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commission des lois

Proposition de loi

Sécurité globale

(1ère lecture)

(n° 150 )

N° COM-282

2 mars 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

MM. Loïc HERVÉ et DAUBRESSE, rapporteurs


ARTICLE 22


I. - Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Caméras installées sur des aéronefs circulant sans personne à bord

II. - Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote

III. - Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Sont prohibés la captation du son depuis ces aéronefs, l’analyse des images issues de leurs caméras au moyen de dispositifs automatisés de reconnaissance faciale, ainsi que les interconnexions, rapprochements ou mises en relation automatisés des données à caractère personnel issues de ces traitements avec d’autres traitements de données à caractère personnel.

IV. - Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 242-4. –  La mise en œuvre des traitements prévus aux articles L. 242-5 et L. 242-6 doit être justifiée au regard des circonstances de chaque intervention, pour une durée adaptée auxdites circonstances et qui ne peut être permanente. Elle ne peut donner lieu à la collecte et au traitement que des seules données personnelles strictement nécessaires à l’exercice des missions concernées et s’effectue  dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

V. - Alinéa 11

Après le mot :

enregistrements

insérer les mots

comportant des données à caractère personnel

VI. - Alinéas 12 à 26

Remplacer ces alinéas par quinze alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 242-5. – I. - Dans l’exercice de leurs missions de prévention, de recherche, de constatation ou de poursuite des infractions pénales, les services de l’État concourant à la sécurité intérieure et à la défense nationale peuvent être autorisés à procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote dans le cas :

« 1° de crimes ou délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure ou égale à cinq ans ;

« 2° d'autres infractions, lorsque des circonstances liées aux lieux de l'opération rendent particulièrement difficile le recours à d’autres outils de captation d’images ou sont susceptibles d’exposer leurs agents à un danger significatif.

« L’autorisation est délivrée par décision écrite et motivée du procureur de la République territorialement compétent qui s’assure du respect des dispositions du présent chapitre. Elle détermine le périmètre et la période pour lesquels elle est valable, ainsi que les infractions concernées.

« II. - Dans l’exercice de leurs missions de maintien de l’ordre et de la sécurité publics, les services mentionnés au I peuvent également être autorisés à procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote dans le but d’assurer :

« 1° La sécurité des rassemblements de personnes sur la voie publique ou dans les lieux ouverts au public ainsi que l’appui des personnels au sol en vue de maintenir ou rétablir l’ordre public, lorsque les circonstances font craindre des troubles à l’ordre public d’une particulière gravité, ou lorsque des circonstances liées aux lieux de l'opération rendent particulièrement difficile le recours à d’autres outils de captation d’images ou sont susceptibles d’exposer leurs agents à un danger significatif ;

« 2° La protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords immédiats, lorsqu’ils sont particulièrement exposés à des risques d’intrusion ou de dégradation ;

« 3° La régulation des flux de transport ;

« 4° La surveillance des frontières en vue de lutter contre leur franchissement irrégulier ;

« 5° Le secours aux personnes.

« L’autorisation est délivrée par décision écrite et motivée du représentant de l'État dans le département et, à Paris, du préfet de police, qui s’assure du respect des dispositions du présent chapitre. Elle détermine le périmètre et la période pour lesquels elle est valable, ainsi que ses finalités.

« III. - Dans l’exercice de leurs missions de prévention des atteintes à la sûreté de l’État, les services de l’État concourant à la défense nationale peuvent procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote dans le but d’assurer la protection des intérêts de la défense nationale et des établissements, installations et ouvrages d’importance vitale mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense.

« Art. L. 242-6. – Dans l’exercice de leurs missions de prévention, de protection et de lutte contre les risques de sécurité civile, de protection des personnes et des biens et de secours d’urgence, les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires des services d’incendie et de secours, les personnels des services de l’État et les militaires des unités investis à titre permanent de missions de sécurité civile ou les membres des associations agréées de sécurité civile au sens de l’article L. 725-1  peuvent procéder en tous lieux, au moyen de caméras installées sur des aéronefs, à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images aux fins d’assurer :

« 1° La prévention des risques naturels ou technologiques ;

« 2° Le secours aux personnes et la lutte contre l’incendie.

Objet

L'article 22 entend donner une nouvelle base légale aux caméras aéroportées. Il vise à mettre fin à l'incertitude juridique qui entoure leur usage, après que, l'an dernier, deux décisions du Conseil d’État et une sanction de la CNIL ont interdit leur mise en œuvre pour des opérations de surveillance et de maintien de l'ordre public, faute de base légale suffisante.

Conformément aux recommandations formulées dans l'avis rendu par la CNIL sur saisine du président de la commission des lois, les rapporteurs privilégient une approche équilibrée : ne pas refuser le progrès technique quand il renforce l’efficacité de nos forces de l’ordre, mais toujours vérifier que ces innovations ne menacent pas les libertés publiques auxquelles nos concitoyens sont légitimement attachés.

Les drones peuvent évidemment être utiles (le secours aux victimes a, par exemple, tout à gagner de ces outils qui permettent d’épargner les vies des sauveteurs). Mais les modes de surveillance policière par drones risquent aussi d’être beaucoup plus intrusifs : contrairement aux caméras fixes aux coins de nos rues, les drones filment en hauteur, avec une grande précision, peuvent enregistrer des milliers de personnes, suivre leur cible, zoomer sur les visages et à l’intérieur des bâtiments, et certains sont furtifs, voire équipés de caméras thermiques… Les garanties doivent donc être d’autant plus fortes que les risques pour les libertés sont importants.

Le présent amendement propose donc :

- de recentrer le nouveau régime juridique sur les seuls drones (sans pilotes à bord), pour bien le distinguer des règles plus souples régissant d'autres dispositifs (caméras embarquées),

- de réaffirmer les principes de nécessité et de proportionnalité et la soumission de l'usage des drones à la loi "Informatique et libertés",

- de mieux encadrer les finalités justifiant l’usage de drones, en réservant leur usage à certaines circonstances où ils sont particulièrement adaptés (infractions graves, lieux difficiles d'accès ou exposant les agents à des dangers particuliers),

- de prévoir un régime souple d’autorisation préalable par le préfet ou le procureur, selon les cas, lorsque des drones sont utilisés dans le cadre d'opérations de police administrative ou judiciaire,

- de réaffirmer, à ce stade, la prohibition des techniques qui ne sont pas expressément autorisées par le législateur (captation des sons, reconnaissance faciale, interconnexions automatisées de données).