AFFAIRES ECONOMIQUES ET PLAN

Table des matières

  • Nomination d'un rapporteur
  • Groupe de travail - Expatriation des jeunes Français - Examen du rapport d'information
  • Aménagement du territoire - Organisation d'audiences publiques lors de la réalisation de grandes infrastructures - Examen du rapport
  • Outre-mer - Loi d'orientation pour l'outre-mer - Examen du rapport pour avis

Mercredi 7 juin 2000

- Présidence de M. Jean François-Poncet, président -

Nomination d'un rapporteur

La commission a tout d'abord procédé à la nomination de M. Jean-Paul Emorine en qualité de rapporteur sur le projet de loi n° 326 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural.

Groupe de travail - Expatriation des jeunes Français - Examen du rapport d'information

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport d'information de M. Jean François-Poncet sur les conclusions du groupe de travail sur l'expatriation des jeunes Français.

En introduction, M. Jean François-Poncet, président, a rappelé que le groupe de travail sur l'expatriation des jeunes Français, créé en juin 1999, s'était fixé comme objectifs de mesurer l'ampleur des expatriations de cadres et d'entrepreneurs français dans les pays anglo-saxons, d'analyser les motifs de ces départs, d'en évaluer les conséquences pour la collectivité nationale et d'en tirer des enseignements sur les moyens de favoriser la création d'entreprises en France. Il a indiqué que le groupe de travail avait effectué deux missions d'étude aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne et auditionné en France plus d'une trentaine de chefs d'entreprises innovantes, d'experts et d'investisseurs.

M. Jean François-Poncet, président, a tout d'abord exposé les conclusions du groupe de travail quant à l'évaluation quantitative et qualitative du phénomène. Il a souligné que cette évaluation était rendue particulièrement difficile par l'absence de statistiques fiables et exhaustives. Il a notamment relevé que les chiffres établis par les consulats français sur les communautés françaises établies à l'étranger n'étaient que des estimations fondées sur le nombre des Français immatriculés.

Il a indiqué que le recoupement de nombreuses sources d'information tant françaises qu'étrangères soulignait, néanmoins, une accélération importante des flux de Français hautement qualifiés vers les Etats-Unis, évoquant, notamment, la croissance de plus de 30 % du nombre de Français résidant à Londres, San Francisco ou Atlanta depuis cinq ans. Il a souligné que la caractéristique marquante de ses expatriés résidait dans leur niveau élevé de formation.

Après avoir décrit les différentes catégories de Français expatriés, cadres, créateurs d'entreprise, chercheurs, investisseurs, il a relevé que cette émigration concernait plus particulièrement les secteurs des nouvelles technologies. Il a indiqué à ce propos que le chiffre évoqué par la presse de 40.000 créateurs d'entreprises innovantes françaises installés dans la Silicon Valley était largement surévalué puisqu'il correspondait à l'ensemble de la population française installée, enfants et personnes âgées compris, dans l'ensemble de la Californie. Il a précisé qu'on pouvait estimer de 7 à 10.000 le nombre de cadres informaticiens français travaillant dans la Silicon Valley et à plusieurs centaines le nombre d'entreprises françaises créées dans cette région.

Après avoir évoqué la situation en Grande-Bretagne, il a fait observer que cette émigration était d'autant plus préoccupante que le taux de retour en France de plus en plus faible de ces expatriés témoignait d'une expatriation de plus en plus durable.

M. Jean François-Poncet, président, a ensuite décrit les principales motivations de ces expatriés. Soulignant que celles-ci étaient aussi hétérogènes que le profil des expatriés, il a toutefois relevé qu'elles traduisaient avant tout un environnement favorable à la création et au développement des entreprises.

Indiquant qu'une des motivations des jeunes diplômés était la volonté d'acquérir une expérience internationale devenue nécessaire à leur réussite professionnelle dans une économie en voie de mondialisation, il a constaté que le monde anglo-saxon exerçait sur l'élite de la jeunesse française un attrait indéniable tant en raison de ses performances économiques qu'à cause de l'esprit entrepreneurial qui y règne. Il a toutefois relevé que la principale raison invoquée par les cadres et entrepreneurs interrogés par le groupe de travail était la recherche d'un cadre administratif et fiscal plus accueillant que celui qui leur est offert en France.

Après avoir comparé la situation en France et en Angleterre et aux Etats-Unis en matière de formalités administratives, de flexibilité du droit du travail et de fiscalité des personnes et des entreprises, il a estimé que la France perdait ses créateurs d'entreprise faute de leur offrir un environnement porteur.

M. Jean François-Poncet, président, a alors souligné que les pouvoirs publics, conscients d'un phénomène qu'ils s'efforcent cependant de minimiser, avaient pris dans le secteur des nouvelles technologies de nombreuses mesures pour rendre l'environnement de la création d'entreprises innovantes en France plus compétitif.

Après avoir détaillé ces dispositions, qui ont permis de relancer le capital-risque et d'offrir aux entreprises innovantes un cadre juridique plus adapté, il a estimé que ces mesures, pour utiles qu'elles aient été, n'avaient pas suffi à freiner les départs.

Il a fait observer que les progrès enregistrés ces dernières années en France devaient, en effet, être comparés à ceux effectués par les autres pays concurrents. Il a souligné, à ce propos, que le niveau de développement du marché français des nouvelles technologies de l'information était très en deçà du marché anglais. Il a, en outre, relevé que les mesures adoptées en France pour favoriser le développement des entreprises innovantes, apparaissaient par comparaison avec celles adoptées dans plusieurs pays d'Europe et aux Etats-Unis, d'une portée encore trop limitée.

En conclusion, M. Jean François-Poncet, président, a estimé qu'il était essentiel d'arrêter l'hémorragie de cadres et d'entrepreneurs à laquelle on assistait, parce qu'elle pénalisait gravement un secteur stratégique de l'économie. Il a jugé que si ces expatriations pouvaient apparaître en première analyse positives, illustrant une plus grande ouverture des jeunes Français sur le monde, elles portaient néanmoins gravement atteinte au développement en France de la nouvelle économie.

Il a souligné que cette nouvelle vague d'émigration privait la France d'une élite, certes peu nombreuse, mais dont le rôle économique était essentiel, observant que le pourcentage de diplômés sortant des écoles d'ingénieurs et de commerce qui créent leur propre entreprise était si faible que des délocalisations même numériquement limitées auraient à moyen terme des conséquences très sérieuses.

Il a indiqué que les conséquences de ce phénomène sur la compétitivité future de la France imposaient de prendre d'urgence des mesures correctrices. Il a estimé qu'une première voie consisterait à initier sur tous les fronts une politique différente de celles pratiquées depuis des décennies par tous les gouvernements qui se sont succédé. Il faudrait alléger le taux des prélèvements obligatoires, simplifier radicalement les procédures, rendre plus flexible la législation du travail et faire évoluer l'état d'esprit de l'administration, a-t-il précisé.

Il a indiqué que le groupe de travail, tout en souhaitant un tel changement de cap, avait choisi par réalisme une seconde voie -plus modeste- qui ne vise que le créneau des créateurs d'entreprise et le secteur des nouvelles technologies.

Après avoir évoqué les propositions du groupe de travail, il a relevé que la nécessité de rester compétitif dans un monde où les acteurs économiques sont de plus en plus mobiles imposait, en matière fiscale, un nouvel équilibre entre le souci de légalité et celui de l'efficacité.

Il a conclu que la France ne retiendrait son élite et n'attirerait à elle celle des autres pays que si elle surmontait ses blocages idéologiques et mettait en oeuvre une politique misant résolument sur l'innovation, la jeunesse et, par conséquent, l'avenir.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. André Ferrand s'est félicité que la commission des affaires économiques se soit saisie d'un sujet d'une importance aussi cruciale pour l'avenir de la France. Il a précisé qu'il y avait environ 1,8 million de Français établis hors de France, dont plus de la moitié était immatriculée auprès d'un consulat français. Il a fait observer que les motivations des cadres et des jeunes diplômés qui s'expatrient en Grande-Bretagne sont également liées au rôle central de la place de Londres sur les marchés financiers internationaux. Soulignant que les pays anglo-saxons avaient, pour des raisons historiques et culturelles, une plus forte attractivité que la France, il a jugé que celle-ci devrait compenser ce handicap par une fiscalité plus compétitive.

M. Francis Grignon a tout d'abord souligné que les " business angels " jouaient un rôle tout à fait essentiel aux Etats-Unis dans le financement de la création d'entreprise, comme il avait pu le constater lors de la mission qu'il avait effectuée pour la préparation de son rapport sur le " Small Business Administration ". Il a rappelé qu'il avait proposé, dans le cadre du groupe de travail " nouvelles entreprises et territoires ", une mesure en faveur des " business angels " qui s'inspirait du dispositif américain, autorisant les investisseurs privés à imputer sur leur revenu imposable les pertes liées à leurs investissements dans des entreprises non cotées. Il a regretté que la loi française ne permette pas à ce type de dispositif d'avoir un effet aussi incitatif qu'outre-atlantique. Il a, par ailleurs, constaté que les bons de souscriptions de parts de créateurs d'entreprises étaient malheureusement réservés aux entreprises créées il y a moins de quinze ans. Il a enfin souligné que si la proportion des créateurs d'entreprises issus des polytechniques était de l'ordre de 2 %, elle était, en revanche, plus élevée dans les écoles d'ingénieurs de province, où elle atteignait parfois 15 %.

M. Gérard César a estimé que ce rapport ferait date, se félicitant qu'un cri d'alarme soit lancé pour sensibiliser l'opinion publique à la perte d'attractivité de la France qu'entraînent le niveau de sa fiscalité et la complexité de ses réglementations. Il a considéré qu'à l'instar du rapport Teulade, qui souligne la nécessité de prendre des mesures urgentes pour assurer les retraites de demain, ce rapport oeuvrait pour l'avenir, en incitant les pouvoirs publics à favoriser une plus grande compétitivité de l'environnement fiscal et administratif français.

M. Michel Souplet a estimé que cette nouvelle vague d'émigration, qu'il a comparée à celle provoquée par la révocation de l'Edit de Nantes, était tout à fait préoccupante pour l'économie française. Observant que les générations issues de la guerre étaient en général assez réticentes à s'expatrier, il a considéré que ces expatriations illustraient par comparaison la mobilité croissante des jeunes générations. Il a souligné que la fuite des cadres et des entrepreneurs français vers les Etats-Unis avait des conséquences particulièrement graves dans les départements et territoires d'outre-mer qui se voyaient ainsi privés de leurs élites entrepreneuriales.

M. Louis Moinard a estimé que ces expatriations illustraient la nécessité de réformer notre fiscalité dans le sens d'une plus grande efficacité. Il a relevé que l'environnement culturel et social américain était indéniablement plus motivant pour les jeunes cadres et entrepreneurs que l'environnement français. Il a enfin souligné que le souci légitime de l'égalité et de la justice sociale devait être concilié avec un objectif d'efficacité et ne pas être confondu avec l'égalitarisme.

M. François Gerbaud a observé que ces départs illustraient l'ouverture croissante des jeunes Français à l'étranger, mais également la faible attractivité de la France. Il a jugé, à ce propos, opportun d'établir un comparatif fiscal au sein de l'Union européenne, afin que l'on puisse situer les performances de chaque pays pour chaque catégorie d'impôts. Il a, par ailleurs, estimé que l'enthousiasme actuel pour les nouvelles technologies de l'information conduisait à surévaluer leur importance, relevant que d'autres technologies et, en particulier, la biotechnologie devraient jouer à l'avenir un rôle tout aussi déterminant.

M. Jean-Pierre Vial a souligné que si l'environnement de la création d'entreprises innovantes s'était considérablement amélioré ces dernières années, la France n'avait probablement pas encore rattrapé ce retard dans ce domaine, pour des raisons fiscales mais également culturelles. Il a évoqué à ce propos les difficultés que rencontrait la mise en place dans les universités d'" incubateurs ", chargés d'offrir aux chercheurs un appui logistique technique et financier pour créer leur propre entreprise.

Evoquant le cas d'une entreprise de biotechnologie de son département, M. Francis Grignon a relevé que les collectivités territoriales en France ne disposaient pas des mêmes moyens pour attirer ou retenir les entreprises que les collectivités territoriales américaines, dont certaines proposaient jusqu'à construire gratuitement une usine pour attirer des entreprises françaises à très fort potentiel.

M. François Gerbaud a souligné, à ce propos, la nécessité de retenir nos chercheurs en biotechnologie.

En réponse, M. Jean François-Poncet, président, a apporté les précisions suivantes :

- les pouvoirs publics ont, en effet, la tentation de banaliser et de minimiser le phénomène. Le directeur du service de la législation fiscale du ministère de l'économie et des finances a notamment estimé, lors d'une audition par le groupe de travail, que l'expatriation de ces cadres et entrepreneurs du secteur des nouvelles technologies n'avait aucun effet macro-économique ;

- si les pouvoirs publics attendent que cette émigration ait un effet macro-économique, il sera trop tard pour agir. Le moteur à explosion en 1860 ou la télévision dans les années 1940 n'avaient pas d'effet macro-économique. On sait ce qu'il en est advenu quelques décennies plus tard ;

- le secteur des nouvelles technologies fait actuellement l'objet d'une bulle spéculative qui fera sans doute l'objet d'une correction. Mais, au-delà de ces mouvements boursiers, nous assistons à une véritable révolution industrielle. La possibilité offerte aux entreprises de se connecter au monde entier et de personnaliser leurs relations avec leurs clients est à l'origine d'une modification profonde des modes de production et de consommation ;

- les biotechnologies joueront, en effet, demain, un rôle tout à fait essentiel dans le domaine médical et dans nombre d'autres domaines. Le groupe de travail a, d'ailleurs, rencontré de nombreux chefs d'entreprises français de ce secteur implantés à Washington.

La commission a ensuite adopté les conclusions du rapport.

Jeudi 8 juin 2000

- Présidence de M. Jean François-Poncet, président.-

Aménagement du territoire - Organisation d'audiences publiques lors de la réalisation de grandes infrastructures - Examen du rapport

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Arnaud sur la proposition de loi n° 196 (1999-2000) de M. André Dulait et plusieurs de ses collègues, portant sur l'organisation d'audiences publiques lors de la réalisation de grandes infrastructures.

M. Philippe Arnaud, rapporteur, a indiqué que la proposition de loi portait sur l'organisation d'une consultation publique à l'échelon communal lors de la phase préparatoire à la réalisation de grandes infrastructures. Elle énonce, a-t-il précisé, que tout grand projet d'infrastructure fera l'objet, pour avis, dans toutes les communes intéressées et à la diligence de leurs maires selon les modalités qu'ils souhaiteront mettre en place d'une présentation et d'une discussion en réunion publique. Cette procédure interviendra trois mois au moins avant la prise de décision. Le texte ajoute que tout habitant devra être informé de cette procédure préalable au moins quinze jours à l'avance.

Après avoir relevé que les procédures existantes de consultation n'intervenaient pas suffisamment en amont dans le processus de décision, le rapporteur a déclaré que l'expression de la volonté citoyenne locale s'apparentait de plus en plus à une simple formalité qui, du fait de son caractère tardif, ne pouvait, en réalité, exercer aucune influence sur un processus déjà engagé et largement irréversible.

La proposition de loi -a-t-il souligné- tend à combler une lacune de la législation existante : la consultation directe et préalable des citoyens des communes touchées par un projet de création d'une nouvelle grande infrastructure.

M. Philippe Arnaud, rapporteur, a estimé qu'une telle discussion publique permettrait aux associations intéressées d'intervenir plus efficacement en présentant notamment des contre-expertises dans le cadre d'un débat véritablement contradictoire ; elle donnerait aussi aux responsables des projets la possibilité de connaître le sentiment du " terrain " et, partant, de modifier, voire d'abandonner, certaines initiatives.

Après avoir évoqué les procédures de consultation publique organisées chez un certain nombre de nos voisins, le rapporteur a rappelé que la loi du 2 février 1995 avait prévu, s'agissant des grandes opérations publiques d'aménagement d'intérêt national de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics et des sociétés d'économie mixte présentant un fort enjeu socio-économique ou ayant un impact significatif sur l'environnement, l'organisation éventuelle d'un débat public sur les objectifs et les caractéristiques principales des projets, pendant la phase de leur élaboration.

A cet effet, cette réforme a institué une commission dite " Commission nationale du débat public " qui peut être saisie conjointement par les ministres dont dépendent les projets pouvant donner lieu à débat public et par le ministre chargé de l'environnement ainsi que, pour les projets des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, par le ministre chargé des collectivités locales après consultation desdites collectivités.

Après avoir souligné qu'il partageait les préoccupations des auteurs de la proposition de loi, le rapporteur a souhaité insister sur deux points.

Il a, d'abord, jugé que demeurait posé le problème de la participation consultative des citoyens en amont des décisions " fondatrices " et souvent irréversibles portant sur les grands projets d'infrastructures, notamment dans le domaine ferroviaire ou routier.

Il a reconnu la difficulté de créer de réelles procédures d'information et de consultation, notamment à l'échelon communal, lorsque le projet n'en est encore qu'à l'étape de la déclaration d'intention, avant d'insister sur la nécessité de réfléchir aux meilleurs moyens d'instaurer dans notre pays une véritable démocratie participative, conformément au souhait exprimé récemment par le Président de la République.

Il a encore relevé que le débat parlementaire qui accompagnerait le futur projet de loi du ministre de l'environnement et de l'aménagement du territoire sur la réforme de l'utilité publique devrait pouvoir donner lieu à d'utiles réflexions et propositions sur le sujet.

En second lieu, le rapporteur a indiqué qu'il souhaitait éviter le risque de faire apparaître la collectivité locale comme co-responsable du projet, surtout lorsqu'il s'agit d'un projet d'infrastructure dont elle n'est pas maître d'ouvrage.

Il importe, a-t-il souligné, que l'expression de la volonté citoyenne communale soit bien perçue comme s'intégrant dans une phase consultative et que la décision définitive apparaisse bien comme relevant de l'Etat ou de la collectivité qui " pilote " le projet.

Afin d'éviter toute confusion, le rapporteur a jugé ainsi préférable que la présentation publique du projet dans la commune soit effectuée par le maître de l'ouvrage lui-même, le maire étant, pour sa part, garant du bon déroulement et de la transparence de la consultation. Il a ajouté qu'une plus grande " responsabilisation " des intervenants passait aussi, à ses yeux, par l'exigence d'observations écrites.

En conclusion, il a proposé à la commission une nouvelle rédaction de l'article unique de la proposition de loi avant de suggérer d'ajouter un article 2 dont l'objet serait d'ouvrir le débat sur la nécessaire consultation préalable des citoyens en ce qui concerne les grands projets d'infrastructure pilotés par l'Etat.

M. Michel Souplet a estimé que les procédures de consultation du public devraient pouvoir s'effectuer dans des délais suffisamment rapides, afin de ne pas retarder à l'excès la réalisation de certains grands projets d'équipement.

M. Léon Fatous a relevé, à son tour, que la réalisation de certaines infrastructures simples nécessitait aujourd'hui des délais très longs. Il s'est, ensuite, demandé quelles infrastructures bénéficieraient des procédures de consultation visées par la proposition de loi.

Après l'intervention du président Jean François-Poncet, M. Philippe Arnaud, rapporteur, a notamment estimé qu'il convenait de prendre en considération les exigences croissantes des citoyens en matière d'information et de participation consultative aux décisions.

Puis la commission a conclu à l'adoption de la proposition de loi dans la rédaction retenue par le rapporteur.

Outre-mer - Loi d'orientation pour l'outre-mer - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean Huchon sur le projet de loi n° 342 (1999-2000) adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence d'orientation pour l'outre-mer.

Soulignant que ce texte très attendu faisait suite à la parution d'un certain nombre de rapports dressant un bilan alarmant de la situation des départements d'outre-mer, dont celui des parlementaires Claude Lise et Michel Tamaya remis en juin 1999 au Gouvernement,M. Jean Huchon, rapporteur pour avis, a rappelé qu'après l'avoir annoncé à l'automne 1998, le Gouvernement s'était enfin engagé à le déposer à la suite d'un voyage du Premier ministre aux Antilles à la fin du mois d'octobre 1999.

Le Président de la République a lui-même, a-t-il ajouté, manifesté, dans une allocution prononcée en Martinique en mars dernier, l'attention qu'il porte à la définition pragmatique d'un modèle original de développement pour les départements d'outre-mer, en faisant valoir que " toutes les propositions, dès lors qu'elles ne mettaient pas en cause la République et ses valeurs, étaient recevables et légitimes ".

Le rapporteur pour avis a jugé très préoccupante la situation économique des départements d'outre-mer, soulignant qu'elle avait été qualifiée d'explosive par M. Rodolphe Désiré, dans son dernier avis sur les départements d'outre-mer, adopté par la commission lors de l'examen de la loi de finances pour 2000. Il a rappelé que le chômage touchait en moyenne 30 % de la population active et que le caractère massif des transferts publics, soit trois quarts à trois cinquièmes du PIB des départements d'outre-mer en 1994, soulignait la dépendance excessive des économies domiennes à l'égard de la métropole. Témoignent également de cette dépendance, a-t-il précisé, la part des importations en provenance de métropole, la primauté des liaisons maritimes et aériennes vers celle-ci, et enfin la part prépondérante du tourisme métropolitain.

Après avoir rappelé l'existence de handicaps structurels au développement, tels que l'éloignement, l'insularité, l'étroitesse des marchés, l'absence de ressources énergétiques, mais également la concurrence des Etats voisins offrant des régimes fiscaux et sociaux avantageux, le rapporteur pour avis a jugé indispensable l'adoption de mesures de compensation particulières, à l'instar de l'article 299-2 du Traité sur l'Union européenne qui définit le statut des régions ultrapériphériques auquel sont liés des aides et des avantages octroyés tant dans le cadre national que dans le cadre européen.

M. Jean Huchon, rapporteur pour avis, a ensuite présenté les dispositions du projet de loi qui tendent à répondre aux aspirations de la population des DOM sur le plan social, politique ou culturel.

Les titres I, II et III, a-t-il indiqué, comportent des dispositions visant à favoriser l'emploi, la lutte contre l'exclusion et le droit au logement, notamment l'exonération de cotisations sociales patronales en faveur des entreprises de moins de onze salariés et de celles relevant de secteurs spécifiques, l'instauration d'un dispositif favorisant l'emploi des jeunes, et l'alignement du montant du RMI sur le montant de celui versé en métropole.

S'agissant de l'important volet institutionnel, destiné à accroître les pouvoirs des collectivités locales, il a indiqué que le titre V conférait à celles-ci un rôle important en matière de coopération régionale et que le titre VI, relatif à l'approfondissement de la décentralisation, renforçait la consultation des départements et régions d'outre-mer en cas de modification de leur statut, leur transférait des compétences nouvelles, et prévoyait en outre la création d'un second département dans l'île de la Réunion. Il a enfin évoqué le titre VII qui instaure un congrès, réunissant le conseil général et le conseil régional, en vue de proposer des évolutions institutionnelles dans les DOM.

Puis le rapporteur pour avis a brièvement présenté les articles ayant fait l'objet de la saisine de la commission, ainsi que les modifications qu'il entendait proposer.

Après avoir cité l'article 1er, qui constitue une sorte de déclaration d'objectifs sans réelle portée normative, qui ferait l'objet d'un amendement rédactionnel, M. Jean Huchon, rapporteur pour avis, a indiqué que l'article 7 bis imposait à la conférence paritaire des transports de chaque DOM de remettre un rapport annuel au Gouvernement intégrant des propositions visant à réduire le coût des transports outre-mer. Soulignant tout l'intérêt de cette structure prévue par la loi Perben du 25 juillet 1994, qui doit réunir de façon paritaire des représentants des transporteurs et des collectivités publiques, le rapporteur a regretté l'absence de fonctionnement effectif de ces structures, alors que le secteur des transports, notamment intérieurs, dans les TOM est caractérisé par une grave désorganisation. Après avoir regretté que le Gouvernement n'ait pas pu prendre par ordonnance les mesures de fonctionnement indispensables, comme l'y autorisait la loi d'habilitation du 25 octobre 1999, M. Jean Huchon, rapporteur pour avis, a recommandé la mise en place urgente de ces conférences paritaires des transports.

Abordant l'article 7 ter qui impose qu'une date-limite de consommation soit mentionnée sur les produits agro-alimentaires provenant du surplus communautaire et destinés à la consommation humaine, le rapporteur pour avis a annoncé que cette disposition faisait l'objet d'une proposition de suppression.

Il a ensuite présenté l'article 7 quater, qui étend la compétence de la chambre de commerce, de l'industrie et des métiers de Saint-Pierre-et-Miquelon au secteur de l'agriculture, afin de prendre en compte le développement d'une activité agricole et d'élevage, puis l'article 9 bis, qui étend le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles aux dommages causés par certains cyclones particulièrement violents. Les dégâts causés par les vents des cyclones, a-t-il fait valoir, sont, au même titre que ceux causés par les tempêtes, en théorie couverts par les contrats d'assurance dommage aux biens ; mais dans la pratique, les compagnies d'assurance ont mis en place des restrictions à l'assurance de ce risque en imposant aux assurés des DOM des conditions tarifaires élevées. Il s'est félicité, dans ces conditions, de l'inclusion des effets des cyclones dans le régime d'assurance des catastrophes naturelles, lequel prohibe toute restriction dans la couverture du risque, garantissant ainsi aux populations des DOM une meilleure indemnisation de ce type de sinistre.

Il a indiqué, ensuite, que l'article 9 ter renforçait le dispositif prévu à l'article 28-1 de la loi " Royer " du 27 décembre 1973 pour limiter la concentration des entreprises du secteur de la distribution alimentaire dans les départements d'outre-mer, ces derniers étant, du fait de leur insularité, des marchés captifs, particulièrement exposés au risque de formation de monopoles.

Présentant l'article 9 quinquies, qui impose au Gouvernement de publier un rapport sur l'évolution du dispositif d'incitation à l'investissement outre-mer, il s'est déclaré en faveur de l'adoption d'un statut pérenne pour ce dispositif.

Il a ensuite évoqué l'article 16, qui instaure dans chaque département d'outre-mer un Fonds régional d'aménagement foncier et urbain (FRAFU), destiné à améliorer la maîtrise foncière et à faciliter la construction de logements sociaux, et l'article 28, qui modifie et complète la rédaction de l'article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales relatif aux schémas d'aménagement régional (SAR). Institués par une loi du 2 août 1984, a-t-il précisé, ces schémas permettent aux régions d'outre-mer de déterminer des orientations en matière de développement, de mise en valeur du territoire et de protection de l'environnement. Tout en se déclarant peu convaincu par l'efficacité des schémas d'aménagement régional, le rapporteur pour avis s'est dit favorable au renforcement de cet instrument, qui s'inscrit dans une politique d'aménagement durable du territoire dans les DOM.

Il a indiqué ensuite que l'article 29 rendait obligatoire l'élaboration, l'adoption et la mise en oeuvre d'un plan énergétique régional par les régions d'outre-mer, et que ce plan énergétique devrait respecter le cadre défini par la programmation nationale pluriannuelle instaurée par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation du service public de l'électricité, ainsi que par les schémas de services collectifs issus de la loi du 25 juin 1999 relative à l'aménagement du territoire.

Présentant l'article 30, qui instaure dans chaque département d'outre-mer un office de l'eau, chargé de doter les DOM d'une véritable politique en la matière, il a jugé ce dispositif particulièrement nécessaire pour des territoires dont le caractère insulaire explique la relative rareté de la ressource hydraulique. Afin de responsabiliser les acteurs locaux, a-t-il ajouté, ces offices prendront la forme d'un établissement public départemental.

Enfin, il a évoqué l'article 35 bis qui instaure en Guadeloupe une redevance communale des mines sur les gîtes géothermiques, sur le principe de laquelle il s'est montré très réservé.

Au cours de la discussion générale, M. Philippe Arnaud est intervenu pour se demander si le régime spécifique à l'outre-mer prévu à l'article 9 bis pour la prise en compte des phénomènes cycloniques dans le régime des catastrophes naturelles, pouvait être étendu à la métropole, ou même dans le cadre d'un arrêté constatant l'état de catastrophes naturelles, les dégâts causés par les vents n'étant pas indemnisés.

M. Rodolphe Désiré, évoquant la mise en oeuvre de la loi sur les " 40 pas géométriques ", a souligné que les principales difficultés provenaient de la vérification des titres de propriété. Il a ensuite considéré que le projet de loi permettait de prendre conscience du blocage institutionnel dont était victime l'outre-mer. Il a fait valoir que le débat sur l'évolution des institutions avait largement eu lieu dans chacun des départements d'outre-mer, ce qui permettait de s'interroger sur la nécessité du congrès prévu par le titre VII du projet de loi. Il a considéré que le débat sur les institutions devait désormais avoir lieu au plan national pour permettre une révision de l'article 73 de la Constitution afin de favoriser une réelle ouverture des économies domiennes vers l'extérieur. Evoquant les dispositions de l'article 299-2 du Traité de Maastricht portant statut des régions ultra-périphériques, il a évoqué le régime particulier des îles Canaries ou de Madère, qui font preuve d'un réel dynamisme économique.

A l'article 1er (objectifs du projet de loi), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 7 ter (mention d'une date-limite de consommation sur les produits alimentaires provenant du surplus communautaire), la commission a adopté un amendement de suppression, car les produits du surplus sont d'ores et déjà soumis à la réglementation communautaire en matière d'hygiène alimentaire, laquelle prévoit de telles dates-limites.

A l'article 7 quater (extension de la compétence de la chambre de commerce et d'industrie de Saint-Pierre-et-Miquelon au secteur agricole), la commission a adopté un amendement supprimant la référence au conseil général pour la création d'une section agricole.

A l'article 9 quinquies (rapport sur l'évolution du dispositif d'incitation à l'investissement dans les départements d'outre-mer), la commission a adopté un amendement précisant que ce rapport serait transmis au Parlement avant le 15 septembre 2001, M. Rodolphe Désiré ayant souligné l'intérêt du dispositif d'incitation fiscale à l'investissement outre-mer pour pallier le coût élevé des crédits bancaires et l'insuffisance structurelle des fonds propres des entreprises.

A l'article 16 (généralisation des fonds régionaux d'aménagement foncier et urbain), la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement instaurant la présidence alternée du FRAFU, par le président du conseil général et le président du conseil régional.

A l'article 28 (adaptation des schémas d'aménagement régional), la commission a adopté, outre un amendement de cohérence, un amendement supprimant la disposition prévoyant que les SAR déterminent la localisation des activités relatives aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. M. Jacques Bellanger s'est interrogé sur l'articulation des SAR avec le contenu des schémas de services collectifs prévus par la loi du 25 juin 1999 portant sur l'aménagement et le développement durable du territoire.

A l'article 35 bis (redevance communale sur les gîtes géothermiques), la commission a adopté un amendement de suppression afin de ne pas remettre en cause le développement outre-mer des énergies renouvelables.