Projet de loi Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027

Direction de la Séance

N°261 rect.

5 juin 2023

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 661 , 660 )


AMENDEMENT

C Défavorable
G Favorable
Adopté

présenté par

Le Gouvernement


ARTICLE 3

Consulter le texte de l'article ^

Après l’alinéa 6

Insérer neuf alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 75-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « de l’enquête, y compris si celui-ci est intervenu dans le cadre d’une enquête de flagrance » sont remplacés par les mots : « d’audition libre, de garde à vue ou de perquisition d’une personne, y compris si cet acte est intervenu dans le cadre d’une enquête de flagrance, lorsque cette personne en fait la demande » ;

b) Au troisième alinéa, la dernière phrase est ainsi rédigée : « Tout acte d’enquête concernant la personne ayant formulé la demande prévue au premier alinéa intervenant après l’expiration de ces délais est nul. » ;

c) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À titre exceptionnel, à l’issue du délai de trois ans, le procureur de la République peut toutefois, selon les modalités prévues par le V de l’article 77-2, décider de la continuation de l’enquête pendant une durée d’un an, renouvelable une fois par décision écrite motivée versée au dossier de la procédure. » ;

d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La demande prévue au premier alinéa peut être faite par la personne ou son avocat à l’issue de son audition ou de la perquisition auprès de l’officier ou de l’agent de police judiciaire ayant procédé à l’acte ou, auprès des mêmes personnes, pendant un délai d’un an à compter de celui-ci ; le procureur de la République en charge de l’enquête en est alors immédiatement informé. » ;

…° Le V de l’article 77-2 est ainsi rédigé :

« V. – Lorsque l’enquête fait l’objet d’une prolongation en application du quatrième alinéa de l’article 75-3, les investigations ne peuvent se poursuivre à l’égard des personnes ayant fait l’objet depuis plus de deux ans de l’un des actes mentionnés aux 1° et 2° du II du présent article et à l’encontre desquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre, en tant qu’auteurs ou complices, une infraction sans que le procureur de la République fasse application du I à leur profit ainsi qu’à celui du plaignant ; le délai de deux ans est porté à trois ans si l’enquête porte sur des crimes ou délits mentionnés aux articles 706-73 ou 706-73-1 ou relevant de la compétence du procureur de la République antiterroriste. Dans ce cas, l’intégralité de la procédure doit alors être communiquée aux intéressés et l’avocat de la personne doit être convoqué au moins cinq jours ouvrables avant toute audition réalisée conformément à l’article 61-1. » ;

Objet

L’article 3 du projet de loi améliore sur plusieurs points importants le déroulement des enquêtes afin de renforcer leur efficacité, notamment en modifiant le code de procédure pénale. Cet objectif de renforcement de l’efficacité des enquêtes justifie de compléter l’article 3 par des précisions devant être apportées aux articles 75-3 et 77-2 du code de procédure pénale résultant de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire.

En effet, ces deux articles, s’ils améliorent grandement les droits de suspects en mettant une durée maximale aux enquêtes qui étaient par le passé sans limite de temps, soulèvent cependant certaines difficultés pratiques pouvant résulter de leur mise en œuvre.

Dans la perspective des moyens supplémentaires massifs prévus pour les cinq prochaines années pour les ministères de l’intérieur et de la justice, il apparaît, à ce stade, difficile de traiter dans les délais légaux les procédures concernées.

En particulier, les délais butoirs de deux ans et de trois ans de l’article 75-3, parce qu’ils s’appliquent de façon systématique à toutes les enquêtes, y compris celles qui sont menées contre X, ou celles dans lesquelles plusieurs personnes sont suspectées avant d’être mises hors de cause et avant que ne soient identifiés le ou les véritables auteurs de l’infraction, aboutissent à instituer des «effets couperets », constituant de fait des formes de prescriptions abrégées de l’action publique au sein de la procédure pénale.

Il est en effet primordial de sauvegarder les nombreuses procédures qui nécessitent des investigations poussées sur plusieurs ressorts et passent ainsi de parquet à parquet, notamment s’agissant des enquêtes préliminaires en matière d’agression sexuelle sur mineurs.

Tout en conservant la règle de la limitation de la durée de l’enquête à deux ou trois ans, le présent amendement modifie en conséquence le premier alinéa de l’article 75-3 pour prévoir, que le procureur de la République pourra, à titre exceptionnel décider de la continuation de l’enquête pendant une nouvelle durée de deux ans, à condition que celle-ci se déroule selon des modalités contradictoires renforcées prévues par l’article 77-2, c’est-à-dire une ouverture complète au contradictoire avec mise à disposition de la procédure et la possibilité de faire des observations ou des demandes d’actes.

Une telle souplesse est à la fois opportune et cohérente : si les investigations doivent se prolonger encore quelque mois, il est inutile d’obliger le procureur à ouvrir une information, dès lors que des garanties similaires pourront être appliquées lors de l’enquête.

Ce nouveau régime nécessitait donc, pour assurer pleinement le contradictoire, de modifier par cohérence le V de l’article 77-2, pour prévoir les modalités du contradictoire renforcé lorsque le procureur de la République décide ainsi d’une prolongation exceptionnelle de l’enquête pendant deux ans. Il prévoit ainsi que dans ce cas, l’intégralité de la procédure devra être communiquée aux intéressés et l’avocat de la personne devra être convoqué au moins cinq jours ouvrables avant toute audition libre, c’est-à-dire exactement dans les mêmes délais que ceux prévus lors d’un interrogatoire par le juge d’instruction.

Ces modifications permettent ainsi d’assurer une conciliation équilibrée et cohérente entre les avancées instituées par la loi du 22 décembre 2021 et l’efficacité des procédures.