Mercredi 17 janvier 2018

- Présidence de M. Hervé Maurey, président -

La réunion est ouverte à 9 h 30.

Audition de Mme Anne-Marie Idrac, Haute responsable chargée de piloter la stratégie nationale sur le véhicule autonome

M. Hervé Maurey, président. - Je salue Mme Évelyne Perrot, nouveau sénateur de l'Aube, qui remplace M. François Baroin.

Nous sommes très heureux d'accueillir ce matin Mme Anne-Marie Idrac, dont la compétence dans le domaine des transports est bien connue. Après avoir été secrétaire d'État aux transports, vous avez été présidente de la RATP puis de la SNCF. Nous nous félicitons de votre nomination sur la question spécifique du véhicule autonome, un domaine dans lequel la France accuse un certain retard.

En effet, les États-Unis, mais aussi l'Allemagne ou le Royaume-Uni ont pris de l'avance dans ce domaine, comme l'a souligné un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable et de l'Inspection générale de l'administration publié en avril 2017, qui regrettait notamment l'absence de structuration de l'action des pouvoirs publics.

Le sujet des véhicules autonomes a nécessairement une dimension interministérielle. Il soulève plusieurs enjeux dont un certain nombre relève très directement de notre commission : l'enjeu de mobilité, d'abord, avec des répercussions notables sur l'emploi, si ces véhicules remplacent les taxis et les VTC ou les poids lourds classiques. L'interaction entre l'infrastructure routière et les véhicules devra aussi être repensée pour favoriser les échanges de données. L'environnement est aussi concerné, puisque le véhicule autonome favorisera l'autopartage. Il y a également des enjeux en matière d'aménagement du territoire, et en matière de sécurité routière : si ces véhicules ont vocation, à terme, à réduire le nombre d'accidents, leur introduction dans un parc de véhicules classiques suscite également des inquiétudes.

Le véhicule autonome soulève aussi des problématiques de cybersécurité, mises en exergue dans le rapport récemment présenté par la commission des affaires européennes à ce sujet, dont notre collègue Pierre Médevielle est l'un des auteurs. L'utilisation des données des utilisateurs, les enjeux industriels et enfin l'acceptabilité sociale ne doivent pas être oubliés. La dimension internationale est présente, car le cadre juridique applicable à la circulation des voitures trouve sa source dans le droit international.

Le Gouvernement ayant pris ce sujet à bras-le-corps, nous sommes impatients de connaître l'état de vos travaux et de vos réflexions, et d'avoir davantage de visibilité sur ce sujet qui va révolutionner la mobilité.

Nous attendons aussi des indications sur les évolutions législatives à venir, notamment dans le cadre de la loi sur les mobilités annoncée pour le premier semestre 2018. Je rappelle que les décrets d'application de l'ordonnance du 3 août 2016 relative à l'expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques n'ont, curieusement et malheureusement, toujours pas été publiés. Sans doute nous éclairerez-vous sur ce point.

Mme Anne-Marie Idrac, haute responsable chargée de piloter la stratégie nationale sur le véhicule autonome. - Je suis heureuse de retrouver des visages bien connus. Le sujet est multidimensionnel, et vous avez à juste titre évoqué les diverses facettes de l'action publique à ce sujet. Vous avez aussi déploré le manque de structuration de l'action publique : pour y répondre, le Gouvernement a souhaité mieux organiser l'approche, dans une démarche interministérielle associant le ministre de l'économie, la ministre des transports, le secrétaire d'État au numérique et le ministre de l'intérieur.

Nous entrons dans une phase importante, marquée par les Assises de la mobilité, avec l'espoir que les véhicules autonomes contribuent à une mobilité plus sûre et écologique, et la récente relance par le Premier ministre du Conseil national de l'industrie, au sein duquel les véhicules autonomes sont définis comme une mission prioritaire pour notre stratégie industrielle.

Ma première intention est de travailler dans une approche intégrée, associant les deux piliers que sont l'innovation, l'industrie et la compétitivité d'une part, et la mobilité d'autre part. Au-delà des aspects techniques, les véhicules autonomes soulèvent des sujets de société qui ne se résoudront pas en quelques mois, ni même en quelques années.

Depuis ma nomination voici quelques semaines, j'ai conduit un travail d'animation autour du projet de stratégie nationale qui définira le cadre de l'action publique. Ce document a été soumis à une consultation par le ministère des transports début octobre, impliquant une cinquantaine d'organismes, entreprises et associations, que j'ai animée et qui prend fin le 19 janvier.

Plusieurs points ont émergé de ces réunions et des rencontres que j'ai eues avec des représentants des milieux industriels, de la mobilité et de la sécurité routière. En premier lieu, les différentes communautés professionnelles expriment de fortes attentes vis-à-vis des pouvoirs publics pour fixer un cadre réglementaire, voire législatif. La ministre des transports présentera prochainement, vous l'avez dit, un projet de loi sur les mobilités au Parlement. Les acteurs réclament avant tout de la clarté et de la sécurité juridique pour leurs investissements et leur développement.

Deuxième élément, la nécessité d'intégrer les véhicules autonomes dans les approches globales de la mobilité. Les véhicules autonomes vont souvent de pair avec l'idée de véhicules partagés, de transports en commun ou communs, et la notion de covoiturage. Quelles que soient les modalités - dont certaines n'existent pas encore, notamment sur le plan juridique - il est important d'intégrer au plus vite l'arrivée des nouveaux outils dans les politiques de mobilités. Les autorités organisatrices chargées de ces politiques ont-elles à leur disposition tous les outils juridiques et techniques pour travailler à cette intégration lorsque l'on sortira du stade expérimental ?

Troisième constat, la nécessité de mieux structurer la quarantaine d'expérimentations en cours, avec des mécanismes de progression et de partage des acquis. C'est une demande consensuelle, ce qui est d'autant plus notable que les acteurs industriels et du transport public sont en compétition.

Dernier point, l'acceptabilité sociale. Certains utiliseront le terme d'éthique, mais je n'ai pas encore eu de remontées sur ce sujet, ce qui ne préempte pas la nécessaire prise en compte des questions de sécurité, de libertés, et de comportement qui émergeront avec le déploiement progressif des véhicules.

Sur la base de ces consultations, nous souhaitons publier début février un document interministériel. Je définirai, dans l'introduction de ce document, un objectif volontariste pour l'échéance de 2022, décliné en trois volets : expérimenter, ce que font déjà les autres pays ; sécuriser, au point de vue juridique et routier, même si la technique ne peut pas tout ; enfin, accompagner, en termes de formation des conducteurs, de politiques urbaines, de mobilisation des autorités organisatrices de transport pour l'intégration des véhicules autonomes dans les politiques de mobilité. Voilà ce qui pourrait définir notre stratégie d'action publique pour les prochaines années.

Quelques mots sur l'évolution des véhicules autonomes - j'emploie le terme au pluriel, ce qui a été l'un de mes premiers apports à la réflexion. En effet, il faut d'abord distinguer les véhicules industriels, opérant dans les secteurs de la logistique, la livraison ou le transport routier de longue distance. Pour le moment, la question mobilise peu les industriels et les opérateurs de mobilité en France, c'est pourquoi nous souhaitons enclencher une dynamique dans ce domaine.

En revanche, les industriels sont plus volontaristes sur les véhicules individuels, avec un rôle considérable des équipementiers. C'est une démarche de progrès graduel : de nombreux éléments de conduite autonome comme le régulateur de vitesse, l'aide au stationnement ou la mesure de distance, sont déjà installés dans nos véhicules. Nous arrivons ainsi progressivement à une conduite automatisée. La profession s'est très bien organisée : le véhicule individuel autonome fait l'objet de l'un des 34 programmes de la Nouvelle France industrielle, entièrement repris par le Conseil national de l'industrie. Un travail collectif est conduit sur la sécurité routière et le confort de conduite, avec des attentes claires : faire évoluer le cadre réglementaire pour faciliter les expérimentations et mettre en place un plan national d'expérimentation et des outils de validation pour accélérer l'homologation des véhicules, à l'image de ce qui a déjà été lancé en Allemagne.

Pour les véhicules individuels, les cas d'usage sont très variables : dans un embouteillage, sur une autoroute, sur une bretelle d'autoroute, sur une route de campagne, en cas d'accident ou de travaux. Chacune de ces situations nécessite une adaptation du véhicule, à la fois à l'environnement et au comportement des autres usagers - ceux des véhicules autonomes et des véhicules traditionnels.

Au vu de ce volontarisme des industriels, je ne partage pas l'idée d'un retard de la France dans ce domaine. Au salon des nouvelles technologies de Las Vegas, nos entreprises de construction et nos équipementiers ont, si l'on me permet l'expression, tenu la route. La coopération entre acteurs est poussée, et les attentes très claires vis-à-vis des pouvoirs publics. Nous avons l'intention d'y répondre.

Les véhicules de type navette ne relèvent pas exactement de la même approche. Il existe déjà des véhicules autonomes roulants, produits par deux constructeurs français : Navya et Easymile. C'est une expérimentation conduite en collaboration avec la RATP, Keolis et Transdev. Le transport collectif est relativement plus simple à traiter, car les cas d'usage sont plus circonscrits : rabattement d'une gare à une station de métro lorsque l'interconnexion n'est pas assurée, ou trajet d'un lieu fixe, peu dense, vers un équipement hospitalier ou industriel par exemple. Pour les trois opérateurs cités, il semble que les gains d'efficacité et la possibilité de trouver rapidement des modèles économiques viables soient réels.

L'autopartage ou le covoiturage sont à la jonction du transport individuel et du transport en commun, avec une interrogation corollaire : les flottes seront-elles gérées par des opérateurs de transport en commun, les opérateurs de véhicules à la demande que nous connaissons tous, ou les loueurs ? Divers business models sont envisageables. L'important est que les opérateurs de transport public sont très mobilisés sur la question.

Autre enjeu, faire en sorte que les expérimentations s'intègrent au plus tôt dans les politiques de mobilité locale, au-delà de l'effet de démonstration ou d'image.

La prochaine étape est la publication du cadre de l'action publique avec les trois priorités que j'ai énumérées : expérimenter, sécuriser, accompagner. Ensuite, j'ai demandé à la ministre des transports l'intégration dans la loi sur les mobilités de dispositions sur l'expérimentation et la notion de responsabilité. Nous allons enfin déployer dès cette année un programme d'expérimentation et d'action qui, je l'espère, sera soutenu par les différents organes de financement disponibles, notamment le Programme d'investissements d'avenir.

Je souhaite aussi aborder, en accord avec la ministre des transports, les questions d'éthique et d'acceptabilité sous une forme ouverte et modeste, en commençant par identifier ces questions qui pourraient émerger. Nous avons tous en tête la question « Les femmes ou les enfants d'abord ? », que les conducteurs vigilants que nous sommes ont résolue par un apprentissage culturel. En travaillant avec les associations et différents milieux professionnels, notamment celui de l'assurance, nous serons amenés à mettre en place un espace de réflexion sur l'application de ces enjeux aux véhicules autonomes.

L'Europe joue un rôle important sur la question du véhicule autonome, qui a fait l'objet d'un rapport intéressant de la commission des affaires européennes du Sénat. Le commissariat à la recherche, à l'innovation et à la science, le commissariat à l'industrie, les directions générales de la mobilité et des transports (DG MOVE) et des réseaux de communication, des contenus et des technologies (DG CNECT) sont concernés. Au mois de mai, la Commission européenne mettra en circulation une communication sur le sujet. Nous souhaitons contribuer à la réflexion européenne à travers le document détaillant notre plan d'action publique, et faire bénéficier les expérimentations françaises, qui sont de grande qualité technique et systémique, des financements européens.

Enfin, l'Europe intervient dans la réglementation. Pour le moment, le cadre juridique des véhicules autonomes est défini par le règlement n° 79 de la Commission économique pour l'Europe des Nations unies (CEE-ONU) ; mais nous souhaitons, avec les autres États membres et la Commission européenne, évaluer la possibilité pour l'Union européenne d'anticiper sur les travaux onusiens, très longs, sans pour autant remettre en cause le cadre multilatéral. Je rencontrerai les représentants de la Commission européenne dans les prochaines semaines.

Je ne rendrai pas de rapport, ce qui, au demeurant, ne m'a pas été demandé : ma mission est avant tout un travail d'animation consistant à assurer l'interface entre les acteurs de l'industrie et de la mobilité, en intégrant de plus en plus les collectivités territoriales à la réflexion - sans oublier les sujets d'infrastructure qui apparaissent peu, à ce stade, dans le dialogue, les acteurs du numérique et des télécoms, et la société civile sur le terrain. Il y a sur les réseaux sociaux, dont je suis une adepte, des animations très intéressantes sur le véhicule autonome et plus généralement le véhicule évolutif, intégrant la connectivité et l'électricité. Je me félicite que vous ayez mis ces sujets passionnants à l'ordre du jour de votre commission.

Mme Nelly Tocqueville. - Je suis d'autant plus intéressée par le sujet qu'une expérimentation de transport à la demande en véhicule autonome est en cours dans la métropole Rouen-Normandie, en collaboration avec l'usine Renault Cléon. La phase de test commencera au printemps 2018. Le projet est porté par Transdev et Renault avec le soutien de la région, de la chambre régionale des comptes et de la Matmut. Il s'agit d'une première européenne ; des expériences similaires sont menées ailleurs dans le monde, comme à Singapour. La mise en action de quatre Zoé électriques est prévue ; en 2019, une navette autonome circulera sur le campus universitaire.

Ce projet illustre la nécessaire transversalité de la démarche dans le nouveau monde de l'automobile, où des compétences en mécanique, en énergétique, en vibroacoustique, en matériaux, en électronique, en informatique sont sollicitées. Trois établissements universitaires sont aussi associés au projet. Cela montre que le véhicule autonome modifie notre façon d'envisager la mobilité en impliquant de nouveaux acteurs.

Autre question à envisager, la sécurité et le code de la route : le véhicule autonome est appelé à révolutionner les métiers de la conduite.

Vous avez évoqué l'échéance de 2022 ; or en Allemagne les expérimentations vont plus vite et se font à plus grande échelle, avec un projet de ville entière en véhicule autonome à brève échéance. Ne risquons-nous pas, en fixant des objectifs trop lointains, de nous faire doubler, si vous me passez l'expression ?

M. Gérard Cornu. - Merci de cet exposé très complet. Certes, nous avons déjà des éléments d'autonomie dans nos véhicules comme l'aide au stationnement ou le régulateur de vitesse. Mais il y a un fossé entre l'aide à la conduite et le fait de ne plus prendre le volant, à 130 kilomètres à l'heure sur l'autoroute. Le véhicule autonome est une révolution technologique et culturelle. Au-delà de la coopération européenne, nous avons besoin d'une coopération mondiale. Il est inconcevable que l'Europe développe le véhicule autonome en s'isolant du reste du monde.

Les véhicules autonomes s'inséreront dans la circulation générale. On peut penser que, grâce à la technologie, ils n'auront jamais d'accident entre eux ; mais en cas d'accident avec un véhicule traditionnel, la question de la responsabilité se pose. Avez-vous travaillé sur cette problématique ? Nous sommes à l'aube d'une véritable révolution.

M. Patrick Chaize. - Qui dit véhicule autonome dit réseau de communication. Le Gouvernement a conclu, voici quelques jours, un accord avec les opérateurs du numérique sur ces réseaux, qui seront utiles, voire indispensables à ces nouveaux véhicules. Mais cette nouvelle utilisation a-t-elle été prise en compte pour que le réseau de demain soit bien celui que nous souhaitons pour demain, et non pour aujourd'hui ?

Une échéance se dessine-t-elle à laquelle le véhicule autonome sera, sinon majoritaire, du moins considéré comme la solution d'avenir ?

M. Olivier Jacquin. - Quatre membres de cette commission travaillent, au sein de la Délégation à la prospective, sur la mobilité du futur. Au niveau international, des industriels se penchent sur la question. Pourquoi votre mission reste-t-elle dans un cadre franco-français, et pourquoi n'y a-t-il pas une collaboration européenne sur la recherche publique ?

M. Claude Bérit-Débat. - Merci de votre exposé. Mme Tocqueville a donné un exemple d'initiative dans une métropole ; mais les autorités organisatrices de transport dans les petits territoires pourront-elles procéder aussi rapidement ? Les problématiques ne sont pas les mêmes en termes de distance ni de connexion aux réseaux. Quelles sont les échéances envisageables pour ces dernières ?

M. Frédéric Marchand. - Le cadre d'expérimentation a été assoupli mais les contraintes demeurent : il faut saisir des autorités, avec des délais parfois très longs, pour lancer les expérimentations. Quand arriverons-nous au niveau de la Suède, où l'initiative Drive Me, lancée par Volvo en association avec les pouvoirs publics, a mis cent véhicules à la disposition de la population, dans le cadre d'un test en grandeur réelle sans ingénieur à bord ?

M. Éric Gold. - Le véhicule autonome ouvre des perspectives enthousiasmantes en matière de sécurité ou d'environnement. J'ai cependant quelques réserves sur la stratégie de déploiement : il faudra des équipements aujourd'hui presque inexistants en zone peu dense ou rurale. En avez-vous tenu compte en matière de stratégie et d'équilibre des territoires, les zones rurales étant déjà très défavorisées en matière d'équipement et de transport collectif ?

M. Guillaume Gontard. - Ces innovations entraînent des modifications d'habitudes et d'usage dans la mobilité. Comment les anticiper ? On risque de penser le véhicule autonome comme un remplacement du véhicule actuel ; il faut au contraire accompagner l'innovation technique d'une innovation des pratiques. L'emploi - dans le transport routier et les transports en commun notamment - sera fortement touché. Comment anticiper ces modifications ? Enfin, pour éviter que les zones rurales ne soient exclues des innovations, veillons à déployer le numérique sur tout le territoire.

Mme Anne-Marie Idrac. - Nous aurons besoin d'infrastructures ad hoc dans certains cas, mais pas systématiquement. Aujourd'hui, c'est au véhicule particulier, compte tenu de la diversité des cas d'usage, de s'adapter à l'infrastructure, et non le contraire.

Dans la perspective des véhicules autonomes, il conviendrait surtout de renforcer les interactions entre gestionnaires routiers et constructeurs. Ainsi, la qualité du marquage au sol est très importante, notamment pour la conduite sur voie ouverte. L'approche des péages ou la signalétique des travaux nécessiteront un soin particulier et une collaboration étroite dans la clarification des informations nécessaires aux véhicules. Il faut ainsi trouver la bonne combinaison entre la signalisation verticale et horizontale, la connectivité, les cartographies numériques qui donnent des informations au conducteur aujourd'hui, au véhicule demain, et définir les priorités dans l'information dont a besoin le véhicule.

Pour le transport public, ces dimensions seront intégrées dès le départ, avec des types de véhicules bien identifiés, un parcours prédéfini, de la connectivité et de la supervision à travers le contrôle-commande. De plus, l'infrastructure sera probablement plus spécifique pour le transport en commun, donc équipée en conséquence.

Dans le cas du véhicule individuel, il n'y aura pas nécessairement d'infrastructure dédiée ; il faudra travailler sur les cas d'usage. Nous aurons des situations mixtes. Or ces éléments de réflexion n'ont pas encore été intégrés dans le débat. En tant que représentants des territoires, vous vous interrogez naturellement sur ce sujet. L'infrastructure fera partie du modèle économique et les expérimentations, notamment à Rouen et Saclay, en tiendront compte.

L'action publique a vocation à mutualiser les enseignements des expérimentations et à produire le cadre réglementaire pour la sécurité et le déploiement des services. L'approche tramway et métro, que je connais bien pour avoir présidé la RATP et été à l'origine de l'automatisation du métro parisien, présente des enjeux équivalents en termes de sécurité.

Sur les sujets internationaux, il convient de distinguer deux niveaux. La réglementation technique des véhicules est élaborée au niveau international par la CEE-ONU. J'ai découvert qu'il y avait 140 règlements en vigueur, dont une partie touche au sujet qui nous réunit. L'Union européenne fixe, de son côté, les modalités d'homologation ou de réception en vue de la mise sur le marché. À ce niveau sont également repris un certain nombre de règlements techniques de la CEE-ONU.

La France propose une réglementation conceptuellement différente. Aujourd'hui, les règles portent sur la latéralité, l'accélération et le freinage, le longitudinal, le champ de vision. Il conviendrait de mettre en place une réglementation horizontale, conçue en fonction des cas d'usage : ainsi, sur une autoroute, les éléments les plus importants sont la latéralité, l'accélération et le freinage. Cette approche serait plus adaptée à la réalité des situations. Dans ce processus long et complexe, nous souhaitons que l'Union européenne avance, dans un contexte de forte compétition mondiale. Aux États-Unis, ces démarches relèvent des États et non du niveau fédéral, ce qui engendre une concurrence entre eux pour attirer les meilleures technologies.

Mme Anne-Marie Idrac. - S'agissant des infrastructures et, plus spécifiquement, de l'équipement des territoires ruraux, il semble effectivement difficile, à court terme, d'envisager, monsieur Gold, une utilisation étendue des véhicules autonomes sur de petites routes de campagne. Peut-être est-ce d'ailleurs préférable en termes de sécurité routière... Certains usages pourraient néanmoins intéresser ces territoires : l'accompagnement des habitants vers les gares et les hôpitaux ou le développement du covoiturage. Les autorités organisatrices des transports au sens de la loi du 10 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, dite Loti, ont un rôle essentiel à jouer pour rendre effectif l'usage des véhicules autonomes dans les territoires. Pourtant, elles sont inexistantes dans de trop nombreuses collectivités. La ministre des transports s'attache avec raison à renforcer la couverture du territoire national en la matière ; aux élus locaux également de se mobiliser, d'autant que la taille de l'autorité organisatrice importe peu. Certaines expérimentations demeurent en effet modestes ; elles se limitent parfois à la circulation de véhicules autonomes sur un campus ou dans une zone d'activité. Je reconnais toutefois que leur mise en place reste plus aisée en ville, où peuvent facilement être installés des itinéraires balisés pour les véhicules autonomes.

Vos interrogations portent également sur les assurances et régimes de responsabilité applicables en cas de délégation partielle de la conduite. Je vous rappelle à cet égard que la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a prévu les expérimentations en matière de véhicule autonomes, en autorisant, dans son article 37, le Gouvernement « à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de permettre la circulation sur la voie publique de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite, qu'il s'agisse de voitures particulières, de véhicules de transport de marchandises ou de véhicules de transport de personnes, à des fins expérimentales, dans des conditions assurant la sécurité de tous les usagers et en prévoyant, le cas échéant, un régime de responsabilité approprié ». L'ordonnance a été publiée en 2016 mais nous sommes toujours en attente du décret. Or, il est apparu il y a peu que cette base légale s'avère insuffisante pour traiter de la responsabilité en cas de vigilance partielle du conducteur ou de délégation partielle de la conduite, y compris dans le cadre des expérimentations. Dans sa version actuelle, le code de la route indique que « tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent » : le législateur devra donc adapter cette disposition au cas particulier des véhicules autonomes. J'estime pour ma part que le titulaire de l'autorisation d'expérimenter devrait être responsable, mais la loi devra le préciser. Les assureurs sont bien entendu parties prenantes des consultations que nous menons ; aussi surprenant que cela puisse vous paraître, ils n'ont nullement soulevé la question de la responsabilité, estimant que la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, dite loi Badinter, s'applique à ces nouveaux véhicules. Mais peut-être des difficultés surgiront-elles ultérieurement ?

Vous m'avez également demandé pour quelle raison je n'avais pas été nommée responsable spéciale mondiale. Je vous réponds modestement : par modestie... Plus sérieusement, l'Union européenne est en pointe sur le dossier du véhicule autonome ; elle a lancé différents travaux auxquels participent, je vous l'indiquais précédemment, plusieurs commissaires et directions générales. Nombre d'États membres ont engagé des expérimentations, la Suède avec Volvo notamment comme le rappelait M. Marchand, ou des partenariats, à l'instar de la France qui, aux côtés de l'Allemagne et du Luxembourg, approfondit des cas d'usage en fonction des habitudes de conduite nationales.

Plusieurs questions ont porté sur les échéances. Je n'en ai pas, n'étant pas tenue à la publication d'un rapport. L'État lui-même n'en a pas fixé pour le lancement de véhicules autonomes dans tel ou tel territoire ou pour un usage particulier. Le développement de ce nouveau mode de transport revient aux industriels, aux opérateurs et, bien sûr, aux autorités organisatrices. Dès lors, lorsque j'évoquais l'année 2022, il ne s'agissait nullement d'une échéance qu'aurait définie l'État en l'accompagnant d'un plan et d'une programmation budgétaire ad hoc, mais d'une éventualité, qui demeure fonction de la mobilisation des industriels et des opérateurs, soutenue par une volonté forte des pouvoirs publics, auxquels il revient d'accompagner et de sécuriser juridiquement le développement du véhicule autonome.

Les projets américains et britanniques, par exemple, limitent de la même manière le rôle des pouvoirs publics à un soutien aux acteurs privés. En France, cette stratégie fonctionne : les partenariats industriels se multiplient ainsi entre équipementiers et acteurs du numérique ; à Rouen, différents constructeurs automobiles coopèrent au sein de l'expérimentation. La nécessaire complémentarité des acteurs industriels pose d'ailleurs la question de la chaîne de valeur entre équipementiers, constructeurs automobiles, acteurs du numérique et de la cartographie, gestionnaires de flottes et motoristes et, partant, celle des compétences et des emplois, que vous avez évoquée, monsieur Gontard. Ceux-ci sont essentiellement concentrés, à ce stade de développement, sur le codage et la gestion des données mais les besoins pourraient évoluer, raison pour laquelle le Gouvernement a demandé, lors du dernier Conseil national de l'industrie, une projection aux industriels afin d'adapter, autant que faire se peut, les formations aux besoins. Il est en effet nécessaire de rester vigilant à cette adéquation, afin qu'une insuffisante qualification de la main-d'oeuvre ne constitue pas à terme un élément de blocage. Certains métiers seront amenés à se développer, notamment ceux relatifs aux éléments techniques et numériques des véhicules et des infrastructures ou à la régulation et à la supervision des flottes de véhicules partagés - j'ai pu le constater récemment en m'entretenant à Vincennes avec les personnels de supervision de la RATP -, tandis que d'autres, en particulier les chauffeurs de taxi et les conducteurs de transports en commun, devront engager de profondes adaptations. Les opérateurs, préoccupés à juste titre par la préservation du lien avec leurs clients, s'attachent à maintenir des effectifs pour accompagner les voyageurs, notamment les personnes âgées ou à mobilité réduite, dans les navettes autonomes sans conducteur. Ces nouveaux emplois, dont les compétences requises font actuellement l'objet d'une réflexion, permettent à la fois d'assurer la sécurité des voyageurs et de garantir une expérience positive de l'usage d'un véhicule autonome : la réussite du développement de ce mode de transport dépend de cette double garantie.

M. Jean-Michel Houllegatte. - À vous entendre, le véhicule autonome représente un véritable changement de paradigme. Est-ce une révolution absolue ou une évolution permettant la cohabitation de plusieurs types de mobilité, comme l'évoquait notre collègue Gérard Cornu ? Je citerais pour ma part les hybridations possibles ou certaines portions de route, pour lesquelles le programme de géolocalisation européen Galiléo constituera un véritable atout.

M. Joël Bigot. - Avec le véhicule autonome, la science-fiction entre dans la réalité ; notre quotidien n'aura rien à envier à Batman ! Plus sérieusement, est-il envisagé de dédier certaines voies de circulation aux véhicules autonomes ? Pourrait-on consacrer à cet usage les voies ferrées désaffectées ? Je m'interroge également sur l'adaptation de la conduite face à un feu tricolore, à un embouteillage ou à des travaux : en somme, le véhicule autonome est-il intelligent ?

Mme Michèle Vullien. - Comment les véhicules autonomes pourront-ils concrètement améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens ? Je conçois bien sûr leur intérêt pour desservir les hôpitaux, les campus ou les zones d'activité, mais il ne sera effectif que si, parallèlement, est limité leur usage particulier au profit des mobilités collectives et que les opérateurs veillent à assurer aux voyageurs un accompagnement de qualité. Nous avons trop vu, à Paris comme à Lyon, les dégâts commis sur les vélos installés en libre-service pour prendre le moindre risque de dégradation volontaire sur des véhicules bien plus coûteux.

M. Guillaume Chevrollier. - Le véhicule autonome nécessitera un renouvellement considérable des infrastructures routières, notamment signalétiques. Conduira-t-il, selon vous, à la réduction de la fracture entre réseau rural et réseau urbain ou, au contraire, à son accentuation ?

M. Cyril Pellevat. - A l'occasion d'un récent déplacement en Israël, une délégation de notre commission s'est rendue au siège de MobilEye, leader mondial de la vision artificielle appliquée à l'automobile, où elle a pu appréhender l'intérêt du dispositif mis en oeuvre par le gouvernement israélien pour favoriser le développement de la conduite autonome. Un tel soutien est-il à votre connaissance envisagé par le gouvernement français ? Existe-il par ailleurs des expérimentations de véhicules autonomes dans des territoires frontaliers, dont il serait utile de prendre en compte les spécificités ? À titre d'illustration, en Haute-Savoie, plus de 80 000 véhicules traversent quotidiennement la frontière entre la France et la Suisse, dont les environnements routiers sont fort différents en termes d'infrastructures et de signalétique.

M. Alain Fouché. - Que représentera, selon vous, le marché des véhicules autonomes pour les constructeurs automobiles ? Il semble qu'il se limite aujourd'hui à des voitures de petit gabarit, mais qu'en sera-t-il demain, même si je doute fort que cette technologie intéresse un jour des constructeurs comme Ferrari ? A-t-on idée du coût, pour ces sociétés, du développement des nouvelles technologies de conduite ? L'État et les collectivités territoriales devront-ils soutenir leur investissement comme ils le font en faveur du développement de la voiture électrique ? Par ailleurs, pour ce qui concerne les transports publics, j'entends certes que l'accompagnement des voyageurs sera assuré par une présence humaine, mais qu'est-il envisagé pour les chauffeurs ? Je terminerai par une question pratique : dans un véhicule autonome, comment puis-je faire pour sortir de l'autoroute ?

Mme Pascale Bories. - Je m'interroge sur le risque de déresponsabilisation des conducteurs de véhicules autonomes au regard des infractions routières. En l'état actuel du droit, les conducteurs se doivent d'être capables de réagir en cas de difficulté, aptitude que garantit le permis de conduire. L'examen sera-t-il nécessaire demain ? Y aura-t-il encore un sens à contraindre la conduite, si elle devient autonome, dans des limites d'âge ou d'absence de handicap tel que la cécité ?

M. Jean-Marc Boyer. - Dans le prolongement des questions posées par notre collègue Pascale Bories, je m'inquiète des conséquences de la délégation partielle de responsabilité en cas de conduite d'un véhicule autonome. Comment les comportements du véhicule, du conducteur et de l'environnement devant un feu tricolore ou une signalétique de limitation de vitesse seront-ils anticipés ? Ne faudrait-il pas, à tout le moins, prévoir une refonte du permis de conduire pour les usagers de véhicules autonomes comme classiques ? Permettez-moi également de m'interroger sur l'intérêt d'une nouvelle diminution de la limitation de vitesse sur certains axes routiers à l'heure où la voiture autonome nous promet une sécurité hautement renforcée.

M. Charles Revet. - Vous nous avez indiqué que les véhicules autonomes devraient s'adapter au réseau routier et non l'inverse. Or, s'il est possible, grâce aux équipements des réseaux ferrés, de ralentir, voire d'arrêter, un train, comment serait-ce faisable sur une route ?

Mme Anne-Marie Idrac. - L'avènement du véhicule autonome représente un changement de paradigme, selon le terme très justement employé par M. Houllegatte, dont nous ne pouvons pas encore percevoir toutes les conséquences. Aussi, vous comprendrez que je n'ai pas la réponse à chacune de vos interrogations. Learning by doing disent les Anglais : les expérimentations en cours servent à nous éclairer progressivement. Ainsi, comme pour toute innovation marquée par une rupture des usages, l'expérience est passionnante, d'autant qu'elle concerne tant le champ de l'intelligence artificielle que celui des comportements humains et qu'elle engage une réflexion sur les interactions entre l'homme et la machine, entre la machine et son environnement physique et humain.

Messieurs Cornu et Houllegatte, vous avez évoqué l'hybridation des véhicules et des modes de conduite : bien évidemment, pendant plusieurs années, le temps nécessaire au renouvellement du parc automobile, plusieurs types de véhicules, plus ou moins autonomes, cohabiteront. L'hybridation des technologies au sein d'un même véhicule représente déjà une réalité puisque existent sur plusieurs modèles des délégations partielles de conduite.

Pour répondre à votre question, monsieur Fouché, l'unique moyen de sortir d'une autoroute est, à ma connaissance, de reprendre le contrôle manuel de votre véhicule autonome, sauf à ce que certains itinéraires aient été préalablement définis. D'ailleurs, et cela est frappant, aucun projet de véhicule autonome n'est à ce jour privé de volant.

J'insiste sur le rôle majeur des pouvoirs publics s'agissant du développement des véhicules autonomes, dans la mesure où ils ont en charge la définition des conditions d'usage : redevances, parkings, voies dédiées notamment. Le véhicule autonome permet d'envisager le solisme dans les transports sous un nouvel angle. Sans considérer naïvement que l'émergence d'une nouvelle technologie pourrait seule résoudre les difficultés politiques ou économiques d'un territoire, je crois indispensable d'intégrer, comme outil supplémentaire des politiques de mobilité, le véhicule autonome dans les dispositifs favorisant le covoiturage et le partage de véhicule, en matière de parking ou de péage par exemple. Exception faite du monde rural et avant même la pollution, la congestion des axes de communication constitue à mon sens le problème majeur des territoires.

Madame Bories, vous avez évoqué le risque de déresponsabilisation des usagers des véhicules autonomes. Un travail d'information et d'adaptation doit effectivement être mené auprès des conducteurs comme des autres usagers de la route et, peut-être, certaines réglementations - je pense aux passages piétons - revues. En tout état de cause, le conducteur d'un véhicule autonome reste responsable de sa conduite. Dès lors, il apparaît que le permis de conduire pourra connaître des évolutions, qui seront précisées en fonction des besoins mis en exergue par les expérimentations menées. Le véhicule autonome représente un changement technique, mais également culturel et, à terme, juridique. Je suis également convaincue, pour répondre à votre seconde question, que les personnes en situation de handicap bénéficieront, dans les années à venir, pour leur mobilité, des progrès réalisés en matière de délégation partielle puis totale de conduite.

Le marché du véhicule autonome, monsieur Fouché, se lancera fort probablement d'abord dans le haut de gamme, auprès de consommateurs à la recherche d'un confort de conduite et de technologies innovantes, avant de se diffuser à d'autres catégories de véhicules en fonction du développement, et donc de la démocratisation, des usages. S'agissant des véhicules collectifs, le marché sera à la mesure du dynamisme des trois opérateurs présents sur le territoire français et de la volonté des autorités organisatrices.

Enfin, bien que n'ayant jamais entendu, monsieur Bigot, évoquer la possibilité de dédier des voies ferrées désaffectées aux véhicules autonomes, il me semble que cette piste pourrait utilement être explorée dès lors que l'on cherche à développer ce type de mobilité sur l'ensemble du territoire.

M. Hervé Maurey, président. - Je vous remercie, madame Idrac, pour l'ensemble des informations que vous avez ce matin portées à notre connaissance.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Projet de loi relatif à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 - Demande de saisine pour avis et désignation d'un rapporteur pour avis

M. Hervé Maurey, président. - Le projet de loi relatif à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, adopté par l'Assemblée nationale le 20 décembre dernier, comporte de nouveaux articles relatifs aux transports, notamment le Charles-de-Gaulle Express et le Grand Paris Express, que la commission des lois, saisie au fond, se propose de nous déléguer. Il me semble également utile que nous nous saisissions pour avis de l'article 6, qui allège, dans le cadre de l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques, la procédure de participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement. Le texte sera examiné en séance publique les 6 et 7 février. Le calendrier est donc fort contraint et nous obligera à nous réunir en commission dès le mardi 30 janvier avant les réunions des groupes politiques, un horaire inhabituel pour notre commission, dicté par la nécessité de se réunir avant la commission des lois, qui se réunit le lendemain matin.

La commission décide de se saisir pour avis sur le projet de loi n° 203 (2017-2018) relatif à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024.

M. Hervé Maurey, président. - Je vous propose de nommer Philippe Pemezec rapporteur pour avis.

La commission désigne M. Philippe Pemezec en qualité de rapporteur pour avis sur le projet de loi n° 203 (2017-2018) relatif à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024.

M. Hervé Maurey, président. - Il s'agit de votre premier rapport, mon cher collègue, au sein de notre commission. Compte tenu des délais, il vous faudra vous y atteler aussi vite que bien, ce que vous saurez parfaitement faire, j'en suis convaincu.

Sécurité routière - Création d'un groupe de travail

M. Hervé Maurey, président. - La semaine dernière, le Premier ministre a annoncé la réduction, à compter du 1er juillet prochain, de la limitation de vitesse sur les routes secondaires à 80 kilomètres-heure. Lors d'une émission radiophonique, le président Larcher a estimé délicat de juger de la pertinence de la mesure sans disposer d'éléments chiffrés précis. Sans avoir d'opposition de principe, mon analyse n'est pas différente et, avec le président de la commission des lois Philippe Bas, nous avons adressé un courrier conjoint au Premier ministre afin d'avoir communication des résultats des expérimentations menées entre 2015 et 2017 sur plusieurs routes secondaires. Nous auditionnerons également, en commun avec la commission des lois, le délégué interministériel à la sécurité routière le 24 janvier prochain à 9 heures. Notre collègue sénateur Michel Raison avait émis le souhait que soit créée une mission commune d'information sur la sécurité routière. Les règles strictes du droit de tirage pour les groupes n'ont pas permis de faire aboutir cette demande. Aussi ai-je décidé avec Philippe Bas de la création d'un groupe de travail composé de trois sénateurs, dans le respect des équilibres politiques : Michel Raison bien sûr - bien qu'il ne soit membre ni de la commission des lois ni de la nôtre -, membre du groupe Les Républicains, un sénateur du groupe Socialiste et républicain désigné par la commission des lois et un sénateur du groupe Union centriste membre de notre commission. Notre collègue Michèle Vullien a manifesté son intérêt pour ce groupe, dont les membres seront désignés mercredi prochain. Il procèdera à des auditions, qui permettront de préparer une table ronde sur ce sujet devant les deux commissions concernées.

M. Alain Fouché. - Les membres de ce groupe de travail pourraient-ils être plus nombreux ? J'ai travaillé sur ce sujet et cela m'intéresserait d'y participer.

M. Hervé Maurey, président. - N'ayez crainte : les auditions du groupe de travail seront ouvertes aux sénateurs des deux commissions concernées et la table ronde à l'ensemble des sénateurs.

Questions diverses

Souvenez-vous qu'avant les vacances de fin d'année, nous avons bénéficié d'une initiation à l'application Demeter. La semaine prochaine, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique, nous utiliserons cette application pour la première fois pour l'examen d'un texte. Je vous invite en conséquence à vérifier sa bonne installation sur vos tablettes. Veillez également à disposer de vos codes.

M. Patrick Chaize. - L'application Demeter va évoluer prochainement pour répondre à plusieurs demandes formulées lors de la présentation, ce qui nous permettra de disposer d'un outil performant.

M. Hervé Maurey, président. - Nous avions effectivement émis quelques remarques et je vous confirme que des évolutions sont à venir.

Nous nous retrouverons demain à 11h15 pour l'audition de Jean-Marc Janaillac, président du groupe Air France-KLM.

La réunion est close à 11h25.

Jeudi 18 janvier 2018

- Présidence de M. Hervé Maurey, président -

La réunion est ouverte à 11 h 15.

Audition de M. Jean-Marc Janaillac, Président-directeur général du groupe Air France-KLM

M. Hervé Maurey, président. - M. Jean-Marc Janaillac, président-directeur général du groupe Air France-KLM, étant arrivé avec une ponctualité extraordinaire, digne de celle des avions de sa compagnie, je vous propose de commencer dès à présent cette audition, devenue en quelque sorte un rendez-vous annuel - nous vous avions entendu au mois de novembre 2016 - permettant à notre commission d'être régulièrement informée de la situation économique du pavillon français.

Les assises du transport aérien, qui se tiendront vraisemblablement au début du mois de mars, seront l'occasion, je l'espère, de faire émerger de nouvelles propositions pour soutenir le développement du secteur aérien et améliorer la compétitivité des entreprises françaises de transport. Ces propositions pourront, le cas échéant, être intégrées dans le futur projet de loi d'orientation des mobilités.

L'année 2017 a été, pour Air France, particulièrement positive, avec notamment le nouveau plan stratégique Trust together qui s'est accompagné de la création d'une nouvelle compagnie baptisée Joon, qui cible la clientèle des 18-35 ans et dessert, depuis le mois de décembre dernier, quatre destinations européennes. Par ailleurs, le groupe Air France-KLM a mené plusieurs opérations capitalistiques en vue de renforcer ses partenariats vers l'Atlantique nord et la Chine, avec l'entrée à son capital des compagnies Delta Airlines et China Eastern, pour 10 % chacune, dans le cadre d'une augmentation de capital.

Pour autant, la situation économique du pavillon français demeure fragile, en raison d'un différentiel de compétitivité persistant avec les compagnies low cost, qui proposent pour certaines des vols entre Paris et New York à moins de 130 euros, comme avec les compagnies du Golfe, qui bénéficient d'un environnement juridique, social et fiscal attractif avec lequel il est difficile de rivaliser. Ainsi, malgré le dynamisme du trafic aérien, qui a progressé de plus de 7 % au niveau mondial et de 4 % au niveau national l'année dernière, la part de marché du pavillon français ne cesse de reculer.

Au regard de ces différents éléments, quelles seraient à vos yeux les mesures nécessaires pour soutenir la compétitivité du transport aérien ? Quelles sont à cet égard vos attentes vis-à-vis des prochaines assises du transport aérien ? Quelle stratégie de développement poursuivrez-vous pour Air France dans les prochaines années et quelle sera la place des différentes compagnies du groupe au sein de celle-ci ?

J'aimerais enfin vous interroger sur la contribution des compagnies aériennes à la lutte contre le changement climatique, qui intéresse également notre commission. Si le transport aérien n'est pas partie prenante de l'Accord de Paris sur le climat, l'Organisation de l'aviation civile internationale a néanmoins adopté, en 2016, une résolution visant à mettre en oeuvre un mécanisme mondial de compensation des émissions de CO2 à compter de 2021. Quel regard portez-vous sur cette initiative et sur les modalités de sa mise en oeuvre ?

M. Jean-Marc Janaillac, Président-directeur général du groupe Air France-KLM. - L'année 2017 s'est terminée sur un bilan globalement positif pour le groupe Air France-KLM avec une croissance à la fois de l'activité et du chiffre d'affaires. Sans être en mesure de vous transmettre des chiffres précis - les résultats du groupe ne seront rendus publics que le 15 février prochain -, je peux vous annoncer une forte augmentation des résultats opérationnels et un recul bienvenu de la dette, dont le montant constituait un élément préoccupant de fragilité. La situation économique et financière du groupe bénéficie en outre d'une amélioration de sa valorisation boursière : d'1,5 milliard d'euros en juillet 2016, elle s'établit désormais à 6 milliards d'euros, niveau qui demeure toutefois inférieur à la valorisation d'environ 12 milliards d'euros de sociétés concurrences comme Lufthansa ou International Airlines Group (IAG).

Des avancées stratégiques majeures ont également marqué l'année 2017, notamment la mise en oeuvre du plan Trust together - pardonnez cette entorse à la francophonie : l'anglais est la langue partagée par les salariés français et néerlandais du groupe -, qui signe notre volonté de retrouver une croissance rentable, en particulier chez Air France. Nous avons renforcé notre offre de vols grâce à une meilleure utilisation de la flotte, choix plus économique qu'une augmentation du nombre d'appareils. Des partenariats - vous en avez évoqué certains, monsieur le président - ont été approfondis sur le long-courrier. Ainsi, Delta Airlines est entré au capital du groupe à hauteur de 10 %, en contrepartie d'une participation de 31 % d'Air France-KLM dans Virgin Atlantic. Le joint-venture constitué de Delta Airlines, Virgin Atlantic et Air France-KLM, avec 30 % de parts de marché, domine le transport aérien entre l'Europe et les États-Unis. Nos liens avec China Eastern, également présent à hauteur de 10 % au capital du groupe, nous permettent d'occuper la position de leader européen à l'aéroport de Shanghai et de nous positionner favorablement dans la perspective de l'ouverture, en 2019, du futur aéroport de Daxing près de Pékin. Enfin, nous nous sommes également rapprochés de Jet Airways, première compagnie indienne, qui offre à Air France-KLM une position privilégiée sur un marché prometteur. Fruit d'une longue et délicate négociation avec les syndicats de pilotes, la création de Joon nous permet, par ailleurs, d'être plus compétitifs face notamment aux compagnies du Golfe. À compter du mois de mai, des destinations long-courrier, comme les Seychelles, qui avaient été fermées il y a quelques années en raison d'une trop faible rentabilité face à la concurrence, viendront compléter l'offre actuellement moyen-courrier de Joon.

En 2019, de nouveaux Airbus 350 seront intégrés à la flotte du groupe Air France-KLM, qui comprend déjà depuis peu plusieurs Boeing 787, dont la consommation par siège au kilomètre est inférieure de 20 % à celle des avions de taille comparable.

Je conclurai mon bilan de l'année 2017 en vous indiquant que l'offre de Transavia a augmenté d'environ 12 %. Cette croissance devrait se poursuivre en 2018 pour atteindre 18 %, avec une fréquentation satisfaisante et de bons résultats économiques.

L'année se clôt donc pour le groupe sur un sentiment de reprise offensive et de dynamisme face à la concurrence, même si des réformes restent à mener pour améliorer encore notre compétitivité. Certes, le résultat opérationnel du groupe avoisine 6 %, mais il reflète une importante disparité entre celui d'Air France (4 %) et de KLM (9 %), ce dernier niveau étant identique à Lufthansa et proche de celui de British Airways. Les efforts doivent également être poursuivis en matière de performance opérationnelle et de régularité des vols, notamment à l'aéroport de Roissy, même si les responsabilités sont souvent extérieures au groupe lorsqu'elles sont le fait de l'allongement des contrôles de la police de l'air et aux frontières ou des performances erratiques de la gestion des bagages. La faute est, en revanche, plus directement interne sur les vols domestiques, en particulier ceux réalisés par notre filiale Hop.

L'année 2017 a bénéficié, reconnaissons-le, d'un climat particulièrement favorable à ce que nos initiatives soient couronnées de succès : la demande, que la crise économique puis les attentats en Europe avaient atrophiée, a renoué avec le dynamisme, tandis que la concurrence demeurait modérée et que le prix du pétrole restait raisonnable.

Malheureusement, il est probable que l'année 2018 soit moins favorable. Déjà l'on observe, depuis quelques semaines, une remontée des cours de pétrole et, surtout, une pression exacerbée de la concurrence avec de nouvelles offres des compagnies du Golfe, de Turkish Airlines et des compagnies asiatiques, mais aussi l'arrivée du low cost sur le long courrier - avec une dizaine de Boeing 787, Norwegian propose désormais plus de vols vers l'Amérique du nord qu'Air France, tandis que la filiale low cost d'IAG proposera prochainement des vols pour les Antilles depuis Orly, qu'Easy Jet renforce son offre et que Ryanair annonce son retour en France. Air France travaille, avec ses partenaires, à répondre à cette concurrence. À titre d'illustration, se tenait hier une réunion de 1 200 vendeurs à l'international, en présence des présidents de Delta Airlines et de China Eastern, afin de définir une nouvelle politique tarifaire vers l'Amérique du nord. Tout en maintenant un service gratuit de restauration à bord, il s'agit de se rapprocher des prix de la concurrence pratiqués pour un aller simple sans bagage ni repas. La rentabilité de certains tarifs proposée est d'ailleurs loin d'être assurée : Norwegian est ainsi considérablement endettée. Air France-KLM a également engagé une réflexion sur le low cost sur le marché domestique, où la place de la compagnie et de ses filiales représente un enjeu majeur ; un plan d'action à moyen terme sera présenté au conseil d'administration du mois de juin.

Quelle que soit l'intensité des efforts que nous pourrions réaliser, j'attire votre attention sur le fait que de nombreux de facteurs extérieurs, liés en particulier à l'environnement juridique et fiscal français, pèsent sur notre compétitivité. Air France réalise 60 % de son chiffre d'affaires à l'international. En situation de concurrence sur la totalité des lignes exploitées, la société emploie 97 % de ses salariés sous contrat français, notoirement coûteux en termes de charges sociales. Pour une compagnie concurrente comme Lufthansa, les cotisations patronales s'établissent à 25 % des rémunérations et sont plafonnées pour les salaires supérieurs à 100 000 euros par an, tandis qu'elles atteignent 46 % pour Air France sans plafonnement. Cette différence représente un delta d'environ 400 millions d'euros par an. Certes, d'autres compagnies aériennes françaises pâtissent de cette réglementation défavorable mais elles demeurent moins concernées par la concurrence internationale sur les lignes qu'elles exploitent, essentiellement tournées vers l'Outre-mer. Enfin, nous nous acquittons de redevances élevées auprès d'Aéroport de Paris (ADP) et de taxes sur le transport aérien dont le niveau a de multiples fois été critiqué par le Parlement et la Cour des comptes. Vous comprendrez combien nous attendons des prochaines assises du transport aérien qu'elles proposent des évolutions de notre environnement social et fiscal.

Vous m'avez enfin interrogé, monsieur le président, sur les actions que notre groupe entend mener en faveur de l'environnement. J'ai cité il y a un instant la moindre consommation en carburant de nos nouveaux avions ; j'ajouterai que la nuisance sonore qu'ils induisent est inférieure de 40 % à celle des plus anciens appareils. Par ailleurs, avec le ministère de la transition écologique et solidaire, Total, Safran et d'autres partenaires, nous avons signé une convention relative au développement et à l'utilisation de biocarburants. Nous sommes également partie à l'accord international Corsia, qui prévoit, pour le transport aérien, une croissance nulle des rejets en CO2 à compter de 2020 et leur recul à hauteur de 50 % en 2050 sur la base des émissions enregistrées en 2005. D'autres initiatives sont enfin prises en interne, comme le calcul de trajectoires de vol moins consommatrices de carburant, l'utilisation de moteurs électriques avant le décollage ou l'attention portée au poids des équipements meublants à l'intérieur des appareils.

M. Hervé Maurey, président. - Je donne d'abord la parole à Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis des crédits du transport aérien au sein de notre commission.

Mme Nicole Bonnefoy. - Je vous remercie, monsieur Janaillac, pour votre présentation extrêmement complète de la situation du groupe Air France-KLM. Je vous souhaite, ainsi qu'à l'ensemble de vos équipes, une année 2018 à la hauteur de vos ambitions et de vos espérances.

Notre commission s'intéresse de près à la question de la compétitivité du transport aérien. Cette thématique a déjà fait l'objet de multiples rapports et de nombreuses propositions. Certaines pistes restent à explorer pour alléger les charges qui pèsent sur les entreprises françaises de transport. Je pense en particulier à l'élargissement de l'assiette de la taxe de solidarité ou à la réforme des modalités de financement des dépenses de sûreté dans les aéroports. J'espère que les prochaines assises du transport aérien seront l'occasion de progresser sur ce sujet.

J'aimerais également avoir votre point de vue sur les redevances aéroportuaires que paient les compagnies du groupe Air France KLM, en particulier dans les aéroports parisiens. Pour l'année 2018, le groupe ADP a proposé une hausse des redevances de 2,1 %. Cette proposition tarifaire a été rejetée le 24 novembre dernier par la commission consultative économique des aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly, et a été critiquée par la Fédération nationale de l'aviation marchande (FNAM). ADP fait valoir que cette hausse est mesurée, qu'elle permet de financer des investissements de développement des aéroports parisiens, qui profiteront à terme aux compagnies aériennes, et qu'elle ne représente qu'une part marginale de l'augmentation des coûts d'exploitation entreprises de transport. Quelle est votre position sur cette question ? La détermination des redevances aéroportuaires pose également la question de la régulation tarifaire. La création d'une nouvelle autorité de supervision indépendante (ASI) en 2016 a constitué un progrès par rapport à la situation antérieure sur ce point. Certains considèrent cependant que cela reste insuffisant. Que pensez-vous, à cet égard, de la proposition de l'Arafer d'exercer les fonctions de régulation du transport aérien et de contrôle de la fixation du montant des redevances ?

J'aimerais également vous interroger sur l'éventuelle privatisation du groupe ADP. Dans une tribune au sein du journal Le Monde parue le 7 décembre dernier, vous avez exprimé des réserves quant à ce projet qui, je vous cite, « ne saurait se concevoir dans une logique budgétaire ». Je partage cette préoccupation, d'autant plus qu'une telle opération, certainement lucrative à court terme, priverait l'État des dividendes annuels versés par ADP. Quelles sont, selon vous, les conditions qui permettraient de concevoir une privatisation ?

M. Rémy Pointereau. - L'année 2017 fut positive, pour Air France comme pour les autres compagnies, en termes économiques comme en matière de sécurité aérienne, puisqu'aucun indicent majeur n'a heureusement été déploré. Ce bilan satisfaisant est-il à porter au crédit d'un meilleur entretien des appareils, d'un effort de renouvellement des flottes ou, simplement, à un favorable concours de circonstances ? L'Airbus A380 enregistre de mauvais résultats commerciaux. Quelle en est selon vous la raison : son coût, sa consommation ? Ma dernière question porte sur la saturation des terminaux de l'aéroport de Roissy. Des discussions sont en cours avec ADP s'agissant de la construction éventuelle d'un nouveau terminal. D'autres solutions sont-elles envisagées ? Alors que les nuisances sonores atteignent leurs limites à Orly, ne pourrait-on pas songer à développer les infrastructures aéroportuaires existantes dans une proximité raisonnable avec Paris, comme Beauvais ou Châteauroux ? Les compagnies aériennes telles que la vôtre seraient-elles prêtes à les exploiter ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Je partage les interrogations de notre collègue Rémy Pointereau. Il semblerait que Ryanair puisse prochainement faire de Nantes-Atlantique son hub européen. Air France serait-elle prête à se développer à son cours depuis des aéroports régionaux ? Comment, par ailleurs, jugez-vous la privatisation de ces aéroports ? Observez-vous les résultats escomptés ? Enfin, votre compagnie rencontre-t-elle des difficultés à recruter ses pilotes ? J'ajouterai une brève remarque : une délégation de notre commission s'est rendue en Israël en novembre dernier dans un Airbus A320 d'Air France, sans aucun équipement destiné au visionnage de vidéos pour un voyage de cinq heures. Cela manquait pour le moins de confort...

M. Guillaume Chevrollier. - Le contexte concurrentiel sur vous subissez va s'aggraver avec le Brexit. Ryanair, vous l'avez mentionné, a d'ores et déjà annoncé son retour en France sur quatre sites en 2019. La très grande majorité de vos salariés sont français : quel dommage d'avoir choisi de nommer votre dernier plan Trust together ! Plus sérieusement, comment jugez-vous le dialogue social dans votre société, après les tensions rencontrées lors des négociations relatives au projet Boost ? S'agissant du renouvellement de votre flotte, après les investissements réalisés pour le long-courrier (cinq Boeing 787 et dix Airbus A380), quelles sont les perspectives au profit du moyen-courrier dont les appareils sont souvent vieillissants ? Quelle est, enfin, votre opinion sur la décision gouvernementale d'abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes ?

M. Jérôme Bignon. - En matière de transport aérien, d'autres énergies que le pétrole sont-elles, à terme, imaginables ? Les aéroports se rapprochent, à bien des égards, des ports maritimes. Ces derniers toutefois, exception faite du cas des bateaux de croisière et des ferrys, accueillent plus de marchandises que de passagers. Cette remarque me conduit à vous interroger sur le niveau de votre activité de fret. Pour poursuivre l'analogie, vous n'êtes pas sans savoir que les compagnies de transport maritime de marchandises bénéficient d'une exonération sur certaines cotisations sociales patronales. Cet avantage ne pourrait-il pas être étendu aux compagnies aériennes ? Enfin, quelle est la part de l'intelligence artificielle dans les progrès technologiques réalisés par votre société ?

M. Didier Mandelli. - Votre compétitivité pâtit évidemment des contraintes et des coûts induits par la réglementation sociale et fiscale des 97 % de contrats français que compte Air France. Notre collègue Jérôme Bignon le mentionnait à l'instant : la loi du 20 juin 2016 sur l'économie bleue a introduit en droit français la pratique du net wage, afin de limiter les coûts salariaux du transport maritime, dispositif maintenu à grand peine lors de la discussion du dernier projet de loi de finances. Cet avantage pourrait-il être appliqué aux personnels des compagnies aériennes françaises ? Lors de l'annonce de l'abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes, le Premier ministre a annoncé que l'État encouragerait à la fois le développement des aéroports de Brest, Rennes et Nantes-Atlantique et le renforcement des liaisons ferroviaires entre Paris et les villes de l'Ouest de la France. Ne vous semble-t-il pas paradoxal de soutenir les aéroports régionaux tout en accroissant la concurrence entre les transports ferroviaires et aériens par la multiplication des jonctions par rail ?

M. Olivier Jacquin. - L'évolution de la part modale du transport aérien peut être comparée à celle de l'automobile au début du vingtième siècle. Comment imaginez-vous, compte tenu des enjeux liés à la pollution, que pourront se développer à l'avenir les aéroports ? La délégation sénatoriale à la prospective travaillera justement en 2018 sur les nouvelles formes de mobilité.

Mme Nelly Tocqueville. - Les questions de sécurité dans les grands aéroports internationaux seront abordées lors des Assises du transport aérien. Quel est sur ce sujet votre niveau de collaboration avec les services concernés de l'État ? Lors du déplacement en Israël évoqué par notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ, nous avons eu l'opportunité de visiter les installations de l'aéroport Ben Gourion et de rencontrer les responsables de la sécurité. Leur organisation est impressionnante ! Vous inspirez-vous de telles expériences ?

M. Joël Bigot. - Dans un contexte de croissance continue du trafic aérien, le projet de Notre-Dame-des-Landes représentait une alternative à la construction d'un troisième aéroport parisien. Quelles infrastructures seront amenées à remplacer ce projet ? De nouveaux hubs seront-ils développés en régions, voire à l'étranger ? Il y aurait en effet un paradoxe à centraliser le transport aérien à Paris à l'heure où chacun reconnaît l'utilité de fluidifier les déplacements. Il n'en reste pas moins que l'Ouest de la France, façade de notre pays vers l'Amérique du Nord, regrette profondément la décision du Gouvernement d'abonner le projet de Notre-Dame-des-Landes.

Mme Angèle Préville. - Vous avez créé Hop, une compagnie à bas coûts. J'emprunte régulièrement le vol Paris-Brive la Gaillarde, et de nombreux vols ont été retardés ou annulés. Les passagers sont alors redirigés vers l'aéroport de Toulouse, à 2h30 de bus. Existe-t-il un protocole pour les vols retardés ? Quelles réponses apportez-vous à vos clients ? La SNCF rembourse les billets en cas de retard, ce n'était pas le cas avec Hop...

Mme Françoise Cartron. - Élue du département de la Gironde, j'ai vu arriver la ligne à grande vitesse mettant Bordeaux à deux heures de Paris depuis le mois de juillet. Quelle est votre stratégie face à cette concurrence très attractive ? Quels sont les chiffres de la fréquentation ? Nous percevons déjà une réduction du nombre de vols...

M. Hervé Maurey, président. - Il y a deux ans, nous nous sommes rendus sur le chantier de l'aéroport de Daxing, qui progressait à une vitesse impressionnante. Nous avions conscience qu'il ne faudrait pas cinquante ans pour le faire - ou ne pas le faire...

Je ne suis pas dans le coeur de cible de la compagnie Joon. Qu'est-ce qui la différencie des autres compagnies de votre groupe ?

Les passagers arrivant à Roissy ont parfois des difficultés à récupérer leurs bagages, ce qui est très pénible, et Aéroports de Paris et Air France se renvoient la balle. Des améliorations sont-elles prévues ?

M. Jean-Marc Janaillac. - Madame Bonnefoy, depuis 2005, l'inflation a augmenté de 12 %, les redevances de l'aéroport Charles-de-Gaulle de 36,7%, alors que celles de l'aéroport d'Amsterdam ont diminué de 4 %...

Je me suis déjà exprimé sur la privatisation d'Aéroports de Paris, après avoir envoyé mes réflexions au ministre concerné et au Premier ministre. Le cahier des charges d'une éventuelle privatisation doit faire la part des choses entre le souci de l'État de récupérer des capitaux à investir dans d'autres secteurs et une vision à moyen terme du secteur aérien français. L'organisation actuelle pose problème, en raison de la présence de deux caisses : une caisse, régulée, finance les activités aéroportuaires, et est abondée par les compagnies aériennes. La deuxième caisse est abondée par les bénéfices réalisés par les commerces et les parkings de l'aéroport, et Aéroports de Paris peut l'utiliser comme bon lui semble. Elle finance notamment des opérations de développement à l'international. Air France tient à ce que la plateforme aéroportuaire se développe et que le coût des redevances soit maîtrisé.

Dans mes précédentes fonctions, j'ai travaillé avec l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), qui fonctionne efficacement et de manière responsable. Il ne m'appartient pas de choisir l'autorité de régulation pour l'aérien...

La sécurité est un ensemble de facteurs : les avions deviennent de plus en plus fiables, grâce à l'informatique embarquée. Toutes les compagnies font un effort de formation des personnels navigants et techniques pour éviter au maximum les turbulences. Certes, il reste des concours de circonstances ou des événements extérieurs pouvant aboutir à des situations dramatiques, mais même les compagnies de pays n'accordant pas beaucoup d'importance historiquement à la sécurité améliorent leur organisation. Il y a une véritable prise de conscience.

Nous avons peu d'Airbus A 380 car les Boeing 787 et les A 350 ont un coût du siège par kilomètre inférieur aux A 380. Notre compagnie est donc moins incitée à les utiliser : il faudrait remplir l'avion pour qu'il soit rentable. C'est intéressant uniquement dans des aéroports qui ont peu de slots - où les compagnies ne peuvent faire que peu de vols.

Nous sommes très favorables à la réalisation du nouveau terminal 4 de l'aéroport Charles-de-Gaulle, car le trafic s'accroît. C'est aussi le fondement de notre plan stratégique Trust together, de retrouver une dynamique. Pour les prochaines années, nous prévoyons une croissance des vols long-courriers entre 3,8 et 4,5 %, chiffre relativement faible mais largement supérieur aux 0 à 1% connus ces dernières années. Nous souhaitons l'ouverture d'un nouveau terminal sur l'emprise foncière de l'aéroport Charles-de-Gaulle, et non la création d'un troisième aéroport parisien afin d'éviter toute dispersion. Sur l'aéroport Charles-de-Gaulle, 45% de notre trafic est en correspondance, que ce soit avec des longs ou des moyens courriers. Si nous éclatons ces flux, l'efficacité du hub sera remise en cause et le modèle économique d'Air France fragilisé. Cela n'aidera pas au développement d'un transporteur français fort à l'international. Dans ce cas, certaines lignes ne seront plus rentables et seront fermées. Certes, des liaisons directes peuvent être réalisées à partir d'autres aéroports, mais nous avons besoin de cette unité.

M. de Nicolaÿ, Ryanair a annoncé la création de bases en France. Cette compagnie, très présente en France, comme à Beauvais ou à Marseille, n'a pas, pour l'instant, d'équipages basés en France. La justice française avait estimé que cela n'était pas possible car elle payait ses cotisations sociales en Irlande - soit 10 %, alors qu'elles sont de 46 % en France... La compagnie voudrait revenir dans le droit chemin, nous l'attendons et sommes prêts à affronter sa concurrence si elle respecte les mêmes règles sociales que nous.

À l'échelle mondiale, il semble impossible de former suffisamment de pilotes pour répondre aux besoins. C'est difficile à comprendre. En France, nous n'avons aucun souci de recrutement de pilotes, grâce à des conditions d'emploi favorables. Nous recrutons de nombreux pilotes de Ryanair ou de compagnies du Golfe. Mais il y a quatre ans, nous avons signé un accord stipulant que sur dix pilotes recrutés par Air France, trois devaient provenir de Hop. Cette règle possible pour 100 recrutements annuels est désormais plus compliquée avec 200 recrutements annuels... Les compagnies asiatiques ont davantage de difficultés à recruter.

Les avions moyen-courrier qui font la liaison avec Israël font aussi d'autres liaisons. Prévoir de les équiper avec des écrans ne serait pas très économique, mais nous trouvons d'autres solutions. Sur Joon, nous permettons aux passagers de télécharger une application qui leur permet de visionner des séries ou des films.

Actuellement, nous n'observons pas de différence particulière entre les aéroports publics et les aéroports privatisés.

Monsieur Chevrollier, le nouveau plan à moyen terme concerne à la fois Air France et KLM. Il est difficile de trouver un nom compréhensible à la fois par les Français et les Néerlandais, d'où l'utilisation de l'anglais. Le dialogue social au sein des compagnies aériennes est difficile, mais nous ne sommes pas les seuls à y être confrontés. Nous avons signé un accord avec les pilotes pour la création de Joon, et un accord collectif avec le personnel navigant pour les prochaines années. Malgré des sujets de friction, le dialogue est constant. La semaine dernière, nous avons réuni l'ensemble des organisations syndicales pour préparer les assises du transport aérien, les écouter et échanger pour trouver des positions communes.

Les anciens Boeing 777 et les A 340 sont en cours de remplacement par des Boeing 787 et des A 350 pour les long-courriers. Nous allons lancer un appel d'offres pour renouveler une partie de la flotte de Hop, KLM et Transavia auprès des constructeurs français, canadien, américains et brésilien, afin de trouver la solution au meilleur coût, grâce à l'émulation. Le cahier des charges sera défini au premier trimestre, avant une décision à la fin de l'année.

Il y a deux mois, j'ai inauguré notre nouvelle agence commerciale à l'aéroport de Nantes-Atlantique. Même si nous passons de 40 à 10 agences commerciales, elles seront plus visibles et utiliseront davantage de nouvelles technologies, pour un meilleur conseil et une meilleure image. J'ai ainsi rencontré la maire de Nantes et le président de la chambre de commerce et d'industrie. Il était essentiel que l'État décide rapidement du sort de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, car les conditions d'accueil des passagers de l'aéroport de Nantes sont inacceptables. À moyen terme, nous vivrons avec un aéroport rénové. Les efforts doivent porter davantage sur l'aérogare que sur la piste. Le trafic augmente fortement, et Air France ouvre des lignes internationales. À mon arrivée, nous avons ouvert la ligne Nantes-Hambourg, notamment pour les salariés d'Airbus. Nantes est la deuxième base de Transavia après Orly, avec trois avions positionnés. Nous voulons continuer à investir là-bas.

Monsieur Bignon, le fret est une activité importante, qui se restructure fortement. Il y a une vingtaine d'années, Air France-KLM disposait d'une vingtaine d'avions tout cargo. Nous n'en avons plus que trois et demi aujourd'hui, en raison de la forte concurrence du transport maritime et d'un taux d'occupation faible, de 50%. Désormais, la nouvelle génération des Boeing 777 permet d'embarquer un gros volume de fret dans des avions de ligne. Nous réservons le tout cargo à des liaisons spécifiques. Depuis six mois, la situation s'améliore : les volumes transportés en fret augmentent et les prix unitaires se réduisent.

Oui, nous sommes intéressés par le modèle appliqué au transport maritime, afin de réduire le coût des cotisations sociales. Mais le nombre de personnes concernées et les niveaux de rémunérations ne sont pas du même ordre...

Nous sommes très attentifs à l'environnement : la consommation de carburant et les rejets de dioxyde de carbone sont les facteurs les plus importants. Nous avons un plan dédié et une directrice de l'environnement au sein d'Air France, et de même chez KLM, qui travaillent avec l'ensemble des services de la compagnie sur le bruit, le recyclage de la nourriture - délicat à bord en raison des questions sanitaires - et de l'eau, dans les avions et sur les installations terrestres. Notre rapport annuel vous fournira des informations plus précises sur les actions engagées depuis plusieurs années.

J'ai été surpris de l'importance de l'intelligence artificielle à mon arrivée chez Air France-KLM, groupe en avance par rapport à ses concurrents sur le digital. Le groupe est très présent dans les médias sociaux, comme WeChat en Chine, et on peut désormais acheter son billet Air France-KLM sur WhatsApp. J'ai découvert une équipe de recherche et développement rassemblant des personnes très brillantes qui travaillent sur l'intelligence artificielle. Cette équipe a développé en interne le système de revenue management Carmin, très performant, et a travaillé sur des outils de maintenance prédictive qui permet de déterminer, à partir d'informations envoyées par les avions, après combien d'heures de vol il faudra remplacer certaines pièces. Le travail au sein d'une équipe néerlando-française est particulièrement efficace dans ce domaine, car les ingénieurs et les mathématiciens français sont excellents, tandis que les Néerlandais sont plus innovants, ce qui donne de très bons résultats.

Monsieur Mandelli, nous développons des liaisons entre Nantes et d'autres villes étrangères. Le TGV affaiblit nos lignes aériennes s'il arrive à Montparnasse, mais pas à Roissy. Madame Cartron, le trafic aérien entre Paris et Bordeaux s'est réduit de 30%, passant de 14 à 10 vols vers Orly par jour. Si le trafic se réduit encore, nous ne pourrons maintenir ces 10 vols quotidiens, mais la ligne vers l'aéroport Charles-de-Gaulle, avec 6 vols par jour, n'est pas affectée car elle concerne surtout des vols en correspondance avec des longs-courriers. Sur la ligne Paris-Strasbourg, nous avions 16 liaisons quotidiennes, 12 vers Orly et 4 vers Charles-de-Gaulle. Désormais, nous n'en avons plus. Nous avions 35 vols par jour de Marseille à Orly, nous en avons désormais 14. Le trafic est important entre Bruxelles et l'aéroport Charles-de-Gaulle par le Thalys qui bénéficie aux vols long courrier. Nous essayons de développer nos vols vers l'étranger.

Monsieur Jacquin, il est difficile d'avoir une vision à long terme ; cela dépend à la fois de la demande et de l'offre. La demande augmentera dans plusieurs pays en croissance économique - Chine, Inde, Brésil - dont les habitants auront davantage envie ou besoin de voyager. Ces pays connaissent une augmentation impressionnante du nombre de voyageurs, tant dans leur zone géographique que pour les longs courriers. Tous leurs habitants souhaitent se rendre un jour en Europe ou à Paris... La croissance de l'offre dépend des constructeurs. Airbus et Boeing travaillent sur des avions électriques ou des avions dont la consommation énergétique est plus neutre. Cela prendra une dizaine d'années, en commençant par des avions hybrides, et des petits avions, avant de concerner les gros porteurs. À l'heure actuelle, il faudrait remplir un Boeing 787 ou un A 350 de batteries électriques pour réussir à les faire décoller.

Nous assistons également au retour des avions supersoniques, prônés par Elon Musk - qui développe aussi l'Hyperloop, moyen de déplacement par tube - et des drones téléguidés pourraient transporter des passagers sur des petites distances. Nous sommes à l'aune de bouleversements considérables qui modifieront profondément la situation d'ici 25 ans...

Madame Tocqueville, la sécurité relève de la responsabilité des autorités de l'État, au travers des forces de police présentes dans et autour des grands aéroports. Les agents des compagnies aériennes et des aéroports sont contrôlés par les gendarmes. Auparavant, nous risquions des prises d'otages classiques ; le 11 septembre 2001 a montré la possibilité d'attaques suicides. Désormais que les cockpits des avions sont fermés, le risque s'est déplacé dans les aéroports, comme l'a montré l'attentat de Bruxelles. Lorsque la sécurité est insuffisante, nous intervenons dans certains aéroports étrangers en recrutant des agents de sécurité privés pour un contrôle supplémentaire que nous maîtrisons - ce qui est parfois difficile à gérer avec les autorités locales.

Madame Préville, je comprends votre mécontentement et vous présente mes excuses au nom de la compagnie Hop. La compagnie est dans une situation compliquée : de nombreux pilotes sont partis vers Air France, rendant difficile l'organisation du planning. Hop a fusionné trois compagnies disparates avec des flottes d'avions différents : les pilotes ne sont parfois pas certifiés sur tous les avions... Les avions sont généralement positionnés sur les aéroports de province pour effectuer les premiers vols tôt à Paris, mais la maintenance est réalisée à Paris. Il n'y a pas de base de Hop en province. Certains avions fonctionnent très bien, d'autres moins. La direction générale de Hop a mis en place un plan industriel pour un meilleur suivi opérationnel des avions et forcer le constructeur à mettre davantage de moyens. Nous avons mis en place davantage d'équipes volantes pour résoudre les difficultés. Je vous le concède, cette situation est anormale. Sachez que les règles européennes imposent une compensation sur le prix du billet en cas de retard ou d'annulation qui n'est pas due à un phénomène climatique ; je regrette qu'on ne vous l'ait pas dit plus clairement...

Nous avons créé Joon pour des raisons économiques, afin d'avoir une meilleure structure de coûts et lutter plus efficacement contre nos concurrents. Nous aurions pu créer un Air France bleu, blanc ou rouge ou un Air France bis, mais avons procédé différemment pour des raisons sociales et après une enquête auprès de nos clients. L'image d'Air France n'est pas assez positive chez les jeunes adultes par rapport au reste de la population ; nous souhaitions modifier cette image. Le coût de cette compagnie est inférieur, l'image correspond davantage à la façon de vivre de la jeune génération. Nous y testons aussi de nouvelles idées de services, de prix, de marketing, comme l'application de téléchargement de films et séries que je vous citais, qui est très appréciée. Il n'y a désormais plus de repas gratuits sur les liaisons européennes. Nous innovons également en proposant des tarifs aller simple et non seulement aller-retour. Monsieur le président, rassurez-vous, il n'est pas interdit aux plus de 35 ans de voler avec Joon ; vous bénéficierez de leur accueil serviable et efficace.

M. Hervé Maurey, président. - Merci de vos réponses précises et complètes.

La réunion est close à 12 h 45.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.