Projet de loi Programmation militaire pour les années 2019 à 2025

commission des affaires étrangères

N°COM-118

15 mai 2018

(1ère lecture)

(n° 383 )


AMENDEMENT

Adopté

présenté par

M. BONNECARRÈRE

au nom de la commission des lois


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 22 BIS(NOUVEAU)

Après l’article 22 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 6 nonies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Après les mots : « À cette fin, elle », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « peut solliciter tout document, information ou élément d'appréciation nécessaire à l'accomplissement de sa mission. Lorsque la transmission d'un document, d'une information ou d'un élément d'appréciation est soit susceptible de mettre en péril le déroulement d'une opération en cours ou l'anonymat, la sécurité ou la vie d'un agent relevant d'un service spécialisé de renseignement mentionné à l'article L. 811-2 du code de la sécurité intérieure ou d'un service autorisé par le décret en Conseil d'État mentionné à l'article L. 811-4 du même code, soit concerne les échanges avec les services étrangers ou avec les organismes internationaux compétents dans le domaine du renseignement, le Premier ministre ou les ministres de tutelle des services mentionnés au présent alinéa peuvent, par une décision motivée, s'opposer à sa communication. » ;

b) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont en outre communiqués à la délégation : » ;

c) Après le 6°, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° La liste annuelle des rapports de l'inspection des services de renseignement ainsi que des rapports des services d'inspection générale des ministères portant sur les services de renseignement qui relèvent de leur compétence. » ;

d) Après les mots : « tout ou partie des rapports », la fin de l'avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « mentionnés au 7° du présent I. » ;

e) Le dernier alinéa est supprimé ;

2° Le II est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La délégation peut nommer, parmi ses membres, un rapporteur auquel elle peut déléguer une mission d'évaluation ou de contrôle sur une ou plusieurs thématiques relatives à l'activité des services mentionnés au I. » ;

3° Le premier alinéa du III est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après les mots : « coordonnateur national du renseignement », sont insérés les mots : « et de la lutte contre le terrorisme » ;

b) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu'elle se rend sur le site de l'un des services mentionnés au I, la délégation peut entendre tout personnel placé auprès de ce service. »

Objet

Cet amendement tend à renforcer le dispositif français de contrôle parlementaire du renseignement et modifie, à cet effet, l’article 6 nonies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaire.

En effet, malgré un élargissement de ses prérogatives par la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019, la délégation parlementaire au renseignement bénéficie encore d’un pouvoir de contrôle moins approfondi que les dispositifs parlementaires mis en place dans d’autres démocraties, que ce soit l’Allemagne, le Royaume-Uni ou encore l’Italie. Or, l’exercice d’un contrôle plein, entier et objectifs des services de renseignement répond tant à un souci démocratique qu’au besoin d’assurer l’efficacité de notre appareil de renseignement.

Aussi l’amendement poursuit-il trois objectifs.

Il ouvre en premier lieu le périmètre de contrôle de la délégation et, par conséquent, son droit d’information, à l’ensemble de l’activité des services de renseignement, tout en prévoyant, pour respecter les exigences constitutionnelles et ne pas entraver l’efficacité des services, un droit d’opposition du Gouvernement pour les cas où la communication d’une information, d’un document ou d’un élément d’appréciation est susceptible de porter atteinte à une opération en cours, de mettre en péril l’anonymat ou la sécurité d’un agent ou concerne les échanges avec des services de renseignement étrangers.

La délégation serait donc désormais en droit de connaître notamment des procédures et méthodes opérationnelles, qui sont actuellement exclues de son contrôle. Elle serait par ailleurs en mesure de demander la transmission, en complément des documents qui lui sont communiqués de droit en vertu de la loi, de toute autre information qu’elle estimerait nécessaire à l’accomplissement de sa mission.

En deuxième lieu, l’article étend les prérogatives de la délégation parlementaire au renseignement.

Afin d’améliorer son droit d’information, la délégation serait tout d’abord rendue destinataire, chaque année, de la liste des rapports publiés par l’inspection des services de renseignement ainsi que par les services d’inspection d’autres ministères portant sur les services de renseignement. Si elle peut, en l’état du droit, solliciter du Premier ministre la transmission de tout ou partie de ces rapports, cette prérogative se révèle, dans la pratique, difficile à exercer dans la mesure où la délégation n’a pas connaissance des travaux réalisés par ces inspections.

Par ailleurs, la liste des personnes pouvant être entendues par la délégation serait étendue à l’ensemble des personnels des services de renseignement, qui ne peuvent actuellement être auditionnés que lorsqu’ils accompagnent les directeurs des services de renseignement ou lorsqu’ils occupent un emploi pourvu en conseil des ministres. De manière à ne pas mettre en péril leur anonymat, ces agents ne pourraient être entendus que lorsque la délégation se déplace sur le site d’un service.

En troisième et dernier lieu, l’article unique prévoit la possibilité pour la délégation de nommer en son sein un rapporteur, auquel elle pourrait confier des missions d’évaluation et de contrôle sur des thématiques définies.

La création de cette fonction, qui avait été envisagée en 2007 lors de la création de la délégation, poursuit un double objectif : d’une part, alléger la charge du président de la délégation, fonction assurée, de droit, par un président de commission permanente ; d’autre part, renforcer la continuité des travaux de la délégation en lui permettant de conduire des missions de contrôle en dépit des changements annuels de présidence.