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commission des affaires économiques

Projet de loi

Lutte contre la maltraitance animale

(1ère lecture)

(n° 326 )

N° COM-180

16 septembre 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

Mme CHAIN-LARCHÉ, rapporteure


ARTICLE 4 QUINQUIES (NOUVEAU)


Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 214-6-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa est insérée la mention : « I.- »

2° L’article est complété par huit alinéas ainsi rédigés :

« Un arrêté du ministère chargé de l’agriculture fixe les règles sanitaires et de protection animale applicables aux établissements de vente d’animaux de compagnie relevant du présent article et les autorités administratives chargées de leur contrôle.

« Afin d’assurer la cohérence des règles prévues par l’arrêté mentionné au deuxième alinéa avec l’état des connaissances scientifiques relatives aux animaux, et au regard de leur application constatée au sein des établissements de vente d’animaux de compagnie au cours des trois années précédentes, le ministère chargé de l’agriculture conduit une enquête se prononçant sur l’opportunité de prendre un nouvel arrêté en application dudit deuxième alinéa, dans un délai maximal de trois ans après la prise du dernier arrêté. »

« II.- En partenariat avec des fondations ou associations de protection des animaux, les établissements de vente d’animaux de compagnie mentionnés au premier alinéa du I peuvent proposer à la cession des animaux de compagnie appartenant à ces fondations ou associations, issus d’abandons ou dont les anciens propriétaires n’avaient pas été identifiés.

« Les modalité de ces cessions, les conditions régissant la détention des animaux par l’établissement mentionné au premier alinéa du présent I, et les conditions devant être remplies par les acquéreurs de ces animaux sont prévues par une convention entre ledit établissement et la fondation ou association mentionnée premier alinéa du présent II, dans un cadre fixé par un arrêté du ministère chargé de l’agriculture.

« Les dispositions de l’article L. 214-8 s’appliquent aux cessions réalisées en application du présent II.

Objet

Cet amendement vise à ré-autoriser l’activité des animaleries, tout en renforçant l'encadrement de cette activité et en encourageant les partenariats entre animaleries et associations dans l'objectif de trouver un foyer à des animaux abandonnés.

Issu des travaux de l’Assemblée nationale, le présent article interdit toute vente d’animaux de compagnie au sein d’animaleries. Si l’objectif visé par la mesure est la préservation du bien-être animal, cette interdiction totale sera sans aucun doute contre-productive.

Les Français continuent à accueillir en nombre des animaux de compagnie au sein de leurs foyers : plus de 800 000 animaux sont acquis chaque année en France.

Pour la part de ces animaux acquis en animalerie (environ 20 000), de nombreuses règles sanitaires et de protection animale doivent être respectées par les établissements : toutes celles applicables aux refuges et aux élevages, immatriculation et déclaration aux autorités, certifications professionnelles ou certificat de capacité, règles sanitaires, mais aussi règles additionnelles en matière, par exemple, d’autocontrôle, de suivi des animaux ; ou encore « bonnes pratiques » validées par le ministère de l’Agriculture et par l’Anses. Comme dans tout autre établissement qui accueille des animaux, il peut arriver que des pratiques non conformes soient relevées. Dans ces cas, le préfet peut – c’est prévu par la loi - interdire la poursuite de l’activité et toute cession d’animaux.

Si carence il existe, c’est donc la capacité de réglementation et de contrôle de l’État – dont c’est le rôle - et en particulier ses moyens qu’il convient de renforcer, plutôt que de fermer ces locaux.

En outre, l’ensemble des acteurs entendus confirment que la vente sur Internet d’animaux de compagnie connaît un essor important – par le biais d’annonces, mais même, cela arrive, par expédition postale. Ces échanges sont extrêmement difficiles à contrôler et à encadrer. La fermeture totale des animaleries, qui n’éteindrait aucunement l’envie des Français d’acquérir des animaux de compagnie, renverrait sans aucun doute une partie des échanges à d’autres canaux, moins faciles à contrôler : foires, vente en ligne, voire trafic d’animaux.

L’argument, souvent avancé, selon lequel les animaleries seraient responsables des achats d’impulsion et des abandons, n’est pas corroboré par les chiffres : Alors que 20 000 animaux environ sont vendus chaque année en animalerie, le nombre d’abandons annuel en France est estimé à 100 000. En grande majorité, les animaux abandonnés ne sont pas identifiés, alors que tout animal vendu en animalerie l’est obligatoirement.

Les exigences de formation et de certification de leur personnel permettent souvent d’assurer que les acquéreurs d’animaux de compagnie disposent des conseils et informations nécessaires pour bien accueillir leur nouvel animal. Sans ces lieux de conseil, on peut craindre que d’autres modalités de vente, plus isolées se mettent en place, conduisant en outre à la perte d’un savoir-faire et d’un accompagnement utiles, et de près de 20 000 emplois directs et environ 30 000 emplois indirects sur l’ensemble du territoire français.

Enfin, la mesure présentée soulève des problèmes constitutionnels de fond : peut-on interdire à certains professionnels uniquement, à certains types d’établissements uniquement, de vendre des animaux, tandis que d’autres canaux équivalents sont maintenus ?

L’auteur de cet amendement estime qu’une interdiction sèche des animaleries n’est pas la solution aux différents problèmes soulevés par les députés - contrôles insuffisants, règles parfois inadaptées, nombreux abandons, défaut de formation des acquéreurs. Au contraire, elle renforcera ces dynamiques en redirigeant une partie des ventes vers de canaux encore moins satisfaisants du point de vue du bien-être de l’animal.

En conséquence, il est proposé de supprimer l’interdiction des activités des animaleries, au profit d’un meilleur encadrement, d’un renforcement des moyens de contrôle, et d’une évolution progressive du modèle. La réécriture globale, qui supprime l’interdiction de vente d’animaux de compagnie en animalerie, introduit deux nouvelles mesures :

1) D’abord, il renforce les règles applicables aux animaleries et garantit leur actualisation, tout en incitant l’État à y consacrer davantage de moyens humains et financiers. Il serait impensable de fermer des centaines d’établissements en raison de rares manquements individuels.

L’administration – le ministère de l’agriculture - est chargée d’édicter ces règles et de contrôler les animaleries. Toutefois, il apparaît que ces contrôles sont parfois insuffisants, faute de moyens dédiés par l’État, et que les règles en vigueur n’intègrent pas toujours le dernier état des connaissances scientifiques relatives aux animaux : ce sont là des critiques légitimes.

L’amendement propose :

-D’inscrire dans la loi la nécessité d’une réglementation cadre pour les animaleries. De très nombreuses dispositions existent aujourd’hui, au sein notamment d’un arrêté en date du 3 avril 2014. Il est utile de consacrer législativement l’existence de cet arrêté, pour améliorer son respect et tenir l’administration à un plus haut niveau d’exigence ;

-Que cet arrêté désigne explicitement une autorité administrative chargée du contrôle du respect de ces règles sanitaires et de protection animale, fixées par l’arrêté. Cela placera en responsabilité les administrations compétentes et facilitera la mobilisation de moyens nouveaux ;

-Que l’arrêté soit révisé tous les trois ans au moins, après que le ministère de l’Agriculture ait conduit une enquête portant sur la bonne application des règles au sein des animaleries, et sur l’évolution des connaissances scientifiques (dès lors que l’enquête confirme le besoin de révision). Cette disposition améliorera le retour d’expérience sur les règles en vigueur, dans une logique de meilleure performance du droit et des contrôles de l’administration. Il incitera à mobiliser, là encore, davantage de moyens à cette fin.

2) Ensuite, il reconnaît et encourage une pratique existante de partenariat entre animaleries et associations, dans l’objectif de trouver un foyer à des animaux abandonnés. Il arrive aujourd’hui que des animaleries, en accord avec des associations ou refuges locaux, présentent, dans leurs établissements, des animaux issus de refuges ou d’associations.

Ces pratiques permettent aux refuges de toucher un plus grand public et de faciliter l’adoption par de nouvelles familles, tout en s’appuyant sur l’expérience et les installations des animaleries. Il permet aussi de conserver de la place en refuge pour accueillir de nouveaux animaux abandonnés. Pour les animaleries, ce partenariat permet de contribuer à lutter contre l’abandon d’animaux, tout en faisant évoluer leurs pratiques.

Cependant, ces pratiques n’ont pas de base ni d’encadrement juridique, et gagneraient à se développer. Le présent amendement propose en conséquence de modifier l’article L. 214-6-3 du code rural et de la pêche maritime, pour établir un cadre juridique de partenariat entre animaleries et fondations ou associations de protection des animaux qui le souhaitent.

Il autorise la cession, par les animaleries, d’animaux détenus par des refuges ou associations sans refuge, issus d’abandons ou dont les anciens propriétaires n’avaient pas été identifiés. Le cadre de ce partenariat sera déterminé par une convention, dans une logique donc consensuelle entre animalerie et association ou fondation. Le format et le contenu de ces conventions seront eux-mêmes encadrés par arrêté.

Ce partenariat et la vente de l’animal selon les modalités prévues par l’amendement seront bien entendus couverts par le droit existant, qu’il s’agisse des règles sanitaires et de protection des animaux applicables en animalerie, ou des actes obligatoires lors de la cession (certificat vétérinaire, document d’information…).