Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026

Direction de la Séance

N°1004

16 novembre 2025

(1ère lecture)

(n° 122 , 131 , 126)


AMENDEMENT

C
G  

présenté par

Mmes PONCET MONGE et SOUYRIS, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 8

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa du V de l’article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est ainsi modifié :

1° Les mots : « assimilée, pour l’assujettissement » sont remplacés par le mot : « assujettie » ;

2° À la fin, les mots : « , aux sommes versées au titre de l’intéressement mentionné au titre Ier du livre III de la troisième partie du code du travail » sont remplacés par les mots : « au taux de 20 % ».

Objet

Dans son rapport de 2024 sur les niches sociales des compléments de salaires, la Cour des comptes indique que « L’ampleur prise par les régimes sociaux dérogatoires pour les compléments de salaire en modifie leur portée. Ils portent désormais atteinte aux équilibres financiers de la Sécurité sociale et à l’équité du prélèvement social entre les entreprises et entre les salariés. Dans un contexte de déficits croissants d’ici à 2027 et de cumul du recours aux différents dispositifs à l’avantage d’un nombre restreint d’entreprises et de salariés, un rapprochement du droit commun s’impose. ».

Parmi eux, la prime de partage de la valeur instaurée en 2022 pose un problème particulier du fait de son utilisation croissante, puisqu’elle a été distribuée en 2022 à 5,5 millions de salariés pour un montant total de 5,3 milliards d’euros la même année, et du fait de son fort effet substitutif à l’augmentation des salaires : selon l’INSEE l’effet substitutif de la prime partage de la valeur serait de 40 % !

Cela a été confirmé par le CAE qui souligne que la grande liberté accordée aux employeurs dans la distribution de cette prime en renforce l’effet substitutif qui « peut [ainsi] s’expliquer en partie par le caractère volontaire des mécanismes de partage de la VA comme l’intéressement ou la PEPA, ce qui permet aux entreprises d’optimiser le calendrier d’adoption et favorise la substitution. ».

La Cour des comptes, dans le rapport précité a également souligné le phénomène de substitution concomitant à l’explosion des compléments de salaires, fortement encouragés depuis 2017 en remarquant que le dynamisme des compléments est bien supérieur à l’évolution des salaires, laissant entrevoir un fort effet substitutif : « De 2014 à 2017, les compléments de salaire, hors heures supplémentaires, et les salaires de base du secteur privé ont évolué au même rythme, sans effet visible de substitution. En revanche, de 2018 à 2023, la progression des versements de compléments de salaire exemptés est devenue plus rapide (7,8 % par an) que celle des salaires de base (4,1 % par an). ». Cette dynamique disjointe est également mise en avant dans l’annexe 4 du présent PLFSS qui indique « Les dispositifs d’exemption d’assiette se caractérisent par un dynamisme qui se prolonge durablement et bien au-delà de leur phase de montée en charge initiale. Malgré l’ancienneté de certains, ils continuent d’évoluer de façon plus dynamique que l’assiette des cotisations, ce qui peut s’expliquer par leur substitution sur le long terme aux rémunérations ordinaires. » et d’ajouter qu’en conséquence : « les composantes les plus dynamiques des rémunérations sont celles qui contribuent le moins au financement de la protection sociale. ».

Quelques modifications ont pu atténuer les pertes relatives à la PPV puisque la LFSS 2025 a inclus les montants de prime de partage de la valeur dans les rémunérations prises en compte pour déterminer le montant des allègements généraux et elle est soumise, depuis le 1er janvier 2024, à forfait social de 20 %.

Néanmoins, du fait des dispositions de la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, la PPV est assimilée à l’intéressement, laquelle est une prime qui, depuis la LFSS 2019, est exemptée de forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés, amplifiant les pertes de recette pour les comptes sociaux.

C’est pour atténuer ces pertes que la Cour des comptes a recommandé dans son rapport d’appliquer le forfait social à la prime de partage de la valeur, y compris pour les entreprises de moins de 250 salariés. Le montant des gains relatifs à cet assujettissement serait d’1 milliard d’euros.

Compte tenu de la trajectoire budgétaire inquiétante des comptes sociaux et du fait que le statut dérogatoire de la PPV n’est pas justifié, surtout au regard de son fort effet substitutif amplifiant les pertes pour les comptes sociaux, le présent amendement se propose de reprendre cette recommandation de la Cour et d’assujettir la PPV au forfait social y compris pour les entreprises de moins de 250 salariés.