Pénalisation des génocides : les temps forts de la discussion générale
« Je veux dire à nos compatriotes d'origine arménienne la compassion que nous éprouvons tous pour l'existence du génocide de 1915, existence qui ne fait aucun doute -Esther Benbassa (écolo, Val-de-Marne) pourra vous le confirmer, elle qui a fait sa thèse d'histoire sur la Turquie au début du siècle. Il ne s'agit nullement de minimiser les souffrances qu'ont subies les Arméniens » a expliqué en préambule Jean-Pierre Sueur (Soc, Loiret), président de la commission des lois et rapporteur sur ce texte. « Le débat ne porte pas sur le génocide mais sur le vote de cette loi. Ce texte encourt un fort risque de censure constitutionnelle. Notre commission a considéré qu'il n'appartient pas à la loi de décider de l'Histoire. « Le Parlement n'est pas un tribunal », ajouterai-je avec Robert Badinter. Il est bien d'autres voies pour s'exprimer ».
« On voit des milliers de compatriotes d’origine arménienne et turque en train de manifester devant le Sénat » a déclaré le président du groupe écologiste, Jean-Vincent Placé (Essonne, Ecolo), « ce sont des lois qui divisent quand nous voulons, nous, un travail de mémoire, de réconciliation. Nous allons voter unanimement contre cette loi. Mais le débat doit avoir lieu, notamment en Turquie. Sans reconnaissance, il ne saurait y avoir d’intégration à l’Union européenne : voilà un moyen pour faire bouger les lignes tout en respectant le droit et notre Constitution. Le législateur est-il dans son rôle ? Nous disons non. Cette loi sert-elle la cause arménienne ? Nous disons non, et nous voterons unanimement contre cette loi ».
« La paix ne peut se construire sur la négation de l’Histoire » a opposé Sophie Joissains (UMP, Bouches-du-Rhône). « La présente proposition de loi vise à rendre effective la loi du 29 janvier 2001 : la loi doit imposer le respect des normes qu’elle édicte. Seule la négation de la Shoah est pénalement réprimée aujourd’hui. Le texte actuel vise à étendre cette répression à tous les génocides reconnus par la loi. Le génocide est le plus grave crime commis contre l’humanité. La France doit accorder protection aux descendants des victimes du génocide qui vivent sur notre territoire » a affirmé la sénatrice, invitant ses collègues à voter contre la motion d’irrecevabilité.
« Pourquoi ne pas laisser les historiens faire l’Histoire ? » a interrogé Nathalie Goulet (UCR, Orne) qui a salué « la position de notre commission des lois et de son président. Les victimes du génocide arménien méritent mieux que des considérations électoralistes. En adoptant ce texte aujourd’hui, le Parlement va compromettre la position internationale de la France. Je compte sur la sagesse du Sénat pour mettre un terme à ce naufrage législatif ».
A l’issue de la discussion générale, le Sénat a examiné la motion d’irrecevabilité adoptée par la commission des lois.
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