MISSION COMMUNE D'INFORMATION  "LA FRANCE ET LES FRANÇAIS FACE A LA CANICULE


Table des matières




Mardi 16 décembre 2003

- Présidence de M. Jacques Pelletier, président.

Audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

La mission d'information a procédé à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Jacques Pelletier, président,
a rappelé, à titre liminaire, que la mission d'information du Sénat ne s'était pas fixé pour objectif de conduire une « chasse aux sorcières », mais de comprendre les événements de l'été dernier et d'en tirer les leçons pour l'avenir.

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, a précisé qu'il souhaitait expliquer l'action de son ministère lors de la canicule de l'été 2003 et que la réflexion, entamée avec les conclusions de la mission d'information de l'Assemblée nationale présentées le 24 septembre dernier, devait se poursuivre.

Indiquant qu'il comptait proposer à la mission quelques orientations afin qu'un aléa climatique en France ne se traduise plus par un drame sanitaire, il a estimé que les pouvoirs publics devaient avoir un devoir d'humilité pour hier, d'humanité pour aujourd'hui et d'efficacité pour demain.

Déplorant les nombreuses polémiques faisant état de querelles administratives et juridiques, il a souligné que de nombreuses familles avaient été meurtries par la catastrophe et que des personnes étaient mortes seules dans l'indifférence.

Rappelant que la canicule de l'été 2003 était sans précédent, comme le montraient les relevés météorologiques établis depuis 1873, et qu'elle avait provoqué une surmortalité exceptionnelle, M. Nicolas Sarkozy a noté que le travail de la mission d'information de l'Assemblée nationale, estimant que la catastrophe n'avait été ni anticipée, ni perçue rapidement comme telle, devait servir de base aux réflexions en cours.

Il a ajouté que ce n'était pas tant l'impuissance, inévitable, de l'Etat à faire face à ce phénomène climatique qui était l'objet de critiques, que son incapacité à en prévenir les conséquences sanitaires. Après avoir indiqué qu'il détaillerait dans un premier temps le rôle des services, dont il a la charge, pendant la crise, il a rappelé que son ministère était responsable de la gestion des crises de sécurité civile et de la réglementation funéraire. Notant qu'il fallait distinguer deux périodes dans l'action du ministère, il a souligné que personne n'avait mesuré les conséquences sanitaires de la canicule entre le 5 et le 12 août et que les problèmes rencontrés par les services funéraires à cette dernière date avaient amené les services concernés à prendre conscience de l'ampleur de la catastrophe.

Précisant que la réponse aux crises de sécurité civile était apportée par le centre opérationnel de gestion interministériel des crises (COGIC), intervenant soit dans le champ propre du ministre de l'intérieur, soit à la demande d'autres ministères, il a constaté que cette structure avait prouvé son efficacité lors des tempêtes de 1999, des inondations ou encore des pollutions dues aux naufrages de l'Erika et du Prestige.

Notant que le COGIC était en formation renforcée l'été dernier pour lutter contre les incendies de forêt, les plus importants en France depuis 30 ans, et que ceux-ci avaient touché plus de 60.000 hectares et provoqué la mort de neuf personnes, il a fait observer que l'efficacité de son rôle de coordination et de son appui logistique aux moyens de secours avait permis de limiter les conséquences de cette catastrophe.

Estimant que le COGIC aurait pu intervenir pour mesurer et gérer les effets de la canicule, il a souligné qu'il aurait fallu pour cela qu'il ait connaissance des événements. A ce titre, il a indiqué que le COGIC avait récemment organisé avec succès une remontée d'information spécifique, à la demande du ministère de la santé, pour analyser la gravité de l'épidémie de bronchiolite et permettre aux services hospitaliers de s'y adapter dans les meilleurs délais.

Concernant la canicule, il a rappelé que le COGIC ne disposait jusqu'au 12 août d'aucun élément pour percevoir l'existence même de la crise, qu'il n'avait pas été saisi par les ministères concernés et qu'il était dépourvu de tout système de renseignements spécifique.

Après avoir précisé qu'il avait eu la responsabilité opérationnelle des sapeurs-pompiers au coeur de la crise, M. Nicolas Sarkozy a insisté sur l'efficacité de la gestion de l'urgence par ces derniers, par les services d'aide médicale d'urgence (SAMU), par les services hospitaliers et les structures d'accueil des personnes âgées, soulignant que ce constat était partagé par la mission d'information de l'Assemblée nationale.

Rappelant que le rôle des sapeurs-pompiers était de secourir les personnes en détresse pour les conduire rapidement dans des centres de soins et non de formuler un diagnostic sur leur état de santé, il a précisé que les sapeurs-pompiers disposaient certes de quelques médecins, mais qu'ils n'étaient mobilisés dans les interventions qu'à la demande du SAMU lorsque ce dernier estimait leur présence nécessaire pendant le temps de transport des victimes. Il a souligné que les sapeurs-pompiers n'avaient pas la responsabilité et les compétences nécessaires pour effectuer une régulation médicale ajoutant que, même s'ils constataient parfois des décès, ils n'avaient ni les moyens, ni la mission d'assurer un suivi exhaustif des personnes transférées dans les établissements hospitaliers et de la mortalité.

Indiquant que son directeur adjoint de cabinet avait assuré une permanence au mois d'août et que son cabinet n'avait eu connaissance de la crise que le 12 août, il a rappelé que les rapports d'activité de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), transmis chaque jour avant cette date au ministère, ne permettaient pas de détecter la gravité de la situation. A ce titre, il a cité les commentaires accompagnant les rapports d'intervention concernant les événements particuliers à signaler pendant cette période :  le 5 août, « une personne décédée sous le RER » ;  le 6 août, « rien de particulier à signaler » ;  le 7 août, « un militaire décédé, une intoxication au chlore dans une piscine et deux feux d'entrepôts » ;  le 8 août, « deux feux signalés » ; le 9 août, « deux feux signalés » ;  le 10 août, « un feu signalé » ;  le 11 août, « rien à signaler ».

Notant que les préfets n'avaient pas non plus signalé d'événement particulier à son cabinet, M. Nicolas Sarkozy a cependant indiqué qu'il avait eu connaissance de l'augmentation du nombre d'interventions et des cas de « secours à victime », avec mille interventions le 8 août contre 800 par jour en moyenne annuelle, mais que ce nombre ne constituait pas en lui-même un motif d'alerte. A cet égard, après avoir indiqué que 950 interventions par jour pour secours à victime ont été recensées au cours de la semaine passée, et que des fluctuations importantes sont habituelles dans l'activité des sapeurs-pompiers, il a fait observer qu'il n'avait été informé à aucun moment d'une surmortalité importante ou de difficultés particulières rencontrées par les sapeurs-pompiers pour remplir leurs missions.

Rappelant qu'il était en vacances en Gironde pendant cette période, il a indiqué qu'il avait visité une brigade de gendarmerie le 8 août et présidé une réunion portant sur l'organisation d'une « rave party » à Toulouse le 13 août, précisant qu'il était alors en contact téléphonique avec son cabinet au minimum cinq fois par jour. Il a insisté sur le rôle déterminant de ce dernier pour gérer les conséquences de la canicule sur la pollution de l'air, les réserves en eau, l'activité agricole et le fonctionnement des centrales nucléaires, avant de souligner qu'il n'aurait pas hésité à revenir à Paris pour faire face à la crise sanitaire s'il avait su qu'il y avait une telle crise.

Evoquant les mesures d'urgence prises à son initiative pour permettre aux services de police de conduire des personnes sans domicile fixe dans des centres d'hébergement lors de l'hiver dernier et les polémiques qui en résultèrent, il a indiqué qu'il préférait surestimer un risque plutôt que de le sous-estimer lorsque des vies humaines sont en jeu.

Rappelant que son ministère avait été également concerné par la crise au titre de la réglementation des activités funéraires, il a constaté qu'à la suite des premières difficultés signalées le 12 août, son cabinet avait donné dès le lendemain des instructions aux préfets de la région Ile-de-France par deux circulaires tendant, d'une part, à les informer des disponibilités funéraires et, d'autre part, à leur demander de déclencher « le plan blanc » et de réquisitionner les locaux nécessaires à proximité des chambres funéraires, ainsi que tout véhicule permettant le transport des bières.

Notant qu'une circulaire plus précise avait été envoyée le 14 août à tous les préfets de France, leur demandant de s'assurer de la bonne marche des services publics, de déclencher le « plan blanc » en cas de nécessité et d'adopter la réglementation funéraire à la situation, il a fait observer que son directeur adjoint de cabinet, sur demande du directeur adjoint de l'Institut de veille sanitaire (InVS), leur avait également donné instruction de recenser, auprès des services de l'état civil des mairies, les décès survenus chaque jour depuis le 25 juillet. Il a ajouté que l'Institut avait ainsi pu procéder, dans un premier communiqué de presse, à une estimation de la surmortalité, de l'ordre de 3.000 décès et qu'il avait fallu ensuite attendre plus d'un mois pour avoir des chiffres précis.

Il a souligné que les services de son ministère avaient rempli leur tâche de manière satisfaisante, insistant sur le fait que celle-ci ne couvrait ni le suivi statistique de la mortalité ni celui du fonctionnement des services de santé et s'est interrogé sur l'opportunité d'inclure le risque sanitaire humain dans leurs missions.

A cet égard, M. Nicolas Sarkozy a rappelé que l'ordonnance du 24 avril 1996 avait explicitement exclu la tutelle hospitalière du champ de compétence des préfets pour la confier aux agences régionales d'hospitalisation (ARH), responsables de l'organisation hospitalière,  de la planification et de l'allocation des ressources.

Déplorant l'absence des préfets dans les conseils d'administration des centres hospitaliers et leur manque d'information sur la situation sanitaire, il a constaté que les préfets n'avaient pas besoin d'un plan préétabli pour répondre avec efficacité à une crise, ainsi que la gestion des conséquences des tempêtes de 1999 le prouvait, mais qu'ils devaient avoir conscience des difficultés pour agir. Il a indiqué que son ministère n'avait pas été informé, ajoutant que ni les directions départementales et régionales des affaires sanitaires et sociales (DDASS et DRASS), ni les ARH, ni les maisons de retraite et l'InVS n'avaient détecté la catastrophe.

Estimant qu'il était normal de chercher à comprendre les événements de l'été dernier, il est convenu de la défaillance de l'ensemble des pouvoirs publics pour identifier la crise et tenter de la limiter. Soulignant qu'il fallait réfléchir à l'avenir pour que cette situation d'impréparation et de manque de réaction ne se reproduise plus, il a fait observer que la crise estivale avait mis en lumière un manque de planification, de vigilance et de coordination dans le domaine sanitaire. S'agissant de la planification, il a précisé qu'il avait demandé à ses services de réfléchir à un « plan canicule », sur le modèle du « plan grands froids ». Insistant sur les exigences de la vigilance et de la coordination, il a constaté que la dispersion des responsabilités entre les ARH, les différents instituts de veille et les agences sanitaires, à l'exemple de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES), de l'Agence nationale française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) ou de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), avait contribué au cloisonnement des services. Il a ajouté que ce cloisonnement avait été à l'origine d'une situation, comme celle de cet été, où chacun est responsable de son domaine de compétence et ne communique pas avec les autres et où personne n'a une vision globale de la situation.

Estimant que le rapprochement entre les préfets et la chaîne sanitaire, constituée des ARH, des DRASS et des DDASS, était urgent, M. Nicolas Sarkozy a estimé nécessaire de placer le corps préfectoral en situation de travailler au quotidien avec toutes les administrations sanitaires compétentes pour détecter une crise et coordonner la réponse opérationnelle.

Après avoir précisé que les ARH devaient être seules responsables de la planification hospitalière et de la gestion des crédits, il a insisté sur la légitimité du préfet pour rassembler et coordonner les différents acteurs de santé en tant que représentant de tous les ministères ainsi que sur l'utilité d'affirmer l'autorité du préfet sur les ARH en cas de crise. Après avoir rappelé qu'il avait présenté ces propositions, visant en particulier à créer un pôle régional de santé publique, dans le cadre de la réflexion actuellement menée pour réorganiser l'administration territoriale de l'Etat dans la perspective d'un approfondissement de la décentralisation, il a fait observer que les querelles sur l'indépendance des administrations sanitaires face aux préfets étaient déplacées en situation de crise comme au quotidien. Notant que la gestion de crise ne se préparait pas dans l'urgence mais par des relations régulières entre les différents acteurs, il a constaté que le préfet était en position de centraliser l'information venant des services de l'Etat et des collectivités locales et qu'il bénéficiait de l'expérience et des structures nécessaires pour coordonner les interventions face à des situations exceptionnelles.

Refusant la création d'une nouvelle structure nationale de coordination pour faire face à une crise sanitaire, il a proposé d'étendre le champ d'intervention du COGIC à la santé. Rappelant que ce dernier, composé de 40 membres, était à la disposition de tous les ministères et que des représentants des ministères de l'écologie, de la santé, de l'équipement, de l'agriculture et de la défense y avaient travaillé ensemble il y a quinze jours, dans le cadre de la lutte contre les inondations, M. Nicolas Sarkozy a fait observer qu'il convenait de renforcer au quotidien les relations du centre avec les services du ministère de la santé, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et l'InVS.

Après avoir constaté que de véritables choix politiques étaient indispensables pour répondre à une crise d'une telle ampleur, il a souligné la nécessité d'une instance spécifique de décision, à l'image de celle existant pour le plan Vigipirate qui prévoit des réunions régulières des directeurs de cabinet des ministres, à Matignon, en cas de crise. Il a estimé que le COGIC pourrait servir de « bras armé » opérationnel à cette instance.

Il a indiqué que la canicule de l'été dernier posait en outre la question de la solidarité de la société face à la vieillesse et celle du bon équilibre entre solidarité privée et solidarité publique. Estimant que ce débat devait être relancé, il a constaté que toute notre société avait été interpellée par la crise et que la recherche des responsabilités publiques ne devait pas écarter la responsabilité individuelle. Il a rappelé que l'organisation de la solidarité envers les personnes âgées était surtout assurée par les acteurs publics aujourd'hui et qu'il fallait l'adapter pour que de tels drames ne se reproduisent pas à l'avenir, ajoutant qu'il partageait le sentiment général de douleur et d'humilité devant cette catastrophe.

M. Jacques Pelletier, président, a fait observer que les problèmes issus de la dépendance des personnes âgées et les exigences de solidarité pour la société envers ces dernières allaient croître dans les années à venir en raison de l'augmentation régulière de l'espérance de vie. Il a indiqué que les auditions antérieures de la mission semblaient montrer des difficultés de coordination entre les différents acteurs concernés et que les communiqués de presse des 1er et 7 août de Météo France n'avaient pas permis d'alerter les services compétents sur la gravité de la canicule, en dépit de leur pertinence.

Après avoir rappelé qu'il présidait le conseil d'administration d'un centre hospitalier, M. Serge Lepeltier, rapporteur, a constaté que le préfet de son département avait des relations permanentes avec la DDASS et que celle-ci le saisissait de difficultés éventuelles. Il s'est en revanche interrogé sur l'absence de liens actuels entre le corps préfectoral et les ARH.

Mme Valérie Létard, rapporteur, a remercié le ministre pour la précision de son constat et de ses propositions, ajoutant qu'elle partageait son souci d'améliorer la prévention des risques et de mettre fin au cloisonnement des services pour faire face à ces crises. Elle a souligné qu'il convenait de réfléchir aux moyens les plus efficaces d'alerter rapidement la population en cas de crise et s'est interrogée sur la possibilité d'une transmission rapide des certificats de décès aux préfets afin de faciliter la détection d'une situation anormale.

M. Hilaire Flandre, rapporteur, a insisté sur la nécessité de renforcer la coopération entre les différents acteurs et sur l'utilité d'une coordination par le préfet en situation de crise. Notant que la vague de chaleur de l'été dernier annonçait probablement d'autres canicules dans les années à venir, en raison du réchauffement climatique, et que la réaction tardive des services avait été liée à un décalage entre l'augmentation des températures et la surmortalité, il a souligné l'importance de la mise en place rapide de dispositifs spécifiques et de la diffusion de bonnes pratiques pour anticiper les prochaines crises.

Constatant que son quotidien régional avait annoncé huit décès liés à la canicule dès le 7 août, M. Serge Lepeltier, rapporteur, s'est demandé si le dispositif actuel d'information sur les décès ne pouvait pas être complété dans les préfectures par un système d'indicateurs simples permettant une détection précoce des anomalies en termes de mortalité et une remontée d'informations rapide au niveau national.

M. Nicolas Sarkozy a indiqué qu'il n'avait pas eu connaissance de messages d'alerte des DDASS aux préfets lors de la canicule et qu'en dépit de nombreux articles de presse, les indices sérieux de la catastrophe n'étaient remontés que le 12 août à son cabinet. Constatant que la réforme de 1996 avait provoqué une césure entre les administrations sanitaires et les préfets, il a indiqué que de bonnes relations pouvaient exister entre ces derniers et les DDASS, mais qu'elles ne concernaient pas l'organisation hospitalière. Il a souligné que les responsables des ARH étaient devenus de véritables « préfets sanitaires » et que les acteurs du secteur sanitaire et social ne pouvaient à la fois revendiquer leur indépendance et dénoncer la responsabilité des préfets en cas de crise.

Il a ajouté que les préfets étaient les seuls à pouvoir coordonner les services de manière satisfaisante en situation de crise. Après avoir rappelé que la mairie de l'Häy-les-Roses avait attiré l'attention du préfet du Val-de-Marne sur le nombre important de décès lors de la canicule, il a rappelé que le quotidien « Le Parisien » avait évoqué sept morts liées à la canicule dès le 9 août mais que l'alerte ne pouvait résulter de la seule prise en compte d'articles de presse. Indiquant que la préfecture de police de Paris avait en charge la sécurité de six millions d'habitants, il a fait observer que ses décisions devaient s'appuyer sur des données tangibles et que les sept morts liées à la canicule relevées par la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) le 8 août étaient bien en deçà de la surmortalité de ce jour, constatée ultérieurement, avec 109 décès en excès à Paris et 525 décès en Ile-de-France. Il a noté que la détection de la catastrophe et la coordination des acteurs ne s'étaient pas effectuées de manière satisfaisante dans le contexte difficile du mois d'août, marqué par de nombreux départs en vacances et l'activité ralentie de certains services, rappelant que 66 % et 42 % des décès liés à la canicule avaient eu lieu respectivement dans les maisons de retraite et dans les hôpitaux.

Rejoignant les propos du ministre, M. Paul Girod a souligné l'importance de l'anticipation et de la prévention de certaines épidémies et s'est interrogé sur la capacité de veille de notre pays face à une éventuelle attaque bioterroriste.

M. Nicolas Sarkozy a fait observer que l'InVS était en charge de la détection d'éventuelles épidémies et de la diffusion de l'alerte, ajoutant qu'il n'était pas souhaitable que son ministère élargisse ses compétences à la prévention et à la veille sanitaire. Rappelant que ses services intervenaient en revanche par la mobilisation des forces de sécurité intérieure, en cas de trouble à l'ordre public, ou pour coordonner et renforcer les moyens de secours locaux, en cas de crise sanitaire exceptionnelle, il a indiqué qu'il était impossible de prévenir l'ensemble des risques potentiels.

Soulignant l'intérêt des préconisations du ministre, M. François Fortassin a déploré les défaillances dans l'alerte et la réaction tardive des services compétents, en particulier de la DDASS de son département. Il a rappelé que les médias avaient évoqué les risques liés à la chaleur dès la fin du mois de juillet, ajoutant que, sur son initiative et après contact avec les pompes funèbres et la presse locale, son département avait su anticiper le déclenchement de la vague de chaleur en diffusant des informations simples sur les gestes essentiels pour lutter contre les effets des fortes températures. Estimant que les départs en vacances massifs du mois d'août avaient contribué aux dysfonctionnements constatés en étant à l'origine d'une absence de personnels à un moment critique, il a indiqué que son conseil général avait mis en place un système de congés permettant en permanence le maintien d'effectifs suffisants dans les services. Il a ajouté que le renforcement de la coordination et de la planification des services concernés nécessitait une disponibilité accrue des personnels.

M. Nicolas Sarkozy a rappelé qu'il n'était pas responsable du fonctionnement des maisons de retraite ni de celui des hôpitaux et qu'il n'avait aucun pouvoir de tutelle sur les DDASS. Il a ajouté qu'il avait la responsabilité opérationnelle des sapeurs-pompiers, mais pas des médecins, des SAMU et des infirmières et qu'une réflexion était en cours pour établir des plans départementaux de liaison entre préfets, médecins généralistes et directeurs d'hôpitaux. Constatant que la canicule avait frappé la France alors que la sécurité civile et les sapeurs-pompiers étaient mobilisés dans la lutte contre les incendies de forêt qui ravageaient le sud du pays, il a noté que la gestion de la crise après le 13 août avait été satisfaisante.

En réponse à M. Jacques Pelletier, président, M. Nicolas Sarkozy a indiqué qu'au début du mois d'août, la préfecture de police de Paris, tout comme la mairie de Paris, ne disposaient pas des indices nécessaires pour appréhender l'ampleur de la catastrophe et que la décision des collaborateurs du préfet de police de ne pas rendre publiques les sept morts constatées par la BSPP le 8 août était peut-être regrettable a posteriori mais qu'il n'y avait eu, à sa connaissance, aucune volonté de dissimulation de leur part. Il a ajouté que la communication en temps de crise nécessitait de bénéficier d'informations fiables et suffisamment larges, et que les commentaires annexés aux rapports d'intervention de la brigade n'étaient pas assez précis pour détecter une surmortalité anormale.

M. Hilaire Flandre, rapporteur, a ensuite demandé au ministre de préciser l'action de ses services dans le cadre de la lutte contre les incendies de forêt et s'est interrogé sur le bilan de la coopération internationale en la matière ainsi que sur le renforcement des capacités opérationnelles de la sécurité civile. Il a par ailleurs constaté que la plupart des feux de l'été avaient une origine criminelle.

M. Nicolas Sarkozy a rappelé que la mobilisation importante de la sécurité civile et des sapeurs-pompiers avait été renforcée par des moyens venus d'Italie, d'Allemagne ou de Russie. Il a ajouté que les feux de forêt avaient eu lieu simultanément dans de nombreux pays, empêchant l'envoi de renforts français au Portugal comme la venue de renforts canadiens en France. Concernant les incendiaires, il a précisé que l'action conjuguée des forces de police, de la gendarmerie et des parquets, qui s'est traduite par la création d'une cellule spécifique dans le Var, avait permis d'interpeller 88 personnes et d'en écrouer 25. Précisant que les deux avions Fokker 27, trop vétustes, seraient prochainement remplacés et qu'une réflexion était en cours pour doter la sécurité civile d'hélicoptères supplémentaires, il a souligné que ces acquisitions supposaient des investissements lourds et que les nouveaux appareils devraient permettre d'augmenter la polyvalence de la flotte aérienne de la sécurité civile.

Il a rendu hommage au dévouement des sapeurs-pompiers en faisant observer qu'ils avaient été fortement sollicités dans la lutte contre les incendies de forêt puis dans la gestion des conséquences de la canicule et des inondations. Constatant que « la catastrophe devenait quelque chose de naturel » en France, avec la multiplication des crises récentes, il a estimé qu'il convenait d'améliorer la prévention des risques pour répondre aux exigences des Français.

M. Jacques Pelletier, président, a vivement remercié le ministre pour son intervention et a souhaité que les propositions de la mission contribuent à atteindre ce dernier objectif.

Mercredi 17 décembre 2003

- Présidence de M. Jacques Pelletier, président, puis de M. Alain Gournac et de Mme Gisèle Gautier, vice-présidents

Audition de M. Patrick Pelloux, président de l'association des médecins urgentistes hospitaliers de France

La mission a d'abord procédé à l'audition de M. Patrick Pelloux, président de l'association des médecins urgentistes hospitaliers de France.

Après avoir rappelé que l'objectif de la mission d'information commune du Sénat consistait, non pas à conduire une « chasse aux sorcières », mais à comprendre ce qui s'était passé lors de la canicule, M. Jacques Pelletier, président, a invité M. Patrick Pelloux à présenter son récit de la crise et à exposer les enseignements qui devraient, à ses yeux, en être tirés.

M. Patrick Pelloux s'est tout d'abord félicité que le Sénat se soit saisi de cette question. Soulignant que, face à cette crise sanitaire d'une ampleur sans précédent depuis la Seconde guerre mondiale, il avait été le premier à souhaiter publiquement que le Parlement entame des investigations, il a affirmé qu'il partageait l'opinion du président Jacques Pelletier et que les démarches engagées ne devaient pas conduire à une « chasse aux sorcières ». Pour autant, il a relevé, d'emblée, que la crise de la canicule avait mis en évidence le caractère inadapté et dépassé des structures du ministère de la santé.

Il a indiqué que l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France, qu'il préside depuis sa création il y a cinq ans, rassemblait aujourd'hui environ 850 adhérents, ce qui en fait la première organisation représentative de la profession qui figure, à ce titre, parmi les interlocuteurs de référence des pouvoirs publics.

Il a noté que son organisation était intervenue depuis deux ans à de multiples reprises, tant auprès de M. Bernard Kouchner que de M. Jean-François Mattei, pour souligner l'impact négatif des fermetures de lits sur les services d'urgence des établissements hospitaliers. Soulignant que les mois d'août 2001 et d'août 2002 avaient tous deux été caractérisés par un véritable encombrement des urgences, il a rappelé qu'il avait, dès le mois de mai 2003, exprimé la crainte que trop de lits soient fermés lors de la prochaine période estivale, en particulier en réanimation. Il a observé qu'il avait fait part au ministre de la santé, lors de la réunion du 23 juillet, de ses inquiétudes en estimant alors que 20 % à 30 % des lits risquaient d'être fermés au cours du mois d'août. Il a précisé que le ministre l'avait rassuré en lui indiquant, sur la base des indications fournies par ses services, que les mesures prises devaient permettre une amélioration sensible par rapport aux deux étés précédents et que le nombre de lits fermés ne dépasserait pas 11,6 %.

Revenant sur l'absence, souvent évoquée, de littérature scientifique disponible en France sur les questions liées au phénomène de canicule, M. Patrick Pelloux a observé que, pour être rares, ces données n'étaient pas pour autant inexistantes dans notre pays. Sans revenir sur les crises similaires survenues à l'étranger, comme à Chicago en 1995, dont le retentissement international a été important, il a relevé que trois études mettant en évidence le risque des vagues de chaleur avaient été réalisées dans notre pays : l'analyse par le professeur San Marco de la canicule de juillet 1983 à Marseille, les travaux du professeur Besancenot ainsi que l'étude réalisée à l'occasion des Journées mondiales de la jeunesse à Paris en 1997.

Il a ensuite exposé la chronologie des événements depuis le 28 juillet 2003, date à laquelle il avait fait part, lors d'un point de presse, de sa divergence d'appréciation avec le ministre de la santé quant à l'ampleur prévisible des fermetures de lits dans les hôpitaux au cours du mois d'août 2003. Il a ainsi souligné que, lors des derniers jours du mois de juillet, les médecins urgentistes, du fait notamment de leurs contacts quotidiens avec les sapeurs pompiers et les services de la police, avaient déjà perçu une forte augmentation des cas de personnes fragiles en situation de détresse, et ce avant même que l'affluence aux urgences n'atteigne des sommets à partir du 1er août. Il a noté avoir été alors frappé par la fatigue du personnel soignant dès le matin, ce qui prouvait que le facteur décisif de cette crise sanitaire pour les personnes âgées et fragiles, comme pour le reste de la population, avait été le niveau très élevé des températures nocturnes ne permettant pas à l'organisme de récupérer.

M. Patrick Pelloux a indiqué qu'il avait tenté, dès le 5 août, de transmettre des messages de prévention en direction du grand public, en diffusant un ensemble de conseils pratiques, qui seront repris à 90 reprises par les radios autoroutières et en demandant à son confrère, le docteur Ariel Cohen, de répondre à sa place à une demande similaire des journalistes de TF1. Il a rappelé que les premiers décès dans le service des urgences de l'hôpital Saint-Antoine avaient été enregistrés le 6 août, et qu'il en avait informé le soir même le professeur Carli, directeur du SAMU de Paris.

Il a ensuite déclaré que l'hôpital Saint-Antoine n'avait plus de lit disponible dès le 7 août, ni même de brancard pour accueillir les personnes se présentant aux urgences, tandis que la température à l'intérieur des locaux dépassait 35 degrés. Constatant le silence de l'administration centrale, il a indiqué avoir pris alors l'initiative de téléphoner à la Direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins (DHOS), avant de s'entretenir, une nouvelle fois, avec le professeur Pierre Carli. Il a précisé qu'à cette occasion, il avait été convenu entre eux que lui-même poursuivrait ses contacts avec la DHOS, tandis que le professeur Carli se chargerait de la Direction générale de la santé (DGS), insistant sur le fait qu'il ne s'était jamais trouvé en contact avec la DGS pendant toute la durée de la crise.

M. Patrick Pelloux a ensuite observé qu'après avoir rencontré, le vendredi 8 août, un confrère du SAMU du Val-de-Marne, qui lui avait annoncé avoir constaté plus de vingt décès dans la même journée, il avait envoyé un courrier électronique à tous ses correspondants médecins urgentistes pour recenser les difficultés rencontrées sur l'ensemble du territoire. Il a précisé qu'en découvrant les réponses de ses interlocuteurs, le lendemain samedi 9 août, il avait dénombré déjà plus de 50 personnes décédées, réalisant alors que notre pays traversait une crise majeure. Il a indiqué que des journalistes du « Parisien » » l'avaient contacté peu de temps après, en l'informant d'une forte mobilisation des pompiers dans la capitale, que les services de la DGS attribuaient à des « morts naturelles ». Il a déclaré que c'est dans ce contexte qu'il avait ainsi été à l'origine de l'information publiée dans ce quotidien, révélant la crise au grand public. Il a ajouté qu'il avait voulu par ce moyen donner l'alerte et s'élever contre l'interprétation de la DGS tendant à attribuer l'origine de la surmortalité constatée aux seuls facteurs naturels.

Il a observé qu'il avait remarqué, le lendemain dimanche 10 août, que le ministère de la santé ne réagissait toujours pas, alors même que l'affluence dans les services d'urgence et que le nombre des décès ne faisaient que croître. Il a ensuite indiqué que la réunion qui s'était tenue le lundi 11 août à l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris l'avait conduit à supposer que les sapeurs-pompiers détenaient des informations qu'ils ne souhaitaient pas communiquer pour ne pas affoler la population. Il a noté, à cet égard, que les services dépendant du ministère de l'intérieur centralisaient des informations sans les transmettre automatiquement à ceux dépendant du ministère de la santé, ce qui apparaissait particulièrement préjudiciable dans ce type de situation où le traitement de l'urgence doit primer. Il a rappelé que, lors de cette même réunion, il avait demandé en vain le déclenchement immédiat du plan blanc, précisant que le souci de ne pas affoler la population semblait alors largement partagé par les différents intervenants. Il a également indiqué qu'il avait téléphoné le même jour à Mme Anne Bolot-Gittler, directrice adjointe du cabinet du ministre de la santé, pour lui expliquer qu'il n'était pas possible de parler de morts naturelles en évoquant les victimes de la canicule. Il a fait observer que, le lundi 11 août encore, le ministère de la santé n'avait toujours pas réagi, laissant ainsi les acteurs de terrain improviser seuls, chacun de leur côté, la riposte à la crise sanitaire.

M. Patrick Pelloux a considéré que la mobilisation de tous les efforts, notamment après la mise en oeuvre du plan blanc, avait permis de sauver un certain nombre de victimes de la canicule, y compris parmi les personnes âgées. Il a également relevé que les décès enregistrés alors ne se sont pas limités aux seules personnes âgées ou fragiles, mais ont également concerné des personnes jeunes ou des chauffeurs routiers décédés dans leur camion pendant leur sommeil.

Revenant à la chronologie des événements, il a mentionné qu'il avait participé, le mardi 12 août, en compagnie du professeur Pierre Carli et de M. Yves Coquin, directeur adjoint de la DGS, à une émission de « France Inter » et qu'il avait lancé à cette occasion, de sa propre initiative, un appel aux professionnels de santé, les invitant à revenir de congés pour faire face à la gravité de la situation.

Il a indiqué que l'arrivée des bénévoles de la Croix rouge dans les hôpitaux, le mercredi 13 août au matin, avait constitué un renfort particulièrement précieux et efficace, mais que le nombre des décès ne cessait parallèlement de s'accroître. Il a souligné que certains directeurs d'hôpitaux commençaient, en outre, à invoquer la saturation de leur établissement pour refuser de nouveaux patients aux urgences, ces derniers faisant ainsi l'objet de transferts aléatoires dans les autres établissements franciliens. Il a observé que le centre hospitalier intercommunal de Créteil et le centre hospitalier régional d'Orléans avaient été les seuls, à ce moment, à déclencher le plan blanc.

M. Patrick Pelloux a ensuite précisé qu'il avait été convié à participer à la réunion interministérielle présidée, ce même jour, par le Premier ministre, à l'hôtel Matignon. Il a salué la décision prise alors par M. Jean-Pierre Raffarin, consistant à généraliser le déclenchement du plan blanc, celle-ci ayant permis de mieux soigner et plus rapidement les personnes hospitalisées, et d'humaniser au maximum les soins qui leur étaient prodigués, même s'il apparaît impossible d'évaluer le nombre des personnes qui ont pu être ainsi sauvées.

Il a déclaré en revanche que l'ancien directeur général de la santé n'avait pas assuré la diffusion adéquate de mesures de prévention, qu'il ne s'était jamais véritablement préoccupé des urgences et qu'il n'avait interrompu ses vacances que tardivement.

Considérant qu'à partir du week-end des 15, 16 et 17 août, la crise avait pu être maîtrisée, il a estimé que, compte tenu de l'« effet retard » constitué par les nombreux décès de personnes fragilisées survenus encore au mois de septembre, la fourchette définitive du nombre des victimes devrait s'établir entre 15.000 et 20.000 personnes.

D'une façon plus générale, M. Patrick Pelloux a affirmé que l'hôpital, dans notre pays, ne vivait pas suffisamment en symbiose avec le reste de la société.

Après avoir regretté que les élus locaux n'aient pas été avisés des difficultés rencontrées, il a déploré que les agences régionales d'hospitalisation (ARH) n'aient de comptes à rendre à personne. Il a déclaré que la réforme du système de santé concernait l'ensemble des citoyens et ne devait pas être seulement évoquée lors de « conversations de salon parisien » entre les responsables de la santé publique, dont la formation commune les éloigne des réalités du terrain, et a vivement regretté que l'InVS n'ait pas pris en compte le risque de la canicule.

Après avoir rappelé que le professeur Lucien Abenhaïm avait estimé que l'origine principale du bilan tragique de la crise sanitaire de cet été résidait dans le défaut de l'alerte face au risque caniculaire, Mme Valérie Létard, rapporteur, a interrogé M. Patrick Pelloux sur la position de l'ancien directeur général de la santé selon laquelle les personnes transférées dans les services d'urgence ne pouvaient déjà plus, dans leur majorité, être sauvées.

M. Patrick Pelloux a jugé que cette appréciation était fausse.

Mme Valérie Létard, rapporteur, a ensuite demandé s'il convenait, comme l'avait fait le rapport Lalande, de mettre en cause l'absence des médecins libéraux pendant la crise. Elle l'a également interrogé sur l'encombrement des services d'urgence ainsi que sur un éventuel « effet retard » en termes de surmortalité pour les personnes fragilisées par la crise sanitaire de cet été. Elle lui a demandé comment il lui semblait possible d'améliorer le fonctionnement des services des urgences, quelle appréciation générale il portait sur leur fonctionnement dans notre pays, et si la mise en oeuvre des 35 heures s'était traduite par des difficultés d'organisation dans ces mêmes services. Elle a en outre souhaité obtenir des précisions sur les préconisations qu'il souhaiterait formuler en dehors du domaine des urgences et sur les mesures susceptibles de limiter le nombre des arrivées aux urgences, en intervenant en amont au niveau de l'accompagnement des personnes à domicile.

M. Serge Lepeltier, rapporteur, s'est enquis des relations entre les services d'urgence et la médecine de ville. Il a également interrogé M. Patrick Pelloux sur les principaux arguments développés par M. Lucien Abenhaïm lors de son audition devant la mission. Il a rappelé ainsi que l'ancien directeur général de la santé avait estimé que, même si l'alerte avait pu être donnée quelques jours plus tôt, le bilan final aurait été peu différent, que le fait de boire beaucoup était nécessaire mais pas suffisant et que, compte tenu du niveau des températures enregistrées, la véritable solution aurait résidé dans le recours généralisé à la climatisation, ce qui n'aurait pas été réalisable à court terme dans la mesure où il aurait fallu en faire bénéficier plus d'un million de personnes.

M. Hilaire Flandre, rapporteur, a souligné l'intérêt de l'intervention de M. Patrick Pelloux et lui a demandé quelles solutions il préconisait pour améliorer l'efficacité générale de notre système de santé dans ce type de circonstances dramatiques.

Mme Gisèle Gautier a considéré que M. Patrick Pelloux était largement perçu, par les autres acteurs de la crise de la canicule, comme un homme dérangeant. Elle lui a demandé s'il aurait été possible de sauver, par des mesures simples, des personnes à leur domicile, au lieu de les transporter aux urgences. Elle a, par ailleurs, regretté que les multiples regroupements de services en cours conduisent à la fermeture de nombreux hôpitaux ruraux, dont le rôle apparaît pourtant indispensable.

M. Patrick Pelloux a estimé que la crise avait résulté d'un défaut d'alerte et aussi des insuffisances de la prévention, que la DGS aurait précisément dû assurer. Il a souligné, par ailleurs, que les médecins libéraux avaient été présents pendant la crise, mais que la population s'était spontanément adressée aux hôpitaux, comme toujours dans une situation de ce type. Il a également jugé irréaliste de remédier à l'encombrement des services des urgences en limitant l'accès aux consultations.

Après avoir déploré la faiblesse traditionnelle de la place dévolue aux urgences dans notre culture hospitalière, il a estimé que l'impact des 35 heures dans la gestion de la crise de la canicule avait été nul, dans la mesure où le personnel n'avait compté ni son temps ni ses efforts.

S'agissant des moyens humains, il a insisté sur la nécessité d'augmenter les effectifs des écoles d'infirmières et d'accroître leur rémunération en fin de carrière. Pour ce qui concerne plus spécifiquement les urgences, il a souligné le besoin de reconnaissance universitaire de cette filière.

Il a également considéré, d'une façon plus générale, que le regroupement des établissements hospitaliers tendait à susciter une augmentation du recours aux services d'urgence et que notre système de santé était pénalisé par sa mauvaise organisation. Il a ajouté que les réseaux d'information et d'alerte, qu'il faudra créer en France pour éviter qu'une catastrophe comme celle de la canicule ne se reproduise, devraient aussi associer l'ensemble des professionnels de santé, les kinésithérapeutes et les pharmaciens.

M. Patrick Pelloux a également rappelé qu'avec 13 millions de personnes accueillies chaque année dans les services d'urgence, la France se situait en dessous des pratiques européennes, notamment au Portugal et en Italie, où le recours aux urgences est respectivement deux fois et quatre fois supérieur au regard de leur population.

Mme Gisèle Gautier s'est demandé si le bilan final de la canicule aurait pu être différent si l'alerte avait été donnée quelques jours plus tôt.

M. Patrick Pelloux a considéré que le développement de la climatisation lui apparaissait irréaliste, même dans une perspective à long terme, et présenterait, de surcroît, l'inconvénient de rendre plus difficile l'adaptation de l'organisme aux variations de température.

Il a jugé, par ailleurs, qu'il convenait d'accélérer la circulation des informations avec les maisons de retraite, de renforcer le lien entre Météo France et les services d'urgence et d'encourager les personnels hospitaliers, sur la base du volontariat, à faire preuve de souplesse quant au choix de leurs dates de congés. Il a également estimé qu'il fallait tenir compte des enseignements de la canicule pour remettre en cause certaines normes architecturales privilégiant les grandes surfaces vitrées.

Il a assuré qu'il n'avait jamais recherché un statut médiatique et qu'il se félicitait d'avoir rempli son rôle de citoyen pendant cette crise, en donnant l'alerte et en s'efforçant d'agir. Il a dit avoir conscience de n'être pas en odeur de sainteté auprès des « institutionnels et de la technostructure » du ministère de la santé, en particulier auprès de la DGS dont il a critiqué l'attitude pendant cette crise sanitaire, à la différence de celle de la DHOS.

Il a enfin considéré que les différentes agences chargées de la prévention et de l'alerte sanitaire étaient trop nombreuses, que l'organisation de l'Institut national de veille sanitaire devrait être revue et que l'hospitalisation à domicile, développée sur une grande échelle, n'était pas une option réaliste comme substitut aux consultations aux urgences.

M. Jacques Pelletier, président, a remercié M. Patrick Pelloux pour son intervention très complète et très directe, en soulignant son importance pour le rapport que la mission commune d'information sera prochainement amenée à présenter.

Audition de Mme Claude Nahon, directrice de l'environnement et du développement durable à Electricité de France (EDF)

La mission a ensuite entendu Mme Claude Nahon, directrice de l'environnement et du développement durable à Electricité de France (EDF).

Mme Claude Nahon
, chargée du plan « aléas climatiques » à EDF, a tout d'abord indiqué comment notre système électrique de production et de distribution avait été confronté à la canicule de l'été dernier. Elle a précisé que cet événement météorologique d'une ampleur exceptionnelle avait entraîné des perturbations sur l'ensemble des moyens de production d'électricité. Le faible niveau et la température élevée des cours d'eau ont notamment posé des problèmes de refroidissement pour les centrales nucléaires et thermiques, tandis que l'absence de vent a entraîné l'arrêt des éoliennes.

Elle a rappelé que les ministères de l'industrie et de l'écologie et du développement durable avaient pris des arrêtés dérogatoires autorisant les centrales à rejeter une eau d'une température supérieure à celle autorisée. Elle a précisé que seules les centrales nucléaires de Tricastin et de Golfech avaient usé, pendant quelques jours, de la faculté ainsi offerte.

Mme Claude Nahon a ensuite exposé l'ensemble des moyens utilisés pour assurer la continuité de la fourniture d'électricité pendant la canicule : diminution de la consommation d'un certain nombre d'entreprises industrielles, qui ont décalé dans le temps certaines de leurs activités, achat -à un prix élevé- d'électricité sur le marché, recours à des centrales de cogénération, appel au civisme de la population. Elle a estimé que la crise avait pu ainsi être gérée de manière satisfaisante et que de nombreux enseignements pouvaient en être tirés pour l'avenir.

Soulignant la nécessité d'équilibrer en temps réel la production et la consommation, du fait de l'impossibilité de stocker l'électricité, elle a souhaité qu'une réflexion soit engagée sur la définition des périmètres respectifs du secteur public et du secteur concurrentiel, et sur les responsabilités des différents acteurs. Elle a souligné le caractère virtuel du marché de l'électricité, qui ne permet pas aisément d'assurer cet équilibre en temps réel, comme l'ont montré les problèmes rencontrés récemment par l'Italie et les Etats-Unis

Répondant à une remarque de M. Alain Gournac, président, elle a indiqué que des risques de délestage, certes limités, avaient existé l'été dernier, les interrogations ayant porté sur l'évolution de la température des cours d'eau, ainsi que sur celle de la consommation d'électricité, liée à une reprise traditionnelle de l'activité économique après le 15 août, qui a été finalement moins forte que prévue. Elle a noté que la France avait été l'un des rares pays européens à ne connaître ni délestage, ni panne sérieuse. Elle a précisé que le délestage, ultime recours avant le « black-out », consistait à prévenir une interruption générale dans la fourniture d'électricité, en décidant de coupures préventives. La priorité consiste à maintenir la liaison entre les différentes unités de production et à préserver ainsi le réseau, tout en garantissant aux clients prioritaires la continuité de la fourniture d'électricité, ce qui nécessite une mise à jour régulière de la liste de ces clients. Après avoir rappelé qu'aucun délestage n'avait été mis en oeuvre en France depuis 1987, elle a estimé nécessaire d'engager une réflexion sur son organisation et ses modalités, ainsi que de procéder à des exercices spécifiques dans ce domaine. Elle a également évoqué la mise en place d'une convention nationale permettant d'informer les populations prioritaires, notamment les malades à haut risque vital, et la création d'un groupe de travail consacré à l'examen de ce problème de société, EDF n'étant pas seule concernée.

S'agissant de la période hivernale, Mme Claude Nahon a précisé qu'EDF procédait à une remise à jour de son système d'information interne, à des exercices en temps réel et qu'elle avait adopté un certain nombre de mesures concernant la gestion de crise, et notamment des débits. Elle a indiqué que les récentes crues du Rhône avaient suspendu la production d'électricité d'origine hydraulique et thermique pour les centrales concernées, en raison des charriages sur ce fleuve.

Elle a par ailleurs annoncé que le planning de maintenance des centrales serait modifié, afin de maintenir une diversification de la production pendant les périodes estivales. L'arrosage extérieur des centrales s'étant avéré inefficace, des moyens de réfrigération mobiles des centrales seront mis en oeuvre afin de permettre leur climatisation. En outre, une étude sur le refroidissement des eaux de rejet a été engagée.

Elle a indiqué qu'un plan « confort d'été » serait lancé au printemps prochain, afin d'évaluer les variations de la consommation d'électricité en fonction des nouveaux comportements de la population.

Compte tenu des incidents constatés l'été dernier à Paris sur les câbles électriques souterrains, elle a précisé que des mesures seraient prises afin de mieux organiser les interventions en cas de nouvelle canicule. Elle a enfin informé la mission d'information qu'une étude serait engagée sur les capacités de résistance du parc de production, ainsi que du réseau de transport et de distribution, afin de faire face aux variations climatiques et au développement de nouveaux modes de consommation.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Serge Lepeltier, rapporteur, a demandé si EDF pourrait faire face à un accroissement de la consommation lié au développement prévisible de la climatisation, compte tenu de la récente canicule et du réchauffement climatique. Il a évoqué, par ailleurs, la frilosité d'EDF pour développer des énergies renouvelables et a demandé si l'entreprise était prête à participer à la diversification du bouquet énergétique de la France.

M. Alain Gournac, président, s'est interrogé également sur les conséquences d'une généralisation de la climatisation sur la consommation d'électricité.

Mme Claude Nahon a répondu que les moyens de production d'électricité existants devraient permettre de faire face à une augmentation de la consommation électrique pendant les périodes d'été, mais qu'il conviendrait de renforcer l'équilibre entre la demande et l'offre d'énergie, par le biais, notamment, de conseils comportementaux et d'une politique d'économie d'énergie. Elle a précisé qu'EDF participait aux réflexions menées par les pouvoirs publics et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) sur la climatisation et elle a souhaité qu'EDF, contrairement au principe de spécialité, ait la possibilité de vendre des services et des conseils sur les modes de consommation, afin d'assurer une température « acceptable » en associant isolation, ventilation, climatisation ou simple système de refroidissement.

Elle a ensuite indiqué que, si EDF avait pu montrer quelque réticence pour financer le développement de la cogénération et des énergies renouvelables dans le passé, ce n'était plus le cas depuis que les charges induites pour l'entreprise sont compensées par le fonds du service public de l'électricité. Elle a estimé souhaitable de développer la cogénération au bois plutôt qu'au gaz, ce dernier étant émetteur de gaz à effet de serre.

M. Hilaire Flandre, rapporteur, a demandé si les réserves d'eau permettraient de refroidir les centrales en cas de nouvelle canicule en 2004. Il a demandé, par ailleurs, s'il était possible de développer les stations de stockage et de pompage d'eau, telles que celle de Revin, et si la France risquait de connaître, comme les Etats-Unis ou l'Italie, des risques de coupure de courant.

Mme Claude Nahon a indiqué que, compte tenu de la faiblesse des réserves, il convenait de suivre avec attention l'évolution du niveau des retenues et des fleuves. Elle a rappelé qu'un dispositif « sécheresse » était paradoxalement envisagé lorsqu'est intervenue la récente crue du Rhône et que le potentiel des stations de pompage d'eau représentait 6.000 mégawatts, le coût de raccordement au réseau de transport devant cependant être pris en compte. Notant que notre pays disposait de 14.000 mégawatts de réserves en puissance instantanée, elle a estimé que la création de nouvelles stations de pompage ne paraissait pas nécessaire à l'heure actuelle. Elle a précisé, en outre, que les prix actuels du marché pénalisaient le développement de ces moyens. Elle a enfin indiqué que la France n'était pas à l'abri d'une panne d'électricité, mais que tout était mis en oeuvre pour l'éviter, avec en particulier le développement par Réseau de Transport d'Electricité (RTE) d'un système de délestage automatique. Elle a insisté sur la nécessité de poser la question des responsabilités des différents opérateurs en cas de déséquilibre du marché et de réfléchir à la notion de service public de production.

M. Alain Gournac, président, a demandé quelles seraient les conséquences en cas de crise de l'ouverture totale du marché de l'électricité à la concurrence. Il s'est déclaré favorable à cette ouverture, à condition, cependant, qu'elle ne déstabilise pas l'EDF et que l'entreprise conserve ses capacités d'intervention.

Mme Gisèle Gautier s'est interrogée sur les capacités d'exportation de nos voisins européens vers la France et sur le message des écologistes, qui préconisent l'abandon de la production d'électricité d'origine nucléaire et le développement des énergies alternatives. Elle a noté que ces dernières s'étaient avérées inefficaces l'été dernier, compte tenu de l'absence de vent et de la relative faiblesse du niveau des cours d'eau. Elle a regretté que le débat sur ce sujet soit faussé et a souhaité que des efforts de communication soient réalisés à l'égard du grand public.

Mme Claude Nahon a indiqué que, compte tenu des difficultés enregistrées par les pays voisins l'été dernier, la France n'avait pu importer que de faibles quantités d'électricité. Elle a précisé que la gestion de la pénurie, que permet le délestage, constituait la solution en cas de déséquilibre important, mais qu'il convenait d'en réviser les modalités, notamment en identifiant les clients prioritaires et en modulant la durée des coupures de courant.

S'agissant des énergies renouvelables, dont la France est le premier producteur européen, en particulier pour l'énergie hydraulique, elle s'est déclarée très favorable au développement des chauffe-eau solaires et des éoliennes. Elle a jugé nécessaire de développer la notion de « bouquet énergétique » afin d'organiser la production, à partir des différentes sources d'énergie, d'une électricité à la fois sûre, propre et compétitive. Elle a souligné que la communication sur le « mix » à la française était insuffisante, alors que grâce à nos centrales nucléaires, la France émet beaucoup moins de gaz à effet de serre que l'Allemagne et le Danemark, pourtant défenseurs de l'environnement, dont la production dépend pour une faible part des énergies renouvelables et pour environ 80 % des énergies fossiles, fortement émettrices de CO2.

Audition de M. Michel Minard, directeur général adjoint des Pompes funèbres générales

La mission a enfin procédé à l'audition de M. Michel Minard, directeur général adjoint des Pompes funèbres générales (PFG). Présentant d'abord brièvement son entreprise, il a indiqué que celle-ci relevait du groupe OGF et comportait trois pôles d'activité (services funéraires, prévoyance funéraire et industrie), qu'elle était intervenue à l'occasion des grandes catastrophes collectives depuis une quinzaine d'années et qu'elle avait noué un partenariat avec le ministère de l'intérieur via la signature de conventions dans le domaine de la sécurité civile.

Rappelant que la canicule de cet été pouvait être considérée comme une catastrophe d'une ampleur exceptionnelle en raison du nombre de victimes, de son étalement dans l'espace et dans le temps et de la façon dont elle avait été perçue par l'opinion publique, il a reconnu que la mesure de la catastrophe avait été prise avec un certain décalage par rapport à l'événement, du fait de la difficulté à distinguer un pic d'activité, fréquemment observé dans le secteur funéraire, d'un véritable cataclysme.

Indiquant que 14 000 obsèques avaient été organisées en juillet et en août sur l'ensemble du territoire, soit une augmentation de 40 % par rapport aux années antérieures, avec une concentration sur la période du 6 au 20 août, et que l'Ile-de-France avait enregistré 4 200 obsèques, correspondant à un doublement de l'activité des PFG, il a précisé que plus de 7 000 défunts avaient été accueillis dans des maisons funéraires pour des durées souvent supérieures à six jours, sans que la qualité du service proposé aux familles ne soit affectée.

Il a souligné que la direction générale du groupe OGF s'était mobilisée dès le 8 août, en allant sur le terrain afin d'examiner la situation, en rappelant des salariés partis en vacances, en suspendant l'activité de prévoyance funéraire afin d'affecter son personnel vers le service funéraire proprement dit, en faisant appel aux retraités volontaires, en ouvrant deux maisons funéraires en région parisienne ainsi que des tentes mobiles, ou encore en mettant en place, en liaison avec les préfectures du Val-de-Marne et des Hauts-de-Seine, deux sites funéraires à Rungis (où 174 défunts ont été accueillis) et à Nanterre (destiné uniquement au transit des corps).

Il s'est félicité de la bonne coordination de ces actions avec les services de l'Etat, indiquant que le ministère de l'intérieur avait permis aux préfectures d'alléger les procédures funéraires et que le ministère des transports avait autorisé la circulation des camions chargés du transport des cercueils le week-end, le ministère des affaires sociales ayant autorisé le dépassement des horaires de travail réglementaires.

Estimant que son entreprise avait fait preuve de réactivité et su faire face à ses missions de service public en mobilisant ses ressources et en supportant sans contrepartie financière la gestion du site de Rungis mis à sa disposition par l'Etat, il a souhaité néanmoins la mise en place d'une cellule de commandement centralisée susceptible de mieux coordonner l'intervention des divers acteurs, ainsi qu'une plus grande intégration des pompes funèbres à la mise en oeuvre du plan Orsec et aux exercices de sécurité civile. Il a par ailleurs annoncé que son groupe avait pris des engagements en termes d'investissements afin de gérer convenablement un nouvel événement de ce type, en ouvrant prochainement une deuxième chambre funéraire à Paris, près du cimetière du Père Lachaise, en consacrant davantage de crédits aux crématoriums et en augmentant le nombre d'équipements funéraires semi-mobiles.

A M. Hilaire Flandre, rapporteur, qui l'interrogeait sur la date à laquelle les pompes funèbres avaient eu conscience de la gravité de la situation et sur une éventuelle alerte de leur part en direction des autorités sanitaires, M. Michel Minard a répondu que la prise de conscience de l'événement avait eu lieu le 8 août, date à laquelle les chambres funéraires étaient saturées en région parisienne, et que des chiffres sur le nombre de décès avaient été communiqués par les pompes funèbres à l'Institut national de veille sanitaire à sa demande le 12 août et avaient fait l'objet d'un communiqué de presse publié le lendemain.

A Mme Gisèle Gautier, présidente, qui l'interrogeait sur l'existence d'un système de suivi permettant de connaître l'évolution du nombre de défunts de façon quotidienne, sur le fait que le secteur privé aurait fait preuve d'une plus grande réactivité que le secteur public et sur sa réaction à l'émission diffusée par France 2 exposant les difficultés rencontrées par les services funéraires de la ville de Paris durant la canicule, M. Michel Minard a apporté les précisions suivantes :

- la mise en place d'un dispositif de suivi du nombre de défunts est actuellement étudiée pour l'horizon 2005-2006 ;

- le secteur public, même s'il a correctement réagi, n'a peut-être pas été aussi prompt que le secteur privé, qui a su mobiliser de nombreux cadres sur le terrain et des relais en province, même s'il n'a pas bénéficié du relais attendu dans les médias en ce qui concerne l'appel au personnel alors en vacances ;

- le groupe OGF a publié un communiqué de presse et a adressé un courrier à certaines autorités publiques tels le ministre de l'intérieur ou le maire de Paris pour s'émouvoir, dans le reportage diffusé, d'une atteinte à la dignité des défunts.

A M. Hilaire Flandre, rapporteur, qui s'inquiétait de la proportion de défunts dont les corps n'avaient pas été réclamés par leur famille, M. Michel Minard a indiqué qu'en avaient été dénombrés 57 sur Paris et une vingtaine dans sa petite couronne, précisant toutefois que de telles situations étaient constatées toute l'année.

Enfin, à Mme Gisèle Gautier, présidente, qui l'interrogeait sur une éventuelle coopération plus étroite entre les pompes funèbres et les services de l'Etat depuis la canicule pour mieux anticiper un prochain événement de ce type, M. Michel Minard a indiqué qu'une réunion avait eu lieu cette semaine avec les ministères de l'intérieur, de la santé et de la justice, ajoutant que le séminaire annuel de son groupe, tenu en octobre dernier, avait également été consacré en partie à ce sujet.