Projet de loi Projet de loi de finances pour 2026
Direction de la Séance
N°I-1500 rect.
26 novembre 2025
(1ère lecture)
PREMIÈRE PARTIE
(n° 138 , 139 , 143, 144)
AMENDEMENT
| C | |
|---|---|
| G | |
| En attente de recevabilité financière | |
présenté par
MM. Grégory BLANC et DOSSUS, Mme SENÉE, MM. BENARROCHE et DANTEC, Mme de MARCO, MM. FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mmes OLLIVIER et PONCET MONGE, M. SALMON et Mmes SOUYRIS et Mélanie VOGEL
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 11
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
1° L’article L. 453-65 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « Le » , il est inséré le mot : « premier » ;
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le deuxième seuil de taxation au niveau mondial est dépassé lorsque la somme des contreparties des services d’intermédiation numérique et des services de publicité ciblée excède 3 milliards d’euros.
« Le troisième seuil de taxation au niveau mondial est dépassé lorsque la somme des contreparties des services d’intermédiation numérique et des services de publicité ciblée excède 10 milliards d’euros. » ;
2° L’article L. 453-70 est ainsi modifié :
a) Au 2°, après les mots : « Le taux de 3 % », sont insérés les mots : « lorsque la somme des contreparties mentionnées au premier alinéa de l’article L. 453-65 excède le seuil de taxation mondial prévu au même alinéa. » ;
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de 6 % lorsque la somme des contreparties mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 453-65 excède le seuil de taxation mondial prévu au même alinéa. »
« Le taux de 10 % lorsque la somme des contreparties mentionnées au troisième alinéa de l’article L. 453-65 excède le seuil de taxation mondial prévu au même alinéa. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.
Objet
Le présent amendement fait partie des positions politiques structurantes partagées par les groupes CRCE-K, GEST et SER et faisant l’objet de dépôts d’amendements identiques coordonnés à l’occasion du projet de loi de finances pour 2026.
Il instaure une progressivité du taux de la taxe sur les services numériques, afin de renforcer la contribution des grandes plateformes mondiales tout en préservant les acteurs français déjà soumis à l’impôt sur les sociétés.
Le taux de 3 % s’appliquera jusqu’à 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires mondial, puis sera porté à 6 % entre 3 et 10 milliards d’euros, et à 10 % au-delà.
Le relèvement du premier seuil à 3 milliards d’euros permet d’exclure les entreprises françaises déjà pleinement imposées, comme Leboncoin, tout en concentrant la taxe sur les acteurs dont la contribution effective demeure insuffisante. L’objectif n’est pas de distinguer selon la nationalité, mais de garantir que toutes les entreprises opérant sur le marché français contribuent à hauteur de leurs bénéfices réels.
Les grandes plateformes numériques sont aujourd’hui hégémoniques et ont étendu leur influence sur tous les pans de l’économie. De nombreux commerces dépendent de leur position en tête d’une page Google, du réseau logistique d’Amazon ou de leur réputation sur Facebook. Ces entreprises ne sont plus simplement sur un marché : elles sont devenues le marché lui-même.
Cette position dominante leur permet d’exercer une emprise quasi-monopolistique, tirant profit de la rente du premier arrivé et du travail gratuit de leurs utilisateurs. Elles incarnent ce que l’économiste Cédric Durand décrit comme un « techno-féodalisme » , où quelques puissances numériques concentrent la valeur, les données et le pouvoir de marché, au détriment de la collectivité.
La France, pionnière dans la taxation des géants du numérique, doit actualiser son modèle pour rétablir l’équité fiscale. D’autres pays ont déjà adopté des dispositifs plus ambitieux : l’Italie et l’Espagne ont retenu des seuils de chiffre d’affaires plus bas, tandis que la Turquie applique un taux plus élevé, de 7,5 %.
La présente mesure ne cherche pas à punir mais à corriger un déséquilibre fiscal objectif. Le taux majoré proposé – jusqu’à 10 % sur les revenus numériques – correspond à une estimation réaliste de la contribution que ces entreprises devraient verser si leurs profits étaient effectivement imposés en France. Il s’agit même d’une fourchette basse de la différence entre l’impôt théorique et l’impôt effectivement acquitté.
Adopter cet amendement, c’est corriger une injustice fiscale flagrante, rétablir l’équité entre les entreprises et affirmer la souveraineté fiscale de la France. C’est aussi un acte de résistance démocratique face aux grandes plateformes, ces nouveaux seigneurs du numérique, symboles d’un techno-féodalisme incompatible avec la justice sociale et la souveraineté économique.
NB :La rectification consiste en un changement de place de l'article additionnel après l'article 4 vers l'article additionnel après l'article 11.