Le texte COM 238 consiste en une proposition de règlement promouvant l'équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices des services d'intermédiation en ligne. La Commission entend renforcer la protection des consommateurs au sein du marché intérieur et assurer le respect effectif des principes de transparence et d'équité en matière de concurrence en rééquilibrant les relations entre les entreprises qui utilisent des services d'intermédiation en ligne et les fournisseurs de ces services.

Un nombre croissant d'entreprises de l'Union européenne (plus d'un million) proposent en effet leurs produits et services aux consommateurs via des plateformes numériques en ligne. Or certaines pratiques des fournisseurs de services d'intermédiation en ligne ou encore des moteurs de recherche et des comparateurs de prix peuvent se révéler abusives, au détriment des entreprises, qu'il s'agisse de l'interdiction qui leur est faite d'appliquer des tarifs inférieurs à ceux figurant sur les plateformes, du déréférencement non motivé des services ou produits, de modalités peu transparentes de classement des entreprises, des biens et des services, voire de la préférence donnée aux services concurrents du fournisseur de services d'accès en ligne, ou encore du manque de clarté des conditions d'accès aux données recueillies par les fournisseurs. Les pratiques des moteurs de recherche en ligne généralistes et les comparateurs de prix peuvent en outre compromettre la visibilité des sites d'entreprises qui offrent leurs biens et services en ligne.

Ces pratiques commerciales constituent autant de formes d'atteintes à la concurrence et à l'effectivité du marché intérieur. Pour autant, elles ne sont pas nécessairement contraires aux règles européennes de concurrence définies aux articles 101 et 102 du TFUE. Les directives sur les pratiques commerciales déloyales (2005/29/CE) ou sur les clauses abusives (93/13/CEE) ne sont en effet pas applicables aux relations contractuelles entre professionnels tandis que la directive 2006/114/CE sur la publicité trompeuse n'est applicable qu'à certaines de ces relations.

Dès lors, dans le cadre de la « nouvelle donne pour les consommateurs » qu'elle a annoncée le 11 avril 2018 et qui s'inscrit dans la stratégie pour un marché unique numérique, la Commission européenne estime indispensable de rééquilibrer les relations commerciales entre les plateformes et les entreprises. Afin de créer un environnement juridique clair, transparent et stable pour les fournisseurs de services d'intermédiation en ligne et les entreprises utilisatrices, la proposition de règlement, présentée le 26 avril 2018, fixe des règles visant à garantir des possibilités de recours efficaces aux entreprises utilisatrices de services d'intermédiation en ligne comme à celles qui ont recours à un site internet d'entreprise en relation avec des moteurs de recherche.

Les modalités et conditions des fournisseurs de ces services devront ainsi répondre à des conditions de clarté et de transparence et ne pourront être modifiées, sous peine de nullité, sans notification préalable, assortie d'un délai de préavis raisonnable (au moins 15 jours) et proportionné. Toute décision unilatérale de suspension ou de résiliation de la fourniture du service devra en outre être précisément motivée au regard des conditions initiales de fourniture du service.

Les paramètres de classement et la justification de leur importance relative devront également être précisés dans les modalités et conditions initiales, ou, s'il s'agit d'un moteur de recherche en ligne, être aisément accessibles et suffisamment précis, sans toutefois que les fournisseurs soient tenus de divulguer des secrets d'affaires. Le mécanisme de classement devra tenir compte des caractéristiques des biens et services proposés, de la pertinence de ces caractéristiques pour les consommateurs et des caractéristiques de conception du moteur de recherche.

Dans un souci de transparence, dès lors qu'il est possible d'influencer le classement contre une rémunération directe ou indirecte, cette possibilité et ses conséquences sur le classement devront également être décrites. Par ailleurs, si le fournisseur de services fait bénéficier les biens et services qu'il produit ou que produit une entreprise qu'il contrôle d'un traitement différencié, ils devront en informer les entreprises utilisatrices et leur en préciser les modalités.

Enfin, dès lors qu'un fournisseur d'intermédiation en ligne limite la possibilité pour les entreprises utilisatrices de proposer, par d'autres moyens, les mêmes biens et services à des conditions différentes (notamment en matière de voyages), il devra le prévoir dans les modalités initiales, en informer les consommateurs et justifier ces restrictions.

Les conditions d'accès des fournisseurs de services d'intermédiation en ligne aux données personnelles des consommateurs devront par ailleurs être précisées aux entreprises utilisatrices.

Un mécanisme interne de traitement des litiges entre les plateformes et les entreprises utilisatrices devra être mis en place par les plateformes dès lors qu'elles emploient plus de 50 salariés. En cas de litige, les plateformes devront également proposer aux entreprises un recours à la médiation dont elles devront prendre en charge au moins la moitié des coûts. Enfin, les organisations et associations représentant les intérêts des entreprises ainsi que les organismes publics chargés d'une telle mission pourront engager des actions en justice aux fins d'injonctions de mise en conformité (mais non de dommages et intérêts). Les associations et les entreprises sont en outre encouragées à mettre conjointement en place des mécanismes de médiation et des codes de bonne conduite.

La Commission européenne a annoncé parallèlement la mise en place d'un observatoire européen de l'économie des plateformes numériques, constitué d'experts et chargé de produire des analyses et des conseils sur l'évolution de l'économie des plateformes en ligne, de l'aider à tenir à jour des indicateurs sur les relations entre les plateformes et les entreprises et de mener à bien le processus de réexamen prévu par le règlement.

Le recours à un règlement est justifié par la Commission au regard de la nécessité de remédier à la fragmentation qui résulte actuellement en la matière de règles nationales très différentes. Une approche harmonisée devrait en effet permettre de répondre plus efficacement à l'objectif poursuivi. Dès lors, la proposition de règlement n'apparaît pas soulever d'objections au regard du principe de subsidiarité. Il a donc été décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution