Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026

Direction de la Séance

N°904

16 novembre 2025

(1ère lecture)

(n° 122 , 131 , 126)


AMENDEMENT

C
G  

présenté par

Mmes PONCET MONGE et SOUYRIS, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 8

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 137-16 du code de la sécurité sociale, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».

Objet

Selon la Cour des comptes, les pertes de recettes relatives aux compléments de salaires exonérés et non compensés s’élèvent à près de 19 milliards d’euros en 2023. Cela est dû à une baisse volontaire des taux de forfaits sociaux et à une accentuation des taux différenciés, notamment depuis la loi PACTE en 2019. Comme l’indique la Cour des comptes : « En conséquence, le taux de compensation des pertes de recettes de la Sécurité sociale a baissé de 43,5 % en 2018 à 35,6 % en 2023. (…) la Sécurité sociale ne récupère qu’à peine plus du tiers du manque à gagner qu’elle subit du fait des exemptions sur les compléments de salaire. ». Ces dispositions ont massivement contribué à la dégradation des comptes sociaux depuis 2019, puisque, comme l’indique la Cour, la perte de recette était en augmentation de 8 milliards entre 2018 et 2022, tandis que le déficit de la Sécurité sociale augmentait de 6 milliards dans le même temps. La dérive des comptes à laquelle nous assistons aujourd’hui est donc due en partie à l’affaiblissement des forfaits sociaux et à l’encouragement au recours à des compléments de salaires désocialisés et insuffisamment compensés.

Selon le PLFSS 2026, le déficit de la Sécurité sociale devrait atteindre 23 milliards d’euros en 2025, soit une augmentation de 7,7 milliards par rapport à 2024. Or, comme le souligne la Cour des comptes dans sa dernière note sur la Situation financière de la Sécurité sociale de novembre 2025 : « Cette situation est liée à la persistance d’un écart structurel entre la dynamique des dépenses et celle des ressources. ». Cela a été rappelé par divers organismes comme l’OFCE qui, dans une note de juillet 2025, souligne que l’écart entre les dépenses et les recettes des APU en 2024 est de 5,8 points de PIB, un taux jamais inégalé, alors qu’il était de 3,4 points en 2017, soit presque deux fois moins.

L’OFCE indique que la politique de l’offre en cours depuis 2017 a « conduit à une diminution de 2,5 points de PIB du niveau de prélèvement obligatoire » , principalement en faveur des entreprises, puisque la baisse de 0,6 point de PIB sur les cotisations salariales a été compensée par une hausse de 0,9 point de CSG sur la période, tandis que rien n’est venu contrebalancer la baisse de 1,1 point de PIB de cotisations patronales. De sorte que la conclusion de l’OFCE est claire : « La dégradation du solde structurel observé entre 2017 et 2024 s’explique essentiellement par la baisse non financée des PO, et non par une dérive des dépenses publiques primaires. Bien au contraire, celles-ci ont reculé de 0,3 point de PIB potentiel sur la période. En tenant compte de la hausse de la charge d’intérêts liée à la remontée des taux souverains, la dépense publique totale, en points de PIB, est stable sur la période ». Cette baisse des recettes distingue la France des autres pays d’Europe, comme l’Espagne, l’Allemagne ou le Royaume-Uni, où l’on observe une augmentation des dépenses depuis la crise covid compensée par une hausse des recettes. La Cour elle-même, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juillet 2024, indiquait que « la période 2018-2023 a été marquée par d’importantes baisses d’impôts, dont l’impact est estimé à 62 Md € en 2023, soit 2,2 pts de PIB. » , indiquant ainsi qu’une partie conséquente des 150 milliards de déficits évalués à ce moment-là sont dus à une baisse des recettes. Bien sûr, il faudrait neutraliser ces calculs des crises (subprimes, covid). Selon le chercheur Xavier Rigot de l’OFCE, la dette publique connaît une hausse moyenne de 2,2 points de PIB par an depuis 2017 sous la présidence d’Emmanuel Macron. En neutralisant les effets des crises, l’OFCE considère tout de même que « La hausse structurelle de la dette publique depuis 2017 est en grande partie attribuable à des mesures budgétaires non financées. » , et d’ajouter : « Nous estimons qu’en 2023, l’ensemble des mesures structurelles non financées non prévues représente 40 milliards, entraînant une dégradation du déficit structurel annuel de 1,4 point de PIB par rapport à 2016 ».

Dès lors, si la trajectoire des comptes découle d’un manque de recettes, un effort recette s’avère nécessaire en parallèle d’un effort d’efficience sur les dépenses.

Considérant la baisse du rendements des forfaits sociaux, le présent amendement propose d’en augmenter le taux normal de 20 % à 30 %.

Cette proposition s’appuie en partie sur les analyses du CPO, qui déclare que « Réinterroger les modalités de fiscalisation des assiettes les plus importantes, à savoir les dispositifs de participation et d’intéressement et la protection sociale complémentaire, aurait un rendement financier significatif » et estime que la hausse d’un point de forfait social équivaut à un rendement à comportement inchangé de 0,4 Md €, soit 4 Md € pour une hausse de 10 points.