Projet de loi Projet de loi de finances pour 2026

Direction de la Séance

N°I-2010 rect.

26 novembre 2025

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 138 , 139 , 143, 144)


AMENDEMENT

C
G  
En attente de recevabilité financière

présenté par

M. JOMIER, Mme BONNEFOY, M. OMAR OILI, Mme POUMIROL, M. ROS, Mme ROSSIGNOL et M. TISSOT


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 23

Après l’article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 313-20 du code des impositions sur les biens et services est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les boissons alcooliques ne peuvent être vendues à un prix toutes taxes comprises inférieur à leur prix minimum.

« Le prix minimum d’une boisson alcoolique est le produit du prix minimum par unité de l’alcool, du titre alcoométrique volumique de la boisson et du volume de celle-ci en litres.

« Une unité d’alcool correspond à 10 grammes d’alcool pur.

« Le prix minimum par unité de l’alcool est déterminé chaque année par décret après consultation de la Haute Autorité de Santé. »

II. – L’accise applicable aux boissons alcooliques mentionnées aux articles L. 313-15, L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23, L. 313-24 et L. 313-25 du code des impositions des biens et des services est réduite de 0,1 %.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Objet

Cet amendement propose l’instauration d’un prix minimum pour les boissons alcooliques et abaisse la fiscalité sur les boissons alcooliques dont le prix excède déjà ce seuil.

Cette mesure, inspirée de la législation écossaise, est recommandée par l’OMS.

En 2018, l’Écosse a instauré un prix minimum par unité d’alcool. Cela lui a permis de réduire significativement la consommation excessive d’alcool et la morbidité associée, sans effet notable sur les recettes du secteur alcoolier. La mesure a entrainé une réduction de 13,4 % du nombre de décès liés à la consommation d’alcool et une baisse de 7,3 % des hospitalisations liées aux maladies chroniques liées à l’alcool.

En ciblant les boissons alcooliques vendues très peu cher (visant essentiellement un public jeune et précaire), le prix minimum permet de réduire la consommation à risque, sans effet sur la consommation modérée[1].

La France est le huitième pays le plus consommateur d’alcool au sein de l’OCDE. 8 % des adultes y consomment la moitié de l’alcool et 22 % des Français ont une consommation à risque. Instaurer un prix minimum, une mesure qui cible la consommation à risque, est donc particulièrement pertinent.

En France, l’alcool est responsable de 49 000 décès par an. C’est le deuxième facteur de risque évitable concernant le cancer. La mise en place du prix minimum permettrait de réduire de 22 % la mortalité due aux cancers imputables à l’alcool.

Contrairement à certaines idées reçues, cette mesure n’aura pas d’impact négatif sur le secteur viticole. Au contraire, elle aura un effet positif sur les petites exploitations françaises.

En fixant un prix minimum par unité de 10 grammes d’alcool à 0,50 €, une bouteille de vin titrant à 12° ne pourrait être vendue à moins de 3,50 €. Ce dispositif ne concernera donc pas les produits dont le prix de vente est déjà supérieur au seuil fixé, ce qui est le cas de l’immense majorité des vins commercialisés en France.

Cette réforme constitue ainsi une opportunité pour les petits producteurs. La mise en place d’un prix minimum incitera mécaniquement les consommateurs à se détourner des produits les moins qualitatifs, aujourd’hui vendus à très bas prix, au profit de produits de meilleure qualité. Cet effet entraînera une augmentation des ventes pour nos filières locales. En outre, la baisse du volume de ventes pour les alcools les moins chers pourra être compensée par l’augmentation des marges. Ainsi, l’instauration du prix minimum permettra d’augmenter les profits des producteurs indépendants de vin de 39 %.[2]

Afin d’accompagner davantage les petits producteurs, cet amendement propose d’abaisser marginalement la fiscalité sur les boissons alcooliques dont le prix de vente excède déjà le prix minimum.

Cette réforme aura un impact positif sur les finances publiques. Elle permettra de réduire les dépenses de santé de l’ordre de 237 millions d’euros par an à l’horizon 2050.

Alors que la consommation d’alcool représente 7,8 milliards d’euros de dépenses publiques de santé, pour seulement 4 milliards d’euros de recettes[3] et que le coût social de l’alcool est estimé à 102 milliards d’euros[4], il est urgent d’agir.

Le prix minimum est une mesure de santé publique qui a fait ses preuves à l’étranger, sollicitée par l’OMS, qui permettra d’améliorer la santé des Français, de réduire les dépenses et de privilégier nos filières locales de qualité.

 

[1] En Écosse, la consommation à moindre risque est restée stable. Les repères de consommation à moindre risque recommandés au Royaume-Uni sont de 14 verres par semaine.

[2] Étude de 2023 de l’INCa et de la Mildeca.

[3] Rapport du Sénat sur la fiscalité comportementale. Mai 2024.

[4] Observatoire Français des drogues et Toxicomanie (OFDT).



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.