PROJET DE LOI RELATIF À LA GÉOLOCALISATION

Article 1er

Le titre IV du livre Ier du code de procédure pénale est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« De la géolocalisation

« Art. 230-32. – Si les nécessités de l’enquête ou de l’instruction relative à un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans ou à des procédures prévues par les articles 74 à 74-2 et 80-4 l’exigent, tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national, d’une personne à l’insu de celle‑ci, d’un véhicule ou de tout autre objet sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, peut être mis en place par l’officier de police judiciaire, ou sous sa responsabilité par l’agent de police judiciaire, ou prescrit sur réquisitions de l’officier de police judiciaire, dans les conditions et selon les modalités prévues par le présent chapitre.

« Art. 230-33. – Les opérations mentionnées à l’article 230-32 sont autorisées :

« 1° Dans le cadre d’une enquête de flagrance, d’une enquête préliminaire ou d’une procédure prévue par les articles 74 à 74-2, par le procureur de la République, pour une durée maximum de quinze jours consécutifs. À l’issue de ce délai de quinze jours consécutifs, ces opérations sont autorisées par le juge des libertés et de la détention à la requête du procureur de la République, pour une durée maximum d’un mois renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée ;

« 2° Dans le cadre d’une instruction ou d’une information pour recherche des causes de la mort ou des causes de la disparition mentionnées aux articles 74, 74-1 et 80-4 par le juge d’instruction pour une durée maximum de quatre mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée.

« La décision du procureur de la République, du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction est écrite. Elle n’a pas de caractère juridictionnel et n’est susceptible d’aucun recours.

« Art. 230-34. – Lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’information l’exigent, le procureur de la République ou le juge d’instruction, selon les distinctions prévues à l’article 230‑33, peut, aux seules fins de mettre en place ou de retirer le moyen technique mentionné à l’article 230-32, autoriser par décision écrite l’introduction, y compris hors les heures prévues par l’article 59, dans des lieux privés ou dans un véhicule situé sur la voie publique ou dans de tels lieux, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou de l’occupant des lieux ou du véhicule, ou de toute personne titulaire d’un droit sur ceux-ci.

« Si le lieu privé est un lieu d’habitation, l’autorisation est, au cours de l’enquête, délivrée par décision écrite du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République ; au cours de l’instruction, et si l’opération doit intervenir en dehors des heures prévues à l’article 59, cette autorisation est délivrée par décision écrite du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le juge d’instruction.

« La mise en place du moyen technique mentionné à l’article 230-32 ne peut concerner les lieux visés aux articles 56-1, 56-2 et 56-3 ou le bureau ou le domicile des personnes visées à l’article 100-7. »

« Art. 230-35. – En cas d’urgence résultant d’un risque imminent de dépérissement des preuves ou d’atteinte grave aux personnes ou aux biens, les opérations mentionnées à l’article 230-32 peuvent être mises en place ou prescrites par un officier de police judiciaire. Celui-ci en informe immédiatement, par tout moyen, le procureur de la République ou le juge d’instruction, suivant les distinctions énoncées aux articles 230-33 et 230‑34.

« Toutefois, si l’introduction dans un lieu d’habitation est nécessaire, l’officier de police judiciaire doit recueillir l’accord préalable, donné par tout moyen, du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République.

« Ce ou ces magistrats disposent d’un délai de douze heures pour prescrire, par décision écrite, la poursuite des opérations. À défaut d’une telle autorisation dans ce délai, il est mis fin à la géolocalisation.

« Art. 230-36. – (Non modifié) Le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire commis par lui ou autorisé par le procureur de la République peut requérir tout agent qualifié d’un service, d’une unité ou d’un organisme placé sous l’autorité du ministre de l’intérieur et dont la liste est fixée par décret en vue de procéder à l’installation des dispositifs techniques mentionnés à l’article 230-32.

« Art. 230-37. – (Non modifié) Les opérations prévues au présent chapitre sont conduites sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées ou qui a autorisé leur poursuite.

« Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision de ce magistrat ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.

« Art. 230-38. – (Non modifié) Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables lorsque la géolocalisation se fait à partir de données obtenues auprès des opérateurs de communications électroniques et des personnes mentionnées à l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques ainsi que des prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique et qu’elles sont relatives à la localisation d’un équipement terminal de communication électronique détenu par la victime de l’infraction.

« Dans ce cas, ces données font l’objet des réquisitions prévues par les articles 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 ou 99-4 du présent code. »

« Art. 230-39 (nouveau). – L’officier de police judiciaire dresse procès-verbal de chacune des opérations de mise en place du dispositif technique et des opérations d’enregistrement des données de localisation. Ce procès-verbal mentionne la date et l’heure auxquelles l’opération a commencé et celles auxquelles elle s’est terminée.

« Les enregistrements sont placés sous scellés fermés. 

« Art. 230-40 (nouveau). – L’officier de police judiciaire décrit ou transcrit, dans un procès-verbal qui est versé au dossier, les données enregistrées qui sont utiles à la manifestation de la vérité.

« Art. 230-41 (nouveau). – Lorsque, dans une enquête ou une instruction concernant l’un des crimes ou délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, la connaissance de ces informations est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne et qu’elle n’est pas utile à la manifestation de la vérité, le juge des libertés et de la détention, saisi à tout moment par requête motivée du procureur de la République ou du juge d’instruction, peut, par décision motivée, autoriser que la date, l’heure et le lieu où le moyen technique destiné à la localisation en temps réel est mis en place ainsi que les premières données de localisation n’apparaisse pas dans le dossier de la procédure.

« La décision du juge des libertés et de la détention qui ne fait pas apparaître la date, l’heure et le lieu où le moyen technique destiné à la localisation en temps réel est mis en place, est jointe au dossier de la procédure. La date, l’heure et le lieu ainsi que les premières données de localisation sont inscrites dans un autre procès-verbal, qui est versé dans un dossier distinct du dossier de la procédure, dans lequel figure également la requête prévue à l’alinéa précédent. Ces informations sont inscrites sur un registre coté et paraphé, qui est ouvert à cet effet au tribunal de grande instance. 

« Art. 230-42 (nouveau). – La personne mise en examen ou le témoin assisté peut, dans les dix jours à compter de la date à laquelle il lui a été donné connaissance du contenu de la géolocalisation réalisée dans les conditions de l’article 230-41, contester, devant le président de la chambre de l’instruction, le recours à la procédure prévue par cet article. Le président de la chambre de l’instruction statue par décision motivée qui n’est pas susceptible de recours au vu des pièces de la procédure et de celles figurant dans le dossier mentionné au deuxième alinéa de l’article 230-41. S’il estime la contestation justifiée, il ordonne l’annulation de la géolocalisation. 

« Art. 230-43 (nouveau). – Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement des éléments recueillis dans les conditions prévues par l’article 230-41. 

« Art. 230-44 (nouveau). – Les enregistrements de données de localisation sont détruits, à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l’expiration du délai de prescription de l’action publique.

« Il est dressé procès-verbal de l’opération de destruction. »

Article 2

(Non modifié)

Après l’article 67 bis-1 du code des douanes, il est inséré un article 67 bis-2 ainsi rédigé :

« Art. 67 bis-2. – Si les nécessités de l’enquête douanière relative à un délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à trois ans l’exigent, tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national, d’une personne à l’insu de celle-ci, d’un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, peut être mis en place ou prescrit, par les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret, sur autorisation, dans les conditions et sous les réserves prévues par les articles 230-33 à 230-38 du code de procédure pénale, du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel la mise en place du moyen technique est envisagée ou du juge des libertés et de la détention de ce tribunal. »

Article 3

L’article 1er de la présente loi est applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.