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commission des lois

Projet de loi

lutte contre les violences sexuelles et sexistes

(1ère lecture)

(n° 487 )

N° COM-3

18 juin 2018


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

Mme BILLON


ARTICLE 2


 I. Après l’alinéa 3, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La contrainte morale est caractérisée quand l’acte de pénétration sexuelle est commis par un majeur sur un mineur de treize ans. »

II. En conséquence, dans l’alinéa 2, remplacer les mots :

un alinéa ainsi rédigés

par les mots :

deux alinéas ainsi rédigés

 

Objet

Cet amendement tire les conséquences de la recommandation n° 1 qui conclut le rapport d’information de la délégation aux droits des femmes Projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes : contribution au débat[1]. Celle-ci porte sur l’instauration d’un seuil d’âge de treize ans en-deçà duquel tout acte de pénétration sexuelle commis par un adulte sur un enfant serait un crime, passible de vingt ans de réclusion.

Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à celui qui insère dans le code pénal un article créant un crime de pénétration sexuelle sur mineur de treize ans. Il s’insère dans l’article 222-22-1 du code pénal qui définit la contrainte morale, l’un des critères constitutifs du viol.

Pour la délégation aux droits des femmes, c’est aux adultes de protéger les enfants et non aux enfants de se garder des agressions dont les menacent certains prédateurs. Il s’agit d’un prérequis.

Elle souhaite, comme la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, que la loi affirme « l’interdiction absolue d’un rapport sexuel entre un adulte et un enfant, la violation de l’interdit constituant un crime »[2].

Pourquoi retenir un seuil de treize ans plutôt que l’âge de quinze ans, qui a été porté au débat,  et qui est retenu par le projet de loi pour l’atteinte sexuelle avec pénétration ?

Le seuil de 13 ans permet :

- de prendre en compte les relations sexuelles qui peuvent exister sans contrainte entre des adolescent(e)s d’une quinzaine d’années et de jeunes majeurs. Il ne faudrait pas que ces derniers puissent se retrouver accusés de viol, parce que des parents, opposés à cette relation, auraient porté plainte au nom de leur enfant mineure ;

- d’être cohérent avec le droit pénal, qui fixe à cet âge la responsabilité pénale des mineurs.

Le seuil de 13 ans, comme le remarquait très justement le rapport présenté par Erwan Balanant et Marie-Pierre Rixain au nom de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, marque la « limite indiscutable de l’enfance ».

Qui oserait décemment affirmer que, en-dessous de cet âge, un enfantcar il s’agit bien d’enfants - pourrait consentir à se faire pénétrer par un adulte ? Pour reprendre les mots de Danielle Bousquet, présidente du Haut-Conseil à l’Égalité (HCE), lors de son audition par la délégation aux droits des femmes, le 12 juin 2018, « Aucun enfant ne peut choisir en connaissance de cause d’avoir un rapport sexuel avec un adulte ».

L’auteur des faits conserverait, pour se défendre, la possibilité de prouver qu’il ne connaissait pas l’âge de la personne.

Il faut relever à cet égard qu’au Royaume-Uni, un enfant de moins de 13 ans n’a en aucune circonstance la capacité légale de consentir à une quelconque forme d’acte sexuel[3], et en cas de pénétration sexuelle, l’auteur encourt la réclusion à perpétuité. Or ce pays n’est pas réputé bafouer les droits de la défense.

 


[1] Rapport d’information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Annick Billon, Laurence Cohen, Laure Darcos, Françoise Laborde, Noëlle Rauscent et Laurence Rossignol, co-rapporteures, n° 574 (2017-2018).

[2] Rapport d’information fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, par M. Erwan Balanant et Mme Marie-Pierre Rixain, députés, n° 895, Assemblée nationale, 15ème législature.

[3] Sexual Offence Act du 20 novembre 2003 (section 5-8).