La proposition de directive COM (2016) 864 concerne les règles communes sur le marché intérieur de l'électricité. Outre la coordination avec d'autres dispositions confirmées, modifiées ou introduites par le paquet « énergie propre pour tous les européens » - principalement la réforme de l'ACER, le régime des mécanismes de capacité ou la dissociation entre l'exploitant du réseau de transport et le gestionnaire du même réseau - la proposition de directive tend surtout à modifier la place des consommateurs.

L'idée principale consiste à renforcer le rôle du consommateur. Concrètement, cette orientation se traduit par plusieurs obligations :

- proposer à tous une « tarification dynamique liée au marché au comptant » afin de de répercuter sur les consommateurs finaux « les signes de prix en temps réel (contrairement au classique tarif jour-nuit largement pratiqué en France, la tarification dynamique est basée sur le « marché à un jour », si bien que le prix de l'électricité subit des variations quotidiennes (corrélées de façon très variable au cycle jour-nuit) ;

- permettre à tout consommateur de « participer au marché de l'électricité par l'intermédiaire de solutions dites de participation active de la demande » sur les bourses de l'électricité ;

- éliminer les entraves à l'autoproduction, notamment via la filière photovoltaïque, pour favoriser une baisse des factures d'électricité mais pas nécessairement des dépenses d'électricité calculées après intégration des dépenses induites par l'investissement réalisé ;

- mettre en place les cadres juridiques favorisant la mise en place de « communautés énergétiques locales », cette notion couvrant tout réseau local de consommateurs produisant de l'électricité, indépendamment du fait que lesdites communautés soient ou non connectée au réseau de distribution ;

- protéger les nombreuses données individuelles collectées par les appareils numériques.

Les consommateurs souhaitant bénéficier de la souplesse apportée par les dispositions qui précèdent, mais ne voulant ou ne pouvant consacrer du temps pourraient de plein droit conclure des contrats avec des agrégateurs, sans devoir pour cela obtenir l'assentiment de leur fournisseur final.

Enfin, pour éviter toute forme de rigidité dans la formation des prix, les tarifs régulés doivent disparaître, à charge pour les États membres de trouver d'autres moyens pour venir en aide aux consommateurs vulnérables subissant une précarité énergétique.

Quel que soit le caractère plus ou moins réaliste à grande échelle de l'orientation tendant à transformer les consommateurs individuels et les petites structures en traders actifs sur le marché spot de l'électricité ou en concurrents des industriels de l'électricité, la simple obligation de créer un cadre juridique et tarifaire compatible avec le comportement n'est manifestement pas contraire au principe de subsidiarité.

Il en va autrement de la fin des tarifs réglementés, imposée à l'article 5, alinéa 2, de la proposition de directive, car les tarifs réglementés ont une vocation sociale, qui n'entre pas dans le champ de compétence de l'Union. La proposition de directive laisse toutefois aux États membres toute latitude pour aider les clients vulnérables ou en situation de précarité énergétique, l'objection tirée de la politique sociale n'est pas pertinente. Quant à la prise en compte des préférences exprimées par la grande majorité des consommateurs en faveur des tarifs réglementés, elle porte plus sur le fond.

Par ailleurs, l'obligation faite à tous les fournisseurs d'électricité d'accepter l'intermédiation des agrégateurs d'effacement n'est pas nécessairement conforme à l'intérêt des énergéticiens, mais l'uniformisation de cette obligation dans l'espace de l'Union tend à rendre les conditions de concurrence équivalentes dans tous les États membres. Le principe de subsidiarité ne semble donc pas opposable en l'espèce.

Dans ces conditions, il a été décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.