Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026

Direction de la Séance

N°1304

17 novembre 2025

(1ère lecture)

(n° 122 , 131 , 126)


AMENDEMENT

C
G  

présenté par

Mmes Mélanie VOGEL, OLLIVIER, SOUYRIS et PONCET MONGE, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT, MELLOULI et SALMON et Mme SENÉE


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 11 SEPTIES

Après l’article 11 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les modalités et l’opportunité d’affecter une part du produit de la cotisation d’assurance maladie prélevée sur les pensions des retraités résidant hors de France au financement de la Caisse des Français de l’étranger.

Ce rapport examine notamment les conséquences financières, juridiques et opérationnelles d’un tel mécanisme, ainsi que les conditions dans lesquelles cette affectation pourrait contribuer à renforcer la soutenabilité financière de la Caisse des Français de l’étranger et sa pertinence au vu de l’équité contributive et d’accès à une couverture maladie.

Objet

Cet amendement vise à apporter une réponse à une injustice persistante : la contribution à la CotAM des retraité·es français·es établi·es hors de France.

Les retraité·es français·es résidant hors de France sont soumis·es à la cotisation d’assurance maladie (CotAM) au taux de 3,2 % pour les retraites issues d’une carrière salariée, et 7,1 % pour celles issues d’une carrière indépendante. À cela s’ajoute une CotAM de 4,2 % sur les pensions complémentaires. Cette cotisation s’applique de manière indifférenciée, y compris sur de très petites pensions. Pour rappel, en 2024, sur 1 065 125 retraité·es résidant à l’étranger, la pension mensuelle moyenne n’atteint que 323 €, soit près de trois fois moins que la moyenne nationale (903 €), rendant d’autant plus pénalisant le prélèvement d’une CotAM sans contrepartie assurantielle.

Or, hors Union européenne, un·e retraité·e non affilié·e à la Caisse des Français de l’étranger (CFE) ne bénéficie d’aucune couverture maladie financée par la France. Le seul droit associé à la CotAM est la prise en charge de soins inopinés lors de courts séjours en France, via le CNAREFE. Cette situation est largement perçue comme discriminatoire : nos compatriotes expatrié·es contribuent au financement de l’assurance maladie nationale tout en ne bénéficiant pas d’une protection effective dans leur pays de résidence.

En 2023, selon le Recueil statistique du régime général, les retraité·es non-résident·es soumis·es à la CotAM représentaient 389 215 personnes, générant 62 millions d’euros de recettes pour l’assurance maladie. Le montant réel est supérieur si l’on inclut la CotAM prélevée sur les complémentaires (4,2 %), impossible à estimer précisément faute de données publiques.

En parallèle de cette injustice, nous faisons face au problème du sous-financement de la Caisse des Français de l’étranger malgré ses missions essentielles.

La CFE est un organisme de sécurité sociale de droit privé investi d’une mission de service public, au même titre que les CPAM. Elle est régie par le code de la sécurité sociale et soumise au principe d’autonomie financière.

Pourtant, contrairement à d’autres caisses :

Elle ne dispose d’aucune taxe affectée,

Elle ne bénéficie d’aucun financement pérenne de l’État, en dehors d’une subvention limitée de 380 000 € destinée à la catégorie aidée,

Elle ne reçoit aucune part de la CSG, alors même que les Français·es vivant à l’étranger y sont assujetti·es sur leurs revenus de source française.

La CFE est en outre soumise à une obligation d’accueil universel : elle ne peut procéder ni à une sélection médicale, ni à un questionnaire de santé, ce qui fragilise structurellement son équilibre financier. Elle reste néanmoins l’opérateur unique garantissant un accès à une couverture maladie française pour l’ensemble des Français·es établi·es hors de France.

Cette absence de soutien structurel crée une rupture d’équité manifeste, alors que les Français·es de l’étranger contribuent, via la CotAM, au financement de la solidarité nationale sans que cet effort ne bénéficie à la caisse qui leur est spécifiquement destinée.

Ainsi émerge une piste de réforme cohérente : affecter une part de la CotAM à la CFE.

Il apparaît pertinent d’étudier l’opportunité d’un mécanisme d’affectation, totale ou partielle, du produit de la CotAM prélevée sur les retraité·es résidant hors de France au financement de la CFE.

Un tel mécanisme présenterait plusieurs bénéfices :

une justice contributive : aligner la CotAM sur une couverture réelle pour les Français·es de l’étranger ;

le renforcement de l’attractivité de la CFE : les retraité·es pourraient rejoindre la CFE sans coût supplémentaire par rapport à la CotAM qu’ils acquittent aujourd’hui sans protection effective ;

la pérennisation du financement de la CFE, aujourd’hui structurellement fragile ;

la cohérence juridique, dans la continuité des adaptations déjà imposées par le droit européen (exonérations pour certain·es retraité·es en fonction de leur État de résidence et de la durée d’assurance française).

Afin de déterminer le montant et les conditions dans lesquelles un tel transfert serait pertinent, nous demandons donc leur examen à travers un rapport Gouvernemental, qui constituerait alors la première étape de cette mesure de bon sens.