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Chronologie des médias

Dernière mise à jour le 28 juillet 2017
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Jeudi 27 juillet 2017, Catherine MORIN-DESAILLY, présidente de la commission de la culture, a présenté, en présence de Jean-Pierre LELEUX, les conclusions de la commission relatives à la chronologie des médias.

Retour en 5 questions à la présidente de la commission de la culture sur la chronologie des médias

Cinq questions à Catherine MORIN-DESAILLY, présidente de la commission de la culture (27 juillet 2017)

 

Qu'est-ce que la "chronologie des médias" ?

 

La chronologie des médias est un modèle d’exploitation des oeuvres par les diffuseurs selon un calendrier correspondant au niveau d’investissement de chacun dans la création desdites oeuvres, chaque fenêtre de commercialisation disposant d’une durée d’exclusivité garantie, soit par la loi soit par accord professionnel étendu par arrêté.

Elle repose donc sur un principe de cohérence et de proportionnalité des différentes fenêtres d’exploitation par rapport au poids et aux obligations de chacun dans le préfinancement des oeuvres.

 

Pourquoi une réforme est-elle devenue nécessaire ?

 

Le fondement même de la chronologie des médias est menacé pour des raisons économiques, du fait de l’émergence de nouveaux acteurs et de l’évolution des pratiques. Les plateformes numériques (Netflix, Amazon, etc.) occupent une place désormais majeure sur le marché, sans pour certaines se plier ni aux règles de la chronologie des médias ni aux obligations de financement de la création. Dans le même temps, des acteurs traditionnels, à l’instar de Canal+, se trouvent en grande difficulté, alors même que les préachats, notamment des chaînes payantes, sont au coeur du financement des films. Conformément à ses obligations, Canal+ a préacheté 107 films en 2016 pour un total de 141,7 millions d’euros. Toutefois, cet investissement étant directement corrélé au chiffre d’affaires de la chaîne, dont il doit représenter 12,5 %, toute diminution de ce dernier entraîne mécaniquement un moindre transfert de valeur au bénéfice de l’industrie cinématographique.

Les chaînes de télévision en clair estiment, pour leur part, perdre de l’argent du fait d’un retour insuffisant sur leur investissement en faveur du cinéma.

 

Pourquoi l’intervention du Parlement pourrait être nécessaire ?

 

Les opérateurs de la filière cinématographique et les consommateurs désirent un accès plus rapide aux films. Pour autant, les échanges menés par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) n’ont pu aboutir compte tenu des exigences de certains acteurs, qui souhaitent améliorer leur position concurrentielle sans nécessairement accepter en retour des évolutions de leurs propres avantages.

Le Parlement, garant de l’intérêt général y compris dans le secteur de la création cinématographique, se doit de proposer des pistes d’évolution équilibrées, acceptables pour tous les acteurs et, en même temps, porteuses de perspectives pour les nouveaux usages.

Alors qu’un accord professionnel favorise le point de vue des différents acteurs de la filière, l’intervention du législateur, si elle se confirme, pourra privilégier des objectifs plus larges comme un meilleur accès aux oeuvres pour le public et la valorisation des nouveaux usages.

 

  La directive 97/36/CE du 30 juin 1997 prévoit que "la question des délais spécifiques à chaque type d’exploitation télévisée des œuvres cinématographiques doit, en premier lieu, faire l’objet d’accords entre les parties intéressées ou les milieux professionnels concernés". Ce principe de la priorité donnée à l’accord professionnel n'exclut-il pas l’intervention du législateur ?

 

La loi "Hadopi" du 12 juin 2009 est déjà intervenue pour fixer les délais applicables à la vidéo physique et à la vidéo à l’acte et, par voie de conséquence, le délai précédent applicable à la salle. La compétence est donc déjà partagée entre la loi et l’accord professionnel pour fixer les règles applicables à la chronologie des médias.
Ensuite, la priorité accordée à l’accord professionnel n’exclut pas l’intervention du législateur pour suppléer l’absence d’accord. À défaut, cela signifierait une impossibilité de modifier des règles dans le cas où les acteurs professionnels n’assumeraient pas leurs responsabilités.

La modernisation de la chronologie des médias pourrait donc s’appuyer sur une intervention du législateur afin, en particulier, d’inscrire dans la loi le principe d’une chronologie précoce pour les acteurs vertueux. Cette évolution permettrait d’encourager les acteurs établis en France qui contribuent à la création et de stimuler les nouveaux entrants. La loi pourrait ainsi prévoir de traiter différemment les acteurs vertueux respectant des critères déterminés. Ces critères et les contreparties seraient fixés dans un accord professionnel.

Les opérateurs de service de vidéo à la demande (VàD) par abonnement « vertueux » (ceux qui investissent dans la création à travers le préfinancement à un niveau significatif) pourraient bénéficier d’une fenêtre plus favorable que les 36 mois actuels.

Nous proposons qu’en l’absence d’accord professionnel d’ici le 31 décembre 2017, une disposition législative soit mise en chantier dès début 2018, soit à travers une proposition de loi, soit à l’occasion d’un projet de loi traitant de l’audiovisuel. La nécessité de transcrire la directive service des médias audiovisuels (SMA) en droit interne dès 2018 pourrait constituer une opportunité.

Nous considérons par ailleurs que la définition d’une fenêtre plus favorable que celle des 36 mois pour les opérateurs de VàD par abonnement doit être conditionnée à des engagements significatifs et pluriannuels de financement du cinéma français.

 

Quelles sont les autres propositions de la commission de la culture du Sénat ?

 

De façon générale, la commission de la culture du Sénat est convaincue que la modernisation de la chronologie des médias dépend également d’avancées sur des sujets connexes, en particulier la lutte contre le piratage. Ces dossiers intéressent notamment les diffuseurs en clair qui n’auraient pas intérêt sans cela à prêter leur concours à une telle réforme. Il apparaît d’autant plus aisé d’avancer sur ces sujets qu’ils sont attachés à une époque révolue au regard de l’évolution des usages.
Ces adaptations pourraient, en contrepartie d’une pérennisation des engagements dans le financement du cinéma, ouvrir de nouvelles possibilités :

  • pour les chaînes en clair exposer les films sur l’intégralité de l’offre (linéaire et télévision de rattrapage) ;
  • procéder à de multidiffusions ;
  • exposer les films les jours interdits ;
  • faire de la publicité pour le cinéma à la télévision ;
  • instaurer une 3e coupure publicitaire dans les films d’une durée égale ou supérieure à 1h45mn ;
  • mutualiser l’obligation de préfinancement du cinéma au niveau d’un groupe.

Dans le cadre de cette réforme globale que la commission appelle de ses vœux, il apparaît nécessaire d’ajuster plusieurs aspects de la chronologie des médias sans pour autant en remettre en cause les fondements :

L’adoption des "fenêtres glissantes"

Le principe des "fenêtres glissantes" permettrait, lorsqu’une œuvre n’a trouvé aucun diffuseur sur une fenêtre, que ceux qui interviennent sur la fenêtre suivante soient autorisés à anticiper leur exploitation. Une telle mesure serait favorable à une meilleure exploitation des œuvres, notamment celles, nombreuses, qui n’ont pas trouvé leur public en salle.

L’avancement de la fenêtre de la VàD

L’essentiel de l’exploitation en salle a lieu dans les deux premiers mois suivant la sortie du film. Il n’y aurait donc guère de préjudice à avancer à trois mois la fenêtre de la VàD à l’acte (location et achat), afin de permettre une continuité dans l’accès aux œuvres et de valoriser par d’autres biais celles qui n’auraient pas eu en salle le succès escompté. En outre, un accès en VàD à trois mois pourrait favoriser l’offre légale, alors le piratage atteint des proportions considérables sur cette fenêtre.

Le dégel de la VàD pendant les fenêtres de télévision

Le dégel de la fenêtre VàD permettrait d’allonger la durée de disposition des films sur les plateformes pour les spectateurs et de favoriser là encore les offres légales. La VàD retrouverait ainsi la situation des films en location en vidéoclubs qui restaient disponibles pendant la fenêtre d’exploitation des chaînes de télévision.

L’avancement de quatre mois de la fenêtre de diffusion des films sur la télévision payante
L’avancement de la diffusion des films à six mois après leur sortie en salle (au lieu de dix mois) doit permettre de mieux répondre aux attentes des spectateurs, de lutter contre le piratage et de valoriser les acteurs qui investissent le plus dans le financement du cinéma.

La définition d’une fenêtre plus favorable pour les plateformes de VàD par abonnement "vertueuses "

La détermination de la fenêtre dont pourraient bénéficier les plateformes "vertueuses" doit dépendre de la nature des engagements pris. Toutefois, on ne peut exclure que les acteurs qui contribueraient autant que les chaînes payantes au financement des œuvres se voient reconnaître des conditions comparables pour leur exploitation.

Conférence de presse (27 juillet 2017)

 

Jeudi 27 juillet 2017, Catherine MORIN-DESAILLY, présidente de la commission de la culture, a présenté, en présence de Jean-Pierre LELEUX, les conclusions de la commission relatives à la chronologie des médias.

 

Les transformations du monde numérique viennent bousculer les règles de la chronologie des médias demeurées inchangées depuis 2009. Il convient aujourd’hui de définir les voies d’évolution de ce système vertueux, en préservant le principe selon lequel ceux qui investissent le plus dans les œuvres doivent pouvoir être favorisés dans l’exposition des œuvres. Les recommandations de la commission qui seront présentées visent à construire une réforme à la fois globale et équilibrée qui pourra s’appuyer sur des dispositions législatives déclinées à travers un accord professionnel.

  Comprendre les enjeux

 

La chronologie des médias fut un sujet de discussions approfondies lors d’un déplacement d’une délégation de sénateurs, conduite par Catherine MORIN DESAILLY (UC - Seine Maritime), présidente de la commission de la culture, au Festival de Cannes,.

Dans un contexte où la multiplicité des supports nécessite d’assurer aux œuvres une visibilité adaptée à chacun d’entre eux et où la fragilisation économique des chaînes de télévision oblige à réfléchir à l’intégration de nouveaux acteurs dans le système français de financement de la création, Catherine MORIN-DESAILLY souligne combien "la chronologie des médias, telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, ne correspond plus à la réalité des usages". Elle estime que "son évolution constitue une nécessité absolue, un véritable devoir collectif, pour le maintien d’un cinéma français créatif, ambitieux et largement diffusé".

 

Au cours de la table ronde sur la chronologie des médias organisée par la commission de la culture du Sénat, les professionnels ont  réfléchi ensemble aux évolutions à mettre en œuvre et aux mesures à adopter parallèlement, notamment en matière de lutte contre le piratage, sujet dont la commission de la culture s’était déjà saisie en 2013 lors d’un travail de prospective sur la Hadopi.

Les travaux de la commission de la culture (juillet 2017)

 

Audition des producteurs, créateurs, exploitants et distributeurs (12 juillet 2017)

- Ouverture par Christophe TARDIEU, secrétaire général du centre national du cinéma et de l'image animée (CNC)

- Audition conjointe des producteurs, créateurs, exploitants et distributeurs, en présence d

- Hortense DE LABRIFFE, secrétaire générale de l'Association des producteurs indépendants (API) ;
- Isabelle MADELAINE, vice-présidente, et Frédéric GOLDSMITH, délégué général, de l'Union des producteurs de cinéma (UPC) ;
- Nicolas MAZARS, responsable juridique de l'audiovisuel et de l'action professionnelle de la Société civile des auteurs multimédia (SCAM) ;
- Radu MIHAILEANU, réalisateur, membre de la Société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs (ARP) ;
- Richard PATRY, président, et Marc-Olivier SEBBAG, délégué général, de la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) ;
- Guillaume PRIEUR, chargé des relations institutionnelles de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) ;
- Céline SCIAMMA, réalisatrice et coprésidente de la Société des réalisateurs de films (SRF) ;
- Carole SCOTTA, coprésidente des Distributeurs indépendant réunis européens (DIRE) ;
- Cyril SMET, délégué cinéma, et Gilles SACUTO, président du collège long métrage, producteur, membres du Syndicat des producteurs indépendants (SPI) ;
- Julie LORIMY, Secrétaire générale de la Fédération Nationale des Distributeurs de Films (FNDF).

 

Audition des télévisions gratuites (12 juillet 2017)

Audition conjointe des télévisions gratuites, en présence de :

- Karine BLOUËT, secrétaire générale de M6 ;
- Jean-Michel COUNILLON, secrétaire général de TF1 ;
- Xavier COUTURE, directeur général délégué de France TV ;
- Agnès LANOË, directrice de la Prospective et de la Stratégie d'Arte.

 

Audition des télévisions payantes (12 juillet 2017)

Audition conjointe des télévisions payantes, en présence de :

- David KESSLER, directeur général Orange Studio, Bernard TANI, directeur éditions VOD et Pierre PÉTILLAUT, directeur adjoint affaires publiques d’Orange ;
- Maxime SAADA, directeur général de Canal + ;
- Régis TURRINI, secrétaire général d’Altice.

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