Table des matières

  • Mercredi 23 octobre 2002
    • Union européenne - Commerce - Audition de M. Pascal Lamy, membre de la Commission européenne
    • PJLF pour 2003 - Industrie - Examen du rapport pour avis
  • Jeudi 24 octobre 2002
    • Environnement - Implantation des éoliennes - Examen des amendements
    • Aménagement du territoire - Convention territoriale en téléphonie mobile - Examen des amendements

Mercredi 23 octobre 2002

- Présidence de M. Gérard Larcher, président, puis de M. Marcel Deneux, vice-président. -

Union européenne - Commerce - Audition de M. Pascal Lamy, membre de la Commission européenne

La commission, conjointement avec la Délégation pour l'Union européenne, a procédé à l'audition de M. Pascal Lamy, membre de la Commission européenne chargé des affaires commerciales.

M. Hubert Haenel s'est déclaré très heureux d'accueillir une nouvelle fois Pascal Lamy, commissaire européen en charge du commerce extérieur, pour une audition commune à la délégation pour l'Union européenne et à la commission des affaires économiques. Il a rappelé que la délégation avait reçu M. Pascal Lamy il y a deux ans, pour connaître l'état des négociations en matière commerciale, tout en précisant que son propos du jour serait plus vaste, puisqu'il aborderait trois questions distinctes : d'abord celle du travail mené au sein de la Convention pour l'avenir de l'Union, présidée par Valéry Giscard d'Estaing, ensuite, celle du suivi des négociations actuellement en cours à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) dans le cadre de l'agenda de Doha, enfin, ce thème n'étant d'ailleurs pas dénué de liens avec le précédent, celle de la réforme de la politique agricole commune.

M. Gérard Larcher, président, s'est félicité de l'organisation d'auditions communes, menées avec la délégation pour l'Union européenne, qui lui paraissent constituer une méthode de travail constructive et enrichissante. Il a approuvé l'ordre du jour proposé par le président Haenel et arrêté par Pascal Lamy, notamment la question de la réforme de la PAC, après les échanges qu'ils avaient eus par voie de presse.

M. Pascal Lamy a d'abord souhaité exposer quelques remarques liminaires sur la Convention, qui constitue, selon lui, un sujet de réflexion essentiel, même si les citoyens européens ne sont pas forcément très conscients de l'ampleur des enjeux dont elle est porteuse. Il s'est déclaré convaincu qu'il s'agissait-là d'un véritable rendez-vous, témoignant de la coïncidence entre les problèmes que l'Union européenne doit gérer -notamment celui de son élargissement- et le débat qui agite les opinions publiques sur la globalisation de nos économies. Il a indiqué que la Convention était en mesure de proposer un grand projet, et s'est montré préoccupé de l'écart existant entre l'importance de ses travaux et le faible attrait qu'ils suscitent dans l'opinion publique. Il a affirmé que la mission historique de concevoir le projet européen de l'avenir ne s'achèverait pas avec la Convention et qu'il fallait, dès à présent, préparer le débat qui aura lieu à son sujet dans tous les États membres.

M. Pascal Lamy a ensuite souhaité évoquer certains points importants pour la France, qu'il a considérée comme différente de ses partenaires, par sa sensibilité à la solidarité sociale et territoriale, sa forte culture de soutien à la croissance et à l'activité industrielle, sa volonté d'affirmer la place de l'Union européenne dans le monde, ou encore son aspiration au respect de l'égalité des droits.

Il a estimé que l'Europe devait être plus présente dans les domaines suivants :

- la régulation du marché unique et son ouverture, par exemple en matière d'aménagement du territoire et de services d'intérêt général ;

- l'harmonisation des fiscalités et des systèmes sociaux, qui ne pourront se faire qu'avec l'extension de la règle de la majorité qualifiée ;

- la gouvernance économique, qui ne peut se résumer à une politique monétaire de stabilité des prix et de faible marge de déficit budgétaire. Il a insisté sur la nécessité d'une autorité, n'existant pas aujourd'hui, qui définisse l'intérêt commun et sache faire appliquer les décisions. Sur tous ces points, il a jugé que le travail de la Convention permettrait de progresser.

Il a également déclaré que l'Europe devait avoir la capacité de peser sur les affaires du monde, l'Union étant efficace, en matière de politique commerciale extérieure par exemple. Ainsi, lorsque les partenaires savent ce qu'ils veulent, les procédures existent et sont appliquées, ce qui, a-t-il rappelé, est loin d'être toujours le cas.

Evoquant à nouveau la question des institutions européennes, M. Pascal Lamy a observé qu'il existait une grande différence entre une Constitution pour un État-nation et pour l'Union européenne. Dans le premier cas, on peut, en effet, se limiter à un préambule déclaratif et à une organisation des pouvoirs. En revanche, a-t-il ajouté, l'Union européenne ne peut s'en contenter, car elle doit aussi résoudre la question du « pourquoi être ensemble », dont la réponse relève d'une sorte d'affectio societatis, qui va bien au-delà du sentiment national.

Evoquant ensuite l'histoire de l'Union européenne, il a estimé que le traité de Maastricht et son volet « Union économique et monétaire » avaient constitué de grands succès, mais que les traités d'Amsterdam, en partie, et de Nice, presque entièrement, avaient été des échecs, car les partenaires s'étaient placés sur le seul terrain institutionnel, en tant que tel, sans projet.

Il a ensuite plaidé en faveur d'une méthode visant à faire disparaître la méfiance. Pour ce faire, il a jugé nécessaire de s'appuyer sur la Commission européenne, qui est en charge de l'intérêt général, sans laquelle il n'y aura pas de gouvernance européenne, car elle est plurinationale, pluriculturelle, pluripolitique. Faisant l'éloge de cette « méthode communautaire » , il a rappelé qu'en cinquante ans, un système institutionnel à trois acteurs avait été ainsi bâti avec un ciment de confiance solide. Il a enfin défini l'Europe comme « un multiplicateur de puissance qui fonctionne avec un générateur de confiance ».

M. Maurice Blin s'est félicité de l'importance donnée par M. Pascal Lamy à la confiance entre les États. Rappelant ensuite que la Grande-Bretagne, tardivement ralliée à l'Europe, conservait sa singularité forte, il a estimé qu'elle entraînait un certain nombre de pays partageant assez profondément sa culture commerciale et politique. Par ailleurs, il a considéré que le couple franco-allemand n'était plus ce qu'il avait été et que le rôle de moteur qu'il avait longtemps joué ne correspondait plus à ce qu'on pourrait souhaiter.

Il a rappelé que la position française avait toujours été l'approfondissement, -ce que tente de faire la Convention-, et ensuite seulement l'élargissement, tandis que l'Allemagne était plutôt initialement en faveur de l'élargissement, mais avait changé depuis de discours. Il a considéré que l'on ne pouvait envisager de mener de front les deux stratégies et que l'Europe était « condamnée à l'élargissement », mais sans avoir ni la volonté, ni la capacité de l'approfondissement.

M. Pascal Lamy a jugé que la décision politique de lancer le processus d'élargissement sans le conditionner à des transformations institutionnelles avait été tranchée en 1993 par le Conseil européen, après un débat difficile dans lequel Jacques Delors et François Mitterrand avaient été mis en minorité, mais qu'elle n'avait pas été expliquée à l'époque. La difficulté réside en effet, a-t-il estimé, dans la contradiction existant entre la nécessité de tendre la main aux pays d'Europe centrale après la chute du mur de Berlin et au fond de rester fidèle au projet européen tel qu'il figure dans le traité de Rome, et les décisions difficiles que suppose l'approfondissement. C'est donc faute d'une pondération suffisante entre approfondissement et élargissement que les institutions européennes n'ont pu progresser.

Considérant que le modèle communautaire d'origine, prévu pour six pays, puis étendu avec des modifications à neuf, à dix, à douze et enfin à quinze pays, ne pourrait de toute évidence porter une Europe à vingt-cinq ou trente membres, il s'est interrogé sur la manière dont la Convention pourrait résoudre cette contradiction, alors même que l'élargissement serait décidé et ratifié avant la fin des travaux de la Convention. Il a estimé que les « Conventionnels » avaient les moyens d'une démarche semi-constitutionnelle, -non point qu'ils soient investis du pouvoir constituant, qui reste aux mains des États membres , mais qu'ils avaient le pouvoir de préparer cette nouvelle Constitution de l'Europe- et que, si la Convention trouvait la solution institutionnelle de l'élargissement, les diplomates ne pourraient pas remettre en question la solution retenue et les chefs d'État et de gouvernement ne prendraient pas la responsabilité de revenir sur certains aspects de la solution qui ne leur conviendraient pas.

Il a enfin estimé que, pour l'instant, seuls les Britanniques menaient une stratégie qui tenait compte des enseignements de la précédente Convention, alors que l'axe franco-allemand était absent. Quant aux « petits » États, a-t-il ajouté, ils n'ont pas encore réalisé à quel point la Convention était déjà proche d'une solution qu'il a jugée « trop britannique » à son goût.

Mme Danielle Bidard-Reydet a regretté la faiblesse du débat européen dans les différents pays. Elle a estimé dommageable que les parlementaires nationaux soient insuffisamment associés, non seulement à l'élargissement, mais aussi à la Convention, et jugé qu'il y avait là un déficit grave de démocratie, aussi bien pour le choix des finalités de l'Europe que pour le contenu d'un projet qui est ressenti comme essentiellement libéral, les aspects sociaux semblant disparaître au profit des intérêts financiers ou économiques.

M. Pascal Lamy a estimé que ce qu'on appelait « le déficit démocratique », c'est-à-dire l'absence de relations affectives ou de compréhension entre les peuples et les institutions européennes, tenait, sans doute, en grande partie, au fait que les parlements nationaux n'étaient pas assez impliqués dans le processus européen, parce que l'échelon européen s'était vu déléguer des compétences qui n'étaient plus exercées par les États membres. Il a ensuite évoqué deux voies permettant de réimpliquer les parlements nationaux dans le mode de décision de l'Union : la première, celle d'un Congrès qui deviendrait une institution de l'Union ; la seconde, en donnant aux parlements nationaux le rôle de gardiens de la subsidiarité, comme le propose le groupe de travail de la Convention présidé par M. Mendez de Vigo. Il a toutefois fait valoir que dans certains pays nordiques, comme au Danemark ou en Suède, mais aussi en Grande-Bretagne, les gouvernements faisaient de grands efforts pour informer leurs parlements par le biais de débats fréquents et vifs qui étaient largement relayés par la presse. Il a jugé, en outre, nécessaire de réfléchir à une amélioration du fonctionnement du Parlement européen, -qui consacre beaucoup de son temps à s'occuper de lui-même plutôt qu'à dialoguer avec le citoyen européen,- de « dramatiser » davantage les élections européennes et de mieux mettre en scène l'élection du président de la Commission. Estimant enfin que la contribution des parlements nationaux était incontournable pour une meilleure légitimation des organes européens, il a souhaité, en outre, que la Commission soit responsable devant le Conseil des ministres et non pas seulement devant le Parlement européen.

M. Pierre Fauchon a ensuite évoqué la question de l'espace judiciaire européen et rappelé les propositions énoncées par le Sénat, non seulement en faveur d'un mandat d'arrêt européen, mais aussi -car cela est intimement lié- pour l'établissement de normes communes et pour un système commun unifié de poursuites.

Il a estimé que, dans tous ces domaines, on en était toujours au point mort. La proposition concernant le mandat d'arrêt européen correspond plus en effet à une amélioration de la procédure d'extradition qu'à un véritable mandat d'arrêt du fait de systèmes judiciaires qui ne sont unifiés ni par une codification de la criminalité organisée internationale, ni par des poursuites et des voies de recours devant la Cour de justice de Luxembourg.

Il a appelé de ses voeux une lutte accrue en matière de drogue, de substances interdites, de trafics des êtres humains et de terrorisme dans le cadre d'un espace judiciaire européen.

M. Pascal Lamy a rappelé que les questions d'affaires intérieures et judiciaires n'avaient été confiées à l'Union européenne que depuis une dizaine d'années, et qu'elles touchent directement aux valeurs et aux identités des Etats membres. Aussi bien a-t-il estimé que dix ans d'apprentissage de la confiance mutuelle n'étaient pas excessifs, en comparaison des quarante ans qui ont été nécessaires dans le domaine du commerce extérieur. Il a enfin insisté sur la résistance des appareils policiers ou judiciaires, qui n'ont parfois que peu de comptes à rendre au pouvoir exécutif.

Il a ensuite estimé que le fonctionnement à l'unanimité du dispositif institutionnel et le droit d'initiative partagé entre la Commission et les États ne contribuaient pas à faire évoluer les choses, et a invité le Sénat à faire pression pour modifier ce processus.

M. Claude Estier a ensuite regretté qu'aucun progrès sensible n'ait été réalisé sur la question de l'association des parlements nationaux à la construction européenne. Il a rappelé que la COSAC n'avait jamais été en mesure d'émettre des propositions précises. Il a également émis des doutes sur la capacité du nouveau groupe de travail constitué pour la prochaine présidence grecque à définir un rôle concret, précis et efficace pour les parlements nationaux.

M. Pascal Lamy a partagé les réserves de M. Claude Estier sur la COSAC, tout en reconnaissant que ces rencontres permettaient la création de liens de confiance entre parlementaires des différents pays membres.

Il a évoqué deux solutions : soit les parlements nationaux sont associés aux mécanismes quotidiens de décision de l'Union, mais alors se pose la question délicate de l'articulation de leur intervention avec le Parlement européen et le Conseil des ministres, soit les parlements nationaux font en sorte que leurs gouvernements leur rendent davantage de comptes sur ce qui se passe en matière européenne.

M. Denis Badré a estimé que les problèmes de collaboration entre parlementaires nationaux et européens constituaient à la fois la principale difficulté, mais aussi le principal intérêt et le frein de la réforme de la COSAC.

M. Jean Boyer s'est interrogé sur l'existence d'une véritable politique européenne en matière agricole. Constatant que le défaut d'espaces et de main-d'oeuvre bon marché en Europe -à l'inverse des pays en développement- l'handicapait dans la définition d'une stratégie agricole, il a souhaité savoir sur quels atouts -agriculture raisonnée, réponse au consommateur- le commissaire envisageait de fonder la compétitivité de l'agriculture européenne à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il a déclaré avoir l'impression, certainement à tort, que l'ouverture de l'Europe était un projet plutôt social qu'économique.

M. Pascal Lamy a précisé que les négociations à l'OMC étaient programmées dans le nouveau cycle jusqu'en 2004 et que les travaux avaient commencé fin 2002 pour deux ans. Il a rappelé que le programme de négociation avait été adopté et qu'il était désormais impossible d'y ajouter ou d'en retrancher quoi que ce soit, mais que la substance de la négociation restait à définir avant d'être approuvée par un accord global.

Constatant que l'Union européenne était l'acteur le plus constant dans les négociations en tous domaines -services, investissement, concurrence, agriculture...-, il a souligné qu'elle était positionnée entre le Nord et le Sud, se comportant à la fois en pays développé, donc ayant un intérêt pour la libéralisation, et en pays du Sud, c'est-à-dire ayant un intérêt politique particulier, contrairement à l'Amérique du Nord et au Japon. Il a expliqué que le rythme des négociations était fait de moments difficiles et de longs faux plats, annonçant que le prochain « spasme » aurait lieu lors de la réunion de Cancun de septembre 2003, à mi-parcours. En attendant, il a rappelé que la négociation se déroulait à Genève, avec des petites réunions ministérielles rassemblant une vingtaine de participants.

Parmi les questions à résoudre à brève échéance, il a cité celle de l'accès aux médicaments pour les pays en voie de développement, expliquant qu'une part du dossier restait à régler en matière d'exception aux droits de propriété industrielle. Il a ensuite évoqué l'échéance de mars 2003 pour l'agriculture, date à laquelle l'essentiel des propositions et des demandes des différents partenaires devraient être faites.

Il a relevé que le contexte s'était trouvé profondément modifié depuis l'Uruguay Round, achevé en 1995, du fait que les pays en voie de développement constituaient désormais les deux tiers de l'OMC et que la Chine y était entrée, quoique cette dernière n'ait pas encore choisi son camp entre pays en voie de développement et pays développés et semble rechercher les alliances les plus profitables en fonction de ses intérêts propres. Il a aussi noté que l'attention était très soutenue sur les débats, y compris de la part des organisations non gouvernementales (ONG), depuis Seattle.

Dans ce domaine, il a fait observer qu'il existait des sujets sensibles, parmi lesquels le problème de la libéralisation des services et de son articulation avec les services publics. Evoquant notamment le cas de la distribution d'eau, pour laquelle il existe un véritable savoir-faire européen, il a fait valoir qu'il était dans l'intérêt de l'Europe d'obtenir la libéralisation de ce secteur, ce qui soulevait des difficultés en matière de définition et d'accès à la ressource.

Concernant la question agricole, M. Pascal Lamy a insisté sur la nécessité de distinguer les négociations sur ce sujet à l'OMC de la réforme de la politique agricole commune (PAC). Il a rappelé que l'Union européenne s'était engagée, dans la négociation à l'OMC, à réduire ses soutiens à l'exportation et à la production domestique et à ouvrir ses marchés et qu'il restait à définir les modalités de cet accord de principe. Il a convenu que la réforme actuelle de la PAC interférait avec cette négociation, mais il a souligné qu'elle résultait d'une réflexion interne à l'Union européenne. Il n'a toutefois pas nié que cela influerait sur les positions de négociation de l'Europe, estimant que la réforme de la PAC offrirait à celle-ci des marges de manoeuvre dans les négociations à l'OMC. Il a insisté sur le fait que ce n'était pas la négociation à l'OMC qui déterminait celle à conduire au sein de l'Union européenne mais bien l'inverse. Expliquant que sa position actuelle de négociation à l'OMC était fondée sur la PAC telle qu'elle fonctionnait aujourd'hui, il a déclaré qu'une éventuelle modification de la PAC dans l'avenir -qu'il a d'ailleurs jugée utile- modifierait son attitude à l'OMC. Il a fait valoir que l'interaction ne fonctionnait pas dans l'autre sens.

S'agissant de la PAC, et en réponse à la question de M. Jean Boyer sur le modèle agricole européen, il a rappelé que le point de départ essentiel, sur lequel existait un consensus, était la nécessité de réguler les marchés agricoles, alors que les pays libéraux plaidaient pour la pure application de la loi du marché. Il a estimé que l'Europe faisait de l'agriculture un produit « à part », comportant des externalités en matière de sécurité alimentaire, de culture, d'environnement, et ne pouvant de ce fait être soumis à la loi du marché. Il a jugé que cette conception nous opposait à une partie du reste du monde. Relevant que nos partenaires s'étonnent que l'Union européenne veuille préserver du marché le secteur où elle a, comme par hasard, un faible avantage comparatif, il a appelé de ses voeux un travail politique afin d'expliquer que cette démarche n'était pas protectionniste, même si elle avait pu l'être autrefois. Il a rappelé qu'un consensus existait entre les Etats membres de l'Union européenne pour convenir que, sur les sept millions d'exploitations agricoles que comptait l'Union, six disparaîtraient si on laissait jouer le marché, le million restant se répartissant en outre bien mal sur son territoire. Il a souhaité que ce contrat soit bien clair, ne résulte pas d'un compromis bancal, et qu'il justifie une politique de soutien.

Evoquant ensuite l'autre débat portant sur le choix des modalités de correction du marché en matière agricole, il a cité les multiples questions à résoudre : quel soutien ? combien ? pour qui ? comment ? avec quelles méthodes et quelles évolutions ?... Après avoir rappelé que la PAC avait été conçue dans les années cinquante sur un modèle d'autosuffisance et de prix supérieurs au marché mondial et qu'elle avait exclu l'agriculture de la loi du marché, il a souligné qu'il en était résulté des crises répétées et des surplus de production mémorables. Il a déclaré que la réforme de 1992 avait voulu « réinsérer » un peu de mécanismes de marché dans le dispositif et ne plus faire reposer ce dispositif sur les prix, donc sur les consommateurs, mais sur le contribuable. Il a ensuite relevé que cette option soulevait le débat, qui restait aussi à trancher, du soutien public et de sa répartition entre agriculteurs riches et pauvres, entre plaines et montagnes, entre céréales et bétail... Revenant sur la nouvelle réforme de Berlin, en 1999, qui prévoyait un bilan à mi- parcours et fixait des plafonds jusqu'en 2006 pour la dépense agricole, avec des possibilités de modification à l'intérieur du système, il a remarqué que c'était exactement ce qu'avait fait la Commission et que cela ne manquait évidemment pas de poser des problèmes.

Il a ensuite fait part aux sénateurs, avec leur permission, de quelques considérations tactiques. Constatant que la position de la France consistait à figer la situation jusqu'en 2006, il a souligné deux points : d'abord que, à la différence des perspectives financières qui étaient décidées à l'unanimité, le fonctionnement des marchés agricoles se votait à la majorité qualifiée, ce qui impliquait de travailler à nouer des alliances ; ensuite, qu'il n'était sans doute pas de l'intérêt de la France de traiter ce problème en 2006, sous sa forme budgétaire, sachant que la France restait un gros bénéficiaire de la PAC. Il a estimé que la position tactique de la France était plus forte à la majorité qualifiée que sur un budget agricole qui serait adopté postérieurement à 2006, en raison de l'élargissement et de la position de l'Allemagne qui, en solde budgétaire pur -calcul dont il a convenu du caractère primaire, sur le plan économique- était le plus gros contributeur alors qu'elle devait déjà assumer le coût de sa réunification. Après avoir reconnu que cette question ne relevait pas de son domaine, il a jugé plus judicieux de mettre la réflexion en route aujourd'hui, d'envisager le découplage des aides comme une voie de sortie économique et budgétaire de la politique agricole, et de chercher des compromis avec l'Allemagne et à coûts constants. Il a estimé possible d'aboutir à un accord aujourd'hui, mais pas forcément en 2006.

Rappelant que le souci de l'Europe était de préserver et de promouvoir nos atouts, il a fait observer qu'elle ne disposait pas d'avantages comparatifs dans des secteurs comme celui du sucre par rapport aux pays en voie de développement. En revanche, en matière de fromages, de vins, d'agro-alimentaire, il a considéré que l'Union européenne resterait un grand joueur mondial dans vingt ans, à condition d'avoir protégé ses appellations d'origine, lesquelles feront la force de l'Union mais sont aujourd'hui dispersées sur la planète. Relevant la difficulté qu'il y aurait à les récupérer, il a souligné que l'Union européenne était demandeuse dans de nombreux accords multi ou bi-latéraux afin d'obtenir leur reconnaissance et leur protection. En l'espèce, il a jugé que l'Union était déterminée à défendre ses intérêts de manière offensive.

Il a comparé la gestion de la négociation agricole internationale à un jeu à quatre coins -l'Union européenne, les Etats-Unis, le groupe de Cairns et les pays en voie de développement-, estimant qu'une négligence à l'égard du quatrième coin rendrait notre position tactique difficile. Constatant que les Etats-Unis soutenaient autant leur agriculture que l'Union européenne, mais différemment, il a déclaré qu'ils auraient pourtant tendance à s'allier avec les libéraux, ce qui était contre-nature. En revanche, a-t-il noté, l'Inde, les Philippines, la Thaïlande, des pays du Maghreb et d'Afrique ont, pour leur part, intérêt à ne pas ouvrir à l'extrême leurs marchés. Il en a conclu que l'effort politique de l'Europe devait donc tendre à faire alliance avec des pays en voie de développement qui savaient que leur agriculture souffrirait terriblement de l'ouverture de leurs marchés.

M. Jean Bizet a considéré que la manière dont étaient traités certains contentieux à l'OMC en cours ou réglés (par exemple dans le domaine des Foreign Sales Corporation (FSC), des hormones ou de l'acier) attestait d'un souci, excessif à son sens, de ménager les États-Unis. Il a dit qu'une certaine frilosité se constatait, même lorsque, par l'organe de règlement des différends, l'Europe avait gain de cause. Par ailleurs, évoquant la loi Trade Promotion Authority (TPA) par laquelle le Congrès américain avait octroyé au Président un mandat beaucoup plus restrictif au regard des lois anti-dumping que les anciennes dispositions du Fast track, il a souhaité savoir si le commissaire européen n'avait pas le sentiment d'une crise de confiance interne et de fonctionnement de l'OMC.

Concernant l'agriculture, il a déclaré que la substance de la nouvelle loi d'orientation agricole américaine -Farm Bill- était désormais claire, et qu'elle conduisait à une progression de 80 % des subventions américaines, dont 70 % couplées aux volumes de production. Il a demandé à M. Pascal Lamy s'il jugeait que le Farm Bill respectait les accords de Doha. Il a jugé, pour sa part, que les aides couplées n'étaient certainement pas conformes mais que les aides contracycliques et les Marketing loans, dont le dispositif se déclenchait selon un système de cliquet, seraient, selon les années, conformes ou non aux engagements de Doha. Il a enfin exprimé son inquiétude sur le fait que l'attitude vertueuse de l'Europe ne soit pas payée de retour.

M. Pascal Lamy a précisé que, alors que les tarifs étaient restés une attribution régalienne des États, même pour des pays d'inspiration libérale, l'organe de règlement des contentieux de l'OMC disposait des moyens d'imposer ses décisions, contrairement à d'autres organes de la gouvernance mondiale. S'interrogeant sur l'existence de deux poids et deux mesures selon que le cas impliquait ou non les Américains, il a jugé qu'il n'en était rien et que les sanctions n'avaient d'autre objectif que la mise en conformité de celui qui perdait devant le panel de l'OMC.

Dans les cas gagnés par les Américains, tel celui du boeuf aux hormones, gagné d'ailleurs par des moyens de procédure, il a considéré que l'Europe devait mettre sa législation en conformité. Evoquant également le cas du contentieux sur les bananes, il a relevé que l'Europe s'était mise en conformité et que les sanctions avaient été levées immédiatement.

Concernant les panels perdus par les Américains, notamment celui sur l'affaire des Foreign Sales Corporations -système de subventions à l'exportation à travers la fiscalité des sociétés américaines-, il a fait valoir que l'Europe pouvait imposer jusqu'à 4 milliards de dollars de sanctions. Il a déclaré que cette arme serait mise en oeuvre si les États-Unis ne se mettaient pas en conformité. Or, il a fait savoir que le Président des Etats-Unis, lors de leur dernière rencontre en mai dernier, avait affirmé sa volonté de régularisation et que le processus américain était en cours devant la Chambre des représentants, sur la base d'un projet de loi déposé par son président -du fait qu'aux Etats-Unis, l'initiative législative en matière fiscale et budgétaire appartient au Congrès et non pas au gouvernement. Il a déclaré qu'il en irait de même pour l'acier si l'Europe gagnait le panel qui porte sur les mesures américaines de sauvegarde passive et qui sera jugé dans le courant de 2003.

M. Pascal Lamy a jugé que le système de règlement des différends était équilibré et ne fonctionnait pas seulement pour les États-Unis, mais aussi pour d'autres pays de l'OMC, comme le Brésil, le Canada, etc. Mais il a estimé que le recours à des sanctions commerciales n'était utilisable qu'en dernier ressort, remarquant qu'il s'agissait d'un outil efficace, mais mettant aussi en difficulté nos importateurs. Revenant sur l'affaire de l'acier, il a souligné que, selon la Commission, les Américains n'avaient pas respecté correctement la procédure et que l'Europe disposait donc d'une possibilité de rétorsions. Rappelant que la Commission avait publié cet été une liste de produits américains sur lesquels pourraient porter ces rétorsions, il a fait observer que les sidérurgistes européens avaient préféré bénéficier d'exemptions sur les mesures protectionnistes engagées par les États-Unis.

Concernant la conformité du Farm Bill aux engagements pris par les Etats-Unis à Marrakech en 1995, il a estimé qu'elle serait vérifiée par l'Union européenne année après année. S'agissant des négociations de Doha -qui risquent de modifier certaines dispositions antérieures-, il a assuré qu'il n'était naturellement pas question de faire des concessions qui ne seraient pas payées de retour dans l'hypothèse où le Farm Bill n'était pas conforme aux nouveaux engagements. Enfin, il a précisé que les Américains s'étaient engagés à Doha à revoir leurs règles anti-dumping à la demande des pays en voie de développement, ce qui serait sans doute difficile à accepter pour le Congrès.

Après avoir reconnu que sa question initiale était : « Comment gérer l'engagement de révision de la PAC à mi-parcours avec les pressions que les négociations de Doha ne manqueront pas de poser ? » et que le commissaire y avait répondu de manière très explicite en disant que le commissaire Fischler était son banquier, M. Louis Le Pensec s'est demandé si l'image n'était pas trop réductrice, estimant que M. Fischler était plus un homme de ressources à consulter avant chaque négociation qu'un banquier, dans la mesure où il souhaitait pour la PAC des inflexions très fortes, qualitatives, de modulation des aides, de plafonnements, de réponse de la politique agricole aux attentes des consommateurs et des citoyens, en particulier sur l'environnement.

Par ailleurs, il a dit souscrire totalement à l'analyse du commissaire, jugeant que la France ne pourrait pas rester sur une position de résistance et de refus, tant pour la révision de la PAC que pour celle de la politique commune de la pêche, laquelle doit être adoptée avant le 20 décembre prochain. A ce sujet, il a demandé au commissaire de préciser les contraintes de calendrier sur cette réforme.

M. Pascal Lamy a considéré que la politique européenne de la pêche avait aussi un impact sur les négociations de Doha, à la fois au titre du contrôle des subventions et au titre de la protection de l'environnement. Il a rappelé que l'Europe devait être capable, d'ici mars prochain, de dire comment elle entendait négocier. Il a précisé que la présidence danoise du Conseil, puis la présidence grecque, s'organisaient pour que des décisions sur la réforme de la PAC soient prises au cours du premier trimestre de l'année 2003. Il a souligné l'importance de ces décisions dans deux domaines : d'une part, celui du découplage entre le soutien et le volume de production, c'est-à-dire avec le passage du soutien à l'hectare, au quintal ou à la tête vers l'aide à la personne ; d'autre part, celui de la conditionnalité de l'aide en fonction de considérations liées à la sécurité alimentaire, au respect de l'environnement, voire au bien-être des animaux.

M. Yann Gaillard a relevé que l'élargissement n'avait pas été évoqué, alors que ce sujet n'était pas totalement dénué de lien avec la réforme de la PAC. Il a déclaré avoir constaté, à l'occasion d'un déplacement en Pologne avec le ministre de l'agriculture, que les Polonais avaient une certaine « sympathie » pour le projet de réforme de la PAC. Il a rapporté que le ministre leur avait suggéré d'attendre 2004 afin qu'ils participent à cette réforme. Il a souhaité connaître le point de vue du commissaire sur ce point.

M. Pascal Lamy a répondu en faisant observer que, après 2004, d'autres pays concernés par la réforme, outre la Pologne, auraient rejoint l'Union et qu'ils ne partageraient pas nécessairement notre position. Il a cité la Hongrie, la Slovénie et les pays baltes qui avaient plutôt une tradition agricole libérale sur le modèle néerlandais. Il a donc estimé qu'il n'était pas opportun de repousser la réforme de la PAC après l'élargissement, considérant que la réforme de la PAC n'était pas due à l'élargissement, ni l'élargissement lié à la réforme de la PAC. Il a rappelé à ce propos que les chefs d'État et de gouvernement avaient décidé que l'élargissement se faisait à politiques constantes, ce qui signifiait qu'il s'opérait donc sur la base de la PAC telle qu'elle était aujourd'hui. Il a jugé qu'étaient seulement nécessaires quelques ajustements, notamment pour les aides directes, compte tenu des différences de niveau de vie. Au contraire, il a considéré qu'il était préférable de réformer la PAC avant l'arrivée des nouveaux États membres, d'autant qu'après 2004, compte tenu de la programmation budgétaire post-2006, les ministres des finances chercheraient à faire des économies aux dépens de la PAC.

M. Marcel Deneux a pris acte avec intérêt du fait que le commissaire avait déclaré apprécier le modèle agricole européen et s'était engagé à le défendre, ce qu'il a estimé très important pour la France. Il a également noté les deux considérations critiques de M. Pascal Lamy sur la réforme de la PAC. Il a déclaré qu'il fallait bien reconnaître que le débat avait changé sur ces questions depuis cinq ou six ans à travers le monde, et qu'il était maintenant difficile de séparer les négociations commerciales des autres négociations. Jugeant effectivement très important le rôle des pays en voie de développement dans les négociations, il a considéré de l'intérêt de la France de se concilier ces pays. Sur ce point, il a souhaité connaître l'opinion du commissaire concernant la position de la France en matière de médicaments.

M. Pascal Lamy a déclaré qu'il s'agissait d'un point à la fois tactique et politique essentiel. Il a estimé que la bonne position de l'Union européenne, pour des raisons politiques correspondant à son propre projet, et pour des raisons tactiques correspondant à ses intérêts, était de constituer le maximum de passerelles entre le Nord et le Sud. En matière agricole, il a rappelé que les pays en voie de développement partageaient avec l'Union européenne une sensibilité que n'avaient ni les Américains, ni les pays du groupe de Cairns. Précisant que c'était grâce à l'Europe que les médicaments avaient bénéficié à Doha d'une exception aux règles de la propriété industrielle et commerciale en cas d'urgence sanitaire, il a relevé que l'application de cet accord n'était pas facile, surtout pour les pays qui n'avaient pas les capacités de fabriquer eux-mêmes les médicaments génériques, ce cas particulier n'ayant pas été traité à Doha. Il a assuré que l'Europe travaillait à établir des ponts, notamment avec les Brésiliens, les Indiens, les Sud-Africains, face aux Américains et aux Suisses, mais qu'il fallait à la fois protéger la propriété intellectuelle pour encourager la recherche et permettre des dérogations dans des cas précis avec des systèmes de prix différenciés, tout en évitant les importations parallèles.

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PJLF pour 2003 - Industrie - Examen du rapport pour avis

La commission a enfin procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Francis Grignon sur les crédits consacrés à l'industrie dans le projet de loi de finances pour 2003.

M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, rappelant que les crédits consacrés à l'industrie dans le projet de loi de finances s'inscrivaient en légère diminution, pour revenir à un montant de 2,26 milliards d'euros, a néanmoins précisé que l'importance des reports de crédits contrecarrait largement cette évolution.

Il a ensuite indiqué que les crédits de ce ministère pouvaient être divisés en deux sous-ensembles, les crédits « offensifs » et les crédits « défensifs ».

Relevant que les crédits offensifs englobaient les moyens affectés à la formation, à la diffusion de la recherche et à la valorisation de l'innovation, il a précisé que les crédits consacrés aux écoles des mines augmentaient de 4 %. Il a toutefois noté, au passage, que ces écoles, disposant de moyens en hausse, ne formaient pas plus de créateurs d'entreprises que d'autres écoles d'ingénieurs.

Il a ensuite souligné que les crédits de l'agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) s'élevaient à 142,5 millions d'euros. Précisant que l'action de l'ANVAR s'illustrait dans les domaines des technologies de l'information et de la communication, des matériaux et notamment des nanotechnologies, des sciences du vivant, de l'environnement et des transports, il s'est félicité du bon fonctionnement de cette agence, dont les crédits permettent la création d'un emploi durable par tranche de 9.000 euros. Il a attiré l'attention de la commission sur l'expérience de guichet unique qui avait eu lieu dans sa région et qui avait consisté à situer, dans le même bâtiment, l'ANVAR, les organismes de recherche et les universités, notant que cela avait facilité les transferts de technologies.

Il a enfin précisé que les crédits accordés au soutien des petites et moyennes industries (PMI) étaient désormais entièrement contractualisés dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, pour un montant global de 93,5 millions d'euros.

Evoquant la question des crédits défensifs, il s'est félicité du doublement des crédits visant à accompagner les restructurations et les mutations industrielles, qui atteignent désormais 39 millions d'euros.

Relevant que la conjoncture économique était en net ralentissement en 2002 en raison de l'instabilité des marchés financiers et de la baisse du dollar, il a noté que les prévisions d'évolution des investissements et de l'emploi industriel pour cette même année étaient plutôt défavorables. Il a, à ce sujet, évoqué la concurrence que pouvaient exercer les pays d'Europe de l'est, où le coût de la main-d'oeuvre était souvent faible, ce qui pouvait constituer une incitation à la délocalisation pour les entreprises. Il a toutefois précisé que l'élargissement de l'Union européenne à ces pays devrait les obliger à intégrer l'acquis communautaire et les contraintes s'y rapportant, ce qui devrait estomper ce différentiel de coût.

M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué la situation spécifique de trois secteurs industriels. Rappelant que les industries du textile et de l'habillement employaient directement et indirectement près de 450 000 salariés, il a noté qu'elles avaient été affectées par de lourdes restructurations et qu'elles avaient perdu, en vingt ans, près de 55% de leurs effectifs. Il s'est néanmoins félicité que, lors de la question orale avec débat posée par M. Christian Poncelet, Président du Sénat, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie, ait annoncé la création d'une zone pan-euro-méditerranéenne et la mise en oeuvre de mesures fortes pour que ces industries investissent dans l'innovation et le renouvellement de leur offre.

Evoquant le contentieux transatlantique relatif à la surtaxe américaine des produits sidérurgiques importés, il a précisé qu'une procédure était en cours auprès de l'organisation mondiale du commerce (OMC) et devrait aboutir au cours du printemps 2003. Il a toutefois noté que la négociation avec les Etats-Unis avait pris un tour favorable et que le plan de riposte défini par l'Union européenne n'avait pas eu à s'appliquer, les Etats-Unis ayant accordé des exemptions de droits de douane supplémentaires à une grande majorité des produits sidérurgiques européens.

Enfin, rappelant la démarche qu'avait entreprise la Commission européenne pour libéraliser le secteur de la distribution automobile, il a déploré que la Commission n'ait pas donné de suite favorable à l'avis que le Sénat avait émis à l'occasion de l'adoption de sa résolution du 1er juin 2002 sur le sujet et il a noté que les pouvoirs propres de la Commission en ce domaine étaient sûrement trop importants, ce qui devrait faire l'objet d'une réflexion spécifique dans le cadre des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Union européenne.

Evoquant la question des brevets, il a indiqué que l'accord de Londres, qui devrait permettre une baisse du coût des brevets en allégeant les contraintes de traduction, devrait être ratifié prochainement. Il a par ailleurs relevé qu'il serait particulièrement attentif aux mesures qui seraient prises par le ministère de l'industrie pour accompagner cette ratification et qui viseront à soutenir le dépôt de brevets par les entreprises et les centres de recherche.

Enfin, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a abordé la question du système de normalisation, précisant qu'il existait, en France, un organisme performant, l'association française de normalisation (AFNOR), qui n'était cependant pas assez présent et influent dans les organisations de normalisation européennes et internationales. Au contraire, il a relevé que l'Angleterre et l'Allemagne étaient des pays qui disposaient d'une influence supérieure, ce qui leur permettait d'infléchir la définition des normes dans un sens plus favorable à leurs industries nationales.

Précisant que les conditions de dépôt de brevets étaient différentes en Europe et aux Etats-Unis, M. Jean Bizet s'est interrogé sur l'existence de réflexions visant à harmoniser ces procédures.

Rappelant que les moyens affectés aux écoles des mines avaient augmenté de manière importante dans ce projet de budget, M. Christian Gaudin a demandé s'il existait des statistiques permettant de comparer le nombre de créateurs d'entreprises selon les écoles d'ingénieurs. Il s'est également interrogé sur l'intérêt de disposer des écoles d'ingénieurs et des organismes de recherche dans les mêmes bâtiments.

Répondant à M. Jean Bizet, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a précisé que la plus grande partie des efforts sur les brevets devait d'abord avoir comme objectif d'harmoniser les conditions de dépôt au sein même de l'Union européenne.

Répondant à M. Christian Gaudin, il a enfin précisé que peu de créateurs d'entreprises sortaient des grandes écoles d'ingénieurs, à l'exemple de Polytechnique, et que, par ailleurs, la présence de différents organismes sur le même lieu permettait d'accroître les synergies et de faciliter l'évaluation.

A l'issue de cet examen, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'industrie dans le projet de loi de finances pour 2003.

Jeudi 24 octobre 2002

- Présidence de M. Marcel Deneux, vice-président. -

Environnement - Implantation des éoliennes - Examen des amendements

La commission a d'abord procédé à l'examen des amendements aux conclusions de la commission sur la proposition de loi n° 287 (2000-2001) relative à l'implantation des éoliennes et à la protection de l'environnement (M. Jean-François Le Grand , rapporteur).

A l'article 1er, la commission a émis un avis favorable à l'amendement n°1, présenté par M. Hilaire Flandre, visant à exclure du champ du dispositif les petites éoliennes de pompage d'eau.

Cet amendement permettait de répondre aux interrogations soulevées en commission lors de l'examen du rapport, le 17 juillet 2002. Mme Evelyne Didier a indiqué son plein soutien à cet amendement, en soulignant qu'elle partageait entièrement les préoccupations exprimées par l'auteur de l'amendement.

A l'article 3, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 3 de M. Jean-Pierre Vial tendant à ramener le seuil de déclenchement de l'étude d'impact à une puissance installée de 50 kilowatts (kW), au lieu de 2,5 mégawatts (MW).

A l'article 5, la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat quant à l'amendement n° 2 de MM. Bernard Piras, Daniel Raoul et les membres du groupe socialiste, tendant à remplacer le schéma départemental par un schéma régional, défini après avis des départements et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés.

Dans la discussion de cet amendement, M. Jean Boyer a attiré l'attention sur les deux situations dans lesquelles les EPCI pouvaient se retrouver, selon qu'ils étaient maîtres d'ouvrage ou selon qu'ils accueillaient un promoteur extérieur. M. René Monory a exprimé la nécessité de donner beaucoup de libertés aux structures intercommunales.

En conclusion de ce débat, M. Marcel Deneux, président, a estimé que, de même que le Sénat examinait aujourd'hui les impacts environnementaux d'un projet éolien pour les collectivités voisines, une réflexion devrait sans doute être menée à l'avenir sur les problèmes d'impacts environnementaux affectant un pays voisin.

Aménagement du territoire - Convention territoriale en téléphonie mobile - Examen des amendements

La commission a enfin examiné les amendements aux conclusions de la commission sur la proposition de loi n° 409 (2001-2002) relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs.

M. Bernard Piras a d'abord fait part de l'erreur matérielle concernant l'inscription de M. Marcel Debarge parmi les cosignataires de la proposition de loi. M. Bruno Sido, rapporteur, a assuré que cette erreur avait été rectifiée au feuilleton selon des modalités évitant que cette rectification ne puisse être confondue avec un retrait de signature.

A l'article 1er (définition de l'itinérance), la commission a donné un avis favorable à l'amendement n° 7 du Gouvernement tendant à préciser, dans tout le texte, que l'itinérance à laquelle faisaient référence plusieurs articles de la proposition de loi était strictement locale, et non pas nationale. Par conséquent, elle a suggéré au rapporteur de prier M. Jean-Pierre Vial de bien vouloir retirer son amendement n° 1, dont l'objectif était identique, mais qui n'apportait la précision mentionnée qu'à l'article 1 et non au texte entier, dans la mesure où l'amendement n°1 était satisfait par celui du Gouvernement. Concernant le troisième alinéa de l'article 1, la commission a examiné l'amendement n° 8 du Gouvernement et l'amendement n° 2 de M. Jean-Pierre Vial visant à définir l'itinérance locale. Après un bref débat, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 8 du Gouvernement, et un avis favorable à l'amendement n° 2 présenté par M. Jean-Pierre Vial, dont la rédaction lui a semblé plus neutre.

A l'article 2 (modification du cahier des charges des opérateurs), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 3 présenté par M. Jean-Pierre Vial, tendant à la suppression de cet article.

A l'article 3 (posant le principe et fixant les modalités de la couverture en téléphonie mobile de certaines zones blanches), la commission a émis un avis favorable à l'amendement n° 9 du Gouvernement sur l'alinéa 1, sous réserve que le Gouvernement précise en séance la notion de « centre-bourg » et justifie le remplacement de la conjonction « ou » par la conjonction « et », dans l'expression « zone incluant des centres-bourgs et des axes de transports prioritaires ».

Concernant l'amendement n° 10 du Gouvernement, portant sur le deuxième alinéa de l'article 3, la commission, sur proposition du rapporteur, a émis une sagesse s'appuyant sur un sentiment plutôt défavorable, estimant inutile d'introduire également la concertation dans le processus d'identification des zones réellement non couvertes. S'agissant de l'amendement n° 6 présenté par M. Bruno Sido, rapporteur, à titre personnel, la commission a émis un avis favorable.

Sur l'amendement n° 4 présenté par M. Jean-Pierre Vial, portant sur le troisième alinéa de l'article 3, la commission a émis un avis défavorable, estimant que cet amendement n° 4 était satisfait par l'amendement n° 6 précédemment examiné. Elle a suggéré au rapporteur d'inviter M. Jean-Pierre Vial à retirer en conséquence son amendement. La commission a, par ailleurs, émis un avis favorable à l'amendement n° 11 du Gouvernement, demandant que soit publié par l'ART le montant des engagements financiers respectifs des opérateurs.

A l'article 5 (précisions sur la convention de mise à disposition des infrastructures de télécommunications), la commission a émis un avis favorable à l'amendement n° 5 présenté par M. Jean-Pierre Vial.

A l'article 6 (précisions relatives à la prestation d'itinérance), la commission a également émis un avis favorable à l'amendement n° 12 présenté par le Gouvernement.

M. Jean Boyer, après avoir fait observer que les deux tiers de son département n'étaient pas couverts en téléphonie mobile, a interrogé M. Bruno Sido, rapporteur, sur la question de savoir qui serait maître d'ouvrage dans les zones visées par la proposition de loi.

M. Bruno Sido, rapporteur, a attiré l'attention de M. Jean Boyer sur l'article 4 de la proposition de loi, lequel précisait que les collectivités locales resteraient propriétaires des infrastructures de télécommunications dont elles auront financé la construction. Il a justifié cette disposition par le fait que les pylônes que construiraient les collectivités locales, en vue d'accroître leur couverture en téléphonie mobile de deuxième génération, pourraient également servir, dans l'avenir, à supporter les réseaux de troisième génération -UMTS. Il a rappelé que l'objectif central de la proposition de loi était de permettre à une collectivité locale de négocier avec un opérateur les termes de l'extension de sa couverture téléphonique.