Proposition de loi Réforme de l'audiovisuel public

Direction de la Séance

N°252

7 juillet 2025

(2ème lecture)

(n° 825 , 824 )


AMENDEMENT

C
G  

présenté par

M. VERZELEN


ARTICLE 15

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Alinéas 2 à 4

Supprimer ces alinéas.

Objet

Les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 15 visent à interdire la vente de récepteurs radio exclusivement FM sur le territoire national en modifiant la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur. Les auditeurs souhaitant s’équiper d’un récepteur pour écouter des services de radio FM devront désormais acheter un poste de radio DAB+ / FM.

Ce dispositif, introduit pour faciliter le développement de la radio par voie hertzienne numérique, va priver les consommateurs de la possibilité d’acquérir des postes de radio d’entrée de gamme puisque les postes de radio DAB+/FM sont nettement plus onéreux que les récepteurs radio exclusivement FM.

L’indisponibilité de récepteurs radio d’entrée de gamme sur le marché n’est pas satisfaisante car elle restreint l’accès du public au média radio et donc la liberté de communication des individus.

L’existence d’une offre de postes de radio FM à bas prix est une exigence démocratique dès lors :

qu’elle garantit à la population et notamment aux plus fragiles la possibilité de s’équiper d’un récepteur d’entrée de gamme FM leur permettant d’écouter la radio. En effet, les récepteurs radio FM d’entrée de gamme sont accessibles à partir de 5 ou 10 euros, tandis qu’il faut compter entre 20 et près de 40 euros pour un récepteur compatible FM/DAB+ d’entrée de gamme ;

que la part des récepteurs radio FM dans les récepteurs radio vendus en France représente encore près de 80 % des ventes des récepteurs radio ;

que près de la moitié de la population n’est pas couverte par les radios via le DAB+ (40 %), tandis que les 60 % dits couverts ne le sont pas nécessairement par la totalité de l’offre de radio en DAB+ ;

que les radios locales, présentes en FM, qu’elles soient régionales, multi villes, commerciales ou associatives sont loin d’être toutes présentes en DAB+ dans leur zone de couverture ;

que l’audience du média radio repose massivement sur la FM.

Il doit par ailleurs être souligné que si la vente des postes de radio uniquement FM devait être interdite en France, les auditeurs seraient alors incités à se tourner vers des enceintes connectées qui offrent de la radio (dont des offres étrangères non régulées) mais pas que, d’où un risque de perte des auditeurs et, dont le prix d’accès est aujourd’hui similaire, voire inférieur à celui des équipements hybrides FM+DAB1.

Il est enfin nécessaire de rappeler que c’est grâce aux revenus générés par leurs réseaux FM que les radios peuvent supporter les coûts de déploiement des réseaux DAB+.

Enfin, une interdiction de la vente des postes de radio FM en France n’aurait aucun effet d’entrainement sur le marché des récepteurs radio, dès lors que la France pèse moins de 2 % de la vente mondiale des récepteurs radio.

Au-delà de ces considérations essentielles, la suppression du dispositif introduit par les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 15 est d’autant plus nécessaire que celui-ci méconnait le code des communications électroniques européen (1.) et la liberté d’entreprendre protégée par la Constitution (2.).

1. L’article 113, 2° de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen (refonte) prévoit que : « Les États membres peuvent adopter des mesures visant à assurer l’interopérabilité d’autres récepteurs de services de radio grand public tout en limitant l’impact sur le marché des récepteurs de services de radio d’entrée de gamme et en veillant à ce que de telles mesures ne s’appliquent pas aux produits pour lesquels le récepteur de services de radio est purement accessoire, tels que les mobiles multifonctions, ni aux équipements utilisés par les radioamateurs » (soulignement ajouté).

L’objectif d’assurer l’interopérabilité des postes de radio ne doit donc pas conduire à priver les consommateurs de la possibilité d’acquérir des appareils d’entrée de gamme.

C’est ainsi que le texte de transposition de la directive précitée limite le champ d’application de l’obligation de réception de services radio par voie hertzienne numérique aux récepteurs « disposant d’un écran d’affichage alphanumérique » (article 19 de la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur) et qu’il permet ainsi l’existence sur le marché d’une offre de récepteurs radio d’entrée de gamme (appareils non pourvus d’écran d’affichage alphanumérique).

La Belgique a d’ailleurs également transposé la directive précitée en laissant subsister une offre de récepteurs radio analogique d’entrée de gamme (article 2 de l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française relatif aux récepteurs de services sonores devant recevoir et reproduire des services sonores fournis via des réseaux de diffusion numérique par voie hertzienne terrestre (A.Gt 21-12-2022 M.B. 24-02-2023).

En généralisant l’obligation de réception de services radio par voie hertzienne numérique à l’ensemble des récepteurs, y compris aux appareils d’entrée de gamme, le dispositif prévu par les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 15 méconnaît donc l’article 113, 2° de la directive établissant le code des communications électroniques européen.

Cet amendement rétablit la conformité du droit interne avec la directive établissant le code des communications électroniques européen et il permet aux auditeurs d’accéder au média radio au moyen de récepteurs d’entrée de gamme afin de garantir l’exercice de leur liberté de communication.

2. Cet amendement permet également de protéger la liberté d’entreprendre des opérateurs.

Les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 15 interdisent purement et simplement aux entreprises de commercialiser des récepteurs radio exclusivement FM pour lesquels il existe pourtant toujours une demande très importante.

Cette interdiction générale va faire peser une charge disproportionnée sur les entreprises en les privant de la liberté de choisir la façon dont elles entendent répondre à une demande existante, en particulier pour les dispositifs d’entrée de gamme alors que les fonctionnalités numériques sont coûteuses. Ces contraintes, très lourdes, risqueraient de faire baisser les volumes de ventes des récepteurs radio, et de nuire au média radio. Elles sont en tout état de cause disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi.