Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026
Direction de la Séance
N°1063
17 novembre 2025
(1ère lecture)
(n° 122 , 131 , 126)
AMENDEMENT
| C | |
|---|---|
| G |
présenté par
Mmes PONCET MONGE et SOUYRIS, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL
ARTICLE 39
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Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
Objet
Le présent article 39 du PLFSS réforme les modalités d’examen des dossiers de maladie professionnelle relevant de l’alinéa 6 de l’article L461-1 du code de la Sécurité sociale en disposant que, dès lors que le malade ne remplit pas l’ensemble des conditions de reconnaissance du lien professionnelle de sa maladie figurant dans un tableau, la victime est orientée vers deux médecins-conseils et non plus vers le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies professionnelles (C2RMP). Selon l’Annexe 9, il s’agirait là d’un moyen de désengorger les C2RMP lesquels sont en effet submergés.
Cependant, si l’objectif affiché de simplification et de réduction des délais est louable, cette réorganisation présente un risque réel de dégradation du droit à réparation des assurés. En effet, les médecins-conseils n’ont pas, contrairement aux membres des C2RMP, la connaissance fine des conditions d’exposition en milieu professionnel, contrairement au C2RMP qui complète les médecins-conseils avec des médecins universitaires en santé au travail et des médecins du travail. Cette carence, même partiellement compensée par la possibilité de solliciter un avis extérieur, pourrait entraîner une augmentation significative des décisions de rejet.
Aussi, cette réforme des modalités d’examen des dossiers de maladie professionnelle prive de deux des compétences présentes dans les C2RMP et surtout des deux compétences garantes du lien de la décision avec le travail, soit une expertise scientifique et une expertise des situations de travail. Avec les dernières réformes de la médecine du travail et la volonté de dispenser les arrêts longs et les retours de maternité de l’obligation de passer par la médecine de travail, la place de la médecine du travail dans notre code du travail subit de réforme en réforme un véritable affaiblissement.
De surcroît, depuis le 1er octobre 2025, un décret contesté par les médecins-conseils eux-mêmes et par leurs organisations syndicales (décret n° 2025-599 du 30 juin 2025) a modifié l’organisation du service médical de contrôle de l’Assurance maladie ; celui-ci intègre désormais les caisses d’assurances maladie, c’est-à-dire les caisses primaires pour ce qui concerne le régime général. L’indépendance professionnelle des médecins-conseils risque d’être fragilisée. Cela ne sera pas sans conséquence sur leurs futures décisions en matière de reconnaissance des maladies professionnelles dans l’architecture prévue par cet alinéa de l’article 39. Et ce, sans même évoquer le fait que les services médicaux de l’Assurance maladie dans les caisses sont actuellement insuffisamment dotés en moyens humains pour cette nouvelle mission, ce qui risque de compromettre les objectifs initiaux du présent article visant l’accélération de l’examen des dossiers.
Par ailleurs, cette réforme méconnaît les conclusions du rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de décembre 2024. Dans cet avis, l’Anses affirme que “des recherches en santé publique – parfois récentes – permettent aujourd’hui d’objectiver des liens entre travail et santé non considérés par les tableaux existants. Leur meilleure prise en compte permettrait de renforcer la cohérence et l’efficacité du système de reconnaissance des MP” et elle souligne que « les listes de travaux limitatives sont souvent trop restrictives par rapport aux connaissances scientifiques, générant de nombreux recours aux C2RMP au titre de l’alinéa 6 de l’article L. 461-1 du code de la Sécurité sociale ».
Ainsi, pour répondre durablement à l’engorgement des C2RMP, il apparaît nécessaire de corriger la vétusté des tableaux et d’adapter les listes de travaux aux données scientifiques actuelles plutôt que de créer un type d’examen par les seuls médecins-conseils.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement propose la suppression de l’alinéa 4 visant à orienter les victimes vers les seuls médecins-conseils et non plus vers les C2RMP.