Jeudi 13 octobre 2022

- Présidence de M. Stéphane Artano, président -

Étude sur la gestion des déchets dans les outre-mer - Table ronde sur les aspects sanitaires de la gestion des déchets dans les outre-mer

M. Stéphane Artano, président. - Chers collègues, nous reprenons ce matin nos auditions dans le cadre de la préparation du rapport de la délégation sur la gestion des déchets dans nos outre-mer. Nos deux rapporteures, Gisèle Jourda et Viviane Malet, effectuent un travail d'investigation considérable et ont souhaité un éclairage particulier sur les aspects sanitaires de cette problématique. Nous entendrons donc successivement :


· au nom de la Direction générale des outre-mer (DGOM), M. Stanislas Alfonsi, adjoint au sous-directeur des politiques publiques et Mme Delphine Colle, chef du bureau de l'écologie, du logement, du développement et de l'aménagement durables (BELDAD) ;


· pour la Direction générale de la prévention des risques (DGPR), MM. Philippe Bodenez, chef du service des risques sanitaires liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses et Jean-François Ossola, adjoint de la cheffe de la planification et de la gestion des déchets ;


· pour la Direction générale de la santé (DGS), Mme Caroline Paul, chef du bureau environnement extérieur et produits chimiques et M. François Klein, chef de la mission outre-mer.

Nos rapporteures vous ont transmis leurs questions. Les personnes concernées par cette problématique sont souvent en situation de précarité. Outre les pathologies et les contaminations directes, nous sommes aussi préoccupés par la pollution de l'air, de l'eau et du sol. N'oublions pas non plus les enjeux spécifiques à chaque territoire, comme la gestion des déchets à la suite des essais nucléaires en Polynésie ou les déchets issus de l'exploitation minière en Nouvelle-Calédonie et en Guyane.

M. Stanislas Alfonsi, adjoint au sous-directeur des politiques publiques de la Direction générale des outre-mer (DGOM). - Monsieur le président, nous nous sommes déjà vus à la fin du mois de mai dans le cadre d'une audition plus générale. C'est toujours pour nous un plaisir de venir rendre compte au Sénat et à sa délégation aux outre-mer. Aujourd'hui, les questions portent sur la thématique des déchets et sur la dimension sanitaire de cette politique publique. Nous sommes accompagnés par la DGPR et par la DGS. Compte tenu de la technicité des questions qui nous ont été transmises et de leur lien avec la santé ou la prévention des risques, nous considérons que la DGOM interviendra moins que nos autres collègues.

La DGS répondra à la première question, qui porte sur les aspects généraux, les pathologies et les contaminations. Elle traitera également la deuxième question relative aux actions de sensibilisation, ainsi que la troisième question, relative à la prolifération des nuisibles. La quatrième question, qui porte sur les mesures de la qualité des eaux et des sols, sera prise en charge par la DGOM et la DGPR. La DGS, la DGPR et la DGOM répondront à la cinquième question, relative aux déchets d'activités de soins à risques infectieux (DASRI), ainsi qu'à la sixième question, afférente à la filière responsabilité élargie des producteurs (REP). La septième question, relative aux adaptations réglementaires, sera traitée par la DGS et la DGPR. La huitième question, qui porte sur les déchets radioactifs issus des essais nucléaires en Polynésie, sera prise en charge par la DGPR. La neuvième question, relative à la Nouvelle-Calédonie et à la Guyane, sera traitée par la DGPR et la DGS. Enfin, la DGPR répondra à la dixième question, relative à l'incinération des déchets.

Pour répondre à ces questions très techniques, les directions « métiers » sont davantage en première ligne que la DGOM. Je vous propose de céder la parole aux collègues de la DGS pour la première question.

M. François Klein, chef de la mission outre-mer. - Mesdames et Messieurs les sénatrices et les sénateurs, la DGS vous remercie de pouvoir s'exprimer sur les enjeux sanitaires liés aux déchets dans les outre-mer. Nous constatons tout d'abord que l'impact sanitaire lié aux déchets est similaire à celui rencontré sur l'ensemble du territoire français, mais que les risques s'en trouvent augmentés dans nos outre-mer en raison des difficultés rencontrées dans la gestion des déchets.

Quels sont ces risques et quelles sont les pathologies de contamination constatées ? Tout d'abord, des déchets sont abandonnés dans l'espace public, ce qui engendre des conséquences sanitaires manifestes, qui impactent les populations. L'abandon de déchets, notamment les gros électroménagers et les véhicules hors d'usage (VHU) favorisent la prolifération d'espèces nuisibles, potentiellement vectrices de maladies transmissibles aux populations. Les déchets favorisent la rétention d'eau stagnante, la constitution de gîtes larvaires et entraînent le développement de moustiques vecteurs de différentes maladies (chikungunya, dengue, paludisme, etc.). Ces situations favorisent aussi la prolifération de rongeurs, porteurs de maladies telles que la leptospirose.

Plus généralement, l'abandon de déchets entraîne une dégradation de l'environnement proche des populations, notamment de la qualité des eaux superficielles et souterraines destinées à la consommation. La qualité de l'air est également impactée, en termes de nuisances olfactives, et suite au brûlage régulier de déchets à proximité des habitations. Une enquête effectuée à La Réunion montre que 86 % des Réunionnais pensent que les déchets dégradent les sols et 83 % perçoivent les conséquences négatives pour leur santé. Pour autant, les consignes émises par les autorités sont rarement respectées.

À Mayotte et ailleurs, plusieurs maladies sont favorisées par l'abandon de déchets : le paludisme, la dengue avec des épidémies successives, la leptospirose - qui revient régulièrement en Martinique, en Guyane et à Mayotte -, qui peut générer des conséquences très graves. La leptospirose entraîne notamment de nombreuses hospitalisations. En Guyane, une centaine de cas est comptabilisée chaque année. Le taux est 70 fois supérieur à celui de la France hexagonale.

Des maladies hydriques sont également favorisées par l'abandon de déchets, notamment la typhoïde et l'hépatite A. À Mayotte, 14 cas de typhoïde ont été dénombrés en 2021. Entre 50 et 100 cas d'hépatite A s'y ajoutent. À Mayotte, l'Agence régionale de santé (ARS) engage de nombreuses actions de veille, de prévention et de traitement des déchets pour limiter ces impacts sanitaires. Ces actions sont menées dans le cadre de la lutte anti-vectorielle (gîtes larvaires) et prennent la forme d'interventions directes et de moyens mis en oeuvre pour identifier les gîtes à risque dans les décharges sauvages, dans les véhicules hors d'usage, dans les stocks de pneus et dans l'électroménager abandonné. L'ARS accompagne aussi les associations et les collectivités pour leurs actions de lutte contre les déchets, généralement dans le cadre de chantiers d'insertion.

En Martinique, différents incendies ont frappé des sites recevant des déchets en 2021. L'ARS est beaucoup intervenue auprès du syndicat en charge du traitement des déchets, afin de limiter les risques sanitaires induits. En outre, des interrogations portent sur les déchets issus des sargasses. Ainsi, des incertitudes demeurent sur les conséquences sanitaires du dégazage, en particulier les émissions d'ammoniac.

Une problématique porte aussi sur les déchets verts, à La Réunion et à Saint-Pierre-et-Miquelon notamment. Par ailleurs, le plomb est une autre source de contamination, notamment à La Réunion, à la suite de l'abandon de batteries de voitures ou de batteries à usage industriel. Nous avons constaté des regroupements de cas de plombémie et de saturnisme infantile autour de zones de précarité dans lesquelles des batteries avaient été abandonnées. Les dépôts sauvages de batteries ont également pris des proportions importantes en milieu urbain, à La Réunion, à Mayotte et en Guyane. Des pollutions diffuses ultérieures sont à craindre.

J'aborde la seconde question. Les ARS effectuent des actions de sensibilisation des populations aux risques sanitaires liés aux déchets. Les différents territoires mettent en oeuvre des plans régionaux santé-environnement, qui comprennent tous un volet de sensibilisation à la question des déchets. À titre d'illustration, l'ARS Guadeloupe a organisé de nombreuses réunions d'information sur le sujet de l'enlèvement des véhicules hors d'usage. À Mayotte, le plan 2020-2024 comprend de nombreuses actions de sensibilisation. Au final, ces différentes actions ont pour but de réduire la production de déchets à la source et de résorber les dépôts sauvages. En la matière, nous n'obtenons pas toujours les résultats souhaités.

En Guyane, les différents acteurs sont également sensibilisés à cet enjeu, en lien avec des associations telles que la Croix-Rouge pour des projets d'assainissement. L'ARS a financé un projet « Wash » dont l'objectif est de faire monter en compétence les habitants des zones isolées ou précaires sur la bonne gestion de leurs points d'eau et des déchets.

J'ai déjà répondu à la troisième question, relative à la prolifération des nuisibles. Nous avons constaté, lors des enquêtes environnementales relatives aux cas de leptospirose ou de dengue, des problèmes sanitaires liés à la mauvaise gestion des déchets. Pour autant, il est difficile d'isoler la cause.

M. Philippe Bodenez, chef du service des risques sanitaires liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses. - En ma qualité de chef du service des risques sanitaires liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses, je peux m'appuyer sur une sous-direction en charge de l'économie circulaire et des déchets et sur une sous-direction en charge des enjeux de santé-environnement. Le conseil national de l'économie circulaire nous permet de discuter avec l'ensemble des parties prenantes, techniques ou politiques. La présidence de ce conseil reste néanmoins à pourvoir depuis les dernières élections législatives.

Notre service assure la cohérence entre la gestion des déchets et la prise en compte des impacts environnementaux de certaines pratiques. Nous menons plusieurs actions pour réduire l'impact d'une gestion des déchets déficiente sur les épidémies de dengue transmises par des moustiques. Ainsi, s'agissant des véhicules hors d'usage, dans lesquels les insectes peuvent pulluler, nous avons mis en place un plan de reprise des véhicules hors d'usage par les constructeurs automobiles. Ce plan permet de faire financer par ces derniers la reprise de véhicules hors d'usage. À ce jour, 21 437 véhicules hors d'usage ont été repris, dont 9 000 en Martinique, 4 000 en Guadeloupe, 6 000 à La Réunion, 400 à Mayotte et 2 000 en Guyane. Ces véhicules ont été récupérés dans l'espace public, mais nous avons récemment adopté des dispositions permettant de renforcer la prise en charge de ces véhicules dans des zones privées. De plus, un dispositif de police inscrit à l'article L.541-3 du code de l'environnement permet, lorsque le propriétaire d'un véhicule hors d'usage ne satisfait pas à l'obligation de remettre son véhicule à une filière agréée, de se substituer à celui-ci et de venir faire enlever le véhicule, afin de le déposer au centre VHU.

Nous avons également renforcé les obligations législatives et réglementaires, afin de faciliter la prise en charge de ces véhicules. À l'époque, nous estimions que 60 000 véhicules étaient concernés. Aujourd'hui, nous en sommes donc au tiers et le plan de reprise des véhicules hors d'usage se poursuit.

Une autre disposition figure dans la loi et vise à faire du sujet des véhicules hors d'usage un objet des filières dites à responsabilité élargie des producteurs (REP). Ainsi, à compter du 1er janvier 2023, une filière à responsabilité élargie des producteurs doit être mise en place pour les véhicules, dans laquelle les constructeurs financent ou traitent directement les véhicules hors d'usage. Jusqu'à présent, le système était équilibré financièrement dans l'Hexagone, mais ne l'était pas dans les territoires d'outre-mer ; notre objectif est d'harmoniser les règles qui s'appliqueront dans la collecte et la gestion des véhicules hors d'usage, dans l'Hexagone comme en outre-mer. À l'époque de l'adoption de la loi, en 2020, nous nourrissions des inquiétudes particulières pour les outre-mer. Nous avons donc favorisé le développement des éco-organismes dans les territoires d'outre-mer. Lorsque le taux de collecte, de tri ou de valorisation de déchets dans une filière REP est inférieur à la moyenne nationale, les éco-organismes doivent renforcer leurs financements pour permettre un retour à la normale dans la collecte et la valorisation des déchets.

Nous avons également mis en place une filière REP dans le domaine des piles et accumulateurs, incluant les batteries de voiture. Cette filière est imposée par la Commission européenne. Les deux éco-organismes chargés de cette collecte doivent déployer des plans de prévention et de gestion des déchets spécifiques aux outre-mer, afin de rattraper le retard pris.

Enfin, les pneumatiques sont des gîtes larvaires. En 2020, nous avons fait voter un article de loi prévoyant la réintégration des pneumatiques dans la législation relative aux filières REP. Jusqu'à présent, au niveau des producteurs, le volontariat était de mise dans la collecte des pneumatiques. Nous travaillons sur les textes d'application de la loi, afin de disposer d'une filière REP pour la reprise des pneumatiques. En outre, la loi de 2020 permet désormais d'impliquer les éco-organismes dans la gestion des dépôts sauvages. Lorsqu'un dépôt sauvage est repéré, il est désormais possible de demander aux éco-organismes de financer la reprise de ces déchets au prorata de la composition des déchets.

Globalement, la gestion des déchets en outre-mer présente une difficulté intrinsèque : le manque de disponibilité de filières de traitement et de valorisation des déchets. Ce manque de filières industrielles rend nécessaire l'acheminement des déchets vers l'Hexagone.

Dans certains cas, il serait possible de développer des filières locales, notamment dans le domaine de la surveillance et du contrôle. Les incendies survenus dans des décharges en Martinique entre octobre 2021 et janvier 2022 sont liés aux difficultés de gestion, l'incinérateur étant alors à l'arrêt. Ils ont produit des fumées qui ont pu exposer les riverains à des substances toxiques. Lorsque les services de la préfecture ont voulu réaliser des analyses, il a été difficile de mobiliser les laboratoires du Réseau des intervenants en situation post-accidentelle (Ripa) dans un délai inférieur à dix jours. Nous devons donc renforcer la disponibilité des laboratoires dans les territoires d'outre-mer ou faire venir plus rapidement des laboratoires pour effectuer des prélèvements et des analyses. L'association de contrôle de la qualité de l'air locale, Madininair, ne disposait pas non plus des moyens permettant d'effectuer des mesures dans la zone des incendies. Nous devons ainsi travailler non seulement sur les filières de gestion, mais aussi sur les moyens déployés en réaction à des accidents.

Concernant l'incinération, le débat est propre à la France. Cela s'explique par le fait que durant une longue période, les incinérateurs de déchets n'étaient pas conformes à leurs arrêtés d'exploitation, ce qui a généré des craintes au sein de la population. Le domaine de l'incinération est aujourd'hui l'un des plus contrôlés et des plus suivis. Les incinérateurs doivent respecter les dispositions de la directive européenne sur les effluents industriels. Cette directive prévoit périodiquement une mise à jour des réglementations techniques applicables sur l'ensemble du territoire européen. Nous avons donc récemment mis à jour l'arrêté ministériel du 12 janvier 2021 sur ce sujet. De nouveaux paramètres en sortie d'incinérateurs ont ainsi été fixés. En outre, de nouvelles techniques de dépollution à la sortie des cheminées sont régulièrement imposées. Dans ce contexte, les règles s'appliquent dans l'Hexagone comme dans les outre-mer.

S'agissant des déchets de soins à risque infectieux, deux types de traitement coexistent : l'incinération et la banalisation. Ce second procédé permet d'éliminer les bactéries présentes dans les déchets avant leur remise aux filières d'enfouissement locales. Dans les Antilles, 823 tonnes de déchets de soins à risque infectieux ont été incinérées dans ces conditions en 2021.

En outre, le soutien à l'éco-organisme chargé de la collecte des déchets de soins à risque infectieux chez les particuliers a été renforcé. L'année dernière, le taux de collecte des déchets de soins à risque infectieux s'établissait à 82 % dans l'Hexagone et à 75 % dans les outre-mer ; un rattrapage progressif est mis en place dans les outre-mer, notamment en Guyane où le taux n'est que de 40 %. À ce titre, des campagnes de communication sont menées. Enfin, la procédure de renouvellement de l'agrément de l'éco-organisme est en cours. Celui-ci devra notamment transmettre, d'ici à mi 2023, un plan de prévention et de gestion des déchets en outre-mer. Nous attendons des progrès en la matière, notamment en Guyane.

Concernant les sargasses, la DGOM a mis en place un plan interministériel de lutte contre les sargasses en 2022. Selon la DGPR, il est impératif de renforcer la stratégie de broyage des sargasses collectées en mer. En effet, lorsque celles-ci sont à terre, elles sont très difficiles à gérer, car elles sont chargées en métaux lourds, en chlordécone et en sel. Nous travaillons avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) pour sécuriser les stockages qui posent problème aujourd'hui, afin d'éviter les émanations d'hydrogène sulfuré.

S'agissant des déchets miniers, une réglementation européenne de 2006 a été transposée en France en 2010 par un décret et plusieurs arrêtés ministériels. L'un de ces arrêtés porte sur les installations de stockage de déchets miniers.

Pour rappel, plusieurs activités minières coexistent. L'exploitation alluvionnaire par procédé mécanique génère surtout des déchets inertes avec une toxicité faible. Le danger survient lorsque l'exploitation se déroule dans un cadre illégal avec l'emploi de mercure pour faciliter l'extraction de l'or. Des plans ont été mis en place avec la Gendarmerie nationale pour démanteler les camps de mineurs illégaux en Guyane, c'est un travail de Pénélope. Par ailleurs, sur ce territoire, une unité légale de traitement du minerai n'est pas alluvionnaire et génère des résidus miniers après traitement chimique. Ces résidus sont d'une part les stériles miniers, qui représentent d'importants volumes non toxiques, et d'autre part les résidus miniers post-traitement chimique du minerai. Ceux-ci peuvent contenir des métaux lourds ou des substances qui ont été utilisées dans le cadre du traitement chimique de ces minerais. En Guyane, nous disposons d'une installation de stockage de ces déchets miniers. Celle-ci est soumise à un arrêté préfectoral et doit répondre aux conditions définies dans l'arrêté qui transpose la directive européenne sur les stockages. Les enjeux portent sur la stabilité des stockages (digues) et sur les substances chimiques pouvant émaner des stockages. Sur ce second point, des prélèvements sont régulièrement effectués afin de s'assurer de l'absence de contamination de l'environnement.

La Nouvelle-Calédonie est l'autre territoire marqué par une activité minière conséquente. Trois grandes usines de traitement y sont implantées, dont deux usines pyrométallurgiques et une usine hydrométallurgique. Les compétences en matière de contrôle appartiennent aux provinces ou à la Nouvelle-Calédonie. Le traitement des déchets est effectué de manière industrielle, à travers des parcs à stériles miniers et des stockages de résidus miniers. Plusieurs initiatives ont été lancées pour évaluer l'impact sanitaire de ces déchets sur les populations locales. À titre d'illustration, une initiative portée par la Direction des mines de Nouvelle-Calédonie (DIMENC), vise à mesurer le niveau d'imprégnation des populations locales à un certain nombre de polluants qui peuvent être émis par l'activité minière tels que le nickel, le chrome, le cobalt et le manganèse. Une surexposition éventuelle des populations riveraines est également recherchée. Aujourd'hui, des études sont menées pour déterminer si les rejets liés aux activités minières peuvent être à l'origine de pathologies. En tout état de cause, ces activités font l'objet de dispositions de contrôles. L'exploitation du nickel peut conduire à des émanations de poussières ; des travaux sont en cours pour les limiter.

S'agissant des déchets nucléaires en Polynésie française, la France a procédé à des expérimentations nucléaires entre 1966 et 1996 dans le centre d'expérimentation du Pacifique situé dans les atolls de Mururoa et de Fangataufa. Des déchets ont été immergés entre 1966 et 1976 dans cette zone, mais aussi au large de l'atoll d'Hao. Certains déchets ont été stockés sur place dans des puits à Mururoa. Les quantités de déchets figurent à l'inventaire national de l'ANDRA, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. 4 192 m3 de déchets de haute activité, les déchets les plus dangereux, ont été générés à l'occasion de ces expérimentations. Les déchets de moyenne activité à vie longue représentent un volume dix fois supérieur à celui-ci et sont également stockés dans des puits. Ces déchets sont placés sous la responsabilité du ministère de la Défense. En 1996, la France a demandé une mission d'expertise à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pour déterminer la soutenabilité des choix de stockage des déchets dans les atolls. À l'époque, les experts n'avaient pas soulevé de préoccupations majeures. Ils ont indiqué que la poursuite de la surveillance n'était pas nécessaire. Néanmoins, la surveillance de ces atolls a été maintenue.

M. Stanislas Alfonsi. - Monsieur le président, les interventions de la DGS et de la DGPR ont largement répondu au questionnaire. Je cède la parole à Delphine Colle pour évoquer la question relative à Wallis-et-Futuna.

Mme Delphine Colle, chef du bureau de l'écologie, du logement, du développement et de l'aménagement durables (BELDAD). - Cette question porte sur la mesure de la qualité des eaux et des sols dans les secteurs des anciennes décharges non contrôlées ou sujettes à précautions. À Wallis, la lentille d'eau douce fait l'objet d'un suivi régulier par le territoire, sur l'ensemble de l'île. Au centre d'enfouissement technique de Wallis, un piézomètre permet de suivre la qualité de l'eau du site. Des analyses sont régulièrement réalisées sur le territoire par le laboratoire d'analyse des eaux du territoire. Ces analyses sont toutefois limitées aux paramètres bactériologiques et physico-chimiques. Elles démontrent l'absence de pollution. En outre, des campagnes d'analyse plus globales sont menées à intervalles réguliers et transmises en Nouvelle-Calédonie. La dernière campagne, qui remonte à 2018, fait état de l'absence de difficulté particulière, que ce soit en termes de composition chimique des eaux souterraines ou en termes bactériologiques. À l'inverse, à proximité des dépôts, les sols sont contaminés en surface sur 50 cm de profondeur par des hydrocarbures, des métaux et des composés industriels. Cette pollution superficielle n'affecte pas les eaux souterraines.

À Futuna, aucune nappe phréatique et aucune ressource en eau superficielle ne se trouvent à proximité du centre d'enfouissement.

M. Stéphane Artano, président. - Je cède la parole à nos rapporteures.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - Je vous remercie pour vos exposés exhaustifs, qui ont couvert les questions que nous vous avions adressées. La dimension sanitaire est fondamentale et fait partie intégrante du sujet de la gestion des déchets. L'état dans lequel se trouvent certains sites présente un impact sanitaire avéré sur les populations.

Je reviens sur la question de la gestion des déchets radioactifs en Polynésie française. Je rappelle en outre que les risques climatiques actuels viennent réveiller certaines pollutions historiques. Les déchets immergés et les déchets enfouis doivent faire l'objet d'un suivi, car aucune étanchéité ne peut être garantie. Des difficultés sanitaires peuvent en découler. Dans mon département, les systèmes dits « étanches » n'ont pas résisté et une pollution aérienne à l'arsenic a été déplorée. L'abandon des suivis sanitaires, pour des raisons nécessairement financières, est donc à proscrire.

Nous n'avons pas évoqué l'élimination des pièces anatomiques. Les élus des territoires d'outre-mer confrontés à ces enjeux ne savent pas toujours comment agir vis-à-vis de ces déchets très particuliers. Certains d'entre eux sont traités dans des conditions très insatisfaisantes, faute de solutions locales. Parfois, ils sont acheminés d'un territoire à un autre, de Mayotte vers La Réunion par exemple. Nous devons être en mesure de préconiser, dans notre rapport, des mesures harmonisées ou adaptées.

Mme Viviane Malet, rapporteure. - Merci, Mesdames et Messieurs, pour vos propos détaillés. Le problème de la collecte et du traitement des déchets ne peut pas s'envisager sans l'aspect sanitaire. Selon vous, convient-il d'envisager des adaptations réglementaires ou législatives, le cas échéant dans le cadre d'expérimentations dans certains territoires, pour traiter les pièces anatomiques ? Certains territoires sont dépourvus d'Unité de valorisation énergétique (Uve), d'incinérateurs ou de crématoriums. Quelles sont les solutions envisageables pour traiter ce problème très sensible et éthiquement exigeant ?

Mme Caroline Paul, chef du bureau environnement extérieur et produits chimiques. - Certains déchets d'origine humaine, les pièces anatomiques d'origine humaine (PAOH), doivent être incinérés. Lorsqu'il n'existe pas d'incinérateur, un autre système doit être mis en place. En Guyane, ces déchets sont enfouis par des sociétés funéraires. Le préfet de Guyane a émis un arrêté pour permettre cet enfouissement dérogatoire. D'une manière générale, les déchets d'activités de soins sont de types variés et englobent notamment les déchets chimiques, les déchets radioactifs, les déchets biologiques à risque infectieux et les déchets coupants ou piquants. Chaque déchet doit être traité et nous menons un travail de révision d'un guide de 2009 destiné à expliquer comment gérer tous ces déchets. Dans la mise à jour conduite avec les ministères de l'environnement et de l'outre-mer, nous tiendrons compte des expérimentations. Une expérimentation est en cours et doit permettre de valoriser la matière issue des déchets d'activité de soins à risques infectieux (DASRI) désinfectés, et non plus de seulement les détruire ou les enfouir. Plusieurs projets sont présentés et passent par France Expérimentation. Nous espérons avoir finalisé la première partie de ce guide au début de l'année prochaine.

Mme Victoire Jasmin. - Concernant le milieu hospitalier, des marchés publics encadrent les réseaux de traitement des effluents. De manière générale, la gestion des déchets fonctionne mieux lorsqu'un incinérateur est présent sur le territoire. Quelques filières permettent de faire revenir dans l'Hexagone certains déchets, nucléaires notamment.

Par ailleurs, vous avez évoqué la question du plomb. Celui-ci est présent dans certaines anciennes peintures, lorsque celles-ci n'ont pas été refaites. Des cas de saturnisme ont été identifiés. Récemment, en Guadeloupe, après le passage de la tempête Fiona, l'ARS a émis une communication de qualité sur la leptospirose. Quelques cas de cette maladie ont néanmoins été dénombrés.

En Guyane, les distances entre les communes sont très importantes, ce qui ne facilite pas la collecte des déchets issus des soins. Le rôle des infirmiers à domicile est donc fondamental, puisqu'ils font le lien entre les patients et les pharmacies. Certaines localités ne sont accessibles qu'en pirogue, ce qui renforce la complexité de la collecte.

Mme Viviane Malet, rapporteure. - Monsieur Klein, vous avez également évoqué la pollution des batteries que nous retrouvons régulièrement sur les bords des chemins. À l'inverse, nous n'y retrouvons jamais de bouteilles de gaz, car celles-ci sont consignées. Ne serait-il pas envisageable de prévoir une consigne pour les batteries ? Si la batterie usagée a une valeur, même minime, nous n'en retrouverons plus dans la nature.

Mme Nassimah Dindar. - Concernant les VHU, vous avez rappelé les textes applicables, notamment le code de l'environnement modifié en 2020, qui élargit la responsabilité des producteurs et les missions des éco-organismes vis-à-vis des dépôts sauvages de batteries et de voitures. Ma modeste expérience réunionnaise m'invite à penser que les particuliers, les communes et les communautés d'agglomération, voire les régions, sont les acteurs qui contribuent à l'enlèvement des véhicules usagés. À l'inverse, les vendeurs ou producteurs de voitures ne s'impliquent pas dans cette mission. Comment évaluez-vous l'effectivité de cette politique ? À La Réunion, cette évaluation ne doit pas être difficile, puisqu'une seule entreprise exerce un quasi-monopole dans la vente de véhicules. De même, pour les batteries, il importe de trouver une solution. À La Réunion, la majorité des batteries est récupérée par des acteurs privés et part à Madagascar par containers. De même, les pneus sont récupérés par des acteurs privés et n'encombrent plus la nature.

M. Philippe Bodenez, chef du service des risques sanitaires liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses. - Je vous remercie pour vos questions portant sur l'efficacité des dispositifs que nous mettons en place. S'agissant de la proposition de consigne des batteries, nous avons échangé avec les compagnies maritimes, qui subissent une désorganisation après la crise sanitaire. Certaines d'entre elles ne souhaitent plus transporter des déchets dangereux. Dans ce contexte, l'idée de la consigne est intéressante et mérite d'être étudiée. Certains professionnels tels que Norauto proposent d'ores et déjà un bon d'achat pour une nouvelle batterie, lorsqu'une batterie usagée leur est restituée.

Pour contrôler la bonne application du plan VHU, nos agents sont sur place et constatent les faits. De manière générale, pour qu'un véhicule soit éligible à ce plan, la police doit être intervenue de manière à constater la présence du véhicule de manière illégale sur le domaine public ou sur le domaine privé. Nous pouvons revenir vers les autorités locales pour connaître les actes pris, avant de récupérer le véhicule et l'amener vers la filière adaptée. Une association de constructeurs officie localement dans chaque département d'outre-mer. Les taux de collecte sont les plus importants dans les territoires dans lesquels ces associations sont les plus développées. Un retard important a donc été pris en Guyane, où l'association ne s'est pas encore suffisamment développée.

Mme Nassimah Dindar. - À La Réunion, vous pouvez appeler la police municipale lorsque vous voyez un véhicule hors d'usage. Cependant, celle-ci manque de moyens et jusqu'à quatre mois peuvent s'écouler avant qu'il soit enlevé. Il arrive donc fréquemment qu'en cas de dépôt sauvage de déchets, les citoyens contactent leurs élus. Au final, j'ai du mal à croire que 6 000 véhicules hors d'usage ont été récupérés à La Réunion et je m'interroge sur vos sources.

M. Philippe Bodenez. - La police municipale ne dispose pas des moyens techniques et économiques pour récupérer les véhicules hors d'usage. L'enlèvement de ces véhicules est désormais financé par les constructeurs.

M. Victorin Lurel. - Qu'est-ce qu'une pollution diffuse ? En outre, un moustique n'est pas un déchet, mais peut être le produit d'un déchet. Que devient la politique anti-vectorielle dans les outre-mer ? Sanofi avait mis au point un vaccin anti-dengue. Pouvez-vous m'éclairer à ce sujet ? Ce vaccin a été essayé aux Philippines et des enfants de trois ans sont décédés. Que devient ce vaccin ? Où en est la recherche ?

Par ailleurs, la Guadeloupe comptait une usine d'élimination des DASRI. Or cette usine a fait faillite. Où les DASRI de la Guadeloupe sont-ils traités aujourd'hui ? Où sont-ils envoyés ? De même, que deviennent les pneus de la Guadeloupe ?

Monsieur Bodenez, vous avez exposé l'état de la législation. Quelle est la réalité de la gestion des déchets ? Quels en sont les financements ? En Guadeloupe, les constructeurs ne participent pas du tout financièrement à l'enlèvement des véhicules hors d'usage, au contraire de la Région Guadeloupe. Une filière des déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) a été constituée, mais l'État ne s'y implique pas. L'État n'est présent que pour fixer les normes et assurer la police administrative, et non pour proposer des moyens.

S'agissant de la responsabilité élargie, je ne vois pas de trace de l'éco-participation. Les associations de recyclage fonctionnent grâce aux bonnes volontés locales, et non avec des fonds de l'État. L'État devrait être plus présent dans les économies insulaires. Nous attendions plusieurs usines d'incinération en Guadeloupe, mais au final une seule devrait voir le jour, à l'est de l'île. Quelle est la position de l'État vis-à-vis du schéma adopté par le conseil régional de la Guadeloupe et vis-à-vis des offres du Syvade, le syndicat de Guadeloupe ?

J'attends des réponses concrètes à mes questions, au-delà de la législation que l'État s'efforce de faire respecter, malgré l'absence de moyens étatiques en faveur de la gestion des déchets.

Mme Nassimah Dindar. - Je remercie les représentants de l'État qui sont présents aujourd'hui, car ils s'efforcent de coordonner des politiques complexes sur les territoires. Nous, sénateurs et sénatrices, représentons les collectivités et recherchons la cohérence dans la mise en application des réglementations récentes et futures. Dans le domaine de la santé, concernant la dengue, il ne sera plus possible de faire croire à un Réunionnais que nous étions en phase inter-épidémique de la dengue il y encore un an. J'attends beaucoup du ministère de la santé. Nous devons expliquer correctement les quatre phases progressives de la dengue. Des polémiques accompagnent le vaccin contre la dengue et celui contre le Covid. J'ai personnellement attrapé la dengue au stade 4 et j'ai failli décéder à l'hôpital. De nombreux Réunionnais sont morts de la dengue, et non du Covid. Les communications sur le sujet sont insuffisantes.

M. Stéphane Artano, président. - Nous avons largement dépassé l'horaire prévu pour cette réunion. Nous vous adresserons donc les remarques et les questions qui ont été posées, afin que vous puissiez y répondre ultérieurement.

Mme Victoire Jasmin. - Je tiens à rassurer notre collègue Victorin Lurel. Une table ronde s'est tenue le 12 juillet dernier, en présence du Syvade notamment, sur les sujets qu'il soulève.

M. Stéphane Artano, président. - Je vais conclure cette table ronde en vous remerciant. À Saint-Pierre-et-Miquelon, il est aujourd'hui inacceptable que les pièces anatomiques ne soient pas détruites comme elles devraient l'être. Un amendement a été proposé pour permettre l'aquamation, mais il a été rejeté, probablement en raison de pressions subies par le Gouvernement de la part d'acteurs de l'inhumation et de l'incinération. Or Saint-Pierre-et-Miquelon ne compte pas d'incinérateur et il est parfois compliqué, surtout en « période Covid », d'envoyer les pièces anatomiques au Canada. J'interpellerai officiellement le Gouvernement sur ce sujet. Une équipe de la DGPR s'est rendue sur place et a échangé avec les autorités locales.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - Nous relaierons ce sujet transversal. Celui-ci ne doit pas uniquement être porté par les autorités de Saint-Pierre-et-Miquelon. En effet, il touche à la dignité humaine.

M. Stéphane Artano, président. - Je vous remercie pour la clarté des propos. Nous vous ferons suivre les questions restées en suspens.

Suivi de l'étude de la délégation sur les risques naturels majeurs dans les outre-mer

M. Stéphane Artano, président. - Chers collègues, nous entamons la troisième et dernière partie de notre matinée avec un échange sur la mise en oeuvre des recommandations de notre délégation sur les risques naturels majeurs.

Je vous rappelle qu'à la suite du cyclone Irma en septembre 2017, la Délégation sénatoriale aux outre-mer avait consacré deux rapports très approfondis, en 2018 et 2019, à ce sujet dans lesquels nos 4 rapporteurs (Victoire Jasmin, Mathieu Darnaud, Jean-François Rapin, Abdallah Hassani) avaient formulé 100 recommandations.

Cinq ans après Irma, et suite au passage de la tempête Fiona sur la Guadeloupe, il nous a semblé qu'un bilan était utile. Comme vous le savez, le Sénat a décidé de veiller davantage au suivi de ses travaux, dans le prolongement du groupe de travail conduit par notre collègue Pascale Gruny.

Après avoir auditionné les services de l'État le 7 juillet dernier, je vous propose, avec Victoire Jasmin qui est à mes côtés, et en excusant ses collègues qui ne peuvent être là ce matin, de saisir l'occasion de la Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe, fixée chaque année au 13 octobre, pour dresser cet « inventaire ».

Les services de la Direction générale des outre-mer nous ont transmis un tableau que vous avez dû recevoir par mail et qui a été distribué sur table.

C'est la première fois que nous bénéficions d'un retour aussi précis des services de l'État sur nos travaux et je tiens à les remercier publiquement pour la qualité des réponses apportées.

Sur les 100 propositions, plus de 80 % ont reçu une réponse ou un éclairage sur les perspectives en cours. Certaines pistes ne sont plus pertinentes ou relèvent d'autres ministères que les outre-mer mais on peut estimer - me semble-t-il - que suite à nos suggestions le cadre d'intervention de la puissance publique s'est amélioré sur des points importants, comme l'utilisation du fonds Barnier, les moyens de la sécurité civile ou les systèmes d'alerte et d'information.

Ceci étant, les efforts doivent se poursuivre et j'ai souhaité avec Victoire Jasmin recueillir vos témoignages sur la réalité des situations sur le terrain.

Mme Victoire Jasmin- La Direction générale des outre-Mer (DGOM) nous a transmis un tableau faisant un bilan général de la prise en compte des 100 propositions présentées dans les deux rapports d'information de notre délégation sur les risques naturels dans les outre-mer. Au mois de juillet dernier, l'audition des services de l'État avait permis un premier point d'étape sur les mesures prises. Le problème des sargasses avait particulièrement été évoqué. Le caractère régulier du phénomène a conduit à débloquer des financements et à faire travailler ensemble les services de l'État, les collectivités et les groupements. Les collectivités restent confrontées régulièrement à cet échouage, qu'elles récupèrent tant bien que mal, avec un vrai souci pour le stockage.

Le tableau transmis n'est pas complet mais 80% des propositions des rapports ont déjà obtenues une réponse. Je note avec satisfaction l'appui et le soutien des différents services de l'État, et particulièrement de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC). C'est essentiel pour accompagner les collectivités territoriales et les autres partenaires. Il est également important que les collectivités travaillent en coordination, notamment parce que les documents d'information communale sur les risques majeurs (DICRIM) doivent être mis à jour régulièrement, ainsi que les plans communaux de sauvegarde (PCS), et les plans de prévention des risques naturels (PPRN). On l'a vu avec la tempête Fiona récemment, il est important qu'il y ait une importante réactivité. L'expérience des autres aléas de ce type n'est pas forcément identique, mais le fait d'avoir des documents préparés en commun, permet à chacun de se sentir impliqués.

Il faut également travailler sur l'acculturation, afin de mieux impliquer la population durant toute l'étape de prévention. Le fait de pouvoir permettre aux associations agréées de bénéficier du fonds Barnier est important. On l'a vu dernièrement avec Fiona, à Rivière-Sens où plusieurs associations forment au sauvetage.

Sur la question de l'exonération de l'octroi de mer portant sur les importations liées aux secours, avec la Croix Rouge par exemple, il faut continuer à travailler avec les collectivités responsables pour lever ce frein.

L'offre assurantielle est également un sujet important, car il y a beaucoup de personnes qui ne sont pas assurées. Il y a certes des personnes qui doivent choisir entre se nourrir et payer leur assurance. Mais il y a surtout un manque d'offres adaptées au territoire, pour les différents risques.

Dès que l'état de catastrophe naturelle est déclaré, il existe bien entendu des fonds de secours, mais ces fonds de solidarité ne sont pas inépuisables. La fréquence croissante des aléas divers fait que ces fonds vont s'épuiser plus rapidement. Il faut donc sensibiliser les populations à la nécessité de s'assurer, et travailler avec les assureurs pour qu'ils adaptent leurs offres à nos territoires.

La simplification de l'usage du fonds Barnier a permis de lever un frein pour les collectivités. Il y a également d'autres moyens de financement avec l'Agence française de développement (AFD), et le fonds exceptionnel d'investissement outre-mer (FEI).

Il faut aussi encore travailler sur les plans de continuité d'activité (PCA). On ne doit plus négliger les problématiques économiques, sociales et sécuritaires. Il est urgent de mettre en place une véritable communication avec les services de l'État, les EPCI et les communes, pour que les PCA associent ces différents partenaires.

Ces jours-ci, il y a certes des actions, comme les journées de prévention au Japon, qui sont mises en oeuvre afin de sensibiliser les populations aux différents risques naturels, mais ils manquent de proximité. Dans certaines communes, les maires et les EPCI doivent sensibiliser davantage les habitants aux risques naturels qui existent dans leur commune.

Je crois important aujourd'hui que l'on puisse organiser et mettre en oeuvre un centre régional de psycho-trauma, afin de mieux prendre en compte les patients. À Saint-Martin, la prise en charge psychologique de certains patients a été très difficile, car le psychologue le plus proche était à Saint-Barthélemy, ce qui nécessitait de prendre l'avion.

Il y a certes des améliorations dans le traitement des risques naturels, mais la problématique de l'eau persiste. Il y a des problèmes récurrents entre les EPCI et les délégataires.

Le risque d'incendie est aussi un sujet qui mérite toute notre attention. Les pompiers ont d'ailleurs alerté les autorités, et j'ai transmis un document au ministre délégué chargé des outre-mer. Le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) est souvent sollicité, mais l'absence d'eau à certains endroits complique leur intervention. Les pompiers utilisent des moyens qu'ils ne devraient pas, et des incendies qu'ils pourraient maîtriser facilement, deviennent difficiles à gérer. Ce n'est pas un risque naturel à proprement parler, mais c'est une des conséquences des problématiques liées à la gestion de l'eau.

Voilà mes observations générales sur ce bilan, monsieur le président, je vous remercie.

M. Stéphane Artano, président. - Merci chère collègue, et merci à la DGOM d'être restée. Je remercie les services du ministère pour la transmission de ce tableau. Sur une centaine de propositions, 80 % ont déjà obtenues une réponse. Le reste, et vous l'avez indiqué, relève d'autres ministères. De notre point de vue, on peut considérer que le cadre d'intervention générale s'est amélioré.

Néanmoins, on nous avait annoncé une loi sur la prévention des risques naturels dans les outre-mer. Malheureusement, cela s'est résumé à quelques amendements dans la loi dite « 3DS ». C'est une déception, car le travail de la délégation a été très approfondi et constructif.

Je remercie nos rapporteurs et en particulier notre collègue Victoire Jasmin pour ce compte-rendu de suivi. Je pense en particulier à notre ancien collègue Guillaume Arnell, qui avait coordonné les travaux des deux rapports en 2018 et 2019 et qui a su mener à terme cette étude dont la délégation est particulièrement fière. Nous poursuivons régulièrement ce travail d'évaluation et de suivi qui montre l'utilité et la pertinence de nos recommandations.

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