commission des affaires sociales |
Proposition de loi Accès aux soins par la territorialisation et la formation (1ère lecture) (n° 189 ) |
N° COM-9 6 juin 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||
Mmes SOUYRIS et PONCET MONGE, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 3 |
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 631-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 631-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 631-1-... – I. – Les professionnels de santé titulaires d’un diplôme permettant l’exercice effectif d’une profession mentionnée au premier alinéa de l’article L. 4311-1 du code de la santé publique ou aux chapitre II du titre II du livre III du même code, ainsi qu’au titre IX du même code, et justifiant d’au moins trois années d’exercice à temps plein, peuvent être admis, après sélection organisée par l’université, dans un parcours d’alternance de reconversion préparant aux diplômes de médecine, pharmacie, chirurgie-dentaire, maïeutique ou masso-kinésithérapie.
« II. – Ce parcours permet de valider les enseignements correspondant à une année universitaire en deux années civiles au maximum, selon un rythme d’alternance garantissant la poursuite d’une activité professionnelle rémunérée. À ce titre :
« 1° Les enseignements universitaires sont dispensés pour partie en présentiel et pour partie à distance ;
« 2° Les périodes en milieu professionnel, effectuées chez l’employeur ou dans un établissement agréé, sont reconnues comme terrains de stage et donnent lieu à l’attribution d’ECTS ;
« 3° Les apprenants sont inscrits dans la formation conduisant au diplôme visé et bénéficient du statut social afférent aux contrats d’alternance prévus par le livre II de la sixième partie du code du travail.
« III. – Les étudiants admis dans ce dispositif conservent la possibilité de se présenter, dans les conditions définies par décret, aux épreuves de sélection prévues à l’article L. 631-1 du présent code.
« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe :
« a) La liste des diplômes ou titres permettant l’accès au parcours et la durée minimale d’exercice exigée ;
« b) Les modalités de sélection, d’organisation pédagogique et d’évaluation des acquis, y compris la reconnaissance des compétences professionnelles antérieures ;
« c) Le volume horaire maximal des enseignements en présentiel et la proportion minimale de périodes en milieu professionnel ;
« d) Les conditions de financement et la répartition des crédits entre établissements, en articulation avec les dispositifs de promotion ou reconversion par l’alternance prévus aux articles L. 6324-1 et suivants du code du travail ;
« e) Les règles d’articulation avec les passerelles d’accès déjà existantes et avec la validation des acquis de l’expérience. »
Objet
La France manque cruellement de professionnel·le·s de santé : début 2025, plus de six millions de nos compatriotes sont sans médecin traitant et près de huit millions vivent dans un désert médical. Les projections de l’Ordre des médecins confirment un vieillissement massif de la démographie médicale : près d’un praticien sur quatre aura atteint l’âge de la retraite d’ici cinq ans, alors même que le pays ne forme pas assez de nouvelles et nouveaux praticien·ne·s pour compenser.
Dans le même temps, les soignant·e·s déjà diplômé·e·s – infirmier·ère·s, manipulateur·rice·s radio, technicien·ne·s de laboratoire, etc. – expriment un fort désir d’évolution : une étude IFOP de 2023 montre que six infirmier·ère·s sur dix ne choisiraient plus leur métier s’ils ou elles pouvaient « recommencer », révélant une appétence croissante pour la reconversion tout en restant dans le champ sanitaire. Pourtant, les passerelles actuelles vers les études médicales ou pharmaceutiques sont minimes : la procédure dite « passerelles » n’ouvre que 5 % des places disponibles, et impose le plus souvent un retour aux études à temps plein sans revenu pendant plusieurs années, ce qui dissuade les professionnel·le·s expérimenté·e·s et fragilise les structures qui les emploient.
Le présent amendement propose donc de créer, dans le code de l’éducation, un parcours d’alternance dédié aux professionnel·le·s de santé disposant d’au moins trois ans d’exercice et souhaitant devenir médecin, pharmacien·ne, chirurgien·ne-dentiste, masseur·euse-kinésithérapeute ou sage-femme. Il s’appuie sur le mécanisme de « reconversion ou promotion par alternance » déjà inscrit à l’article L. 6324-1 du code du travail, afin de sécuriser le revenu des apprenant·e·s et de mobiliser les financements mutualisés de la formation continue. Concrètement, le dispositif autorise la validation d’une année universitaire en deux années universitaires : l’alternance des périodes universitaires et professionnelles maintient la présence sur le terrain, valorise l’expérience acquise et réduit le coût pour l’employeur comme pour l’État.
En permettant à des soignant·e·s déjà aguerri·e·s d’accéder progressivement aux diplômes médicaux, la mesure répond simultanément aux enjeux de démographie, de qualité des soins et d’attractivité des carrières, sans recourir à des solutions coercitives ni à l’importation de praticien·ne·s formé·e·s à l’étranger. Elle inscrit ainsi un cercle vertueux : amélioration des parcours professionnel·le·s, fidélisation des talents et renforcement durable de l’offre de soins sur tout le territoire.
Cet amendement poursuit la réflexion engagée dans la note de législation comparée sur les passerelles entre les métiers d’infirmier et de médecin.