Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026

Direction de la Séance

N°1570

17 novembre 2025

(1ère lecture)

(n° 122 , 131 , 126)


AMENDEMENT

C
G  

présenté par

M. JOMIER, Mmes CANALÈS, BONNEFOY, BROSSEL, de LA GONTRIE, FÉRET et LE HOUEROU et M. ROS


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 11 QUATER

Après l'article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 3322-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3322-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 3322-2-1. I. – Le prix minimum de vente des boissons mentionnées aux 3°, 4° et 5° de l’article L. 3321-1 ne peut être inférieur à 0,50 euros par centilitre d’alcool pur.

« II. – Le surplus de recettes est affecté à la branche maladie de la sécurité sociale.

« III. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions d'application du présent article. »

Objet

Cet amendement propose l’instauration d’un prix minimum pour les boissons alcooliques. Cette mesure, inspirée de la législation écossaise, est recommandée par l’OMS.

En 2018, l’Écosse a instauré un prix minimum par unité d’alcool. Cela lui a permis de réduire significativement la consommation excessive d’alcool et la morbidité associée, sans effet notable sur les recettes du secteur alcoolier. La mesure a entraîné une réduction de 13,4 % du nombre de décès liés à la consommation d’alcool et une baisse de 7,3 % des hospitalisations liées aux maladies chroniques liées à l’alcool. En ciblant les boissons alcooliques vendues très peu cher (visant essentiellement un public jeune et précaire), le prix minimum permet de réduire la consommation à risque, sans effet sur la consommation modérée [1].

La France est le huitième pays le plus consommateur d’alcool au sein de l’OCDE. 8% des adultes y consomment la moitié de l’alcool, et 22% des Français ont une consommation à risque. Instaurer un prix minimum, une mesure qui cible la consommation à risque, est donc particulièrement pertinent.

En France, l’alcool est responsable de 49 000 décès par an. Il représente la deuxième cause évitable de mortalité par cancer. La mise en place du prix minimum permettrait de réduire de 22% la mortalité due aux cancers imputables à l’alcool. 

Contrairement à certaines idées reçues, cette mesure n’aura pas d’impact négatif sur le secteur viticole. Au contraire, il aura un effet positif sur les petites exploitations françaises.

En fixant un prix minimum par unité de 10 grammes d’alcool à 0,50 €, une bouteille de vin titrant à 12° ne pourrait être vendue à moins de 3,50 €. Ce dispositif ne concerne donc pas les produits dont le prix de vente est déjà supérieur au seuil fixé, ce qui est le cas de l’immense majorité des vins commercialisés en France.

Cette réforme constitue ainsi une opportunité pour les petits producteurs. La mise en place d’un prix minimum incitera mécaniquement les consommateurs à se détourner des produits les moins qualitatifs, aujourd’hui vendus à très bas prix, au profit de produits de meilleure qualité. Cet effet entraînera une augmentation des ventes pour nos filières locales. En outre, la baisse du volume de ventes pour les alcools les moins chers pourra être compensée par l'augmentation des marges. Ainsi, l’instauration du prix minimum permettra d’augmenter les profits des producteurs indépendants de vin de 39%.[2]

Cette réforme aura un impact positif sur les finances publiques. Elle permettra de réduire les dépenses de santé de l’ordre de 237 millions d’euros par an à l’horizon 2050.  Alors que la consommation d’alcool représente 7,8 milliards d’euros de dépenses publiques de santé, pour seulement 4 milliards d’euros de recettes,[3] et que le coût social de l’alcool est estimé à 102 milliards d’euros[4] , il est urgent d’agir.

Le prix minimum est une mesure de santé publique qui a fait ses preuves à l’étranger, sollicitée par l’OMS, qui permettra d’améliorer la santé des Français, de réduire les dépenses et de privilégier nos filières locales de qualité.

[1] En Écosse, la consommation à moindre risque est restée stable. Les repères de consommation à moindre risque recommandés au Royaume-Uni sont de 14 verres par semaine.

[2] Étude de 2023 de l’INCa et de la Mildeca.

[3] Rapport du Sénat sur la fiscalité comportementale. Mai 2024.

[4] Observatoire Français des drogues et Toxicomanie (OFDT).