’un département à l’autre.

Ce rapport souligne une grande lacune, qui pourrait remettre en cause la soutenabilité du système.

En l’état actuel, une personne reconnue comme majeure dans un département peut être en mesure de solliciter l’accès au dispositif de mise à l’abri, d’évaluation et de prise en charge des MNA dans un ou même plusieurs autres départements.

Cette situation n’est pas acceptable et conduit à saturer les dispositifs d’accueil de la protection de l’enfance, au détriment des enfants mineurs, qu’ils soient étrangers ou français, à qui les départements doivent la protection.

En conséquence, le présent amendement propose la création d’un fichier national biométrique des étrangers qui auront été déclarés majeurs après avoir sollicité la protection de l’enfance, reprenant la proposition n° 8 du rapport bipartite des inspections et de l’ADF précité.