Travaux de la commission des affaires économiques



Mardi 8 juin 2004

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président, et de M. Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. -

Audition de M. Mario Monti, commissaire européen chargé de la concurrence

La commission, a procédé, conjointement avec les membres de la délégation pour l'Union européenne et les membres du groupe de travail sur les délocalisations des industries de main-d'oeuvre, à l'audition de M. Mario Monti, commissaire européen chargé de la concurrence.

M. Jean-Paul Emorine, président, et M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne ont tout d'abord rappelé les sujets relevant des attributions de M. Mario Monti qui intéressaient plus particulièrement les sénateurs de la commission et de la délégation pour l'Union européenne.

Puis M. Mario Monti s'est félicité de l'opportunité de cette audition, dans un contexte qui avait vu, d'une part, l'adoption, par la Commission européenne, le 20 avril 2004, de deux communications importantes sur la politique de concurrence et sur la politique industrielle et, d'autre part, la mise en place, au Sénat, d'un groupe de travail sur les délocalisations, devant rendre son rapport dans les semaines à venir.

Remarquant que la politique de la Commission en matière de concurrence faisait souvent l'objet de critiques, il a estimé cet élément tout à fait étonnant, dans la mesure où la Commission européenne se bornait à traduire dans les faits les orientations politiques définies par le Conseil Européen. Il a donc souhaité rappeler les objectifs et l'utilité de la politique de concurrence. Il a indiqué que celle-ci devait favoriser la croissance et la compétitivité de l'industrie européenne, tout en dégageant d'importants bénéfices concrets pour les consommateurs. Il a déclaré que le but ultime de cette politique, et ce, depuis le Traité de Rome, était la création de richesses pour l'ensemble de la société. Il en a conclu que cette politique devrait faire l'objet d'un large consensus politique, dans la mesure où elle bénéficiait tout autant aux entreprises et à l'activité économique en général qu'aux plus démunis. Il a cité, à titre d'exemple, la transformation très positive des secteurs des télécommunications, de l'énergie ou des transports.

Concernant le contrôle des concentrations, il a rappelé que les interdictions ne représentaient qu'une part infime des dossiers examinés. Il a indiqué que la préoccupation de la Commission européenne était la structure à long terme des marchés, mais qu'elle s'efforçait de tenir le meilleur compte des conséquences sociales des décisions qu'elle prenait. Il a insisté sur le fait que cette politique n'avait pas pour conséquence d'empêcher l'émergence de grands groupes européens, citant en exemple les fusions de TotalFina/Elf, Carrefour/Promodès ou Framatome/Siemens. Il a rappelé qu'on ne pouvait souhaiter le développement international de grands groupes européens sans accepter la possibilité que certains d'entre eux passent sous le contrôle de concurrents internationaux.

Dans le domaine des aides d'Etat, il a fait valoir que le Conseil européen avait insisté, à plusieurs reprises, sur la nécessité d'une réduction du volume global des aides, ainsi que sur une réorientation de celles-ci vers des objectifs horizontaux d'intérêt commun. Il a estimé qu'il importait que les aides sectorielles et individuelles soient soumises à un contrôle strict de la part de la Commission, dans la mesure où elles entraînaient d'importantes distorsions de la concurrence, et qu'elles ne devaient donc être autorisées qu'à titre exceptionnel.

Il a souligné que la Commission européenne ne souhaitait pas interdire toute aide d'Etat et qu'elle était généralement plus souple pour certaines aides d'Etat à vocation horizontale comme, par exemple, en matière de protection de l'environnement ou d'emploi. Dans ces conditions, le contrôle de la Commission européenne sur les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises visait à établir une certaine discipline qui garantisse d'une part, que les nécessaires mesures de redressement à long terme des entreprises considérées seraient bien réalisées et, d'autre part, que la distorsion de concurrence au détriment des autres entreprises ne soit pas excessive. Il a reconnu que cet objectif de long terme pouvait entraîner une impopularité ponctuelle de la Commission.

Il a ensuite exposé dans quelle mesure la politique de concurrence s'articulait avec les autres politiques communautaires, comme l'avait démontré récemment l'adoption simultanée, le 24 avril, des communications sur les politiques industrielle et de concurrence. Il a estimé que l'impression d'une prééminence de la politique de concurrence sur les autres aspects de la stratégie définie au Conseil européen de Lisbonne tenait essentiellement au caractère insuffisant du développement de ces derniers.

Il a estimé que la politique de concurrence renforçait également la politique communautaire de cohésion. En effet, si les aides versées par les Etats membres et les collectivités territoriales n'étaient pas encadrées, on verrait nécessairement les régions les plus riches attirer l'essentiel de l'activité économique au moyen d'aides. Il a rappelé, à cette occasion, qu'il convenait de distinguer, en cas de délocalisations d'entreprises, entre celles qui étaient dues à l'octroi d'aides injustifiées et celles qui n'étaient que le fait du jeu normal du marché. Il a souhaité que l'attention ne se focalise pas sur quelques délocalisations fortement médiatisées, mais sur la réalisation du marché intérieur qui se révélait très positive pour les grands Etats membres, comme la France. Aussi bien est-ce dans ce cadre que doivent s'apprécier les délocalisations.

Il a ensuite souligné que la politique de concurrence prenait en compte la nécessité éventuelle de l'intervention des Etats membres pour corriger les défaillances du marché. Il a indiqué que la question de la cohérence entre la politique de concurrence et certains enjeux sociaux, notamment le fonctionnement des services publics, était au coeur du débat en France, mais aussi au niveau communautaire. Il a estimé que les règles communautaires permettaient le financement adéquat des services publics et se limitaient à interdire les surcompensations.

Il a affirmé, enfin, que le respect des règles de la concurrence se justifiait du fait même de leur caractère bénéfique à l'intérêt général communautaire, et ce d'autant plus à la suite de l'élargissement de l'Union Européenne. Il a estimé qu'on ne saurait en déduire que ces règles étaient immuables et qu'il avait, au contraire engagé un large programme de modernisation de celles-ci en collaboration avec les Etats membres. Cette redéfinition de la politique de la concurrence devait permettre de l'adapter aux nouveaux défis de la globalisation des économies et de l'élargissement de l'Union. Soulignant que l'objectif de la Commission européenne était avant tout l'efficacité à long terme des politiques menées, il a fait valoir que celle-ci avait ainsi pris l'initiative de confier une partie de ses pouvoirs aux Etats membres dans le domaine antitrust. De la même façon, la Commission estimait qu'il lui fallait, dans le domaine des aides d'Etat, concentrer son contrôle sur des affaires ayant le plus d'impact sur la concurrence au niveau communautaire.

M. Jean-Paul Emorine, président, a souhaité évoquer, d'une part, la question de la réforme du statut d'EDF et de GDF dans le cadre de la construction d'un grand marché européen unifié de l'énergie et, d'autre part, celle de la politique européenne en matière d'aides d'Etat au regard du risque de délocalisation.

M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne, a souhaité interroger M. Mario Monti, d'une part, sur l'avenir des services publics et la place réservée à ceux-ci dans la politique de la concurrence et, d'autre part, sur l'émergence d'une véritable politique industrielle européenne, qu'on voyait se dessiner depuis peu. Il a demandé, enfin, comment la réforme de la politique européenne de concurrence s'articulait avec la politique industrielle européenne.

Lui répondant sur le premier point, M. Mario Monti a souhaité dissiper les malentendus entourant la place des services publics ou services d'intérêt général. Il a estimé que la commission avait affirmé, à de nombreuses reprises, l'importance, en termes de cohésion sociale ou régionale, de ces services, qui ne pouvaient pas fonctionner selon les règles habituelles du marché. Il en a conclu que la Commission avait toujours veillé à ce que les mesures de libéralisation proposées au niveau communautaire préservent la possibilité, pour les Etats membres, de maintenir des services publics efficaces. Il a donc nié que l'approche de la Commission européenne soit ultra-libérale. A ce titre, il a souligné que c'était la Commission européenne elle-même qui avait proposé la mise en place du service universel, c'est-à-dire d'un service public communautaire obligatoire dans tous les Etats membres. Il a jugé qu'outre le domaine du service universel, la Commission européenne respectait pleinement les compétences des Etats membres pour mettre en place des services publics et assurer leur financement, ce qui pouvait passer par des soutiens financiers, la Commission demandant simplement que ceux-ci soient proportionnés aux besoins et effectivement utilisés pour les missions de service public, et non pour intervenir sur d'autres marchés. Il en a conclu que les règles communautaires n'empêchaient nullement la mise en place de services publics efficaces par les Etats membres.

En réponse à l'interrogation de M. Jean-Paul Emorine, président, sur EDF, il a rappelé que la Commission européenne avait identifié une difficulté qui tenait à l'existence d'une garantie illimitée liée au statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). La décision de la Commission européenne prise en décembre 2003 se bornait à contester l'existence de cette garantie illimitée, et non les autres prérogatives reconnues par le statut d'EDF. Il a fait valoir que la France n'était pas le premier pays où la Commission européenne avait appliqué ce principe, citant notamment le cas des banques publiques en Allemagne et en Autriche. Il a précisé que la demande de la Commission européenne portait exclusivement sur la suppression de la garantie illimitée de l'Etat et que la transformation du statut d'EDF, telle qu'elle était prévue par le projet de loi sur le point d'être discuté par le Parlement, allait au-delà des exigences de la Commission européenne et répondait au libre choix du Gouvernement français, sur lequel il n'appartenait pas à la Commission européenne de se prononcer.

M. Xavier de Villepin a souhaité savoir, d'une part, s'il existait une différence d'approche entre les politiques européenne et américaine de la concurrence et, d'autre part, si le reproche selon lequel la Commission européenne ne prendrait pas suffisamment en compte les aspects économiques et industriels liés à la nature mondiale des marchés était fondé.

M. Mario Monti lui a répondu qu'il existait une très grande convergence de vues entre la politique européenne et la politique américaine en matière de concurrence, ce que ne devaient pas masquer d'éventuelles divergences sur quelques cas d'espèce, comme Microsoft ou la fusion General Electric/Honeywell. Quant au second point, il a estimé que ces critiques n'étaient pas fondées. M. Xavier de Villepin ayant alors souhaité savoir si M. Mario Monti était favorable à l'émergence de champions industriels européens de taille à rivaliser avec leurs concurrents américains, celui-ci a répondu par l'affirmative et a souhaité revenir à cette occasion sur l'interrogation de M. Hubert Haenel relative à la politique industrielle. Il a fait valoir, en premier lieu, que le débat sur l'émergence de véritables champions industriels, nationaux ou européens ne se développait réellement qu'en France et en Allemagne.

En second lieu, il a estimé que non seulement les règles européennes de la concurrence n'entravaient pas l'émergence de champions industriels, mais qu'au contraire, elles la facilitaient, en raison, d'une part, de la taille du marché européen et, d'autre part, du « guichet unique » et de l'unité des règles de la concurrence au niveau européen. Il a rappelé que, dans le domaine du contrôle des concentrations, qui était souvent perçu comme le principal obstacle à l'émergence de champions industriels, seules 18 opérations de concentrations avaient donné lieu à un refus sur près de 2 200 opérations examinées depuis 1990 par les services de la Commission, ce qu'illustraient les grandes concentrations autorisées telles AXA/UAP, Carrefour/Promodès, TotalFina/Elf ou récemment Air France/KLM. Il a estimé également que, dans certains cas, des entreprises françaises avaient pu bénéficier des interdictions de certaines opérations de concentration de leurs concurrents.

Il a souhaité approfondir les deux exemples des opérations Schneider/Legrand et Pechiney, dont l'interdiction avait été souvent critiquée en France. Concernant l'opération Schneider/Legrand, il a souligné que l'annulation de la décision de la Commission européenne par le tribunal de première instance des Communautés européennes avait été motivée par des considérations de forme et que le tribunal avait en réalité confirmé l'analyse de fond faite par la Commission. Quant au dossier Pechiney, il a considéré que l'opération interdite en 1999 n'aurait pas donné naissance à un champion européen, dans la mesure où Alcan aurait contrôlé plus de 50 % du nouvel ensemble.

La Commission européenne n'empêchant pas la formation de champions industriels européens, sauf exception, la question était de savoir si elle devrait l'encourager. Il s'y est déclaré personnellement favorable, mais il a rappelé qu'en tout état de cause, de tels champions devraient satisfaire aux exigences des autorités étrangères chargées de la concurrence, en particulier américaines.

Il a estimé, en troisième lieu, qu'il n'était pas toujours dans l'intérêt national d'avoir des champions industriels, en particulier si ceux-ci devaient se maintenir avec l'aide de l'argent des contribuables. Il a ajouté que la nationalité des entreprises ne constituait pas, en soi, une garantie de la pérennité de l'emploi.

M. Francis Grignon, rapporteur du groupe de travail sur la délocalisation des industries de main-d'oeuvre, a souhaité revenir sur l'articulation entre la politique européenne de la concurrence et la politique de cohésion, aspect particulièrement important dans le cadre du phénomène des délocalisations. Il a indiqué que de nombreux industriels, auditionnés par le groupe de travail, avaient critiqué les propositions de la Commission européenne de réforme des règles d'attribution des fonds structurels, qui limitaient les possibilités de restructuration dans certaines régions, faute d'un financement important, au bénéfice des nouveaux adhérents de l'Union européenne. Il a jugé également que l'élargissement ne devait pas aboutir à retarder l'harmonisation fiscale européenne, élément essentiel pour prévenir les délocalisations.

M. Christian Gaudin, président du groupe de travail sur la délocalisation des industries de main-d'oeuvre, après s'être réjoui de l'adoption, par la Commission, d'une communication sur la politique industrielle, a fait part de sa perplexité quant à l'articulation de cette communication et de celle relative à la politique de concurrence.

En réponse, M. Mario Monti a affirmé que la politique régionale et la politique de concurrence avaient été soigneusement coordonnées au sein de la Commission européenne, en particulier en matière d'aides d'Etat. Il a souscrit à l'analyse de M. Francis Grignon quant à l'importance de l'harmonisation fiscale en Europe, tout en déclarant ne pas savoir si la démarche franco-allemande allant dans ce sens aboutirait.

Concernant la concurrence des nouveaux adhérents, il a rappelé que la Commission européenne avait exigé de ceux-ci avant leur adhésion de très importantes concessions en matière de concurrence en général et d'aides d'Etat en particulier.

M. Michel Teston a fait part de sa conviction qu'il était parfois difficile de constituer des champions européens, par exemple dans le secteur ferroviaire ou celui de l'énergie et a formulé sa préoccupation à l'égard des positions européennes sur un champion industriel de ces secteurs.

Mme Odette Terrade a souhaité savoir dans quelle mesure l'adoption, en avril, de la communication sur la politique de concurrence permettrait une meilleure prise en compte de l'intérêt du consommateur, notamment dans le cadre du contrôle des concentrations. Elle a souhaité également connaître l'état d'avancement de la réorganisation interne de la direction générale (DG) de la concurrence à la Commission européenne. M. Mario Monti a estimé que le rapport entre la politique de concurrence et les intérêts des consommateurs était une question délicate, dans la mesure où, d'une part, la politique de concurrence était menée dans l'intérêt des consommateurs, mais où, d'autre part, les entreprises analysaient parfois leur intérêt comme différent de celui des consommateurs. Il a indiqué que la Commission européenne considérait qu'il n'y avait, en réalité, pas d'incompatibilité entre la protection des intérêts des consommateurs et les intérêts des entreprises. Quant à la réforme de la DG Concurrence, il a indiqué qu'il avait créé un poste de fonctionnaire chargé des relations avec les organisations de consommateurs.

M. Gérard César a souhaité savoir, à la suite d'une mission en Bulgarie et Roumanie de la commission des affaires économiques, comment se présentaient les négociations d'adhésion avec ces deux pays, pour le chapitre relatif à la concurrence. M. Mario Monti lui a répondu que la politique de la commission serait la même avec ces deux pays que ce qu'elle avait été avec les dix nouveaux adhérents.

M. Jean-Paul Émin ayant souhaité savoir comment pouvaient s'articuler la politique industrielle et la politique monétaire, M. Mario Monti, après avoir reconnu que, d'une manière générale les différentes politiques menées au niveau européen devaient toujours être coordonnées dans la mesure du possible, a estimé que le principal objectif de la politique monétaire était de garantir la stabilité des prix.

M. Claude Saunier a souhaité savoir si les conditions de production, et en particulier d'hygiène dans l'industrie agro-alimentaire de certains nouveaux adhérents ne constituaient pas une forme de concurrence déloyale, outre les problèmes sanitaires. Il s'est également inquiété de la porosité des nouvelles frontières de l'Union européenne élargie.

M. Mario Monti, après avoir rappelé que ces questions ne dépendaient pas directement de sa compétence, a reconnu que ces questions pouvaient avoir des conséquences en matière de concurrence déloyale. Il a néanmoins affirmé sa conviction profonde quant à l'opportunité de l'élargissement.

M. Francis Grignon, rapporteur du groupe de travail sur la délocalisation des industries de main-d'oeuvre, a fait part de son inquiétude concernant l'évolution des fonds européens consacrés au soutien de la recherche privée, en particulier au sein des grandes entreprises.

M. Mario Monti a indiqué que la recherche constituait un domaine prioritaire aux yeux de la Commission, mais que celle-ci estimait qu'il convenait de concentrer ses efforts dans certains domaines-clés pour éviter la dispersion de moyens, surtout dans une Europe à vingt-cinq États membres. Il a rappelé, par ailleurs, le contexte budgétaire, six Etats membres, dont la France, demandant à ce que le budget de l'Union ne dépasse pas le plafond de 1  % du PIB, et certains Etats souhaitant maintenir les moyens de la politique agricole commune (PAC).

Mercredi 9 juin 2004

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président. -

Energie - Examen des amendements

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen des amendements sur le projet de loi n° 328 (2003-2004) d'orientation sur l'énergie.

Mme Marie-France Beaufils a regretté de ne pouvoir disposer du texte établi dans la version définitive de l'Assemblée nationale, et déploré que ce projet de loi ne fasse pas l'objet d'un débat plus approfondi, avant que M. Henri Revol, rapporteur, n'exprime son souhait d'un dialogue constructif, et que le président Jean-Paul Emorine n'indique que le texte transmis avait été disponible sur le site Internet de l'Assemblée nationale peu après son adoption.

A l'article 1er (Annexe), la commission a donné un avis :

- défavorable aux sous-amendements n°s 338 rectifié, 339, 340, 342, 343, 344, 350, 351, 356 à 365, 367, 370, 375, 378, 377, 381 à 387, 391, 393, 394, 396, 397, 399, 400, 403, 401, 452, 405, 407, 408, 409 rectifié, 406, 410, 411, 413, 418, 419, 421 à 424, 426, 429 et 430 à 451 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi qu'aux sous-amendements n°s 414 à 417 de M. Yves Coquelle et plusieurs de ses collègues, à l'amendement n° 4 de la commission des affaires économiques ;

- favorable aux sous-amendements n°s 337, 341, 345 à 349, 352 à 355, 366, 379, 380, 388, 389 après l'intervention de Mme Marie-France Beaufils, 390, 392, 395, 398, 402, 404, 420, 425, 427, 428 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, aux sous-amendements n°s 250 rectifié de MM. Jacques Valade et Henri Revol, 261, 265, 125, 267 après l'intervention de MM. Marcel Deneux et Henri Revol, rapporteur, de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union Centriste, n° 130 de M. Yann Gaillard, n°s  238 et 239 de M. Ladislas Poniatowski, n°s 466 et 467 de M. Rodolphe Désiré, n° 106 de M. Xavier Pintat et plusieurs de ses collègues, à l'amendement n° 4 de la commission des affaires économiques.

Elle a demandé le retrait du sous-amendement n° 266 présenté par M. Marcel Deneux et les membres du groupe de l'Union Centriste au même amendement n° 4 de la commission des affaires économiques.

A l'article 1er (Objectifs de la politique énergétique), elle a émis, après les interventions de M. Henri Revol, rapporteur, qui en a demandé le retrait, et de Mme Marie-France Beaufils, un avis défavorable aux amendements n°s 457, 458, 456, 455, 454, 371, 372, 373, 374 et 459 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

La commission a ensuite rejeté la motion n° 465 tendant à opposer une question préalable, présentée par Mme Marie-France Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Au titre 1er A, avant l'article 1er A (Caractéristiques du service public de l'énergie), la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 294 présenté par Mme Marie-France Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Avant l'article 1er A, elle a émis un avis défavorable aux amendements n°s 298, 309, 311 rectifié, 295, 301, 302, 297, 307, 300, 303, 299, 304, 305, 306, 310 et 308 présentés par les mêmes auteurs.

A l'article 1er A, la commission n'a pas adopté le sous-amendement n° 132 à l'amendement n°1 de la commission des affaires économiques, présenté par Mme Marie-Christine Blandin.

Avant l'article 1er (Approbation de l'annexe définissant les objectifs et les moyens de la politique énergétique française), la commission s'est prononcée contre l'amendement n° 336 de Mme Beaufils et des membres de groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 1er, elle a rejeté les amendements n° 196 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée et 368 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 1er bis (Maîtrise de la demande d'énergie), la commission a demandé le retrait de l'amendement n° 460 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 1er ter (Diversification du panier énergétique français), elle a également demandé le retrait de l'amendement n° 270 présenté par M. Jean-Pierre Vial.

A l'article 1er quinquies (Assurer un transport de l'énergie efficace et des capacités de stockage suffisantes), la commission a souhaité le retrait de l'amendement n° 222 de MM. Jean Besson et Bernard Piras.

A l'article 1er sexies (Rôle des collectivités territoriales et de l'Union européenne en matière de politique énergétique), elle a également demandé le retrait de l'amendement n° 223 des mêmes auteurs.

Après l'article 1er sexies, elle a rendu un avis défavorable aux sous-amendements n°s 135, 136, 137 138 et 139 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 10 de la commission, à l'amendement n° 133 de Mme Marie-Christine Blandin et au sous-amendement n°s 140 du même auteur à l'amendement n° 11 de la commission.

Au même article, elle a émis un avis favorable, sous réserve de rectification, au sous-amendement n° 141 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 11 de la commission, au sous-amendement n° 197 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée à l'amendement n° 10 de la commission. Elle a demandé le retrait du sous-amendement n° 142 du même auteur au même amendement de la commission, et a donné un avis défavorable à l'amendement n° 134 de Mme Marie-Christine Blandin.

Après l'article 1er sexies, la commission a :

- rejeté les sous-amendements n°s 201, 202 et 203 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée  à l'amendement n° 12 de la commission et le sous-amendement n° 144 de Mme Marie-Christine Blandin au même amendement de la commission ;

- donné un avis favorable aux sous-amendements n°s 199 et 200 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée à l'amendement n° 12 de la commission, et sous réserve de rectification, au sous-amendement n° 143 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 12 de la commission ;

- demandé le retrait du sous-amendement n° 204 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée à l'amendement n° 12 de la commission ;

- a souhaité s'en remettre à la sagesse du Sénat sur le sous-amendement n° 198 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée à l'amendement n° 10 de la commission.

Toujours après l'article 1er sexies, elle s'est déclarée défavorable :

- au sous-amendement n° 145 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 13 de la commission ;

- aux sous-amendements n°s 205 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée à l'amendement n° 14 de la commission, et 146 de Mme Marie-Christine Blandin, à l'amendement n° 148 du même auteur (après une intervention de M. Ladislas Poniatowski), ainsi qu'à ses amendements n°s 149 et 150, avant de demander le retrait de l'amendement n° 206 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

Puis les sous-amendements à l'amendement n° 16 de la commission, n°s 151, 152 et 153 de Mme Marie-Christine Blandin ont reçu un avis défavorable de la commission.

Avant l'article 2 (Champ d'application des obligations d'économies d'énergie, modalités d'application et sanctions en cas de non-respect), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 315 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 2 (Champ d'application des obligations d'économies d'énergie, modalités d'application et sanctions en cas de non-respect), la commission a émis un avis défavorable aux amendements n°s 321 à 328 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen, 208 et 210 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, aux sous-amendements n°s 154 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 18 de la commission et 207 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée au même amendement. Elle a demandé le retrait du sous-amendement n° 268 de M. Marcel Deneux au même amendement et celui de l'amendement n° 262 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union centriste. Elle a donné un avis favorable sous réserve de rectification à l'amendement n° 209 de M. Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

Avant l'article 3, elle s'est déclarée défavorable à l'amendement n° 318 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 3 (Modalités de délivrance et valeur des certificats d'économies d'énergie), la commission a :

- demandé le retrait du sous-amendement n° 126 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'union centriste à l'amendement n° 24 de la commission ;

- donné un avis défavorable aux amendements n°s 334, 277, 329, 330, 278, 332, 335 et 333 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen, aux sous-amendements n°s 156, de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 25 de la commission, à l'amendement n° 155 du même auteur et 260 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'union centriste ;

- émis un avis favorable au sous-amendement n° 235 de M. Ladislas Poniatowski à l'amendement n° 25 de la commission.

A l'article 4 (Création d'un registre national des certificats d'économies d'énergie), elle s'est prononcée contre l'adoption des amendements n°s 279 à 281 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 5 (Sanctions applicables en cas de délivrance indue de certificats d'économies d'énergie et modalités de contrôle), elle s'est prononcée pour l'adoption de l'amendement n° 284 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen, avant d'émettre un avis défavorable aux amendements n°s 282 et 283 des mêmes auteurs.

Après l'article 5, la commission a donné un avis défavorable aux amendements n°s 108 de MM. Xavier Pintat et de plusieurs de ses collègues, 233 de MM. Jean Besson et Bernard Piras ; et un avis favorable aux sous-amendements n°s 259 de M. Marcel Deneux à l'amendement n° 39 de la commission, 109 de M. Xavier Pintat et de plusieurs de ses collègues au même amendement, et 232 et 110 de MM. Jean Besson et Bernard Piras au même amendement. Puis elle s'en est remise à la sagesse du Sénat quant à l'amendement n° 107 de M. Xavier Pintat et de plusieurs de ses collègues.

Au chapitre II, avant l'article 6 A, (Maîtrise de la demande d'énergie, intitulé de la section), l'amendement n° 319 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen a été rejeté par la commission.

A l'article 6 A, la commission a rejeté l'amendement n° 316 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 6 (Articles L. 111-9, L. 111-10, L. 110-10-1, L. 152-1 et L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation et L. 224-1 du code de l'environnement) (Règles de construction relatives à la performance énergétique des bâtiments), la commission a émis un avis :

- favorable au sous-amendement n° 212 de MM. Roland Courteau, Jean-Pierre Godefroy et des membres du groupe socialiste et apparenté à l'amendement n° 42 de la commission, 120 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union centriste sous réserve d'une rectification, au sous-amendement n° 258 à l'amendement n° 47 de la commission présenté par M. Marcel Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste ;

- défavorable aux amendements n°s 211, 213, 214 de MM. Daniel Raoul, Roland Courteau et des membres du groupe socialiste et apparenté, 157, 158 de Mme Marie-Christine Blandin, 264 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union centriste, 215, 216 de MM. Roland Courteau, Jean-Pierre Godefroy et des membres du groupe socialiste et apparenté.

Elle s'en est remise à la sagesse du Sénat, souhaitant connaître l'avis du Gouvernement, sur l'amendement n° 217 de MM. Roland Courteau, Jean-Pierre Godefroy et des membres du groupe socialiste et apparenté.

Après l'article 6, la commission s'est déclarée défavorable à l'amendement n° 312 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen tendant à insérer un article additionnel.

A l'article 6 bis (Chapitre IV (nouveau) du code de la construction et de l'habitation) (Création de certificats de performance énergétique), elle s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 287 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Puis elle a émis un avis :

- défavorable aux amendements n°s 285 et 286 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen, n°s 463 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union centriste, et 159 de Mme Marie-Christine Blandin ;

- favorable à l'amendement n° 263 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union centriste, ainsi qu'au sous-amendement n° 464 de M. Gérard César à l'amendement n° 52 de la commission.

Elle a souhaité connaître l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 461 et 462 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'union centriste.

A l'article 6 ter (Plan Face-sud), la commission a rejeté l'amendement n° 288 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 6 ter, elle a demandé le retrait de l'amendement n° 129 de M. Yann Gaillard.

A l'article 7 (Article L. 224-2 du code de l'environnement - Indication du coût de la consommation énergétique des biens immobiliers), la commission s'est déclarée défavorable aux amendements n°s 289 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen, et n°s 160 et 161 de Mme Marie-Christine Blandin.

Après l'article 7 (Indication du coût de la consommation énergétique des biens immobiliers), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 317 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Au chapitre 1er A, avant l'article 8 A, la commission a rejeté l'amendement n° 293 de Mme Marie-France Beaufils et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Puis à l'article 8 A (Définition des sources d'énergies renouvelables), elle s'en est remise à la sagesse du Sénat sur le sous-amendement à l'amendement n° 54 de la commission n° 127 de M. Yann Gaillard, ainsi qu'au n° 246 de M. Ladislas Poniatowski. Elle a ensuite émis un avis défavorable à l'amendement n° 162 de Mme Marie-Christine Blandin.

Après l'article 8 (Recommandations des communes pour l'utilisation des énergies renouvelables), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 247 de M. Gérard Delfau.

A l'article 8, la commission s'est déclarée défavorable au sous-amendement n° 242 de M. Ladislas Poniatowski à l'amendement n° 56 rectifié de la commission.

Après l'article 8, elle a rejeté les amendements n° 236 de M. Ladislas Poniatowski et n° 119 de M. Daniel Goulet.

Avant l'article 8 bis, la commission a statué contre l'adoption de l'amendement n° 163 de Mme Marie-Christine Blandin.

M. Henri Revol, rapporteur, a présenté, tout d'abord, un exposé des questions posées par l'article 8 bis, puis une synthèse des différentes solutions susceptibles d'être mises en oeuvre pour y apporter une réponse, notamment en ce qui concerne la portée de l'avis de la Commission des sites et, d'autre part, l'autorité compétente pour délivrer les permis de construire les éoliennes. Il a également présenté brièvement, en les regroupant par catégorie, les différents amendements déposés sur cet article.

Puis la commission a entamé l'examen des amendements à l'article 8 bis par un large débat sur le régime juridique applicable à la construction des éoliennes.

Après que M. Bruno Sido eut souligné l'importance d'une association des conseils généraux à l'élaboration des schémas d'implantation des éoliennes, M. Henri Revol, rapporteur, a jugé inopportun de rendre obligatoire l'établissement d'un schéma régional éolien. Il s'est également déclaré défavorable à l'instauration d'un avis conforme de la Commission des sites préalable à la délivrance du permis de construire. Avant de rappeler que son amendement initial prévoyait de faire rentrer le régime du permis de construire des éoliennes dans le droit commun des autorisations d'occupation du sol, selon lequel, lorsqu'une commune n'a pas établi de documents d'urbanisme, les permis de construire sont délivrés au nom de l'Etat.

M. Jean-Paul Emorine, président, s'étant déclaré préoccupé par une éventuelle mise en cause de la responsabilité des communes, M. Daniel Raoul s'est quant à lui interrogé sur le régime applicable aux éoliennes dans les plans locaux d'urbanisme (PLU).

Le rapporteur lui a répondu qu'en la matière, le principe général demeurait que tout ce qui n'était pas interdit était autorisé et qu'en conséquence si le PLU n'excluait pas, dans certaines zones, l'implantation d'éoliennes, celle-ci était possible. Actuellement, a-t-il ajouté, 20 % des communes sont dotées d'un document d'urbanisme.

M. Bruno Sido a estimé qu'une réforme tendant à donner compétence aux maires des communes dotées de documents d'urbanisme pourrait pousser les autres collectivités à élaborer de tels documents, d'un coût parfois élevé.

M. Jean Pépin a craint, quant à lui, une « recentralisation » de la délivrance des permis de construire des éoliennes au niveau des préfets de régions.

Puis M. Ladislas Poniatowski a rappelé qu'actuellement les préfets de département étaient compétents pour délivrer le permis de construire des éoliennes, tout en observant qu'aucune région n'avait, pour le moment, élaboré de « schéma éolien », alors même que plusieurs préfets avaient créé des embryons de schémas au niveau départemental. Évoquant le rôle de la Commission des sites, il a critiqué l'idée que celle-ci puisse émettre un avis conforme, considérant que cette disposition justifierait la suppression de l'article 8 bis.

Il a également souligné le fait que les communes dotées d'un document d'urbanisme n'avaient aucunement songé, pour la plupart, à interdire la construction d'éoliennes sur certaines parties de leur territoire, et il a considéré, en conséquence, qu'il était souhaitable de leur laisser le temps de modifier leurs documents d'urbanisme si elles le souhaitaient, tout en ajoutant que la meilleure solution était de supprimer l'ensemble de l'article 8 bis.

Après avoir indiqué qu'il avait consulté plusieurs des maires de son département sur le sujet, M. Roland Courteau a déclaré souscrire à l'idée d'une suppression de cette disposition manifestement inappropriée et « éolicide ». M. Bernard Piras a, quant à lui, approuvé cette observation, considérant que la réflexion n'était pas assez mûre pour modifier le régime existant.

En réponse, M. Henri Revol, rapporteur, s'est déclaré défavorable à la suppression pure et simple de cet article, estimant qu'il était possible de mener à son terme le débat sur le régime des éoliennes, qui avait déjà connu deux modifications en moins de deux ans, afin de définir les termes d'un consensus législatif durable sur ce sujet. Puis il a indiqué que les promoteurs des énergies renouvelables lui avaient fait savoir qu'ils étaient favorables au maintien du statu quo, et donc à la préservation de la compétence du préfet pour la délivrance du permis de construire les éoliennes.

Mme Marie-France Beaufils a souligné la nécessité de choisir des lieux pertinents pour l'implantation de ces machines, au niveau départemental, avant de se déclarer favorable à la suppression de l'article 8 bis.

Puis M. Jean Boyer a appelé de ses voeux une réflexion de fond pour centraliser, sur quelques sites qui acquerraient de ce fait un intérêt touristique, la construction des éoliennes, au lieu de disséminer ces machines sur le territoire. Il a également souligné l'intérêt qui s'attachait à créer des parcs éoliens plus denses, dans un cadre intercommunal, avant que Mme Gisèle Gauthier ne souligne les difficultés qui résultent, notamment en termes d'atteinte aux paysages, pour les maires, de la construction inopinée d'éoliennes, même dans des communes dotées de PLU, et parfois en dépit de l'avis du maire.

M. Bruno Sido a ensuite indiqué qu'il convenait, dans ce débat, de ne pas oublier le point de vue des entreprises souhaitant bâtir des éoliennes, rappelant qu'une telle implantation n'est envisageable qu'à proximité de lignes à haute tension.

Après avoir relevé que le développement de l'énergie éolienne était indispensable à la diversification énergétique de la France, Mme Evelyne Didier a fait valoir que l'implantation des éoliennes ne pouvait résulter, pour les collectivités territoriales, du souci de disposer de ressources financières et a jugé, en conséquence, que l'autorisation devait être délivrée au niveau départemental.

Mme Yolande Boyer a relevé, elle aussi, qu'il était souhaitable que l'implantation des éoliennes fasse l'objet d'une réflexion appropriée des communes, y compris de la part de celles déjà dotées d'un PLU.

M. Claude Biwer s'est, quant à lui, interrogé sur l'opportunité de partager au niveau intercommunal les ressources fiscales afférentes aux éoliennes.

Après avoir précisé qu'il existait une pression des constructeurs en faveur du développement des éoliennes, M. Marcel Deneux a rappelé que le prix de rachat de l'énergie qu'elles produisaient, très supérieur à celui des minicentrales hydroélectriques, lui conférait une rentabilité bien supérieure à celle résultant de l'énergie hydraulique, qu'il a jugé souhaitable de promouvoir.

M. Jean-Paul Emorine a souligné qu'il était favorable à ce que le préfet continue à délivrer les autorisations d'implantation des éoliennes, indiquant qu'il n'était pas souhaitable que les communes disposent d'une telle compétence, y compris celles dotées d'un PLU, pour ne pas créer deux catégorie de maires, les uns dotés d'un pouvoir dont les autres seraient dépourvus.

M. Max Marest a noté que comme pour les décisions relatives au développement des réseaux ferroviaires ou routiers, il était nécessaire, dans le cas des éoliennes, de faire prévaloir un projet plus large qu'une simple initiative communale.

M. Marcel Deneux a ensuite relevé que la consultation des communes limitrophes pouvait ne pas être suffisante dans la mesure où les servitudes de visibilité liées aux éoliennes excèdent le strict territoire des seules communes contiguës, M. Henri Revol, rapporteur, lui répondant que l'étude d'impact, l'enquête publique et l'avis de la commission des sites permettraient de limiter cet inconvénient.

Après avoir noté que le problème soulevé par M. Marcel Deneux était insoluble, M. Gérard Le Cam a souhaité que des considérations d'intérêt général prévalent pour l'implantation des éoliennes.

M. Henri Revol, rapporteur, a ensuite proposé à la commission de donner un avis favorable aux sous-amendements n°s 104 de M. Ladislas Poniatowski, 219 de MM. Roland Courteau et Jean-Pierre Godefroy, ainsi qu'au sous-amendement n° 164 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 58 rectifié de la commission, qui permettaient de revenir à un avis simple de la Commission des sites, ainsi qu'au sous-amendement n° 103 de M. Ladislas Poniatowski au même amendement qui rendait la compétence au préfet.

Puis MM. Roland Courteau et Daniel Raoul ont fait part de leur souhait d'être associés à ces décisions, soulignant tout l'intérêt qui s'attachait à accepter leur amendement n° 218.

M. Jean-Paul Emorine, président, a alors indiqué que l'ensemble des groupes politiques de la commission seraient associés à cette décision et estimé que l'amendement n° 218 était satisfait par l'amendement n° 58 rectifié de la commission, complété des sous-amendements précités.

A l'article 8 bis (Article L. 421 1-1 du code de l'urbanisme) (Régime de l'implantation des éoliennes), la commission a donné un avis :

- défavorable aux amendements n°s 102 de MM. Roland Courteau, Raymond Courrière et des membres du groupe socialiste, 241 de M. Ladislas Poniatowski, 248 de M. Gérard César, 274 de M. Jean-Pierre Vial, 290 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen, 131 de M. Gérard Delfau, 121 et 122 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'union centriste, 276 de M. Jean-Pierre Vial ;

- favorable aux sous-amendements n°s  103 et 104 rectifiés de M. Ladislas Poniatowski, à l'amendement n° 58 rectifié bis de la commission, ainsi qu'aux autres sous-amendements au même amendement : n°s 164 de Mme Marie-Christine Blandin et 219 de MM. Roland Courteau et Jean-Pierre Godefroy, ainsi qu'à l'amendement n° 275 de M. Jean-Pierre Vial.

Elle a demandé le retrait de l'amendement n° 218 de MM. Roland Courteau et Jean-Pierre Godefroy estimant qu'il était satisfait.

Après l'article 8 bis, la commission s'est déclarée défavorable à l'amendement n° 165 de Mme Marie-Christine Blandin tendant à insérer un article additionnel.

A l'article 9, elle a donné un avis défavorable aux amendements n°s 320 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen et 166 de Mme Marie-Christine Blandin, avant d'émettre un avis favorable à l'adoption des amendements n°s 251 et 252 de M. Jacques Valade.

Après l'article 9, la commission s'est prononcée contre les amendements n° 123 de M. Marcel Deneux et des membres du groupe de l'Union centriste, et n°s 167 à 173 de Mme Marie-Christine Blandin tendant à insérer des articles additionnels.

Après l'article 10, elle a demandé le retrait de l'amendement n° 244 de M. Ladislas Poniatowski et s'est déclarée défavorable à l'amendement n° 272 de M. Jean-Pierre Vial, lesquels tendaient à insérer des articles additionnels.

A l'article 10 (Article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (Implantation d'équipements hydroélectriques destinés à turbiner le débit minimal d'eau à l'aval des retenues), la commission a statué contre l'amendement n° 271 de M. Jean-Pierre Vial.

Puis après l'article 10, elle a rendu un avis favorable à l'amendement n° 313 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen tendant à insérer un article additionnel.

A l'article 11 (Articles 1er et 2 de la loi du 16 octobre 1919) (Mesures destinées à favoriser le développement de l'énergie hydroélectrique), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 174 de Mme Marie-Christine Blandin et s'en est remise à la sagesse du Sénat sur les amendements n°s 175 et 176 du même auteur.

Après l'article 11, elle a demandé le retrait de l'amendement n° 105 de M. Jacques Blanc et s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 273 de M. Jean-Pierre Vial tendant tous deux à insérer des articles additionnels.

A l'article 11 bis (Article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales) (Contributions des collectivités locales à la lutte contre l'effet de serre par la maîtrise de l'énergie), elle s'est prononcée contre l'amendement n° 177 de Mme Marie-Christine Blandin.

A l'article 11 ter (Article L. 3121-17 1 (nouveau) du code général des collectivités territoriales) (Bilan énergétique des délibérations des conseils généraux), la commission a émis un avis défavorable au sous-amendement n° 178 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 61 de la commission.

A l'article 11 quater (Article L. 4132-16-1 (nouveau) du code général des collectivités territoriales) (Bilan énergétique des délibérations des conseils régionaux), elle a donné un avis défavorable au sous-amendement n° 179 de Mme Marie-Christine Blandin à l'amendement n° 62 de la commission et à l'amendement n° 180 du même auteur.

Après l'article 11 quater, elle s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 240 de M. Ladislas Poniatowski et s'est prononcée contre l'amendement n° 269 de M. Jean-Pierre Vial tendant à insérer des articles additionnels.

Après l'article 11 sexies, elle s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 181 de Mme Marie-Christine Blandin et a donné un avis défavorable aux amendements n°s 182 et 183 du même auteur tendant à insérer des articles additionnels.

Avant l'article 12, la commission a émis un avis favorable au sous-amendement n° 253 de M. Jacques Valade à l'amendement n° 67 de la commission.

A l'article 12 (Article 6 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (Bilan annuel réalisé par le gestionnaire de réseau de transport d'électricité sur l'offre et la demande d'électricité), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 291 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 12, la commission s'est déclarée défavorable à l'amendement n° 314 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen.

A l'article 13 (Article 21-1 (nouveau) de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (Amélioration du régime applicable aux réseaux de transport et de distribution d'électricité), la commission a donné un avis :

- défavorable à l'amendement n° 292 de Mme Marie-France Beaufils, M. Yves Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen ;

- favorable aux amendements n°s 112 de M. Xavier Pintat et plusieurs de ses collègues, 224 de MM. Jean Besson et Bernard Piras, au sous-amendement n° 111 de M. Xavier Pintat et plusieurs de ses collègues à l'amendement n° 78 de la commission et au sous-amendement n° 230 de MM. Jean Besson et Bernard Piras au même amendement.

Elle s'en est remise à la sagesse du Sénat souhaitant connaître l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 229 de MM. Jean Besson et Bernard Piras à l'amendement n° 77 de la commission.

Après l'article 13, la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat sur les amendements n°s 117 de M. Xavier Pintat et plusieurs de ses collègues, 234 de M. Jean Besson et Bernard Piras et a donné un avis défavorable aux amendements n°s 184 à 191 de Mme Marie-Christine Blandin.

A l'article 14 (Article 200 quater du code général des impôts) (Accroissement du crédit d'impôt pour l'achat d'équipements de production d'ENR et l'amélioration de l'efficacité énergétique), elle s'est déclarée favorable à l'amendement n° 254 de M. Jacques Valade et a rendu un avis défavorable aux amendements n°s 243 de M. Ladislas Poniatowski et 249 de M. Gérard César.

Après l'article 14, la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat, souhaitant connaître l'avis du Gouvernement, sur les amendements n°s 237 de M. Ladislas Poniatowski, 195 de Mme Marie-Christine Blandin, 128 de M. Yann Gaillard, 193 rectifié de Mme Marie-Christine Blandin, avant de demander le retrait de l'amendement n° 118 de M. Daniel Goulet et de donner un avis défavorable aux amendements n°s 194 et 192 de Mme Marie-Christine Blandin tendant à insérer des articles additionnels.

A l'article 15 (Articles 2224-31 et 2224-34 du code général des collectivités territoriales) [Coordination avec les dispositions relatives aux certificats d'économie d'énergie (articles 2 à 5)], la commission s'est déclarée défavorable aux amendements n°s 225 et 226 de MM. Jean Besson et Bernard Piras.

A l'article 17 (Article 45 de la loi n° 46-628 du 8 août 1946) (Substitution du Conseil supérieur de l'énergie au CSEG), elle a statué pour l'adoption de l'amendement n° 255 de M. Jacques Valade et a donné un avis défavorable à l'amendement n° 124 de M. Yves Détraigne et des membres du groupe de l'Union centriste.

A l'article 18 (Article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (Maintien de l'alimentation des consommateurs d'électricité en cas de défaillance de leur fournisseur), la commission a émis un avis favorable aux amendements n°s 113, 114 et 116 de M. Xavier Pintat et plusieurs de ses collègues, 227, 228 et 231 de MM. Jean Besson et Bernard Piras et au sous-amendement n° 256 de M. Jacques Valade à l'amendement n° 89 rectifié de la commission.

A l'article 24 (Article 25 bis nouveau de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 220 de MM. Roland Courteau, Jean-Pierre Godefroy et des membres du groupe socialiste et apparenté et s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 115 de M. Xavier Pintat et plusieurs de ses collègues.

Avant l'article 28, la commission s'est prononcée pour l'adoption de l'amendement n° 257 de M. Jacques Valade tendant à insérer un article additionnel.

Enfin, après l'article 30, elle a souhaité connaître l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 221 de MM. Roland Courteau, Jean-Pierre Godefroy et des membres du groupe socialiste et apparenté.

Nomination d'un rapporteur

Enfin, la commission a désigné M. Philippe Arnaud rapporteur sur la proposition de loi n° 311 (2003-2004) présentée par M. François Marc et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, relative aux modalités de calcul de la participation pour voirie et réseaux (PVR).

Environnement - Charte - Audition de MM. Ernest-Antoine Seillière, président, et Jean-Pierre Rodier, président de la commission « environnement » du MEDEF 

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a, tout d'abord, procédé à l'audition de M. Ernest-Antoine Seillière, président, et de M. Jean-Pierre Rodier, président de la commission « environnement » du MEDEF, sur le projet de loi constitutionnelle n° 329 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la charte de l'environnement.

Se disant très heureux d'accueillir les deux responsables du MEDEF dans le cadre de l'examen de ce texte, M. Jean-Paul Emorine, président, a rappelé que celui-ci était soutenu par le Président de la République et qu'il avait déjà fait l'objet de modifications en première lecture par l'Assemblée nationale. Rappelant que la commission des lois était saisie au fond, il a indiqué que M. Jean Bizet avait été désigné rapporteur pour avis par la commission des affaires économiques.

Souhaitant s'exprimer au nom des quelque 700 000 adhérents qui composent le MEDEF, M. Ernest-Antoine Seillière a fait part de son inquiétude au sujet de l'inscription du principe de précaution à l'article 5 du projet de loi constitutionnelle et a indiqué que ses craintes étaient partagées par de nombreux experts, intellectuels, professeurs et institutions, telles que l'Académie des Sciences ou l'Académie de Médecine. Précisant qu'il fallait écarter toute vision manichéenne, selon laquelle le MEDEF chercherait uniquement à préserver un hypothétique droit à polluer, il a souligné que les entreprises avaient intégré, depuis des décennies, la prise en compte de l'environnement.

Soulignant que les réticences de son mouvement étaient motivées par la volonté de mieux encadrer un principe de précaution nulle part défini, afin d'éviter que ses extensions jurisprudentielles ne risquent d'entraver tout développement économique, il a indiqué que le MEDEF était favorable à l'élaboration d'une charte du développement durable, qui aurait l'avantage de faire référence à une notion internationalement reconnue, qui prendrait en compte les aspects non seulement environnementaux, mais aussi économiques et sociaux du développement.

Insistant sur le fait que les entreprises n'étaient pas, en elles-mêmes, hostiles à l'idée de précaution, il a estimé que le refus de toute prise de risque ne pouvait cependant être érigé en principe d'action économique et il a plaidé pour que l'équilibre gains/coût soit réintroduit dans la définition du principe, proposée à l'article 5.

Il a ensuite fait état de quatre éléments étayant la réticence de son organisation envers le principe de précaution :

- l'incitation au développement d'une culture du « risque zéro », qui s'étendrait à tous les pans de l'activité humaine, entrave considérable au développement économique et scientifique ;

- la crainte d'un affaiblissement de notre compétitivité économique, d'autant plus grand que notre pays est déjà en retard en matière de recherche et d'innovation ;

- l'introduction d'une nouvelle contrainte de nature asymétrique, la France étant le seul pays, avec l'Équateur, à inscrire dans sa constitution un principe de précaution que l'Union européenne tente simplement à l'heure actuelle de définir ;

- l'absence de sécurité juridique, du fait tant de l'indéfinition du principe de précaution que de son invocabilité directe et de l'acception très large de l'intérêt à agir, qui auront pour effet, sous la pression des médias et de l'opinion publique, d'accroître très sensiblement le nombre des contentieux.

Après avoir estimé que l'amendement à l'article 1er de la Charte de l'Environnement, qui fait référence au droit pour chacun de vivre dans un environnement « respectueux de » - et non plus « favorable à » - sa santé, allait dans le bon sens, M. Jean-Pierre Rodier a expliqué que ce n'était qu'en approfondissant l'examen du projet de loi constitutionnelle qu'il s'était alarmé, après s'être aperçu qu'on ne maîtrisait pas les conséquences juridiques de la reconnaissance constitutionnelle du principe de précaution.

D'un point de vue juridique, il s'est inquiété également du caractère directement applicable de l'article 5, ce qui contribue à donner au juge le pouvoir de fixer le contenu du principe, sachant que son extension à la santé n'est pas évaluée à l'heure actuelle. Rapportant avoir constaté sur le terrain un durcissement des mesures administratives envers les entreprises au nom du principe de précaution, il a craint que ce climat d'incertitude juridique ne soit pas levé avant une dizaine d'années, délai nécessaire à la jurisprudence pour être en mesure de donner une interprétation suffisamment homogène du principe, mais délai trop long en termes de sécurité juridique pour les entreprises.

D'un point de vue plus culturel, il s'est inquiété de voir se développer, à côté d'une bonne application du principe, consistant à évaluer objectivement chaque risque et à décider ou non de l'assumer en fonction de sa gravité et de la potentialité de sa réalisation, une mauvaise application tendant à ériger en règle ultime la maxime « Dans le doute, abstiens toi » et à encourager la recherche du risque zéro.

Considérant que l'agitation médiatique constatée autour du principe de précaution avait eu pour effet d'en dévoyer le sens, il s'est dit interloqué des déclarations du rapporteur du texte de la commission des lois de l'Assemblée nationale, selon lesquelles la mise en oeuvre de ce principe permettrait d'éviter de transformer le monde pour l'épargner, et de celles du président de l'Union syndicale des magistrats (USM) à propos de l'affaire d'Outreau, pour qui la présomption d'innocence doit progressivement s'effacer devant le principe de précaution.

S'interrogeant rétrospectivement sur le point de savoir si certaines inventions ou innovations comme l'aspirine, les tunnels ferroviaires, ou encore les téléphones portables auraient eu lieu s'il avait été fait application du principe de précaution, il a craint que ce dernier ne retarde la prise de décisions opportunes et n'encourage les délocalisations, sachant que ce qui ne se fait pas en France peut se faire à l'étranger, même en matière de recherche qui se délocalise à l'heure actuelle vers la Chine et même en Inde.

En vue d'améliorer le projet de loi, il a proposé que le Parlement puisse encadrer la définition et le caractère directement applicable du principe de précaution, en renvoyant à la loi le soin d'en détailler le processus d'application suivant les différents secteurs d'activité, et de préciser notamment sur qui reposerait la responsabilité de décider du niveau de risque acceptable, ainsi que les procédures correspondantes.

M. Jean-Paul Emorine, président, a souligné que le texte était de nature constitutionnelle et qu'il serait, en tant que tel, complété par l'élaboration de dispositions législatives.

Reconnaissant avoir eu à l'origine les mêmes appréhensions vis-à-vis du projet de loi constitutionnelle que les deux responsables du MEDEF, à travers le dossier des organismes génétiquement modifiés (OGM) où le principe de précaution était assimilé à un principe d'inaction, M. Jean Bizet, rapporteur, s'est toutefois voulu rassurant en expliquant que le projet de loi clarifiait le contenu d'un principe, dont l'absence de définition dans la loi du 2 février 1995 le consacrant en droit positif avait rendu son utilisation excessive et inadéquate.

Ainsi, il a tout d'abord distingué le principe de précaution du principe de prévention, expliquant que le premier avait pour objet les risques inconnus, incertains ou éventuels, tandis que le second ne s'appliquait qu'aux risques connus et quantifiés. Il a ajouté que, seul, le dossier des pesticides et des OGM relevait, à l'heure actuelle, du principe de précaution en tant que tel. D'autre part, il a précisé qu'il revenait aux pouvoirs publics, et non aux entreprises, de définir et de mettre en oeuvre les mesures rendues nécessaires par l'application du principe. Enfin, il a indiqué avoir demandé au garde des sceaux que le Parlement puisse se saisir d'office d'un projet de loi d'application, afin d'être certain que ce soit bien aux assemblées parlementaires, et non aux juges et aux experts, de débattre du sujet.

Estimant que le principe de précaution aurait dû conduire à ne pas examiner un texte de cette nature, mais reconnaissant qu'il fallait à présent chercher à l'améliorer, M. Philippe Leroy a souhaité obtenir du MEDEF des informations sur l'actualité du principe au niveau mondial, que ce soit dans les législations, institutions ou colloques internationaux. Faisant état de l'inquiétude des élus locaux, qui gèrent des équipements sources de grands risques, il a exprimé le désir que soit élargi le principe de précaution aux collectivités territoriales.

Disant partager entièrement les propos du président du MEDEF, M. Jean-Paul Emin a toutefois nuancé sa position en estimant que le projet de loi permettrait de définir un principe qui ne l'avait jusqu'ici jamais été. Rappelant que la Constitution européenne en cours de finalisation faisait référence à ce principe, il a insisté sur le fait qu'il ne pourrait, en aucune manière, paralyser une entreprise, car sa mise en oeuvre reposerait sur les seules autorités administratives. Il a cependant exprimé ses craintes quant aux possibles divergences d'interprétation qu'en donneraient ces autorités.

Considérant par ailleurs que la notion de développement durable, présente dans le texte, était très fréquemment mise en avant par les entreprises, et que la très grande majorité des mesures en la matière relevaient du domaine règlementaire, il s'est félicité que l'examen des textes législatifs pris en application de ce texte donne, au Parlement, l'opportunité de les encadrer davantage.

M. Henri de Richemont s'est demandé dans quelle mesure l'industrie française avait besoin, à travers ce texte, d'une protection constitutionnelle pour ne plus craindre le pouvoir des juridictions quant à l'application du principe de précaution. Il s'est également demandé si un glissement du principe de précaution vers un droit de protection n'était pas à l'oeuvre. Il s'est aussi interrogé sur l'utilité d'une loi qui viendrait préciser les conditions d'application d'une disposition censée être d'effet direct, suggérant que plusieurs lois viennent plutôt les préciser dans chacun des secteurs économiques concernés.

Se référant à son expérience personnelle de responsable d'une entreprise de taille moyenne intervenant en matière d'innovation, M. Michel Bécot s'est inquiété de ce que le principe de précaution empêche ce type d'entreprises de se développer.

Se réjouissant de la proximité entre le point de vue qu'il avait développé et celui de plusieurs des intervenants, M. Ernest-Antoine Seillière a regretté que les responsables politiques nationaux, en voulant anticiper et donner au monde une image positive de la France, ne risquent d'y paralyser l'activité économique et d'inciter les entrepreneurs et les chercheurs à s'expatrier, alors qu'aucun autre pays européen n'a choisi de se doter d'une telle contrainte.

Assurant avoir compris les craintes du MEDEF à l'encontre du principe de précaution, M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, s'est voulu rassurant en rappelant que son application serait encadrée par de futures lois. Il a estimé que l'éventualité du déplacement de l'article 6 du projet de loi constitutionnelle après son article 2 permettrait de mettre en valeur le triptyque économie-environnement-social. Soulignant que le principe de précaution figurait dans l'une des dispositions du Traité de Maastricht, il a fait observer qu'il n'était inscrit qu'en pointillé dans les textes relatifs à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et a regretté que les Etats-Unis ne soient pas prêts à ratifier le protocole de Kyoto. Il a ainsi exhorté les responsables politiques et économiques à faire pression pour que le principe de précaution s'applique au niveau mondial, jugeant impensable qu'il ne puisse être appliqué qu'au niveau européen.

Environnement - Charte de l'environnement - Audition de MM. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, et Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l'environnement

Puis la commission, conjointement avec la commission des lois, a procédé à l'audition de MM. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, et Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l'environnement.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a tout d'abord rappelé qu'à l'origine de la Charte de l'environnement était l'engagement du président de la République, M. Jacques Chirac, lors de ses discours d'Orléans du 3 mai 2001, puis d'Avranches du 18 mars 2002, de donner valeur constitutionnelle au droit de l'environnement.

Il a indiqué qu'il s'agissait de la troisième étape du pacte républicain, après la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et les principes économiques et sociaux du préambule de la Constitution de 1946.

Le garde des sceaux a estimé que cet engagement en faveur d'une écologie humaniste, scellant l'alliance de l'environnement, de la science et du progrès économique, et la proclamation conjointe de droits et de devoirs, constitueraient une composante du bloc de constitutionnalité et une nouvelle référence pour le législateur. Il s'est d'ailleurs félicité du complément à l'article 34 de la Constitution, apporté par l'Assemblée nationale, consacrant une compétence législative spécifique en matière d'environnement, ainsi que des autres précisions introduites par les députés, qui devraient permettre de mieux déterminer la part du législateur, du juge et de l'expert. Il a rappelé que le respect de la Charte serait garanti par le Conseil constitutionnel et les juridictions des deux ordres.

Le ministre de la justice a par ailleurs précisé que la Charte concernerait l'ensemble des sujets de droit, personnes morales comme physiques, privées comme publiques.

Il a ensuite présenté l'équilibre des droits et des devoirs prévus par la Charte, rappelant qu'elle reconnaissait le droit, pour chaque être humain, à un environnement équilibré et respectueux de la santé (article 1er), accompagné du devoir de la préservation et de l'amélioration de l'environnement (article 2), du devoir de la prévention des atteintes à l'environnement (article 3) et du devoir de réparation (article 4), considérant que ce dernier allait au-delà du principe pollueur-payeur, en instituant une obligation de réparation, y compris pour le seul dommage à l'environnement.

Il a ajouté que ces droits et devoirs seraient intégrés dans les politiques publiques, notamment l'éducation et la formation, la recherche et l'innovation et l'action internationale de la France (articles 8 à 10).

Néanmoins, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que la préservation de l'environnement ne s'imposerait pas de façon automatique, les objectifs à valeur constitutionnelle de la Charte devant être conciliés avec les autres objectifs de même valeur.

S'agissant du principe de précaution, objet d'un large débat, il a souligné qu'il permettrait de guider les juges, au lieu de leur laisser, comme c'est le cas actuellement, la maîtrise de la définition de ce principe. Son application serait subordonnée à trois conditions cumulatives et restrictives : un dommage grave et irréversible causé à l'environnement, dont la réalisation demeure incertaine en l'état des connaissances scientifiques. Il s'est en outre félicité de la précision apportée par l'Assemblée nationale limitant l'application de ce principe aux autorités publiques dans le strict champ de leurs attributions respectives.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a ensuite insisté sur la pertinence de la Charte de l'environnement au regard des enjeux écologiques actuels et futurs.

Rappelant l'importance du réchauffement climatique intervenu au cours du dernier siècle (+ 0,6°C dans le monde et + 0,9°C en France), il l'a évalué à + 2,3°C au minimum pour le XXIe siècle, soit près de 4°C en deux siècles. Tout en reconnaissant que de tels changements n'étaient pas inédits, il a néanmoins souligné qu'ils n'étaient jamais intervenus dans un temps aussi bref, laissant prévoir une élévation du niveau des mers, une fonte des calottes glaciaires, ainsi qu'une baisse de l'enneigement.

Le ministre a également déploré les menaces pesant sur la biodiversité, vingt-sept espèces disparaissant quotidiennement et deux mille arbres tropicaux étant coupés chaque minute.

Par ailleurs, M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a souligné la fragilité et l'incohérence d'un droit de l'environnement proliférant, du fait notamment du nombre de textes communautaires et réglementaires, et rappelé que si la partie législative du code de l'environnement avait pu être codifiée en 2000, tel n'était toujours pas le cas de sa partie réglementaire.

Par ailleurs, il a indiqué que le principe de précaution, introduit par la loi Barnier de 1995 sans définition, se verrait désormais mieux encadré.

En outre, le ministre a souligné l'importance de l'adoption d'une telle charte en termes d'influence de la France en matière de politique internationale de l'environnement, alors même que la forte croissance économique en Amérique et en Asie aura des conséquences environnementales prégnantes, et appelé de ses voeux une véritable gouvernance écologique mondiale.

Enfin, s'agissant du principe de réparation, il a lui aussi considéré qu'il irait plus loin que celui de pollueur-payeur, en permettant notamment la réparation des atteintes à l'environnement, en l'absence de tout dommage causé à une personne ou à des intérêts économiques.

M. Patrice Gélard, rapporteur au nom de la commission des lois, saisie au fond, a souhaité savoir si le droit de vivre dans un environnement « respectueux de la santé », mentionné à l'article 1er de la Charte, serait d'application directe. Il s'est interrogé sur les motivations qui ont conduit, à l'article 5 de la Charte, à utiliser l'expression « principe de précaution ». Il a demandé au ministre d'indiquer, d'une part, pour quelles raisons avait été choisie, s'agissant de ce principe, une applicabilité directe qui le distinguait des droits énoncés par ailleurs dans la Charte et, d'autre part si, malgré cette particularité, le législateur pourrait en définir plus précisément les modalités d'application.

Rappelant que le principe de précaution fixait des obligations pour les autorités publiques, M. Patrice Gélard, rapporteur, s'est enquis du risque, pour des personnes physiques, de voir leur responsabilité mise en cause au titre de ce principe, et de la nécessité de prévoir, le cas échéant, des garde-fous, à l'exemple de ce qu'avait réalisé la loi Fauchon pour la responsabilité pénale des élus. Il a en outre souhaité connaître les éventuelles répercussions de la Charte et plus particulièrement du principe de précaution, sur les procédures d'urgence appliquées par le juge administratif, comme le « référé suspension » et le « référé liberté ».

M. Jean Bizet, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, saisie pour avis, a salué la mise en place, par ce projet de loi, d'une gouvernance écologique. Estimant que la Charte de l'environnement devait promouvoir une écologie humaniste, il s'est interrogé sur la possibilité de mettre davantage en valeur son article 6, relatif à la conciliation, par les politiques publiques, de la protection de l'environnement, du développement économique et du progrès social. Il a par ailleurs estimé que l'application du principe de précaution pourrait, sur le modèle des dispositions de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, faire appel à la théorie du bilan, et mettre ainsi en balance les risques et les avantages des projets d'une part et le coût des mesures de précaution d'autre part.

Relevant des contradictions entre certaines dispositions du droit en vigueur et le texte de la Charte, M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, a demandé au ministre de préciser les moyens envisagés pour assurer la conformité de la législation avec les dispositions du projet de loi. Il a enfin évoqué la fin du moratoire sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) au niveau européen, et s'est interrogé sur la position que la France pourrait adopter dans ce domaine, en respectant, une fois qu'elle serait définitivement adoptée, la Charte de l'environnement, et plus particulièrement le principe de précaution.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, répondant à M. Patrice Gélard, a indiqué que le droit de vivre dans un environnement « respectueux de la santé », mentionné à l'article 1er de la Charte, entrait dans le cadre des « droits-créances », qui ne pouvaient recevoir d'application sans intervention du législateur. S'agissant de l'article 5 de la Charte, il a expliqué que la référence au « principe de précaution » avait été consacrée au niveau communautaire dans le Traité de Maastricht en 1992 et au niveau national dans la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, dite « loi Barnier ». Il a en outre indiqué qu'aux termes de l'article 5, le principe de précaution ne s'appliquerait qu'à l'environnement.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a estimé que le législateur aurait toute liberté pour préciser l'application de ce principe, a fortiori après l'ajout par l'Assemblée nationale en première lecture d'un article tendant à modifier l'article 34 de la Constitution pour y mentionner la préservation de l'environnement. Il a indiqué que le législateur serait sans doute amené à intervenir pour décider de l'utilisation des OGM, après une évaluation de leur intérêt scientifique et des avantages de leur utilisation pour l'économie et le bien-être des personnes d'une part et de leurs risques pour la santé d'autre part. Il a souligné l'importance de l'intervention du législateur sur de telles questions : dans le silence de la loi, la décision d'appliquer le principe de précaution appartiendrait au juge et aux experts.

M. Dominique Perben a estimé que l'applicabilité directe du principe de précaution était sans incidence sur la responsabilité pénale des personnes physiques, un texte constitutionnel ne pouvant être invoqué pour incriminer une personne. Il a expliqué que ce principe ne présentait pas de difficulté d'application particulière pour les procédures d'urgence mises en oeuvre par le juge, rappelant que le Conseil d'État avait déjà fait référence au principe de précaution dans le cadre de « référés suspension ».

En réponse à M. Jean Bizet, M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a indiqué que l'ordre retenu pour la présentation des articles de la Charte s'articulait selon trois mouvements : tout d'abord les droits, ensuite les devoirs et enfin les relations entre les politiques environnementales et les autres politiques. Il a précisé que cette cohérence interne était renforcée par les considérants qui mettent en perspective les articles de la Charte.

M. Serge Lepeltier a indiqué que la notion de mesure de précaution d'un « coût économiquement acceptable », qui figure à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, n'avait pas été retenue pour la rédaction de l'article 5 de la Charte, parce qu'elle aurait présenté l'inconvénient de ne pas prendre en compte le paramètre du temps dans l'évaluation du coût de telles mesures. Il a ainsi expliqué que la décision de ne pas utiliser l'amiante dans la seconde moitié du XXe siècle aurait eu, à court terme, un coût économique très élevé, qui apparaîtrait néanmoins acceptable au regard de la situation actuelle, où le budget consacré chaque année au désamiantage est supérieur à un milliard d'euros par an.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a estimé qu'il appartiendrait au législateur de mettre progressivement en cohérence la législation en vigueur dans le domaine de l'environnement avec les nouvelles dispositions de la Charte, sans que ce travail ne présente d'urgence particulière, les lois antérieures demeurant applicables. S'agissant des OGM, il a rappelé qu'après la levée du moratoire, des procédures d'autorisation de leur commercialisation étaient en cours à la Commission européenne et que leur expérimentation serait conduite suivant des règles strictes en France. Il a cependant souligné qu'il serait nécessaire de prévoir, à terme, un texte fixant des procédures répondant aux exigences du principe de précaution.

Après avoir rappelé que les valeurs sur lesquelles se fondait la Charte rencontraient, en dépit de divergences entre le Nord et le Sud ou entre les Etats-Unis et le reste du monde, l'adhésion de l'opinion publique au niveau international, M. Philippe Leroy a exprimé ses réticences à l'égard du texte, au motif qu'il risquerait d'aggraver l'incertitude juridique. Il a exprimé le souhait que l'examen du texte permette d'inventorier ses risques juridiques potentiels pour les particuliers, les entreprises et les élus locaux. S'interrogeant sur les inconvénients et les blocages qui pourraient résulter de l'utilisation de la Charte par les experts et les juges, il a déclaré être tenté de supprimer la référence au principe de précaution, dépourvu de définition.

M. Jean-René Lecerf a relevé le caractère très général de l'applicabilité du principe de précaution et demandé au ministre s'il suffirait qu'un membre de la communauté scientifique évoque un risque potentiel pour qu'un projet soit bloqué. Rappelant que la rivière qui fut pendant trente ans la plus polluée de France avait aujourd'hui retrouvé une qualité normale, il a souhaité connaître la portée temporelle du caractère irréversible d'un dommage causé à l'environnement, mentionné à l'article 5 de la Charte.

Après s'être déclaré très favorable à l'adossement, à la Constitution, de principes aujourd'hui indispensables à l'avenir de la vie sur Terre, M. Laurent Béteille a estimé nécessaire de s'assurer que la loi pourrait apporter des précisions propres à la préservation d'un degré de liberté suffisant pour les acteurs économiques. Il s'est interrogé sur le sens de la référence, au dernier considérant de la Charte, aux « générations futures » et aux « autres peuples », ainsi que sur la valeur normative de l'article 10, relatif à l'action internationale de la France.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a jugé qu'un excès de précipitation serait susceptible de nuire au travail des sénateurs sur un projet de loi qui tendait à modifier la Constitution. Il a souhaité savoir pour quelles raisons n'avait pas été retenue, pour le principe de précaution, l'une des rédactions proposées par la commission Coppens, qui ne prévoyait pas que les autorités publiques adoptent des « mesures provisoires » afin d'éviter la réalisation du dommage. Il a souligné qu'il était très difficile de déterminer les mesures provisoires à prendre et que la rédaction choisie pourrait conduire, par exemple, à ne pas réaliser le projet de réacteur européen à eau sous pression (EPR).

M. Jacques Mahéas s'est pour sa part inquiété de l'étendue du champ d'application de la Charte de l'environnement, craignant qu'elle ne conduise à une multiplication des contentieux. Il a en outre déploré le choix d'une loi constitutionnelle, trop rigide selon lui, et estimé que chacun des articles aurait pu figurer dans une loi ordinaire. Par ailleurs, jugeant qu'une réflexion nationale, voire communautaire, aurait été nécessaire, il a regretté la précipitation dans laquelle était mené l'examen de cette Charte.

Sur le fond, considérant que l'environnement faisait partie des droits de l'homme, il a jugé inutile l'adoption d'une telle charte, arguant qu'il n'y avait pas eu de charte de la liberté ou de la fraternité. Il a enfin estimé que l'adoption de cette charte risquerait de bloquer le progrès scientifique.

M. Jean-Pierre Sueur s'est alors interrogé sur la pertinence du principe de précaution au regard de la philosophie de l'histoire, faite d'une succession de prises de risques bénéfiques. Il a de plus estimé qu'il n'était souvent possible de déterminer si le principe de précaution aurait dû être appliqué qu'après la réalisation du dommage, citant l'exemple de l'amiante.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a répondu à la proposition de suppression du principe de précaution formulée par M. Philippe Leroy en indiquant que l'article 5 relatif au principe de précaution tel que précisé par l'Assemblée nationale permettrait une meilleure sécurité juridique qu'actuellement, où le principe de précaution existe mais est laissé à l'appréciation du juge, lequel serait dorénavant encadré.

Il a en outre rappelé que le principe de réparation, plus large que celui de pollueur-payeur, permettrait notamment de prendre en compte les atteintes à l'environnement seul.

Enfin, s'agissant du principe de précaution, le ministre a précisé qu'il ne s'appliquerait qu'aux autorités publiques et que les chefs d'entreprises en seraient donc exclus.

En réponse à M. Jean-René Lecerf, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que, pour déterminer l'irréversibilité d'un dommage, des éléments scientifiques seraient pris en compte.

A M. Laurent Béteille, il a affirmé que ni les considérants, ni l'article 10 n'avaient de valeur normative.

S'agissant du programme EPR évoqué par M. Michel Dreyfus-Schmidt, le ministre a estimé qu'il relevait très clairement du principe de prévention, et non de celui de précaution, les risques étant connus.

Contrairement à M. Jacques Mahéas, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a jugé essentielle la constitutionnalisation du droit de l'environnement, et rappelé que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et la référence aux droits économiques et sociaux dans le préambule de la Constitution de 1946 constituaient respectivement une charte de la liberté et une charte de la fraternité.

Tout en estimant, ainsi que M. Jean-Pierre Sueur, que la conciliation du principe de précaution et du progrès scientifique était au coeur du débat, il a néanmoins souligné les changements intervenus depuis deux siècles, du fait notamment de l'explosion tant de la population mondiale que de la consommation de ressources naturelles. Rappelant les dégâts écologiques déjà patents dans certains pays en développement, il s'est inquiété des conséquences de la rapidité du rythme de croissance de la consommation d'énergie en Chine.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a ensuite indiqué à M. Jean-René Lecerf que l'irréversibilité des dommages requerrait des indices, et non des preuves, et que cette notion devrait s'apprécier à l'échelle de la vie humaine.

En réponse à M. Laurent Béteille, il a précisé que la référence faite aux autres peuples et aux négociations internationales s'expliquait par l'universalité du problème de la préservation de l'environnement.

S'agissant du principe de réparation, M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a estimé qu'il allait au-delà de celui de pollueur-payeur, dont l'absence de définition en droit communautaire l'avait fait interpréter comme un principe économique, et non un principe de responsabilité. Il a ainsi relevé que ce principe pourrait s'appliquer aux oiseaux victimes de marée noire.

En réponse aux interrogations de M. Jean-Pierre Sueur relatives à un frein au progrès, il a considéré que si le progrès restait possible, les risques devraient cependant être dorénavant plus raisonnés, la population mondiale étant passée d'un à six milliards d'habitants en un siècle. Il a d'ailleurs souligné que la propagation du mode de consommation français à l'ensemble de la planète nécessiterait un doublement des ressources naturelles disponibles sur terre.

Abondant dans ce sens, M. René Garrec, président de la commission des lois, a cité le commandant Jacques-Yves Cousteau, selon lequel la planète ne pourrait supporter plus de 700 millions de consommateurs sur le modèle américain.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a alors craint que le principe de réparation se limite à une contribution inférieure à celle due en vertu du principe pollueur-payeur.

S'agissant du programme EPR, dont le garde des sceaux avait affirmé qu'il relevait du principe de prévention, il a déploré que les mesures requises par le principe de prévention (principalement destinées à limiter les conséquences néfastes) soient moins astreignantes que celles requises au titre du principe de précaution, alors même que les risques liés au nucléaire sont connus.

M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, a estimé que cela s'expliquait par le fait que le principe de précaution traitait de dommages graves et irréversibles.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, a pour sa part souligné que le principe de précaution précisé par l'Assemblée nationale était d'application directe, contrairement au principe de prévention, qui nécessiterait une loi précisant ses modalités d'application.

Par ailleurs, il a estimé que la notion de contribution se justifiait par le fait que le responsable n'était pas toujours en mesure de couvrir l'ensemble des dommages et qu'un principe de solidarité devait s'appliquer corrélativement.

M. Max Marest a enfin préconisé de déplacer l'article 6 consacré aux politiques publiques après l'article 3 relatif au principe de prévention.