Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001

LUNDI 20 NOVEMBRE 2000

- La commission a d'abord procédé à la nomination de son bureau qui a été ainsi constitué :

M. Jean Le Garrec, président ;

M. Jean Delaneau, vice-président.

La commission a ensuite désigné :

M. Alfred Recours, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;

M. Charles Descours, rapporteur pour le Sénat.

La commission mixte a ensuite procédé à l'examen du texte.

M. Charles Descours, rapporteur pour le Sénat, a indiqué que, saisi de soixante articles, le Sénat a adopté une position conforme à celle de l'Assemblée nationale sur dix-neuf d'entre eux. Par ailleurs, il a modifié seize articles sans en remettre en cause l'économie générale, notamment l'article 26, enrichi par un amendement du groupe socialiste du Sénat, ou l'article 42, relatif aux victimes de l'amiante. Huit articles ont été amendés d'une manière plus importante. Enfin, ont été introduits dix articles nouveaux, en " contrepartie " de la suppression de dix-sept articles. Le Sénat appelle l'attention de l'Assemblée nationale sur l'un de ces articles, l'article 20 : il s'est en effet rendu compte in extremis que la CNIL n'avait pas donné un avis favorable au répertoire national des retraites et pensions, contrairement à ce qui était affirmé dans l'exposé des motifs de cet article. Des " cavaliers sociaux ", comme l'abrogation de la " loi Thomas ", font également partie de ces dix-sept articles supprimés, évitant ainsi au Conseil constitutionnel une surcharge de travail...

Dire que le Sénat a " taillé en pièces " le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 est ainsi exagéré. Certes, il s'est opposé à quatre mesures principales. Mais trois de ces quatre mesures n'auraient pas dû se trouver dans un projet de loi de financement.

La première est la réduction dégressive de CSG, mesure fiscale imposée au ministère de l'emploi et de la solidarité par le ministère de l'économie et des finances. La remise en cause de l'universalité du financement de la protection sociale apparaît particulièrement dangereuse. Ce prélèvement social ne peut être l'instrument d'une politique fiscale. Le dispositif gouvernemental pose en outre un certain nombre de problèmes de constitutionnalité, auxquels les députés ont eux-mêmes été attentifs. Le Sénat propose un mécanisme alternatif de crédit d'impôt, qui trouve toute sa place en loi de finances.

Le financement de la réduction du temps de travail par les organismes de sécurité sociale, ce que le Sénat a appelé " les tuyauteries " du projet de loi, constitue le second point de désaccord. Il faut être tout à fait clair à ce sujet : il serait faux de dire que le Sénat refuse une deuxième fois la loi relative à la réduction du temps de travail. La loi du 19 janvier 2000 est désormais une loi de la République. Le Sénat s'oppose simplement au financement de cette loi par les excédents de la branche famille et du fonds de solidaritévieillesse. Le financement des trente-cinq heures, qui relève de la politique de l'emploi, doit être inscrit en loi de finances, sous forme d'une dotation budgétaire compensant intégralement, aux organismes de sécurité sociale, les pertes de recettes liées aux exonérations de charges sociales. Le financement des trente-cinq heures par un établissement public qui n'existe toujours pas, le FOREC, permet en revanche au ministère des finances, par tout un mécanisme de tuyaux patiemment démonté, de faire participer les organismes de sécurité sociale à hauteur de 18,6 milliards de francs. Le Sénat n'est pas convaincu par la " réforme de l'assiette des cotisations patronales ", consistant à affecter à un fonds six taxes différentes. Une partie de la majorité plurielle semble d'ailleurs partager ce constat.

Le troisième point de désaccord concerne le financement de la dette sociale. L'Etat doit compenser à la CADES les exonérations de dette sociale. Si la CADES a vraiment deux ans d'avance, il est souhaitable qu'elle termine ses opérations... avec deux ans d'avance. Décider d'exonérations sans compensation revient à reporter sur les générations futures, une nouvelle fois, la charge de financer demain les générosités d'aujourd'hui.

Le quatrième point de désaccord concerne, cette fois, un élément central de la loi de financement : l'ONDAM. Le Sénat a refusé de le voter. Cette décision grave a été prise en pleine connaissance de cause, en raison de deux éléments :

- premièrement, l'ONDAM, depuis quatre ans, est toujours cruellement dépourvu de tout contenu en santé publique. Ce point recueille d'ailleurs vraisemblablement le consensus ;

- deuxièmement, cet ONDAM n'est même pas comptable : une fois voté, il "  vit sa vie ", ce qui lui fait perdre une grande partie de sa crédibilité. Il convient de rappeler que le Gouvernement a modifié de lui-même l'ONDAM par le "  plan hôpital " du mois de mars. Or, le Parlement ne vote pas une prévision, mais un objectif.

Au total, si la loi de financement pour 2001 était une vraie loi de financement, débarrassée de la tuyauterie des trente-cinq heures et de son dispositif fiscal qui, l'une et l'autre, portent atteinte au financement de la protection sociale, débarrassée en outre de ses cavaliers sociaux, on s'apercevrait que reste un débat, mais un débat central, qui est celui de la maîtrise des dépenses de santé et de la façon dont le Parlement doit intervenir dans ce domaine. Ce point est une vraie question qui transcende largement les clivages " politiciens ". Aussi le Sénat regrette-t-il vivement de n'avoir pu débattre correctement de notre protection sociale.

Il faut entamer une véritable réflexion sur les lois de financement de la sécurité sociale, qui débouche sur une réforme de la loi organique de 1996. Un certain nombre de députés de la majorité partagent ce sentiment. Il est également nécessaire de simplifier les circuits de financement de la protection sociale, comme en atteste le très intéressant tableau remis par le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale à la ministre de l'emploi et de la solidarité. Il ne faut pas attendre quarante ans pour modifier la loi organique du 22 juillet 1996. L'expérience de cinq lois de financement permet désormais de préciser les contours de la réforme essentielle souhaitée par la précédente majorité.

M. Alfred Recours, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a salué le travail important réalisé par le Sénat, qui a certes supprimé dix-sept articles mais en a aussi ajouté dix nouveaux, parfois techniques et astucieux. Des aménagements pour la fiscalité agricole méritent sans doute d'être repris, à tout le moins discutés.

Mais il y a trois points de désaccords fondamentaux sur les recettes :

- Le Sénat a refusé de mettre en place une réduction dégressive de CSG. L'argumentation sur la non-prise en compte de la situation familiale pour calculer cette réduction dégressive n'est pas faux, mais il est inhérent à la CSG. Le Conseil constitutionnel a déjà donné un brevet de constitutionnalité à la CSG qui, en elle-même et avant toute réduction, est un impôt cédulaire ne prenant pas en compte le foyer fiscal. Le mécanisme de crédit d'impôt que propose le Sénat en remplacement n'est pas plus équitable, car il ne concerne que les personnes imposables. Plutôt que de supprimer une baisse d'impôt au motif qu'elle ne serait pas applicable, l'Assemblée nationale a préféré, de manière plus constructive, faire bénéficier de cette mesure le plus de personnes possibles (ministres du culte, chauffeurs de taxis, concierges, pluriactifs agricoles,...) ;

- Le Sénat a supprimé le financement du FOREC pour 2001, au motif que ce " monstre " sucerait le sang financier de la sécurité sociale pour payer les 35 heures. Au demeurant, le Sénat n'a pas supprimé le FOREC, mais seulement ses ressources pour 2001 : le résultat du travail du Sénat, c'est donc que les exonérations de cotisations ne seraient pas compensées à la sécurité sociale, ce qui ne constituerait pas un bel exemple de bonne gestion financière. Il est faux de dire que le FOREC finance les 35 heures ; le FOREC reverse à la sécurité sociale tout ce qu'il reçoit : 42 % à la branche maladie, 8 % aux accidents du travail, 30 % à la branche vieillesse et 20 % à la branche famille. Sur les 85 milliards de francs de dépenses du FOREC, 41 milliards sont liés à la ristourne Juppé et seulement 30 milliards concernent les aides aux 35 heures ;

- Le Sénat a décidé de retirer 18,5 milliards de francs en 2001 et 102 milliards de francs à terme en 2020 au fonds de réserve pour les retraites, car il est opposé à l'affectation à la sécurité sociale des recettes provenant de la vente des licences de téléphonie mobile de troisième génération (UMTS). Ce faisant, il atteste de son manque d'empressement à défendre le système des retraites par répartition et ne prépare pas un bel avenir aux générations futures. A ce titre, la suppression de la " loi Thomas " n'est pas un cavalier social, car sa mise en oeuvre obérerait les recettes de la sécurité sociale. Il s'agit là d'une économie potentielle.

Enfin, le Sénat a tout simplement décidé de supprimer l'ONDAM. Ce faisant, non seulement il a oublié de minorer à due concurrence l'objectif de dépenses de la branche maladie, mais il a rendu la loi de financement pour 2001 inconstitutionnelle, car elle ne comporte plus une disposition obligatoire en vertu de la loi organique de 1996. Là encore, plutôt que de chercher à dépenser mieux ce qui est utile à la santé des Français, le Sénat dit qu'il est possible de dépenser sans compter, sans maîtriser les dépenses de santé. La majorité sénatoriale refuse de discuter de l'assurance maladie dans le cadre qu'elle a elle-même voulu, elle refuse le rebasage de l'ONDAM voulu par l'ensemble de la profession, elle ne considère pas qu'un taux de croissance de 3,5 % pour l'ONDAM en 2001 est un bon taux qui ouvre des marges de manoeuvre significatives.

Il ne paraît donc pas possible de poursuivre la discussion sur des positions absolument incompatibles.

M. Jean Le Garrec, président, s'est félicité du souci de clarté des deux rapporteurs dans leurs exposés, qui ont permis de souligner les points-clés du projet de loi de financement et d'éclairer l'incompatibilité des positions de chaque assemblée. Une divergence fondamentale concerne bien évidemment l'article 2, que le Sénat a décidé de supprimer. En revanche, les remarques formulées sur l'article 20 sont tout à fait justifiées : une réflexion devra indiscutablement s'engager sur cette question.

A plus long terme, un travail de refonte de la loi organique de 1996 va devoir être entrepris, car la procédure mise en place par ce texte, novatrice en son temps, n'est plus aujourd'hui adaptée à l'ampleur des débats.

M. Charles Descours, rapporteur pour le Sénat, a formulé plusieurs observations :

- En ce qui concerne le crédit d'impôt, le Sénat n'est pas en retrait pour en faire bénéficier les revenus modiques. Ceux qui ne paient pas d'impôt recevront un chèque.

- Le Sénat a préféré assurer l'équilibre financier du FOREC par un relèvement des cotisations effectives, c'est-à-dire un financement des exonérations par le budget de l'Etat.

- L'abrogation de la " loi Thomas " n'est pas une disposition essentielle du projet de loi de financement et il reviendra au Conseil constitutionnel de se prononcer sur son caractère de cavalier social. Il convient de rappeler que, lors de l'adoption, par le Sénat, d'une proposition de loi relative aux fonds de pension - ce qui souligne l'intérêt que le Sénat porte à cette question - l'application de la " loi Thomas " avait été écartée et le financement des retraites par répartition, garanti.

On ne peut laisser dire que le Sénat n'est pas attaché aux retraites par répartition qui constituent les deux premiers étages indispensables de notre système de retraite. La meilleure preuve en est que le Sénat a approuvé, il y a deux ans, le principe de la création d'un fonds de réserve. Par contre, l'alimentation financière de ce fonds doit procéder d'une certaine logique et l'on doit reconnaître que le lien entre le produit de la vente des licences de téléphonie mobile de troisième génération et les retraites n'est pas très évident. C'est pourquoi le Sénat a préféré affecter au fonds de réserve les excédents du FSV et de la branche famille.

- Si le Sénat a choisi de supprimer l'ONDAM, c'est parce que celui-ci, loin d'être intangible comme l'on voudrait le faire croire, a été régulièrement modifié par le Gouvernement depuis deux ans. De plus, son évaluation pour 2001, après un rebasage que le rapporteur pour l'Assemblée nationale présente comme étant conforme aux souhaits des professionnels de santé, semble néanmoins ne pas faire l'unanimité si l'on en croit la journée " santé morte " décidée pour le premier jour du débat de ce texte à l'Assemblée nationale.

M. Alfred Recours, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a fait les remarques suivantes :

- On peut tout à fait comprendre que le Sénat considère que le produit de la vente des licences de téléphonie mobile de troisième génération n'a pas vocation à financer le fonds de réserve. Tout le problème réside dans le fait que la ressource qu'il propose en substitution est insuffisante. Lorsqu'une opportunité de ressource publique exceptionnelle se présente, il n'y a rien de choquant à ce qu'elle puisse profiter aux retraites.

- Au sujet de l'ONDAM, que celui-ci soit rebasé puis augmenté d'un certain taux de croissance ou, à l'inverse, d'abord accru par ce taux de croissance puis à nouveau augmenté pour tenir compte de l'accroissement des prescriptions, revient en réalité au même. Il ne faut donc pas s'arrêter à de simples présentations comptables. Tout l'intérêt du rebasage est de permettre de prendre en compte, lors du débat au Parlement, l'évolution des prescriptions constatées de l'année en cours, quels que soient les prescripteurs. Dans ce cas, la définition de l'ONDAM ne relève pas de la maîtrise comptable, mais bien d'une démarche réaliste et prospective. On peut regretter que la ventilation de la masse globale des dépenses de santé et la définition de leur taux de croissance échappent ensuite au Parlement, mais cela est un autre problème.

- La stabilité du taux de croissance des dépenses de santé - celui-ci s'est maintenu à 9,5 du PIB entre 1995 et 1999 - permet d'écarter les critiques régulièrement faites à la France, soit de vouloir mettre en oeuvre une maîtrise comptable des dépenses, soit d'être trop laxiste en la matière. Si l'on compare par exemple notre situation avec celle de l'Allemagne, où les dépenses de santé sont passées de 10,4 % du PIB en 1995 à 10,7 % en 1997, on peut dire que la ligne suivie par les majorités qui se sont succédé depuis cinq ans a non seulement rendu possible une maîtrise de la croissance des dépenses, mais également permis de faire profiter la politique de santé publique des fruits de la croissance économique.

M. Jean Delaneau, vice-président, a souligné que le Sénat considérait que les ressources du fonds de réserve des retraites ne devaient pas provenir de recettes exceptionnelles, trop aléatoires. Il convient de définir au contraire un mode d'alimentation pérenne. Les revenus exceptionnels de l'Etat ont plutôt vocation à contribuer à la diminution de la dette publique.

M. Jean Le Garrec, président, est revenu sur la nécessité de trouver un équilibre pour l'évolution des dépenses de santé entre une trop grande rigueur et un trop grand laxisme. Cette position sur la " ligne de crête " est délicate à tenir, car susceptible de faire l'objet de critiques des deux côtés.

En ce qui concerne le fonds de réserve, il semble difficile qu'à prélèvements constants, une alimentation pérenne suffise à couvrir ses charges ; des revenus extraordinaires sont donc les bienvenus.

M. Jean Delaneau, vice-président, a observé que cette difficulté à assurer l'alimentation du fonds de réserve dans l'avenir prêchait pour une meilleure coordination, tout au moins en ce qui concerne leur examen par le Parlement, du budget de l'Etat et de celui de la sécurité sociale.

M. Jean Le Garrec, président, a estimé que le rapprochement entre les budgets de l'Etat et de la sécurité sociale recelait de nombreux risques et la révision de la loi organique de 1996 devrait être l'occasion d'insister sur les différences existant entre ces deux systèmes de financement.

La commission mixte paritaire est ensuite passée à l'examen des articles restant en discussion.

Sur proposition du président Jean Le Garrec et avec l'accord de M. Jean Delaneau, vice-président, elle s'est prononcée d'abord sur l'article 2 (Réduction de la CSG et de la CRDS sur les revenus d'activité) dans le texte de l'Assemblée nationale, supprimé par le Sénat, et l'a rejeté par six voix contre six.

M. Jean Le Garrec, président, a alors constaté que la commission mixte paritaire n'était pas en mesure d'adopter un texte commun sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence

LUNDI 20 NOVEMBRE 2000

- La commission a d'abord procédé à la nomination de son bureau qui a été ainsi constitué :

M. Jean Le Garrec, président ;

M. Jean Delaneau, vice-président.

La commission a ensuite désigné :

Mme Hélène Mignon, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;

M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat.

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen du texte.

M. Jean Le Garrec, président, après avoir salué le travail accompli par les deux assemblées lors de la discussion de la proposition de loi, a exprimé le souhait d'aboutir à un accord.

M. Jean Delaneau, vice-président, a observé que sur ce texte, qui porte sur un sujet transcendant les divergences politiques, il serait effectivement souhaitable que la commission mixte paritaire puisse aboutir.

M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat, a indiqué que lors de l'examen de cette proposition de loi en première lecture, le 31 octobre, le Sénat a apporté un certain nombre de modifications à l'article 1er et a introduit un article additionnel.

S'agissant de l'article premier, le Sénat a adopté une nouvelle rédaction du deuxième alinéa du texte proposé pour compléter l'article L. 5134-1 du code de la santé publique. Le Sénat a en effet souhaité préciser que la dérogation au principe du consentement parental ne pouvait se justifier que par un impératif essentiel : préserver les mineures d'une grossesse non désirée et donc d'une interruption volontaire de grossesse.

Afin que la question du coût de ce contraceptif d'urgence ne soit pas un obstacle pour certaines jeunes filles issues de milieux défavorisés, le Sénat a complété cet alinéa par une disposition prévoyant que la délivrance en pharmacie de ces contraceptifs aux mineures s'effectuerait à titre gratuit dans des conditions fixées par voie réglementaire. Cette disposition facilitera l'accès des mineures à la contraception d'urgence, notamment pendant les vacances scolaires.

Le Sénat a également souhaité consacrer un alinéa spécifique à la possibilité offerte aux infirmières scolaires d'administrer aux élèves une contraception d'urgence. Il a ainsi a voulu, d'une part, rappeler les principes qui doivent guider les infirmières dans leur action, d'autre part, définir de manière plus précise la procédure d'administration du Norlevo aux élèves. Le texte adopté par le Sénat reprend ainsi fidèlement certaines des formulations retenues par la circulaire du 29 décembre 1999.

Cette procédure doit être réservée aux cas d'urgence et de détresse caractérisée. L'administration d'une contraception d'urgence aux élèves ne peut qu'être exceptionnelle. Le Sénat a souhaité ainsi rappeler que la contraception d'urgence ne saurait en aucun cas être un substitut à une contraception régulière et responsable et que son usage ne saurait être banalisé.

En ce qui concerne la procédure proprement dite, le texte adopté par le Sénat précise que l'infirmière scolaire, confrontée à une demande de Norlevo, doit s'efforcer en premier lieu d'orienter l'élève vers un médecin ou un centre de planification ou d'éducation familiale. Si un médecin ou un centre de planification familiale n'est pas immédiatement accessible, l'infirmière scolaire peut - compte tenu de l'urgence et si elle estime qu'il s'agit d'une situation de détresse caractérisée - administrer à l'élève majeure ou mineure une contraception d'urgence.

Le texte adopté par le Sénat prévoit le nécessaire suivi des élèves à qui l'on administre le Norlevo : l'infirmière scolaire doit ainsi informer a posteriori le médecin scolaire des décisions qu'elle a prises, s'assurer de l'accompagnement psychologique de l'élève et veiller à la mise en oeuvre d'un suivi médical par un médecin généraliste ou spécialiste ou par un centre de planification familiale.

Le Sénat a également adopté un article additionnel - l'article 2 - qui prévoit que le Gouvernement présentera au Parlement, avant le 31 décembre 2002, un rapport dressant le bilan de l'application de la disposition autorisant les infirmières scolaires à administrer une contraception d'urgence aux élèves mineures et majeures ainsi que de la délivrance à titre gratuit, dans les pharmacie, d'une contraception d'urgence aux mineures.

M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat, a estimé que sur le fond, rien ne sépare véritablement les deux assemblées. Un accord quant à la rédaction de cette proposition de loi est donc tout à fait réalisable.

Mme Hélène Mignon, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a d'abord rappelé le vote unanime par lequel cette proposition de loi a été adoptée à l'Assemblée nationale qui traduit bien le sentiment partagé que la pilule du lendemain sera toujours préférable à l'IVG pour une jeune fille. Dans une société qui évolue, le rôle du législateur est de protéger le mieux possible les jeunes en difficulté. Pour cela une éducation à la sexualité, ouverte à tous et intégrée efficacement au cursus scolaire, est impérative.

Le Sénat a adopté ce qui constitue le coeur de ce texte, c'est-à-dire la reconnaissance du droit à l'accès à une contraception d'urgence.

Il a ensuite soulevé la question de l'accès à celle-ci pendant les vacances scolaires à laquelle l'Assemblée, consciente de la difficulté, n'avait cependant pas apporté de réponse.

La délivrance gratuite de la contraception d'urgence en officine qui a été adoptée par le Sénat mérite d'être bien encadrée par le rappel du rôle de conseil du pharmacien et par la définition de la période pendant laquelle cette délivrance sera possible, les vacances scolaires ou bien toute l'année.

La contraception d'urgence doit rester d'un usage exceptionnel. Pour autant, il n'apparaît pas indispensable de rappeler, dans la loi, les termes du protocole national sur l'organisation des soins et des urgences en milieu scolaire. De même, il apparaît difficile d'inscrire dans la loi la notion de " détresse caractérisée ", dont la définition n'est pas aisée. La référence aux cas d'urgence devrait être suffisante.

Enfin, la nécessité pour l'infirmière d'informer le médecin scolaire de la délivrance de la conception d'urgence à une élève, introduite par le Sénat, pose un problème délicat. Les infirmières sont aptes à remplir la mission qui leur est confiée et sont prêtes à assumer leurs responsabilités. C'est seulement lorsque des problèmes graves se posent que le médecin doit être amené à intervenir. Les infirmières scolaires ont un rôle à jouer, au sein de l'équipe médicale, mais ce rôle est essentiel.

M. Jean Le Garrec, président, a observé que comme les deux rapporteurs l'ont souligné, il s'agit bien d'ouvrir l'accès à la contraception d'urgence sans aucunement en faire un usage banalisé. A cette fin, une information sur la sexualité doit être organisée dans le cadre scolaire et de façon efficace.

Le Sénat a recherché une réponse à la délivrance de cette contraception pendant les vacances scolaires en préconisant sa gratuité. Ce principe suppose un encadrement, au moyen d'une convention qui devrait être passée entre l'Etat et les pharmaciens, afin justement d'éviter la banalisation de l'usage de la contraception d'urgence.

La commission mixte est ensuite passée à l'examen des articles restant en discussion.

A l'article premier (article 5134-1 du code de la santé publique) (Délivrance de la contraception d'urgence), M. Jean le Garrec, président, a indiqué que, sur cet article, il restait à résoudre les deux différends existant entre les deux assemblées : le maintien ou non de la " détresse caractérisée " et plus fondamentalement l'information, par l'infirmier scolaire, de la délivrance de la contraception d'urgence au médecin scolaire.

M. Jean Delaneau, vice-président, a observé que le problème de la définition de la " détresse caractérisée " se pose de la même façon en matière d'IVG car les textes qui en traitent se réfèrent aussi à cette notion et que la difficulté provient de ce qu'elle repose sur une appréciation subjective. Cependant cette formulation a son importance car elle permet de recueillir, sur ce texte, un accord le plus large possible.

M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat, a rappelé que cette notion figurait à plusieurs reprises dans la lettre de Mme Ségolène Royal, dans la circulaire de l'éducation nationale, dans les fiches pour les infirmières et enfin dans la loi Veil. Il peut donc y être fait référence.

Mme Hélène Mignon, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a indiqué que sa mention dans le protocole n'était pas gênante à la différence de son inscription dans la loi. Toutefois, elle a précisé que cela ne saurait être un point de blocage.

M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat, a regretté qu'il soit difficile de faire admettre à l'éducation nationale que l'information sur la contraception relève de sa mission.

La disposition introduite par le Sénat sur l'information du médecin scolaire par les infirmières scolaires ne remet pas en cause la compétence de ces dernières. Il s'agit toutefois d'une mesure qui relève du fonctionnement interne de l'équipe médicale et n'est pas indispensable dans la loi.

Mme Hélène Mignon, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a remarqué que cette information systématique risquait d'effrayer certains jeunes qui ont besoin d'une très grande confidentialité pour établir un lien de confiance avec l'infirmière.

M. Jean-Pierre Foucher a observé que l'information d'un médecin était la garantie du suivi médical que l'on recherche. Toutefois, on peut admettre que ce suivi médical n'est pas nécessairement mis en oeuvre par le médecin scolaire.

D'autre part, la notion de détresse caractérisée est importante, car elle sera un moyen d'éviter la banalisation de la délivrance de la contraception d'urgence.

M. Bernard Cazeau a précisé qu'il ne voyait pas ce qu'apportait la référence à une détresse caractérisée, mais qu'il ne s'opposait pas à une mention qui pouvait rassurer certains collègues.

Mme Hélène Mignon, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a précisé que le suivi médical ne relevait pas nécessairement d'un médecin scolaire et a proposé, en accord avec M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat, une nouvelle rédaction pour la dernière phrase du dernier alinéa de l'article premier supprimant l'obligation pour l'infirmière d'informer le médecin scolaire de la délivrance de la contraception d'urgence.

La commission mixte paritaire a suivi cette proposition et a adopté, à l'unanimité, l'article premier ainsi rédigé.

La commission mixte partiaire a adopté, à l'unanimité, l'article 2 (Bilan d'application de la loi) dans la rédaction du Sénat.

Mme Hélène Mignon, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour le Sénat, ont exprimé le souhait que les décrets d'application du texte soient publiés rapidement après promulgation de la loi.

La commission mixte paritaire a ensuite adopté l'ensemble du texte élaboré.