Projet de loi Projet de loi de finances pour 2026
Direction de la Séance
N°I-280
23 novembre 2025
(1ère lecture)
PREMIÈRE PARTIE
(n° 138 , 139 , 143, 144)
AMENDEMENT
| C | |
|---|---|
| G | |
| En attente de recevabilité financière | |
présenté par
M. LEVI
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 21
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les dispositions des articles L. 433-84 à L. 433-90 du code des impositions sur les biens et services sont maintenues dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2025.
II. - En conséquence, la trajectoire d’augmentation des tarifs de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) applicables à l’enfouissement et à l’incinération des déchets non dangereux prévue dans le projet de loi de finances pour 2026 est supprimée.
III. - La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle sur les produits polluants non soumis à filière de responsabilité élargie du producteur (REP).
Objet
La loi de finances pour 2019 a engagé une trajectoire de hausse sans précédent de la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) appliquée à l’enfouissement et à l’incinération des déchets. Entre 2018 et 2025, le prix à la tonne est ainsi passé de 18 à 65 € pour la mise en décharge (+261 %) et de 3 à 15 €/t (+ 400 %).
Cette politique poursuivait trois objectifs : réduire de moitié la mise en décharge à horizon 2025 par rapport à 2010, renforcer le principe pollueur-payeur, et aligner la fiscalité française sur la hiérarchie européenne des modes de traitement des déchets (directive 2008/98/CE).
Cette trajectoire devait s’accompagner en miroir de la création ou de la montée en puissance de nouvelles filières de responsabilité élargie du producteur (REP), destinées à alléger la charge financière des collectivités. Or, ces contreparties n’ont pas été au rendez-vous : plusieurs filières ont pris du retard (Déchets d’Éléments d’Isolation et de Construction – DEIC) ou ont été partiellement suspendues (Produits et Matériaux de Construction du Bâtiment – PMCB), tandis que d’autres connaissent des difficultés récurrentes (filière emballages, notamment).
Dans le même temps, les volumes de déchets mis en décharge n’ont pas diminué à la hauteur des attentes, et la charge financière du traitement reste principalement supportée par les collectivités.
Or, plutôt que d’interroger les causes de cet échec partiel, le projet de loi de finances pour 2026 prévoit au contraire de poursuivre la hausse de la TGAP, accentuant la pression sur les collectivités, qui en supportent déjà près de 70 % de la charge.
En pratique, la TGAP « aval » actuelle frappe indistinctement les déchets recyclables et ceux qui ne le sont pas. Les collectivités se trouvent ainsi en bout de chaîne, contraintes de gérer des flux qu’elles ne maîtrisent pas, alors que les producteurs de biens non recyclables échappent largement à leur responsabilité environnementale. Dans les faits, ce mécanisme renverse le principe du pollueur-payeur : la taxe est in fine acquittée par les ménages, via la fiscalité locale, tandis que les metteurs sur le marché de produits non recyclables restent peu sollicités.
La nouvelle hausse proposée est par ailleurs incohérente au regard des efforts réalisés par les collectivités, qui ont significativement amélioré le recyclage, la valorisation énergétique et la prévention, contribuant déjà à la réduction des tonnages enfouis.
Une réforme plus juste consisterait à instaurer une filière REP « déchets résiduels » , véritable dispositif de responsabilité « amont » visant les produits non recyclables dès leur mise sur le marché. Cette évolution rétablirait la cohérence du système : elle responsabiliserait les producteurs tout en allégeant la charge supportée par les collectivités et les contribuables.
Dans l’attente de cette refonte, le présent amendement propose de geler la TGAP au niveau atteint en 2025.
Ce moratoire vise à préserver la soutenabilité financière du service public de gestion des déchets, et à ouvrir le chantier d’une fiscalité environnementale véritablement incitative distinguant clairement les déchets évitables de ceux qui ne le sont pas, et fléchant les recettes vers les politiques locales d’économie circulaire.
Le présent amendement a été élaboré en collaboration avec France Urbaine, qui représente les grandes villes et métropoles françaises et alerte sur l’impact financier croissant de la TGAP sur les budgets des collectivités territoriales.