Le groupe d’amitié France-Croatie s’est réuni le jeudi 8 mars 2018, sous la présidence de M. Yves Daudigny, pour entendre Son Exc. M. Filip Vucak, Ambassadeur de Croatie en France qui était accompagné de Mmes Anita Trsic, ministre plénipotentiaire, de Mme Lidija Vizek Mrzjak, ministre conseiller chargée des affaires culturelles, de la communication, de l’éducation, de la diaspora croate et de la Francophonie, et de Mme Barbara Majer, première secrétaire chargée des affaires économiques et de l’OCDE.

Outre M. Yves Daudigny, Président, ont participé à cette réunion M. Olivier Cadic, Mme Elisabeth Doineau, M. François Grosdidier, Mme Valérie Létard, MM. Jean-Yves Leconte, Rachel Mazuir, Pierre Ouzoulias, et Mme Patricia Schillinger, membres du groupe d’amitié.

M. Yves Daudigny, a souhaité la bienvenue à M. Filip Vucak et à ses collaboratrices et s’est réjoui de la tenue de cette réunion qui permettait au groupe d’amitié, au lendemain d’un renouvellement important, de reprendre contact avec l’ambassade de Croatie.

M. Filip Vucak a expliqué qu’il avait déjà été en poste à Paris, il y a une vingtaine d’années, et qu’il avait eu l’occasion de rencontrer M. Robert Badinter qui avait été reçu docteur honoris causa de l’université de Zagreb.

Il a estimé que la Croatie, qui appartenait maintenant depuis cinq ans à l’Union européenne, et qui en assurerait la présidence au premier semestre 2020, « se portait bien ». Il a insisté sur la dimension francophone du gouvernement actuel. Il a estimé que la Croatie bénéficiait, au plan politique, d’une situation stable, même si le gouvernement actuel était un gouvernement de coalition, et ne disposait que d’une assez courte majorité.

Sur le plan économique, il a indiqué que la situation s’était maintenant stabilisée avec une croissance de 3 % tirée par le tourisme qui représente 80 % de son PIB : la Croatie accueille chaque année 18 millions de touristes dont 600 000 français.

Il a indiqué que les relations qu’entretenait la Croatie avec ses voisins était importantes : la Slovénie et la Croatie sont déjà membres de l’Union européenne, et six autres pays des Balkans sont candidats à l’entrée dans l’UE : la Serbie, qui est le pays le plus important de la région ; le Monténégro, qui est déjà membre de l’OTAN ; la Bosnie-Herzégovine, grand pays mais peu stable et dont la population compte entre 10 et 12 % de Croates ; et le Kosovo. La Macédoine n’a pour l’instant pas entamé de négociation d’adhésion à l’Union européenne, du fait d’un différend qui l’oppose à la Grèce sur sa dénomination officielle.

Il a indiqué que la Croatie était confrontée au problème de l’arrivée de combattants qui reviennent de Syrie. Elle surveille attentivement les 1 000 km de frontière avec la Bosnie. La perspective d’intégrer la zone Schengen dans un horizon de cinq ans est importante pour elle. Sa sécurité intérieure est un aspect particulièrement  sensible pour le secteur du tourisme.

M. Filip Vucak s’est ensuite réjoui que les relations avec la France soient beaucoup plus simples et cordiales qu’elles ne l’étaient il y a vingt ans. Evoquant un projet de visite officielle du Président Emmanuel Macron, il a indiqué qu’il s’agirait du premier déplacement  effectué par un Président de la République française en Croatie. Il s’est félicité de la prochaine venue à Zagreb de Mme Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes.

Evoquant la communauté croate en France, il l’a évaluée à environ 20 000 personnes, dont la moitié vit en Ile-de France ; ils sont bien intégrés tout en restant attachés à la pratique de leur langue.

En réponse à une question de M. Olivier Cadic, il a précisé que la Croatie apportait son soutien à l’adhésion à l’Union européenne de la Serbie, et  également à celle des autres pays des Balkans. La Croatie a assuré la traduction d’environ 20 000 pages de réglementation européenne qu’elle a bénévolement mis à disposition des autres pays de la région. Selon lui, le passé n’est pas oublié, mais on s’efforce de le surmonter. Les relations entre les deux pays ne peuvent être qualifiées d’amicales mais plutôt « de bon voisinage ». Et la Croatie considère qu’il vaut mieux pour elle avoir la Serbie dans l’Union européenne qu’en dehors, car cela contribuera à « rapprocher les standards » et à stabiliser la région.

A M. Jean-Yves Leconte qui l’interrogeait sur les difficultés de l’entreprise Agrokor, la principale entreprise du pays, et les conséquences des règles européennes qui encadrent strictement les aides qu’un Etat peut apporter à une entreprise, M. Filip Vukac a précisé que Agrokor était en effet un consortium qui employait quelques 60 000 salariés, et que le gouvernement, qui travaillait sur ce dossier en étroit contact avec les autorités de Bruxelles devait en effet trouver une solution avant le 15 juillet pour éviter une faillite qui aurait de très graves conséquences sociales.

Il a indiqué à M. François Grosdidier qui s’inquiétait de la stabilité de la Bosnie-Herzégovine, et de sa vulnérabilité face à des phénomènes de radicalisation, que la Croatie suivait très attentivement l’évolution de la situation dans ce pays voisin ; il a rappelé que la population de cet Etat, de plus de quatre millions d’habitants avant la guerre, était tombée à 3,5 millions, une diminution qui résultait en grande partie du départ des populations croates ; la République Srpska représente la moitié de son territoire ; le pays, qui a peu progressé, est touché par une forte émigration. Quoique très sécularisée, la Bosnie-Herzégovine a évolué et Sarajevo n’est plus la ville multiculturelle qu’elle était avant la guerre. Beaucoup de mosquées s’y sont également construites.

M. Filip Vucak et Mme Lidija Vizek Mrzjak ont rappelé à Mme Elisabeth Doineau qui souhaitait savoir où en était l’égalité entre les femmes et les hommes, que le 8 mai était pratiquement considéré comme une fête nationale dans l’ancienne Yougoslavie ; mais cet héritage communiste n’était pas nécessairement bien perçu et pouvait alimenter des réactions de rejet. Même si les stéréotypes restent forts, les femmes croates jouissent cependant d’une grande liberté.

M. Filip Vukac a indiqué à M. Yves Daudigny qui l’interrogeait sur la perception qu’ont les croates de l’idée européenne, que celle-ci restait très largement marquée par une adhésion globale, même si la Croatie n’avait pas tiré de son adhésion des bénéfices aussi importants que l’Espagne ou le Portugal. Les tendances populistes et l’extrême droite y restaient faibles.

Enfin , il a précisé à M. Rachel Mazuir que la Croatie comportait une petite minorité albanaise et que les réunions trilatérales avec le Monténégro et l’Albanie étaient inspirées par un souci commun de stabilisation.

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