Mardi 29 mai 2007

- Présidence de M. Alain Vasselle, président -

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de M. François Monier, conseiller maître à la Cour des comptes, secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la mission a procédé à des auditions sur les évolutions du périmètre de la protection sociale.

Elle a tout d'abord entendu M. François Monier, conseiller maître à la Cour des comptes, secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale.

M. François Monier a tout d'abord souligné le caractère essentiel d'une approche globale des comptes publics. En effet, il est important que le contribuable cotisant puisse disposer d'informations précises sur l'ensemble des dépenses publiques financées par prélèvements obligatoires. Cet ensemble est déjà regroupé dans les documents transmis aux institutions européennes, ainsi que dans la comptabilité nationale, dont les résultats sont toutefois méconnus du grand public et difficiles à utiliser. D'autres documents, récemment institués, permettent une certaine approche globale : le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances, d'une part, le rapport de la Cour des comptes, préparatoire au débat d'orientation budgétaire et des finances sociales du mois de juin, d'autre part. A partir de cette base, il faudra encore progresser et développer, à côté de la notion de prélèvements obligatoires aujourd'hui bien connue, celle de dépenses publiques de l'ensemble des administrations. Cette notion est en effet essentielle pour pouvoir, par exemple, constater la forte progression en volume des dépenses publiques enregistrée au cours des dernières années, en moyenne annuelle de 2 %, c'est-à-dire supérieure à la croissance du PIB. La mise en exergue de cette notion de dépenses publiques permet ainsi de démontrer que les dépenses n'ont en rien contribué à la réduction des déficits des derniers exercices. Le retour sur les évolutions passées est nécessaire, puisque l'objectif de progression des dépenses de l'Etat, aussi bien que celui de l'Ondam, ont presque toujours été dépassés. En outre, ces deux ensembles ne recouvrent pas la totalité des composantes de la dépense publique, ce qui justifierait l'élaboration de ce nouveau concept. La nouveauté de 2006 d'une comptabilité générale de l'Etat effectuée en droits constatés, se rapprochant de ce qui existe déjà pour la sécurité sociale, est, à cet égard, prometteuse. En tout état de cause, il est important de conserver un niveau de détail suffisant dans la présentation des comptes de l'ensemble des administrations publiques.

L'idée d'une fusion des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale a un peu surpris, dans la mesure où elle a été complètement absente des débats tenus en 2005 lors de l'examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Elle ne peut en tous cas pas s'appliquer à certaines branches de la sécurité sociale, en particulier la vieillesse et les accidents du travail, en raison du lien étroit de leurs dépenses avec le travail. Pour la maladie, le mode de gouvernance particulier de la branche semble également exclure une telle fusion. Pour la branche famille, le principe de la création d'une grande mission qui rassemblerait tous les éléments de la politique familiale peut être posé. Cette branche étant structurellement excédentaire, une telle approche permettrait en effet de gérer la dépense seule, sans considération des recettes, et donc d'éviter les tentations de dépenses supplémentaires ou de recyclage des excédents de la branche. Néanmoins, cette solution aurait beaucoup d'inconvénients. Il n'est pas certain, tout d'abord, que la gestion des prestations familiales soit mieux effectuée par l'Etat que par la sécurité sociale, comme l'a par exemple montré la gestion du RMI ou de l'allocation aux adultes handicapés (AAH). En effet, pour ces dernières, les crédits limitatifs inscrits en loi de finances étaient régulièrement sous-dotés, ce qui a conduit à l'accumulation d'une dette auprès de l'organisme verseur, sans la moindre incidence sur la croissance budgétaire des dépenses concernées. Par ailleurs, l'organisation du transfert des recettes de la branche famille à l'Etat, soit 40 à 50 milliards d'euros, ne serait pas simple à réaliser. Enfin, les partenaires sociaux sont très attachés à leur rôle au sein des caisses de sécurité sociale, même si, dans la réalité, leur pouvoir n'apparaît pas considérable. Au total, la budgétisation de la branche famille paraît donc présenter plus d'inconvénients que d'avantages, en dépit du fait que cette solution, retenue par de nombreux autres pays, soit cohérente en théorie.

M. François Monier a alors insisté sur le rôle des partenaires sociaux, même si leur pouvoir réel est souvent limité. Leur participation à un certain nombre d'instances, comme le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie et le Conseil d'orientation des retraites (Cor) est importante et doit continuer à exister pour permettre au Gouvernement et au Parlement de jouer pleinement leur rôle de décideur.

Il est naturellement essentiel de conserver la notion de droits acquis par le travail, en particulier dans le domaine des retraites.

Le mouvement de fiscalisation de la sécurité sociale est sans doute inéluctable. Il faut rappeler que la part des impôts et taxes dans le financement de la sécurité sociale, qui était de 5 % il y a seulement quinze ou vingt ans, est aujourd'hui de 28 %. Cela résulte essentiellement de la création de la CSG, qui apporte 60 milliards d'euros de recettes sur un produit total d'impôts et taxes de 80 milliards d'euros pour le régime général. Si on considère en France que la CSG est un impôt, il convient de reconnaître sa nature particulière, puisqu'elle remplace des cotisations, est recouvrée par le réseau des Urssaf et de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) et n'a jamais été affectée à l'Etat. Elle n'a d'ailleurs pas la qualité d'impôt pour les autorités européennes. En 2006, le transfert d'un panier de recettes d'environ 20 milliards d'euros, principalement la taxe sur les salaires, a constitué une nouvelle fiscalisation des recettes sociales.

A l'avenir, cette tendance devrait se poursuivre, notamment pour financer une augmentation des dépenses de retraite et de maladie supérieure à celle du PIB. Pour les retraites, les réformes de 1993 et 2003 ont permis de combler une grande partie des déficits, mais le problème demeure surtout en raison d'un taux de départ anticipé à la retraite très élevé. Pour la maladie, des marges d'économies potentielles importantes subsistent, comme le prouve le freinage des dépenses réalisé au cours des deux ou trois dernières années, mais leur progression reste plus forte que celle du PIB, comme l'a montré une étude récente de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). Cela signifie qu'il est impératif de poursuivre les réformes, de maintenir une gestion active de la branche, afin de ralentir l'accroissement des dépenses. Mais si des besoins de financement subsistent, une augmentation d'impôt s'imposera. En effet, il existe trois manières de financer la sécurité sociale : les cotisations, qui constituent la ressource historique, les impôts et taxes, qui se sont beaucoup accrus au cours des quinze dernières années et des transferts de l'Etat.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a estimé qu'au nombre des modes de financement possibles de la sécurité sociale, on peut ajouter les assurances complémentaires et la participation des usagers eux-mêmes.

M. François Monier en a convenu, mais il a considéré que la mise à contribution des usagers ou des assurances complémentaires permet avant tout de diminuer la dépense plutôt que d'accroître les recettes. En 2006, les régimes de base de la sécurité sociale ont été financés par 200 milliards de cotisations, 100 milliards d'impôts et taxes et 15 milliards de transferts de l'Etat. Si des besoins de financement futurs apparaissent pour la branche vieillesse, il faudra sans doute les combler par une augmentation des cotisations. La même solution devra être retenue pour les accidents du travail ou l'assurance chômage. En ce qui concerne la famille, le mode de financement actuel constitue une véritable anomalie, puisqu'il est composé de cotisations patronales et d'un peu de CSG. Or, le financement patronal prête à discussion. L'idéal serait que l'intégralité de la branche soit financée par les impôts, en particulier la CSG. Tant sur le plan économique que sur le plan de la logique des risques, puisqu'il s'agit d'une branche à vocation universelle, ou d'une meilleure transparence, il faudrait donc remplacer les cotisations employeurs par de la CSG, ce qui exigerait d'augmenter les salaires.

En ce qui concerne la branche maladie, les prestations en espèces des indemnités journalières doivent rester entièrement financées par des cotisations. Pour le reste, les dépenses d'assurance maladie ont plutôt vocation à être financées par des recettes de nature fiscale, comme la CSG, ou, pourquoi pas ? la TVA. Le recours à un impôt général est certainement la meilleure méthode, au moins pour les besoins futurs. A cet égard, la CSG apparaît comme l'impôt le plus satisfaisant, comportant le moins de défauts sur le plan économique en raison de son prélèvement immédiat et présentant une assiette touchant directement les principaux intéressés par les dépenses. Le débat mené en 2006 sur un changement d'assiette des recettes de la sécurité sociale a été rendu difficile par le faible montant de cotisations qui subsiste au niveau du Smic. Il en est toutefois ressorti que, pour un changement d'assiette aussi important, on ne pouvait en attendre que très peu d'avantages, en particulier en termes d'emploi. La TVA sociale peut éventuellement être une solution acceptable, mais elle présente sans doute un risque inflationniste et sa mise en oeuvre ne peut être que limitée compte tenu des taux déjà élevés applicables dans notre pays.

M. François Monier a souligné que, seuls, des prélèvements simples à assiette large facilitent réellement la clarté des choix. En outre, aucun prélèvement ne possède les caractéristiques d'une croissance supérieure à celle du PIB sur longue période. Cela signifie qu'un apport de recettes supplémentaires est inévitable pour la sécurité sociale, mais pas qu'il doit y avoir une augmentation des prélèvements sociaux, puisque les prélèvements de l'Etat doivent pouvoir continuer à baisser, de même que ceux de la branche famille, par exemple.

La distinction entre le contributif et l'assurantiel n'est pas totalement pertinente. Il vaut mieux distinguer, d'une part, les prestations universelles comme la maladie, hors indemnités journalières, et la famille, qui doivent être financées par des impôts ou des cotisations salariales, d'autre part, les prestations en lien avec le salaire, comme la retraite ou le chômage, qui doivent être financées par les cotisations. Un partage précis est toutefois très difficile, puisque la plupart des branches mélangent solidarité et universalité.

Puis il a insisté sur le problème majeur des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, même si les montants financiers en cause ont beaucoup diminué au cours des dernières années et ne s'élèvent plus qu'à 15 ou 20 milliards d'euros sur un total de 400 milliards d'euros de dépenses. Le jaune budgétaire, qui fait la synthèse de ces mouvements financiers, mériterait d'être clarifié, car il ne fait pas bien ressortir ce qui entre dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale et ce qui constitue des concours de l'Etat à la sécurité sociale. Favoriser la réduction de cette masse de transferts, voire sa suppression, en raison des problèmes systématiques qu'ils posent notamment pour la sécurité sociale, est une piste à étudier. Il paraîtrait, en effet, plus intéressant de remplacer les transferts par des impôts et taxes et de créer une étanchéité encore plus grande entre les ressources de l'Etat et celles de la sécurité sociale. Dans ce cadre, il conviendrait alors de réfléchir au meilleur moyen de respecter la loi de 1994 en matière de compensation des allégements de charges sociales.

Au cours des deux dernières années, de véritables progrès ont été enregistrés dans la coordination des différents services responsables de la préparation des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale. La création du ministère des comptes publics devrait encore améliorer cette articulation, en particulier à l'étape des derniers arbitrages pour laquelle le rapport conjoint de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale des finances (IGF) de 2005 reste d'actualité.

Puis M. François Monier a convenu des très grandes insuffisances de l'annexe B sur le cadrage pluriannuel du projet de loi de financement de la sécurité sociale, trop peu développé et explicité. A cet égard, il faut constater que tous les documents de prévision pluriannuelle présentés au cours des dernières années ont été démentis par les faits. Il est regrettable qu'ils ne comportent aucun caractère contraignant pour le Gouvernement. Leur appropriation par les ministères sociaux est également encore insuffisante, car fixer des objectifs ambitieux est une chose, mais déterminer les moyens d'y parvenir en est une autre. Il pourrait donc être judicieux d'introduire des éléments contraignants dans la projection pluriannuelle, comme le font certains pays, sur une durée de trois ans : si un engagement n'est pas tenu une année, il devra impérativement l'être l'année suivante afin de permettre le respect des objectifs fixés à l'échéance de ces trois années. Par ailleurs, il est important d'effectuer un meilleur chiffrage des mesures nouvelles et d'en contrôler la pertinence a posteriori, car il faut éviter de revoir un dérapage comme celui lié à la nette sous-estimation de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje).

M. François Monier a ensuite présenté les trois conditions nécessaires au bon fonctionnement d'un comité d'alerte : un objectif public de référence, des moyens de suivi infra-annuel, enfin des moyens de corriger la dérive si celle-ci est diagnostiquée. De telles conditions existent pour l'assurance maladie, du moins en partie, puisque les moyens de corriger la dérive des dépenses hospitalières ne sont pas totalement disponibles. En revanche, pour la branche famille, ces moyens ne paraissent pas exister, puisque l'essentiel des dépenses correspond à des droits. La seule marge sur laquelle on pourrait intervenir est la masse relativement limitée des dépenses d'action sociale. En outre, pour les branches vieillesse et famille, on observe depuis quelques années des modifications de comportement de grande ampleur, particulièrement difficiles à prévoir, ce qui n'était pas le cas auparavant.

Mme Marie-Thérèse Hermange s'est élevée contre l'impossibilité de connaître en détail les dépenses du secteur hospitalier, qui nécessiteraient, selon elle, d'entreprendre une véritable réforme. Sur la Paje, elle a estimé indispensable d'effectuer une comparaison entre le coût des prestations individuelles accordées et le coût d'un système collectif public de garde d'enfants.

M. François Monier a insisté sur la nécessité d'agir sur les dépenses avant d'envisager le recours à de nouvelles recettes. Il a réaffirmé la très grande insuffisance des travaux de chiffrage du coût de la Paje pour la branche famille.

M. François Autain a souhaité savoir quel pourrait être l'avenir de la commission des comptes de la sécurité sociale, dès lors que la Cour des comptes est investie d'une nouvelle mission de certification des comptes des organismes sociaux.

M. François Monier a répondu que la commission des comptes s'intéresse principalement à la prévision des comptes sociaux, tandis que la Cour des comptes se penche sur les comptes clos. Les deux principaux intérêts de la commission des comptes de la sécurité sociale sont, d'une part, de réunir à échéance régulière l'ensemble des partenaires sociaux avec les ministres concernés, d'autre part, de produire un rapport qui a pour but de faire un peu de pédagogie dans un domaine compliqué.

M. Alain Vasselle s'est interrogé sur les moyens d'analyse du comité d'alerte en matière de maîtrise de la dépense d'assurance maladie.

M. François Monier a indiqué que ce comité comprend trois membres et que son rôle au regard des textes est très précis : alerter le public en cas de dérapage des dépenses puis, un mois après la notification de l'alerte, examiner les propositions de rectification de la dérive présentées par les caisses et, le cas échéant, le Gouvernement.

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de M. François Mercereau, directeur du pôle sanitaire du groupe Korian

Puis la mission a procédé à l'audition de M. François Mercereau, directeur du pôle sanitaire du groupe Korian.

M. Alain Vasselle a précisé que M. François Mercereau est inspecteur général des affaires sociales. Il a été directeur de la sécurité sociale au milieu des années 1980 avant d'être directeur du cabinet de M. Jean-Louis Bianco, ministre des affaires sociales et de l'intégration, au début des années 1990. En 1993, il a rejoint les assurances générales de France, dont il a été directeur général adjoint avant d'être directeur central santé d'Axa France Assurances de 1998 à 2002. Après un passage au centre technique des institutions de prévoyance en 2005-2006, il est entré, en décembre dernier, dans le groupe Korian, dont il est le directeur du pôle sanitaire.

M. François Mercereau a tout d'abord présenté le groupe Korian qui résulte de la fusion, au mois d'octobre 2006, des sociétés Suren et Medidep. Ce groupe assure la gestion de 127 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et de cinquante établissements de soins de suite, de réadaptation et cliniques psychiatriques ; ses activités sont en forte croissance.

A son sens, les dépenses sociales ne présentent pas de particularité par rapport aux autres dépenses publiques et il est indispensable d'introduire de la rigueur et de la concurrence dans la gestion de ces dépenses. Par ailleurs, aucune présentation des comptes ne peut, à elle seule, suffire à régler un problème d'équilibre ; elle peut seulement clarifier le débat.

Sur la question du rôle des partenaires sociaux, des évolutions importantes ont eu lieu au cours des dernières années, notamment en 1996 et en 2004 pour l'assurance maladie. Pour la famille, les retraites et la branche recouvrement, l'Etat a toujours été l'élément décideur, les partenaires sociaux ayant un rôle consultatif ou de simple gestion administrative, c'est-à-dire le suivi du service des prestations et du recouvrement des cotisations. Ce rôle est utile, mais il conviendrait sans doute de le renforcer au niveau régional et de supprimer tous les échelons locaux inférieurs, qu'ils soient départementaux ou infradépartementaux. Il est en effet impératif de redéployer les moyens des caisses au niveau régional, voire au niveau de plusieurs régions.

A la Cnam, les partenaires sociaux ont essentiellement un rôle d'observation puisque, désormais, le directeur général a le pouvoir de décision, ce qui semble être une bonne évolution. Néanmoins, on constate que dans le cadre d'un paritarisme complet, comme tel est le cas pour les retraites complémentaires et l'assurance chômage, les partenaires sociaux assument très bien leur mission, car ils ont la totalité du pouvoir, aussi bien sur les dépenses que sur les recettes. On pourrait imaginer de transposer cette solution à la branche vieillesse dès lors que les dépenses de solidarité sont bien identifiées et isolées dans le cadre du fonds de solidarité vieillesse.

Puis M. François Mercereau a considéré indispensable de conserver le principe des droits acquis par le travail, en particulier pour les retraites. Ce lien apparaît toutefois aussi à travers la CSG. Aussi bien, se déclare-t-il opposé aux franchises sous condition de ressources, car cela concentre la recette sur un faible nombre de personnes, principalement les cadres. En revanche, une franchise par acte, non remboursée par les assurances complémentaires, même d'un très faible montant, présente un caractère civique utile.

Il pourrait également être intéressant de renforcer le lien entre cotisations et prestations en espèces, par exemple pour les indemnités journalières, en faisant comme pour l'assurance chômage, c'est-à-dire en les rendant proportionnelles à la durée de cotisation. En effet, la logique des indemnités journalières est d'être un revenu de remplacement, et non de substitution, pour lequel existent les minima sociaux. Ce raisonnement pourrait aussi s'appliquer aux prestations d'invalidité ainsi qu'à la retraite, en rapprochant les régimes de base de régimes à points, c'est-à-dire en rendant applicable le principe de proportionnalité.

M. François Mercereau a alors insisté sur le caractère inévitable de la fiscalisation des ressources de la sécurité sociale qui, d'ailleurs, ne fait plus l'objet d'un débat aujourd'hui, contrairement aux années qui ont précédé la mise en oeuvre de la CSG. L'intégration des cotisations patronales dans les salaires serait une bonne chose, car elle permettrait aux salariés de mieux percevoir le coût économique de la protection sociale. En ce qui concerne l'évolution de l'assiette des prélèvements sociaux, le rapport de référence est celui de Charles-Amédée de Courson et de Claire Bazy-Malaurie, publié en 1984, selon lequel l'utilisation de la TVA présenterait un faible avantage pour la plupart des entreprises et un intérêt très fort pour quelques secteurs bien ciblés comme l'industrie pétrolière ou les secteurs très capitalistiques.

Puis il a souligné le caractère paradoxal des transferts sociaux actuels, devenus des sortes de transferts à rebours. En effet, les retraités consomment actuellement 45 % des prestations sociales et le transfert des actifs vers les retraités s'élève à environ 50 milliards d'euros par an. Ce transfert serait acceptable s'il s'agissait uniquement de solidarité, mais, en réalité, il reflète une sous-cotisation des retraités dont les revenus sont supérieurs à ceux de nombreux actifs. On estime que sur les 50 milliards transférés, 30 sont justifiés et 20 s'apparentent à de la sous-cotisation des retraités, ce qui rend à l'évidence nécessaire une redistribution du prélèvement entre actifs et inactifs.

Pour les retraites, l'augmentation des cotisations est à son sens inéluctable, puisqu'entre 1995 et 2030, la part des retraités dans la population française doit passer de 16 % à 24 %. En augmentant de 0,1 % par an les cotisations, on peut régler un tiers du problème, mais il convient également de diminuer les droits et sans doute de sous-indexer les pensions de vieillesse.

En matière de dépendance, le coût d'un séjour en établissement est de 60 euros par jour en province et de 80 euros par jour à Paris, pour une durée moyenne de quinze mois. Au regard de cette somme, il est probable que deux tiers des Français peuvent épargner la ressource nécessaire. Mais cela signifie qu'il faut inciter les retraités à constituer cette épargne.

M. François Mercereau a ensuite fait observer que l'existence d'un comité d'alerte ne suffit pas à équilibrer des comptes en déficit et que, s'agissant de l'assurance maladie, il faut faire des économies et prendre des décisions importantes, même si elles sont difficiles. Parmi les pistes envisageables, on peut citer la mise en concurrence de la sécurité sociale et l'instauration d'une pluralité de gestionnaires qui, d'ailleurs, ne doivent pas forcément appartenir au secteur privé lucratif. Il en est de même pour les hôpitaux, pour qui il faut aller au bout de la mise en concurrence entre établissements publics et privés.

M. François Autain s'est interrogé sur les conséquences de la mise en concurrence, puisque celle-ci peut aboutir à remettre en question l'égal accès de tous aux soins, comme tel est le cas aux Etats-Unis, où 50 millions de personnes n'ont pas de protection sociale et où, de surcroît, les dépenses de santé sont plus élevées qu'en France. Il a également souhaité savoir pour quelles raisons il n'est pas possible d'instaurer une franchise sous condition de ressources. Enfin, il a voulu connaître les raisons d'une diminution de la durée moyenne de séjour en Ehpad.

M. André Lardeux a constaté que la durée de la dépendance varie selon les personnes et peut parfois être très longue, ce qui pourrait justifier un financement de la dépendance par l'assurance. Il a demandé l'avis de M. François Mercereau sur le mode de gouvernance actuel très complexe de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

M. Claude Domeizel a fait observer que le revenu moyen des retraités est aujourd'hui égal à 90 % du revenu moyen des actifs hors revenus du patrimoine. Or, cette statistique ne doit pas masquer le fait que certains inactifs ont des revenus très inférieurs à la moyenne, tel est le cas pour 800 000 veuves dont les revenus sont inférieurs à 277 euros par mois.

M. François Mercereau a précisé que la mise en concurrence de la gestion des dépenses sociales doit naturellement se faire à l'intérieur d'un cahier des charges précis comportant le respect de quelques grands principes comme ceux d'une assurance universelle, de l'absence de sélection des assurés ou de la garantie d'un niveau minimum de prestations. Ce système serait très différent du système américain, mais se rapprocherait de ce qui existe en Suisse ou aux Pays-Bas. L'accès de tous aux soins doit évidemment être préservé, mais il convient d'éviter le sur-accès aux prestations sociales.

Il s'est ensuite déclaré très favorable à la contribution d'un euro par consultation ou d'un euro par boîte de médicament, car il s'agit de petites sommes qui, a priori, ne posent pas de problème pour les assurés, y compris pour ceux qui sont inscrits à la CMU. Si la durée de séjour en Ehpad diminue, cela est avant tout lié au fait que l'âge d'entrée dans ces établissements recule et qu'il est aujourd'hui supérieur à quatre-vingt-cinq ans. La dépendance est bien évidemment assurable et, seule, la mutualisation permettra effectivement de faire face à des durées de dépendance très différentes. Mais trop peu de personnes encore veulent y penser en France, où l'on constate que ce type de produit d'épargne ou d'assurance reste très peu développé.

Après avoir convenu de la complexité des structures et des mécanismes de la CNSA, malgré la qualité des intervenants, M. François Mercereau a confirmé que la situation de certaines veuves est à l'origine d'une réelle pauvreté. Il faudrait que les retraites soient plus directement liées au travail et que l'on mette par exemple en place un système patrimonial où le conjoint survivant pourrait bénéficier de la moitié des points de retraite engrangés pendant la durée du mariage.

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de M. Gilles Johanet, président du comité maladie à la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA), directeur général adjoint des Assurances générales de France (AGF)

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi sous la présidence de M. Alain Vasselle, président, la mission a poursuivi ses auditions sur les évolutions du périmètre de la protection sociale.

Elle a tout d'abord entendu M. Gilles Johanet, président du comité maladie à la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA), directeur général adjoint des Assurances générales de France (AGF).

M. Alain Vasselle, président, a rappelé à titre liminaire l'expérience acquise par M. Gilles Johanet en matière de financement de la protection sociale comme directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) puis, à partir de l'année 2003, comme directeur général adjoint des Assurances générales de France (AGF), enfin, comme président du comité maladie de la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) à compter de 2004.

M. Gilles Johanet a d'abord estimé que le niveau de détail et de pertinence des comptes sociaux est encore insuffisant pour permettre au Gouvernement, au Parlement et aux partenaires sociaux de suivre convenablement les évolutions du système de protection sociale et de juger sa performance. De réels progrès ont été faits pour la branche vieillesse grâce à la création du conseil d'orientation des retraites (Cor) et à la réforme Fillon de 2003. Toutefois, les besoins de clarification des comptes sont encore considérables pour la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), qui se caractérise par des résultats sensiblement différents d'une caisse régionale à l'autre. Pour la branche maladie, l'analyse de la performance médicale, financière et sociale du système est encore très insuffisante.

Pour un niveau d'information optimal, il conviendrait idéalement de disposer d'un « carré magique » comprenant la ventilation des dépenses, leur contrepartie productive, la pertinence de cette contrepartie ainsi que le coût de celle-ci. Or, ces informations restent incomplètes puisque, par exemple, la ventilation des dépenses n'est pas précisée pour l'hôpital, alors que ce poste représente 47 % des dépenses de santé. Pourtant, cette insuffisance est connue depuis de nombreuses années et on ne l'a pas corrigée, malgré une circulaire de 1989 engageant les directeurs d'hôpitaux à améliorer le système d'information relatif aux dépenses des établissements.

A cet égard, la faible productivité des dépenses des hôpitaux constitue un sujet d'inquiétude majeur. Citant l'exemple de l'imagerie à résonance magnétique (IRM), M. Gilles Johanet a indiqué que les hôpitaux effectuent en moyenne 4 700 actes par an et les centres de lutte contre le cancer 468, contre plus de 13 000 pour les structures privées. De fait, l'utilisation des IRM dans le secteur public n'est pas optimale, ce qui peut entraîner un problème de qualité lorsque la pratique de l'acte médical est trop peu courante. Plus généralement, la question de l'allocation des ressources humaines et matérielles dans le domaine de la santé devrait faire l'objet d'une analyse plus fine pour améliorer la productivité des dépenses, notamment par des économies d'échelle. Dans l'exemple précédent, il s'agirait ainsi de limiter le nombre d'IRM en milieu rural et de développer les IRM « en batterie » dont le coût de fonctionnement est de 30 % inférieur à celui d'un appareil utilisé isolément.

Abordant le rôle des partenaires sociaux dans la gestion du système de protection sociale, M. Gilles Johanet s'est déclaré attaché au paritarisme, le jugeant indispensable au dialogue et, au-delà, à la cohésion sociale, même si le paritarisme n'a pas toujours correctement fonctionné.

Il a souhaité que le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie fasse évoluer les mentalités des partenaires sociaux et de l'opinion publique sur le sujet de l'optimisation des dépenses de santé, comme le Cor y est parvenu pour les retraites, même si cette évolution semble plus difficile pour l'assurance maladie, en raison de l'importance des intérêts des professionnels de santé et d'une approche souvent trop systémique de ces questions.

Il s'est déclaré préoccupé par le développement du subreptisme qui modifie sans le dire le paradigme de 1945 selon lequel toute dépense sociale nouvelle est synonyme de progrès social, et son augmentation permise par des ressources humaines et financières quasi illimitées. Cette méthode de réforme opaque n'est à son avis pas étrangère à la « poujadisation rampante » des professionnels de santé, inquiets des changements de leurs conditions de travail et des pressions souvent contradictoires exercées par l'Etat et par les caisses pour améliorer leur performance.

Concernant l'avenir des lois de financement de la sécurité sociale et la place particulière de la protection sociale au sein des finances publiques, il s'est élevé contre la proposition de fusionner les lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Si les branches retraite et accidents du travail sont par nature contributives, la stricte logique de solidarité ne s'applique en réalité que pour la CMU, qui ne devrait d'ailleurs pas pour autant être exclue d'une recherche de performance. Il a cité, à cet égard, le paradoxe du remboursement total, unique en Europe, des dépenses d'homéopathie pour les bénéficiaires de la CMU et, à l'inverse, leur mauvaise couverture dentaire. Il a souligné le problème des dentistes qui refusent certains des patients à la CMU, car leur prise en charge constitue pour leur cabinet un coût économique, notamment pour l'activité de prothésiste.

M. Gilles Johanet a jugé absurde que les professionnels de santé soient associés à la régulation de la dépense sociale. Aucun contrat n'est en effet crédible entre la puissance publique et les soignants, dans la mesure où ces derniers disposent d'une liberté absolue d'installation, de prescription et parfois de tarification et que le conventionnement n'est pas sélectif.

Il s'est déclaré favorable à une coopération entre l'assurance maladie et les assurances complémentaires, rendue nécessaire par la logique de modulation du ticket modérateur. Ce partenariat doit toutefois être contractuel, et non réglementaire, et ne pas être soumis à l'accord préalable des professionnels de santé. Il suppose également que les complémentaires aient accès aux données de l'assurance maladie, leur permettant de connaître ce qui revient à leur charge et ainsi de répondre au mieux à la demande de performance formulée par les assurés. Enfin, certains transferts de remboursements de l'assurance maladie vers les assurances complémentaires devraient être organisés pour que la solidarité nationale conserve les moyens de prendre en charge de nouvelles dépenses et être accompagnés de la liberté de remboursement pour les complémentaires en fonction de l'intérêt médical de l'acte ou du produit.

M. André Lardeux a souhaité savoir si le fait d'améliorer la productivité des dépenses de santé, en particulier du secteur hospitalier, suffirait à résoudre le déficit chronique de l'assurance maladie.

M. Gilles Johanet a convenu que l'augmentation de la productivité ne pourrait régler à elle seule le problème du déficit, mais qu'elle constitue un élément capital de la solution. Il a pris l'exemple du nombre d'infirmiers hospitaliers, passé de 150 000 à 460 000 entre 1975 et aujourd'hui, alors que le nombre d'entrées et la durée moyenne de séjour ne se sont pas accrus dans les mêmes proportions. Le secteur hospitalier est trop diffus, peu hiérarchisé et insuffisamment spécialisé. Les seules améliorations apportées ont concerné les greffes grâce à un décret pris par Michèle Barzac et le maillage territorial des maternités mis en place par Bernard Kouchner, lorsqu'ils étaient ministres de la santé.

Mme Marie-Thérèse Hermange a rappelé que la commission des affaires sociales du Sénat appelle de ses voeux depuis longtemps une réforme ambitieuse de l'hôpital. Elle a souhaité que cette réforme prévoie notamment un système de promotion des directeurs d'hôpitaux en fonction des résultats obtenus.

Abordant le problème du déficit sous l'angle de la médecine de ville, M. François Autain a considéré que les médecins libéraux bénéficient en réalité des avantages du salariat, compte tenu de leur conventionnement avec l'assurance maladie et s'est déclaré favorable à la mise en place d'un conventionnement sélectif, rappelant que la Fédération hospitalière de France (FHF) le préconise également. Il s'est inquiété de l'individualisme croissant des soignants comme des assurés, qui rend délicate toute tentative de réforme du système de santé.

Il a dénoncé le lien entre l'Etat, qui détermine en particulier le prix des médicaments, et les professionnels de santé. Or, le prix des médicaments devrait être fixé par les organismes d'assurance plutôt que par le ministre et l'assurance maladie obligatoire devrait avoir la responsabilité entière pour les soins entrant dans un panier bien déterminé, le reste pouvant être transféré aux assurances complémentaires.

M. Bernard Cazeau a souhaité connaître l'opinion de M. Gilles Johanet sur les franchises applicables aux remboursements annoncées par le Gouvernement.

M. Gilles Johanet a rappelé que les pouvoirs publics avaient longtemps eu une approche essentiellement comptable de l'assurance maladie, puis une approche médicale ces cinq dernières années, mais jamais une approche économique du système. Or, l'économie de la santé est une économie de rente, puisque l'offre de soins n'est régulée ni par la demande, ni par les prix. Le système crée ses propres dépenses. Ainsi, la généralisation du dépistage obligatoire du cancer du sein a été pour partie décidée afin d'utiliser les 1 500 mammographes implantés sur le territoire national, nombre élevé comparé aux 400 appareils anglais et aux 600 allemands. De même, la France compte 4 500 laboratoires de biologie, dont un tiers n'atteint pas l'équilibre financier, au lieu de 600 en Allemagne. Il y a donc des progrès à faire en matière d'économies d'échelle.

Les pouvoirs publics doivent se placer sur le terrain du « donnant-donnant » pour faire accepter aux soignants les nécessaires réformes. Or, la tendance est plutôt à ménager leur susceptibilité, comme tel a été le cas avec les médecins généralistes dont les honoraires ont été portés à 23 euros sans contrepartie, alors qu'il convenait, par exemple, de négocier la suppression de la prescription médicale facultative afin de développer l'automédication, moins coûteuse pour la collectivité. Une réflexion doit également être engagée sur les actes effectués par ces professionnels, dont un tiers semble relever du paramédical. Dans un contexte de démographie médicale défavorable - le nombre de médecins généralistes devrait revenir de 55 000 à 40 000 ces prochaines années - il serait utile de recentrer leurs missions sur les actes les plus médicalisés. Or, les pouvoirs publics se sont contentés d'une frileuse délégation de tâches aux professions paramédicales, décidée de manière subreptice, au lieu de mettre en place un véritable transfert de compétences.

M. Gilles Johanet a ensuite reconnu que l'établissement du prix des médicaments devrait logiquement revenir aux financeurs, même si ce point ne fait pas partie des principales revendications des assureurs complémentaires. Il serait également souhaitable de disposer d'un bilan annuel précis des rabais, ristournes et remises accordés dans la plus complète opacité par les laboratoires pharmaceutiques.

Mme Marie-Thérèse Hermange a complété ce propos en indiquant que le niveau de consommation médicamenteuse à l'hôpital, en forte augmentation, ne fait l'objet d'aucune communication.

M. François Autain a estimé que la consommation de médicaments ne peut être régulée que par les prix.

M. Gilles Johanet a rappelé la position particulière du système de santé français, qui a refusé de se réformer par la voie du marché, pourtant choisie avec succès par le Japon et l'Allemagne et consistant en des prix libres et des niveaux de remboursement au tarif de référence. La solution administrée a été préférée par la France pour deux raisons principales : le maintien de l'attractivité du territoire national pour l'industrie pharmaceutique (320 laboratoires sont aujourd'hui présents sur le marché français : l'instauration d'un tarif de référence n'en laisserait subsister qu'une quinzaine) et l'idée que l'administration est capable de réguler le système en l'encadrant. Or, seul, Xavier Bertrand, lorsqu'il était en charge du ministère de la santé, est parvenu à faire en sorte que les laboratoires soient conduits, pour la première fois, à contribuer au financement du système de santé.

Sur les transferts de charges entre l'assurance maladie et les assurances complémentaires pour les soins et les médicaments à faible intérêt thérapeutique, M. Gilles Johanet a souhaité qu'une réflexion soit rapidement menée, de même que sur l'instauration de contreparties mesurables et suivies pour toute augmentation des honoraires des soignants. A cet égard, la négociation en cours sur le secteur optionnel est instructive.

Les franchises ne répondent pas au problème du déficit de manière efficiente. En effet, elles ne sont pas concentrées sur les dépenses les plus coûteuses, qui dépendent de l'heure (honoraires de nuit), de la nature de l'acte (les échographies ou les actes de chirurgie par exemple) et du lieu (les hôpitaux locaux ont un rendement plus faible). En outre, si les franchises ne s'appliquent qu'aux dépenses avec ticket modérateur, elles ne touchent pas les onze millions de personnes en affection de longue durée (ALD), dont les dépenses de santé augmentent trois à quatre fois plus vite que celle des cinquante autres millions de Français.

Plutôt que la mise en place de franchises, il vaudrait mieux modifier les critères de classement en ALD. Les critères médicaux actuels ne sont pas adaptés et exercent une pression très grande sur les médecins pour qu'ils acceptent de déclarer les patients en ALD. Ainsi, si 28 % des diabétiques étaient inscrits en ALD dans les années 1960, ils sont 78 % aujourd'hui, sans que la nature du mal ait changé. Il faut au contraire mettre en place des critères financiers en fonction des ressources du patient, comme le préconise la Haute Autorité de santé, pour limiter le risque de fraude et, par là, l'inflation des dépenses. En effet, il n'est pas souhaitable que l'assurance maladie ne protège à terme qu'une minorité de Français pris en charge à 100 %. Néanmoins, les franchises, sorte de « reste à charge initial », finiront sans doute par se mettre en place, sous réserve de la résolution d'un certain nombre de difficultés techniques.

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de M. Jacques Bichot, professeur à l'Université Jean Moulin Lyon III

La mission a enfin procédé à l'audition de M. Jacques Bichot, professeur à l'université Jean Moulin Lyon III.

M. Jacques Bichot a tout d'abord souligné qu'il convient de distinguer les différents prélèvements obligatoires en fonction de la présence ou non de contrepartie et du risque de phénomène de passager clandestin qu'ils entraînent, c'est-à-dire l'apparition de services gratuits financés par tous. Certaines activités, notamment dans le domaine régalien de l'Etat, ne peuvent être financées que par des prélèvements obligatoires sans contrepartie. En revanche, dans le domaine de la protection sociale, qui s'apparente à une activité de prestation de service, il est préférable de choisir des prélèvements obligatoires avec contrepartie. Tel était d'ailleurs le choix opéré par les fondateurs de la sécurité sociale quand ils ont opté pour un financement par cotisations sociales. A l'heure actuelle, le financement de la protection sociale tend à s'éloigner de ce modèle, avec une forte progression du financement par prélèvements obligatoires sans contrepartie.

Les comptes publics constituent un ensemble complexe, en raison de la multiplicité des acteurs concernés et d'une organisation des relations financières entre ces acteurs, qui est source de confusion. Dans le domaine social, les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale ont été rendues particulièrement peu lisibles en raison des choix opérés en matière d'allégement de charges sociales. Par ailleurs, la multiplication des fonds a entraîné la mise en place d'une tuyauterie compliquée et changeante, qui ne facilite pas la reconstitution des comptes et leur suivi à moyen terme.

Abordant la question de la fusion du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Jacques Bichot a considéré que cette proposition s'inscrit dans la suite logique de la transformation du conseil des impôts en conseil des prélèvements obligatoires et relève de la même idée que la création d'un ministère des comptes publics. Il s'est déclaré défavorable à une telle fusion, estimant que celle-ci n'améliorerait pas la clarté des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale doit se concentrer sur les sujets relevant réellement de son périmètre afin d'enrayer sa tendance à se transformer en « projet de loi portant diverses mesures d'ordre social » et il faut laisser aux gestionnaires de la sécurité sociale le soin de prendre les mesures de gestion quotidiennes qui n'entrent pas dans le champ de compétences du Parlement.

S'agissant du rôle des partenaires sociaux, il a observé qu'ils assurent correctement leur mission, dès lors que l'on respecte leur rôle de gestionnaire. Ainsi, l'association générale des institutions de retraite des cadres (Agirc) et l'association des régimes de retraite complémentaire (Arrco), qui sont gérées par les partenaires sociaux, réussissent à s'adapter progressivement à l'évolution de leurs charges, là où le régime général échoue en raison d'une intervention systématique de l'Etat. Il serait donc souhaitable d'accroître nettement le rôle des partenaires sociaux dans le régime général et d'éviter que l'Etat interfère dans la gestion de la sécurité sociale.

M. Jacques Bichot a estimé ambiguë la notion de droits acquis par le travail, lui préférant celle de droits acquis par les cotisations. La notion de droits acquis par le travail a souvent été mal comprise. En particulier aux Etats-Unis, en déconnectant les prestations servies des cotisations qui les financent, elle a entraîné des dettes sociales très importantes pour certaines entreprises du secteur automobile, qui ont reporté de façon dangereuse une partie de leurs charges dans le futur.

Il s'est dit favorable à un remplacement des cotisations patronales par des cotisations salariales, afin de clarifier le coût du travail pour les entreprises et de montrer que les cotisations sont effectivement supportées par le salarié.

S'agissant de la fonction publique, les charges de pension inscrites au budget d'une année donnée ont en réalité été créées lors d'exercices antérieurs. On impute donc à une mauvaise gestion de la dépense publique un phénomène qui relève en réalité d'une mauvaise gestion de la dette de l'Etat.

Le principe d'un financement par des cotisations salariales peut, à son sens, être conservé pour la plupart des risques, à l'exception des accidents du travail. Dans ce dernier domaine, il est normal que le financement du risque repose sur une cotisation de l'employeur, dans la mesure où c'est lui qui crée le risque pour ses salariés. Il a insisté sur le fait que la branche famille peut rester financée par des cotisations sociales, puisqu'elle finance des dépenses ayant un caractère d'investissement dans le capital humain pour les entreprises.

Il serait souhaitable de mettre fin à la progression de la part de l'impôt dans le financement de l'assurance maladie, sachant qu'un financement par cotisations sociales n'exclut pas la possibilité d'un régime de solidarité. Le régime actuel de la CMU de base en est un bon exemple, puisqu'il consiste à subventionner la cotisation de ceux qui ne peuvent la payer.

La TVA sociale ne constitue pas, à son avis, une ressource de financement réellement intéressante. Sa variante, consistant à moduler les cotisations sociales en fonction de la valeur ajoutée de l'entreprise, n'est pas plus opérationnelle. D'ailleurs, Maurice Lauré, inventeur de la TVA, n'était pas lui-même partisan d'une TVA sociale, puisqu'il avait démontré qu'un financement par cotisations sociales était le mode de financement de la protection sociale le plus compatible avec l'économie de marché.

M. Jacques Bichot s'est alors dit favorable à toute mesure permettant aux assurés de mieux percevoir le coût de la protection sociale. Il est nécessaire que chacun puisse expérimenter en pratique ce coût et telle est la raison pour laquelle un financement par cotisations salariales est préférable. Dans le même souci, on pourrait mettre fin au prélèvement à la source des cotisations salariales, afin que les assurés soient obligés de faire un acte positif pour s'acquitter de leurs cotisations. Une meilleure perception, par les assurés, du coût de la protection sociale devrait leur permettre d'influencer son évolution par leurs choix de consommation.

Il est souhaitable de préserver une distinction entre protection sociale et budget de l'Etat, qui pourrait continuer à reposer sur le critère assurance/assistance. Toutefois, la solidarité entre les assurés sociaux ne se limite pas à l'existence d'un régime non contributif, car elle s'opère également dans le cadre de la mutualisation qui préside au régime assurantiel.

M. Jacques Bichot a observé que les dépenses de solidarité représentent aujourd'hui entre 25 % et 30 % des dépenses de protection sociale, soit un montant total d'environ 130 milliards d'euros. Cette somme étant équivalente au produit actuel de la CSG et de l'impôt sur le revenu, on pourrait envisager de fusionner ces deux impôts afin d'en affecter le produit au financement de la protection sociale de solidarité.

La gestion de la dépense sociale ne peut être améliorée, à son sens, qu'en rapprochant les gestionnaires de la dépense. Telle est la raison pour laquelle les partenaires sociaux doivent rester les gestionnaires principaux de la sécurité sociale. D'ailleurs, dans certains domaines, les assurés sociaux pourraient eux-mêmes piloter la dépense : en matière de retraites, il serait possible de fixer simplement des règles de neutralité actuarielle permettant aux assurés de faire leur choix en toute connaissance de cause, au lieu d'intervenir sans cesse par des mesures législatives.

M. André Lardeux a souhaité savoir si les transferts de compétences réalisés au profit des départements en matière de protection sociale, notamment au titre de la dépendance, ont un caractère vertueux ou inflationniste en termes de dépenses.

M. Jacques Bichot a reconnu qu'en matière de dépendance, la période écoulée fait apparaître une augmentation forte des dépenses, mais qu'il serait injuste d'attribuer cette augmentation à un laxisme des départements. La hausse des dépenses est due en réalité à la montée en charge d'une prestation nouvelle dans un contexte de vieillissement généralisé de la population. Au total, les départements assurent une gestion aussi, voire plus, économe qu'un organisme de sécurité sociale classique.

Le choix de confier la gestion du risque dépendance aux départements ne signifie pas qu'il faille renoncer à l'inclure dans la protection sociale : une véritable assurance dépendance pourrait même être mise en place en mobilisant une partie des revenus des jeunes retraités.

M. Alain Vasselle a rappelé que les prestations d'assurance maladie sont principalement concentrées sur onze millions d'assurés, alors que cinquante millions d'autres personnes cotisent avec un faible retour en termes de prestations. Il a donc relevé le risque qu'il y aurait à faire apparaître un écart important entre les cotisations supportées et la consommation réelle de soins, dès lors qu'on mettrait fin au prélèvement à la source des cotisations sociales. Il a souligné qu'en laissant le salarié libre de reverser ou non ses cotisations, il est probable que de nombreuses personnes choisiront de ne pas payer tant qu'elles ne se sentiront pas concernées, ce qui serait contraire à la logique de mutualisation et de solidarité intergénérationnelles de l'assurance maladie.

M. Jacques Bichot a estimé que l'assurance maladie doit rester obligatoire afin de préserver la solidarité propre à la protection sociale. Toutefois, l'assurance maladie n'est pas une assurance ordinaire, puisque certains, comme les enfants, sont assurés gratuitement et que d'autres cotisent de façon identique, alors qu'ils consomment davantage. Il a d'ailleurs évoqué la possibilité d'appliquer une logique actuarielle au calcul des cotisations d'assurance maladie. Le choix d'une telle solution éviterait d'avoir à recourir à des mécanismes d'exonération de charges pour les jeunes afin de compenser un coût du travail trop élevé par rapport à leur productivité. Il a enfin rappelé qu'il est possible de distinguer une assurance obligatoire de base pour les soins les plus importants et les plus coûteux et une assurance facultative pour le reste.

Mercredi 30 mai 2007

- Présidence de M. Alain Vasselle, président -

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la législation fiscale à la Direction générale des impôts

La mission a poursuivi ses auditions sur l'évolution du périmètre de la protection sociale.

Elle a tout d'abord entendu Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la législation fiscale à la Direction générale des impôts.

Mme Marie-Christine Lepetit a précisé que la direction de la législation fiscale n'est pas directement impliquée dans la préparation des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale. Sa compétence porte sur les seuls impôts alors que, pour les prélèvements sociaux, la direction de la sécurité sociale est l'administration compétente. Néanmoins, elle a coprésidé le groupe de travail administratif ayant mené, au début de 2006, la réflexion sur un changement d'assiette des cotisations de sécurité sociale et elle participe également aux travaux en cours du ministère des finances sur la TVA sociale.

Puis Mme Marie-Christine Lepetit a présenté les deux questions essentielles qui, selon elle, se posent aujourd'hui en matière de recettes : l'existence de marges de manoeuvre en matière d'assiette des prélèvements obligatoires et le problème de la cohérence de l'affectation des recettes aux différentes catégories de dépenses.

La structure de nos prélèvements obligatoires est une question centrale, car il s'agit de savoir si l'on peut limiter les prélèvements pesant directement sur le travail en les remplaçant par des recettes assises sur une assiette plus large. Cette réforme a déjà été en partie mise en oeuvre avec la création de la CSG, qui a conduit à diminuer le taux des prélèvements sur les salaires et à asseoir les prélèvements sur une assiette plus large, comprenant notamment les revenus du capital. La plupart des points de CSG correspondent bien au remplacement de points de cotisations sociales, ce qui signifie que l'on a clairement choisi la voie de la fiscalisation des recettes de la sécurité sociale. Aussi bien la part des cotisations au sein de ces recettes est-elle revenue de 90 % il y a vingt-cinq ans à environ 60 % aujourd'hui.

Au cours de l'année 2006, plusieurs travaux ont été menés sur la substitution d'une nouvelle assiette aux cotisations patronales. De façon assez concordante et quelles qu'aient été les hypothèses retenues, les différentes études ont montré que cette substitution ne présentait pas autant d'avantages qu'on pouvait l'espérer. Il en a été ainsi aussi bien pour l'institution d'une cotisation sur la valeur ajoutée que pour la création d'une cotisation patronale généralisée ou l'instauration de la TVA sociale. Dans chaque cas, ont été examinés la dynamique potentielle de la recette, son impact économique à moyen et long terme, ainsi que ses conséquences pour les contribuables.

Globalement, il est ressorti de ces divers travaux qu'il n'existe pas, sur le long terme, de recette ayant une meilleure dynamique que les prélèvements sur les rémunérations. En outre, il est apparu dangereux de négliger les phénomènes d'ouverture de l'économie et de très grande concurrence fiscale à l'échelle européenne et mondiale. La mobilité du capital est une réalité, avec des phénomènes de fuite rapide des actifs dont il faut avoir conscience et pouvoir se protéger.

Sur un plan économique, le débat est resté ouvert et assez interrogatif. Les résultats mathématiques des différents modèles ont montré qu'à court terme, on pouvait attendre un léger progrès en termes d'emploi avec une création nette de 10 000 à 25 000 emplois. A plus long terme, ces effets paraissent bien moins nets ; en outre, on a constaté un impact non négligeable sur la croissance et l'inflation.

Ainsi, en matière de TVA sociale, il est sans doute nécessaire d'observer une très grande prudence sur les enchaînements inflationnistes, en tenant compte du fait que de nombreuses prestations et coûts publics sont indexés sur la hausse des prix. Néanmoins, la hausse récente de la TVA en Allemagne ne se traduit pas, pour l'instant, par un effet inflationniste, à l'inverse de ce qu'avaient prévu les économistes. Il est donc extrêmement difficile de prévoir ce qui pourrait se passer en France si l'on décidait d'augmenter la TVA. Il est également important d'ajouter qu'à la différence de l'économie française, l'économie allemande est essentiellement fondée sur les investissements et les exportations.

Mme Marie-Christine Lepetit a ensuite évoqué d'autres pistes possibles de réflexion en matière de prélèvements sociaux. La première concerne les niches sociales. En effet, dans un contexte où la dépense sociale reste très dynamique, il convient d'être extrêmement vigilant sur le dynamisme des recettes et donc de se montrer particulièrement critique sur les diverses exonérations d'assiette.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité savoir si le ministère des finances porte le même intérêt à la traque des niches fiscales, en rappelant que le déficit du budget de l'Etat est sensiblement supérieur à celui de la sécurité sociale.

Mme Marie-Christine Lepetit a convenu du parallélisme entre les deux débats, mais la dynamique particulière de la dépense sociale exige d'être très rigoureux sur les niches sociales. Diverses mesures d'améliorations sont envisageables. Ainsi, en matière de CSG, quelques éléments d'assiette peuvent encore être taxés et l'existence de quatre barèmes différents applicables aux revenus de remplacement, aux revenus d'activité et aux revenus de placement est parfois source d'inéquité. Les règles applicables à la CSG sont plus hétéroclites qu'un rapide examen ne pourrait le montrer à première vue. En outre, la prime pour l'emploi n'est aujourd'hui pas intégrée dans les calculs d'assiette et quelques effets de seuil sur les revenus des retraités mériteraient d'être corrigés.

Un espace de réflexion existe également sur les prélèvements dits comportementaux, c'est-à-dire sur les taxes applicables au tabac, à l'alcool et aux boissons sucrées et autres produits alimentaires. Même si un recours accru à ce mode de taxation ne peut résoudre les problèmes d'équilibre de la sécurité sociale et si leur mise en oeuvre technique est parfois complexe, il n'en demeure pas moins que des marges non négligeables existent sur ces prélèvements.

Puis Mme Marie-Christine Lepetit a fait valoir que, sur le problème de l'allocation des recettes aux dépenses, il y a plus de sécurité à disposer de plusieurs catégories de recettes que d'une seule. L'Etat et les collectivités territoriales disposent d'ailleurs de ressources suffisamment variées pour pouvoir supporter des variations de rendement. Pour la sécurité sociale, il semble préférable de ne pas avoir une seule dynamique de recettes, à savoir aujourd'hui les rémunérations, assiette des cotisations et, aussi en grande partie, de la CSG.

Le deuxième élément de réflexion est celui de la distinction entre dépenses contributives et assurantielles. Même si cette division est intellectuellement séduisante, sa mise en oeuvre pratique est difficile. Néanmoins, on constate de façon légitime la forte prédominance des cotisations sociales pour le financement des dépenses de retraite, d'assurance chômage et d'indemnités journalières.

Un autre aspect de la réflexion concerne le coût du travail. En effet, la plupart des économistes conviennent aujourd'hui de l'efficacité de la diminution du coût du travail pour améliorer l'emploi. A cet égard, les travaux de la Cour des comptes sur les allégements de charges sociales ont parfois été mal interprétés, car celle-ci a bien conclu à un effet positif sur l'emploi des allégements de charges sur les bas salaires. Aujourd'hui, il pourrait être intéressant d'ouvrir une discussion avec les partenaires sociaux pour réfléchir à l'opportunité d'une nouvelle baisse du coût du travail, en particulier sur les bas salaires.

Au total, il existe, malgré certaines contradictions apparentes, plusieurs possibilités d'aménagement des dépenses et des recettes qui permettraient de clarifier les relations entre le budget de l'Etat et la loi de financement de la sécurité sociale.

Enfin, Mme Marie-Christine Lepetit a souligné que son expérience de travail avec les différentes administrations chargées de la préparation des deux textes financiers est avant tout celle d'une étroite collaboration et d'un souci permanent de recherche d'une réelle cohérence, notamment sur les questions fiscales. Les difficultés mises en exergue ne tiennent pas non plus à l'existence de deux textes de loi, mais plutôt à des raisons politiques, car il est parfois commode d'avoir deux discours contradictoires sur certains sujets. En définitive, les prélèvements ont un seul impact économique et ne s'adressent qu'à un seul contribuable, ce qui rend impérative une vision unique des finances publiques.

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de M. Didier Tabuteau, directeur général de la fondation des Caisses d'épargne pour la solidarité

Puis la mission a procédé à l'audition de M. Didier Tabuteau, directeur général de la fondation des Caisses d'épargne pour la solidarité.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que M. Didier Tabuteau est conseiller d'Etat et a travaillé auprès de plusieurs ministres de la santé et de la protection sociale : M. Claude Evin, Mme Martine Aubry et M. Bernard Kouchner, dont il a été le directeur de cabinet. Depuis novembre 2003, il exerce les fonctions de directeur général de la fondation « Caisses d'épargne pour la solidarité » et de chargé de mission pour la filière « assurances » de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. Il a créé la chaire « Santé » de l'Institut d'études politiques de Paris et il est vice-président de la Société française de santé publique.

A titre liminaire, M. Didier Tabuteau a indiqué qu'il limiterait son propos à la santé et à l'assurance maladie, qui entrent dans son champ de compétences actuel. En réponse aux interrogations des rapporteurs sur l'organisation du système de protection sociale français, il a estimé qu'il existe aujourd'hui un décalage complet entre les fondements théoriques de la sécurité sociale élaborés en 1945 et les transformations très profondes qui l'ont affectée au cours de ces soixante dernières années. Il s'est constitué, en particulier, en matière d'assurance maladie, un fossé important entre le monde virtuel des institutions en place et le monde réel, qui repose sur un fonctionnement très différent.

Les mécanismes d'origine prenaient appui, jusque dans les années soixante-dix, sur une gestion par les partenaires sociaux disposant d'une autonomie effective, dans la mesure où il n'existait pas de problèmes de financement des dépenses de santé. Pendant cette période, le taux global de remboursement et de prise en charge de la dépense de maladie a crû de manière continue.

A partir de la fin des années soixante-dix et du début des années quatre-vingt, la légitimité de la démocratie sociale a été en pratique progressivement battue en brèche, sans que la question de la remise en cause éventuelle des institutions ne soit posée.

Cinq étapes peuvent être distinguées : la création de la CSG entre 1991 et 1995, d'abord pour le financement de la branche famille, puis pour celui de la branche maladie ; la transformation du débat sur les conventions médicales qui, de strictement contractuel, est devenu un débat de portée politique ; la mise en place de la réforme Juppé ; la création de la CMU ; enfin, l'institution, par la loi de 2004, de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam). Ainsi, par petites touches, la France est sortie en pratique du système instauré en 1945, tout en y restant sur le plan organique.

M. Didier Tabuteau a fait ensuite observer les divergences d'évolution entre les trois principales branches de la sécurité sociale, s'agissant du degré de maintien du paritarisme : celui-ci reste très présent dans la branche vieillesse, notamment avec les régimes complémentaires, alors qu'il a de fait disparu dans la branche famille, qui ne constitue plus qu'un instrument d'intervention aux mains de l'Etat placé au sein de la sécurité sociale ; l'assurance maladie se situe entre ces deux extrêmes.

Le débat réel porte aujourd'hui sur les modes de régulation. De ce point de vue, force est de constater que l'enveloppe institutionnelle n'a que peu d'effet et que la création des lois de financement de la sécurité sociale n'a pas véritablement remis en cause les facteurs de détermination de la dépense, notamment en matière de maladie. Au-delà d'un débat somme toute assez formel entre le Gouvernement et les assemblées au moment de la discussion de ce texte, chaque automne, la réalité du pouvoir reste entre les mains des patients et des professionnels de santé, qui continuent à déterminer seuls, en pratique, le niveau de la dépense, et donc du solde.

Il est indispensable, à son sens, de se tourner vers les modèles étrangers pour repérer ceux qui ont permis une approche plus satisfaisante de la régulation des dépenses de santé. A l'épreuve de cet examen, deux réponses apparaissent pertinentes : d'une part, la territorialisation, d'autre part, le partenariat avec les professions de santé, qui est un élément central du dispositif allemand, mais qui n'a jamais réussi à trouver sa place en France. Se contenter de vouloir retailler le « château de sable » de 1945 ne présente donc aucun sens.

Au-delà de la question des modes de régulation, l'autre défi à relever est celui de la mise en place d'une approche globale des besoins de financements sociaux, lesquels recouvrent la dépendance, les réponses à apporter à la pauvreté, l'effort à poursuivre en matière de handicap, la progression des dépenses de maladie au rythme d'un point de PIB supplémentaire par décennie, l'expansion des retraites, l'indemnisation persistante du chômage et, enfin, l'éducation.

Sur tous ces sujets, il apparaît aujourd'hui très difficile de disposer d'une approche d'ensemble fondée sur des projections intégrées permettant de définir le besoin global de financement à échéance de cinq ou dix ans. C'est pour cette raison que la chaire « Santé » de l'Institut d'études politiques de Paris vient de se doter d'outils de projection pour évaluer les effets à long terme des décisions prises en matière de financement.

C'est donc sous cet angle d'une vision intégrée des besoins de financements sociaux pris dans leur ensemble que doit être posée la question de l'articulation entre loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale. La conclusion à en tirer pour l'organisation des pouvoirs publics est double : cette organisation doit permettre une synthèse, mais les décisions finalement retenues doivent être le fruit d'arbitrages entre plusieurs instances distinctes présentant chacune leur demande. Cette nécessité d'un arbitrage découlant d'un dialogue préalable exclut la création d'une structure unique et il n'apparaît pas pertinent de mettre dans la même main, de ce point de vue, ce qui relève de la sphère budgétaire et ce qui relève du domaine social.

M. François Autain a demandé des précisions sur la proposition de territorialisation. Il a aussi souhaité savoir comment l'Allemagne était parvenue à un système de cogestion associant les médecins au financement de l'assurance maladie. Il s'est interrogé concomitamment sur l'incapacité des Français à suivre la même démarche.

M. André Lardeux s'est enquis de l'opinion de M. Didier Tabuteau sur la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale pour la dépendance, ainsi que sur la nature des financements dont elle pourrait bénéficier.

En réponse aux questions de M. François Autain, M. Didier Tabuteau s'est déclaré une nouvelle fois convaincu que la maîtrise des dépenses de santé ne pourra se faire que dans un cadre géographique assez restreint, au niveau régional, voire infra-régional. Ce n'est en effet qu'à ce niveau qu'il est possible de repérer les facteurs de dérapage de la dépense.

Bien évidemment, cette régulation régionale ou infra-régionale n'aura de sens que si une partie des dépenses est régionalisée. Tout en se déclarant partisan absolu de l'existence de prestations uniformes sur l'ensemble du territoire, il a estimé de ce point de vue que la responsabilisation des professionnels de santé et des patients doit reposer localement sur la mise en place d'objectifs de dépenses régionaux. Ces objectifs, fruit de discussions entre les partenaires sociaux, les professionnels de santé et les représentants des patients, devraient recevoir une sanction politique, par exemple sous la forme d'une validation par le conseil régional qui engagerait l'ensemble des cosignataires.

En réponse à Mme Marie-Thérèse Hermange, M. Didier Tabuteau a précisé qu'à ses yeux, la régionalisation devait s'appliquer également aux dépenses hospitalières et impliquerait une régionalisation concomitante d'une partie des cotisations maladie, sous réserve de la mise en place d'un mécanisme de péréquation entre les régions.

Il a cité en exemple le régime local d'Alsace-Moselle, dont le fonctionnement est proche des règles appliquées en Allemagne, qui présente un intéressant système d'équilibrage effectué à peu près en temps réel, fonctionnant de surcroît à la satisfaction générale de l'ensemble des bénéficiaires et des prestataires.

Revenant sur le modèle allemand, M. Didier Tabuteau a indiqué que les moindres difficultés rencontrées outre-Rhin dans la gestion de la branche maladie proviennent de l'absence d'opposition stérile entre gestionnaires et professionnels de santé. Il a rappelé qu'en France, la loi de 1928, qui se proposait d'étendre à l'ensemble du pays le régime alsacien-mosellan, n'avait pas été appliquée et que la charte de la médecine libérale, adoptée en réaction à la loi de 1930, avait, quant à elle, cristallisé une opposition tranchée entre des professionnels estimant qu'ils devaient en permanence défendre leur liberté et un système de financement perçu, par ces mêmes professionnels, comme aliénant. En Allemagne au contraire, le chancelier Bismark avait mis en place l'assurance maladie en s'appuyant sur les médecins considérés comme des partenaires.

Abordant ensuite les questions de dépendance, il a d'abord souligné le fait que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a eu pour premier mérite d'apporter des marges de financement nouvelles et, plus fondamentalement, qu'elle a permis de rapprocher dépendance et handicap. L'étape à laquelle il convient maintenant de réfléchir est celle d'une articulation, mais pas nécessairement d'une fusion, entre la prise en charge de la dépendance et la politique familiale. A l'avenir, en effet, les deux questions ne pourront pas être traitées indépendamment l'une de l'autre.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité que soient précisées les critiques portant sur la relative inefficacité des lois de financement de la sécurité sociale en matière de régulation des dépenses. Il a en particulier demandé l'opinion de M. Didier Tabuteau sur l'option d'une fusion entre la loi de financement et la loi de finances, sur les nouvelles règles de gouvernance instituées par la réforme de 2004 en matière d'assurance maladie, sur le rôle des partenaires sociaux dans la gestion des caisses et sur le recours aux franchises pour réguler les dépenses d'assurance maladie.

M. Didier Tabuteau a tout d'abord entendu écarter toute ambiguïté, en indiquant qu'il est un farouche partisan des lois de financement de la sécurité sociale. Pour autant, force est de constater que toute la phase préparatoire des discussions entre l'exécutif et le Parlement apparaît finalement comme un travail en trompe-l'oeil. Après son adoption, la loi de financement se révèle totalement déconnectée de la réalité, dans la mesure où elle ne constitue pas un instrument pertinent de régulation de la dépense. Seule, peut-être, l'action sur les dépenses hospitalières peut échapper à cette critique.

S'agissant de la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie, la réforme de 2004 constitue une nouvelle étape du processus, amorcé à partir des années soixante-dix, de dépossession progressive du pouvoir des partenaires sociaux. Il convient de rappeler, en effet, que les ordonnances de 1967 donnaient tout le pouvoir de négociation au président de la Cnam. Le régime mis en place en 2004 apparaît comme un système hybride, se situant au milieu du gué : le législateur n'est pas allé jusqu'à créer une agence dont la mission serait d'appliquer la politique du Gouvernement. M. Didier Tabuteau s'est déclaré en ce sens pour une évolution vers un mécanisme comprenant une agence nationale, à la condition toutefois que cette réforme soit combinée avec la territorialisation qu'il a précédemment évoquée, l'agence comprenant des démembrements sous forme de délégations régionales assurant le pilotage de l'assurance maladie.

Il a confirmé son souhait de mise en place d'objectifs de dépenses régionalisés, tout en reconnaissant qu'il ne dispose pas de modèle clé en main. L'idéal serait sans doute la création d'un organisme régional de concertation comprenant les partenaires sociaux, les fournisseurs de santé et les représentants des patients, l'accord réalisé au sein de cet organisme étant ensuite validé par une autorité politique qui pourrait être le conseil régional.

S'agissant des franchises, celles-ci ont deux vocations possibles :

- la première est d'assurer le financement de l'assurance maladie. La technique de la franchise peut alors se révéler efficace, mais présente l'inconvénient de casser la solidarité entre les bien portants et les malades, les premiers n'en subissant pas la charge, intégralement reportée sur les seconds. Par ailleurs, cette conception de la franchise part de l'idée qu'une partie des dépenses d'assurance maladie est le fruit d'un gaspillage imputable aux malades eux-mêmes, ce qui n'est pas économiquement démontré ;

- la seconde consiste à lui conférer un rôle de régulation en vue de réfréner la dépense. Il s'agit alors d'un instrument classique de la politique de maîtrise de la demande. Cette conception est critiquable, car l'effet de la régulation apparaît alors paradoxal : celle-ci ne pèse pas sur les catégories les plus aisées, qui sont les plus tentées de faire un usage de confort de la médecine ; en revanche, elle ferme l'accès aux soins pour les catégories les plus fragiles sur le plan économique et sur le plan sanitaire avec, pour corollaire, le risque d'apparition à terme de pathologies plus graves et donc plus coûteuses.

M. Gilbert Barbier a demandé que soit justifiée l'affirmation selon laquelle les dépenses de santé augmentent d'un point de PIB en moyenne tous les dix ans.

M. Didier Tabuteau a rappelé qu'une étude rétrospective sur les quarante dernières années révèle une progression des dépenses de santé d'en réalité 1,2 point de PIB tous les dix ans. La progression inéluctable de la part des dépenses de santé dans la richesse nationale ne signifie pas une hausse automatique des prélèvements obligatoires : il faudra opérer des choix.

Ainsi, si l'on constate qu'aujourd'hui, les trois quarts environ de la dépense consacrée à la santé sont socialisés, il faudra qu'au cours des quarante prochaines années trois des quatre points de PIB supplémentaires consacrés à ce secteur soient pris en charge par la collectivité. Mais il est également possible d'envisager une stabilisation de la prise en charge socialisée et un report intégral de la charge nouvelle sur le patient. En ce cas, il faut être bien conscient que l'on reviendra progressivement vers un taux de prise en charge par la société de 50 %, taux qui était celui en vigueur dans les années cinquante, au début de la sécurité sociale. Cette situation est tout à fait plausible si la hausse au cours des prochaines quarante années est supérieure aux quatre points envisagés et si, comme certains le pensent, la part de la richesse nationale consacrée à la santé atteint 25 % du PIB.

Toutefois, si l'on souhaite que les Français continuent d'adhérer aussi massivement qu'ils le font aujourd'hui à leur système de soins, il faudra maintenir un taux de prise en charge socialisée de la dépense de santé de l'ordre de 75 %.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a désiré savoir quelles sont les pistes privilégiées pour rester à ce niveau de prise en charge socialisée des dépenses de santé à hauteur de 75 %, compte tenu de leur taux de progression. Quelles sont les autres dépenses sur lesquelles il serait possible d'agir afin de ne pas provoquer, toutes choses égales par ailleurs, un relèvement des prélèvements obligatoires ?

M. Didier Tabuteau a décliné son expertise, l'estimant, en l'état, insuffisante. Toutefois, il sera difficile d'échapper, à son avis, à une hausse nette des prélèvements obligatoires pour financer le coût croissant des régimes sociaux. La dépense socialisée pourrait ainsi augmenter de deux à trois points de PIB, même en opérant parallèlement un gros travail de maîtrise des déterminants de cette dépense.

Evolution du périmètre de la protection sociale - Audition de Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre de la Cour des comptes, et de M. Michel Braunstein, conseiller maître

Puis la mission a procédé à l'audition de Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre de la Cour des comptes, et de M. Michel Braunstein, conseiller maître.

A titre liminaire, Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre de la Cour des comptes, a indiqué que la chambre qu'elle préside a conduit, conjointement avec la 1re chambre, compétente pour les lois de règlement, une réflexion sur l'éventuelle fusion des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Les propos qu'elle peut tenir sur ce sujet sont donc le fruit d'un travail en commun qui ne constitue cependant pas une prise de position de la Cour des comptes dans son ensemble.

Interrogée sur les moyens permettant d'assurer une meilleure approche globale des comptes publics, Mme Rolande Ruellan a estimé qu'une vision d'ensemble est d'ores et déjà possible ex-post à travers la comptabilité nationale. Celle-ci a en effet pour objet de rassembler par catégories de dépenses, ou par sous-ensembles d'acteurs, selon des nomenclatures uniques, les dépenses enregistrées dans les comptes de l'Etat, des collectivités territoriales et des administrations de sécurité sociale.

La notion de protection sociale fait, dans ce cadre, l'objet d'une définition européenne et d'un système statistique harmonisé, le système européen de statistiques de la protection sociale (Sespros), piloté par Eurostat.

En revanche, il n'existe pas d'approche globale des finances publiques ex-ante se traduisant dans un document voté par le Parlement. Cependant, des progrès ont été réalisés dans ce sens avec la mise en place de la conférence nationale des finances publiques, ainsi qu'avec la faculté dorénavant offerte d'organiser un débat parlementaire dans chaque assemblée, commun à l'ensemble des finances publiques, en vue duquel la Cour doit élaborer en juin de chaque année un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques. Si tous ces exercices sont réalisés avec sérieux et réalisme, ils peuvent constituer un apport considérable.

Mme Rolande Ruellan a cependant jugé que si des avancées importantes ont été réalisées, notamment avec le débat d'orientation de juin au Parlement, on peut regretter que celui-ci ne se soit pas encore complètement emparé des instruments qui lui étaient offerts.

Ainsi est-il indispensable que le travail de définition des objectifs pour les dépenses et les déficits soit effectué de manière réaliste. La présentation pluriannuelle prévue en annexe à la loi de financement de la sécurité sociale n'a de sens que si elle est sérieusement étayée et accompagnée de mesures de maîtrise des dépenses. A défaut, elle ne peut apparaître que comme incantatoire et ne peut être respectée. Or, force est de constater qu'actuellement, ces annexes demeurent trop peu explicites sur la justification des hypothèses servant à leur élaboration.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que la commission des affaires sociales a dénoncé, lors des débats de la fin 2006, les insuffisances qui caractérisent ces annexes et notamment la pauvreté des justifications apportées aux hypothèses retenues. Il a demandé que la Cour l'appuie dans sa démarche en vue d'obtenir plus de précisions.

M. Michel Braunstein, conseiller maître, a estimé que les problèmes de projection se concentrent essentiellement sur l'Ondam, les autres données (taux de progression du PIB, de la masse salariale dans le secteur privé et inflation) étant généralement bien établies. Depuis sa création en 1996, l'Ondam n'a en effet été respecté qu'en 2005 et on sait, d'ores et déjà, qu'il y aura un nouveau dérapage en 2006, risquant d'être plus important en 2007 au vu des statistiques des quatre premiers mois, alors même que celles-ci ne prennent pas en compte les hausses des honoraires des médecins et des infirmières accordées depuis le début de l'année.

Mme Rolande Ruellan a évoqué à ce sujet le déclenchement de la procédure d'alerte par le comité d'alerte sur le respect de l'Ondam, lequel a estimé que le dépassement de l'objectif des seuls soins de ville serait de l'ordre de 2 milliards d'euros en 2007.

Abordant ensuite la question de la proposition de fusion du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, Mme Rolande Ruellan a indiqué que c'est sur ce point précis qu'a été menée la réflexion commune des 1re et 6e chambres de la Cour des comptes.

Certes, le rapport de MM. Alain Lambert et Didier Migaud, à l'origine de cette proposition, se fonde sur plusieurs constats dont certains peuvent être partagés. Il est vrai, en particulier, que les impôts et taxes affectés (ITAF) revêtent une importance croissante, représentant 28 % des ressources du régime général en 2007.

Cependant, les deux chambres de la Cour ne partagent pas le postulat des auteurs du rapport selon lequel la fusion des deux lois assurerait une vision consolidée des finances publiques et des prélèvements obligatoires et garantirait une plus grande maîtrise des dépenses et des déficits sociaux. Les chambres relèvent, en effet, les contradictions internes de cette proposition qui opère une confusion entre budgétisation et fiscalisation de certaines branches, alors que l'une n'est en aucun cas le corollaire obligé de l'autre. Par ailleurs, la budgétisation aurait pour résultat de porter le budget de l'Etat à plus du double de son montant actuel, l'essentiel de la majoration correspondant en outre à des dépenses évaluatives. Ce procédé n'aurait aucune portée en termes de maîtrise des dépenses, sauf si l'on transformait les dépenses à caractère social de nature évaluative en dépenses limitatives, ce qui est impossible.

On a plutôt eu le sentiment, ces dernières années, que l'on allait vers une plus grande distinction entre les deux textes, au travers notamment de reclassements de dépenses qui ne manquent pas de pertinence.

Les chambres font par ailleurs observer que la plage de recouvrement des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale est aujourd'hui faible et a même tendance à s'amoindrir : elle se limite à 16,4 milliards d'euros en 2006, soit 4 % des 391 milliards d'euros de recettes des régimes de base.

La complexité dénoncée par MM. Alain Lambert et Didier Migaud est certes avérée, mais elle est d'abord due à des décisions politiques. De ce point de vue, les chambres n'ont pas vu en quoi ces décisions auraient été différentes s'il n'y avait eu qu'une seule loi. La maîtrise des dépenses de sécurité sociale ne dépend pas en effet des supports législatifs dès lors que l'on exclut l'idée que les prestations cessent d'être servies quand les objectifs de dépenses sont atteints. Elle suppose des choix politiques et des solutions juridiques et techniques indifférentes au fait qu'il y ait deux lois distinctes ou qu'elles soient regroupées dans une seule.

En conséquence, la 1re et la 6e chambres de la Cour se sont prononcées pour le maintien d'une loi de financement de la sécurité sociale distincte, mais ont estimé que cette loi devrait à l'avenir respecter cinq conditions : prévoir des mesures pour respecter les objectifs ; ne pas créer de dépense nouvelle non financée ; ne pas sous-évaluer l'impact des mesures nouvelles, l'exemple de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) apparaissant emblématique à cet égard ; ne pas compter sur des économies hypothétiques à l'évaluation très volontariste ; et, enfin, ne pas abuser de mesures de financement à effet ponctuel qui ne constituent que des « fusils à un coup ».

En conclusion, la nature et la portée des deux lois sont différentes, mais la loi organique de 2005 a renforcé la portée des lois de financement de la sécurité sociale en permettant au Parlement de voter l'équilibre des branches et d'en suivre l'exécution pluriannuelle.

Dans le prolongement de cette réforme, les deux chambres suggèrent que le législateur fixe et respecte des règles cohérentes et stables de répartition des champs de compétences entre les deux lois. En particulier, dès lors que le budget de l'Etat n'est pas concerné, il serait normal que les mesures touchant la sécurité sociale relèvent de la seule loi de financement de la sécurité sociale. Or, en l'état, la loi organique précise que, seules, les recettes entièrement affectées à la sécurité sociale relèvent de la compétence exclusive des lois de financement. En conséquence, il suffit qu'une faible fraction d'un impôt continue d'être affectée au budget de l'Etat pour que les mesures concernant cet impôt figurent indifféremment en loi de finances ou en loi de financement. Tel est le cas en particulier des droits sur les tabacs, qui sont aujourd'hui affectés à hauteur de 95 % à la sécurité sociale, et dont il serait dès lors plus logique qu'ils relèvent de la compétence des lois de financement de la sécurité sociale.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que la commission des affaires sociales a protesté contre cette situation à plusieurs reprises, mais n'a jusqu'à présent pas obtenu gain de cause.

Mme Rolande Ruellan a indiqué que les chambres se sont également prononcées pour la mise en place de procédures visant à empêcher des incohérences entre les deux lois tout au long de la procédure de vote.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a abondé en ce sens, soulignant l'asymétrie actuellement existante : si la commission des finances a un rapporteur pour avis sur les lois de financement de la sécurité sociale, apte à repérer les amendements susceptibles d'interférer avec le budget, il n'existe pas à l'inverse de rapporteur de la commission des affaires sociales présent en permanence sur la totalité de la discussion du projet de loi de finances.

Mme Rolande Ruellan a confirmé que les difficultés de coordination entre les deux textes sont plus liées aux hommes qu'à un éventuel défaut de travail en commun des administrations concernées. Il semble en particulier que la direction de la sécurité sociale et la direction de la législation fiscale soient parvenues à un très bon niveau de concertation et c'est donc plus en aval, notamment lors de la discussion parlementaire, que les difficultés apparaissent, reflétant en réalité des rapports de force de nature politique.

Réitérant son scepticisme à l'égard de solutions mettant en avant de nouvelles procédures pour régler les problèmes qui ne peuvent l'être que par une réelle volonté de maîtrise de la dépense, elle a exprimé son inquiétude sur les dangers potentiels de la nouvelle architecture gouvernementale en train de se mettre en place. Sortir les questions de financement de la compétence des ministères sociaux leur conférera peut-être un caractère exclusivement dépensier, au risque de les déresponsabiliser.

Achevant la présentation des propositions des chambres pour accroître la clarification des relations entre le budget et les lois de financement, Mme Rolande Ruellan a souligné le rôle de la certification des comptes de l'Etat et de ceux du régime général, qui devrait permettre de faire clairement apparaître la dette de l'Etat à l'égard des organismes de protection sociale.

Interrogée sur la notion de droits acquis par le travail, Mme Rolande Ruellan a rappelé que certains droits à prestations restent, dans le système français, liés à la qualité de travailleur : les retraites et, plus nettement encore, les accidents du travail - maladies professionnelles. Tel n'est pas le cas en revanche pour les prestations maladie et famille qui ont un caractère universel. Il est regrettable de ce point de vue que l'on ne soit pas allé jusqu'au bout du processus de fiscalisation de l'assurance maladie dans un souci de cohérence, après la création de la CMU.

A y regarder de plus près, les retraites ne constituent pas non plus un pur produit d'assurance. En effet, la nature contributive de la retraite connaît beaucoup d'aménagements : les pensions sont plus que proportionnelles à l'effort contributif, à la faveur même des règles de calcul ou de majorations diverses. Mais la tendance depuis quinze ans est bien de rendre les retraites plus strictement contributives, renvoyant ainsi à des mécanismes d'assistance sous condition de ressources (le minimum vieillesse) le soin de compléter les pensions les plus faibles.

Mme Rolande Ruellan a ensuite souligné la difficulté rencontrée pour finir de faire basculer le financement des branches famille et maladie dans le champ de la fiscalité. La partie du financement de ces branches toujours assise sur les salaires est en effet constituée de cotisations patronales que l'on ne sait pas, en l'état actuel des choses, convertir en impôt. Cette conversion, qui suppose la réintégration des cotisations supprimées dans le salaire direct afin de compenser la hausse de CSG imputée aux salariés, est sans doute jouable pour les grandes entreprises, mais elle paraît plus difficile à mettre en oeuvre dans les petites entreprises du fait de l'absence de syndicats et de contrôle.

Répondant à la question de savoir si la fiscalisation progressive des recettes des organismes de protection sociale répond à un mouvement inéluctable, Mme Rolande Ruellan a estimé que la fiscalisation des recettes est souhaitable, notamment pour la branche famille, tout en rappelant que ce mouvement ne doit pas être confondu avec une budgétisation. La budgétisation de la branche famille ne serait d'ailleurs pas de l'intérêt de l'Etat, même si l'excédent structurel de cette branche est appelé à réapparaître.

En réalité, la complexité dont parlent MM. Alain Lambert et Didier Migaud vient d'une fiscalisation rampante. L'essentiel de ce point de vue est d'aboutir à une clarification, ce qui a commencé à être fait avec l'instauration d'un panier fiscal destiné à compenser les allégements généraux de cotisations à la place de l'ancien système confus de subventions par l'Etat. On voit bien que ce mouvement de substitution d'impôt affecté aux subventions de l'Etat est contradictoire avec l'idée de fusion et que c'est bien dans cette voie qu'il faut continuer d'avancer.

A ce sujet, Mme Rolande Ruellan a indiqué que le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale de 2006, qui paraîtra en septembre 2007, comprendra une insertion sur le « mitage » de l'assiette des cotisations. Cette insertion fera apparaître que le régime général perd plusieurs milliards d'euros de cotisations chaque année du simple fait des diverses exonérations non compensées. Or, il n'existe pas de bilan de l'avantage coût/efficacité de ces exonérations.

Abordant ensuite la question des moyens de couverture des dépenses à caractère social au cours des prochaines années, compte tenu d'une évolution très dynamique, elle a confirmé le constat selon lequel on anticipe plutôt une augmentation des dépenses de santé et surtout de retraite supérieure à celle du PIB. Les projets de réforme élaborés par des experts ont toujours recommandé de partager les efforts entre professions de santé et assurés, entre cotisants et retraités actuels et futurs.

Pour la retraite, les choix de principe ont déjà été réalisés dans la réforme de 2003 : l'équilibre financier doit se faire par l'effet combiné des trois leviers que sont l'âge de la retraite, en jouant sur la durée nécessaire pour avoir une retraite à temps complet, le taux de cotisation retraite et le taux de remplacement. Les travaux récents du Conseil d'orientation des retraites (Cor) montrent qu'une action limitée à l'âge de départ à la retraite obligerait à reporter celui-ci de trois ans ; agir uniquement sur le taux de cotisation imposerait une majoration de quatre points ; enfin, l'utilisation du seul levier du taux de remplacement contraindrait à réduire celui-ci de vingt points. Dans ces conditions, il conviendra d'agir sur les trois leviers à la fois pour répartir l'effort et le rendre plus supportable. En outre, toute modification des règles devra comprendre un objectif d'égalité de traitement entre cotisants, c'est-à-dire s'attaquer à la réforme des régimes spéciaux.

En ce qui concerne l'assurance maladie, l'avenir de son financement passe par un accroissement de la productivité du système de distribution des soins, qu'il s'agisse de la répartition géographique des équipements hospitaliers, de la réorganisation interne de l'hôpital, de la mise en place d'une médecine de ville mieux organisée ou de la redistribution des compétences entre les médecins et les paramédicaux. Du côté des assurés, il faudra se préoccuper de la répartition du reste à charge. 60 % des dépenses d'assurance maladie sont aujourd'hui causées par les patients en affections de longue durée (ALD), proportion qui ne cesse d'augmenter.

Cette question des ALD est aujourd'hui prioritaire, mais la Haute Autorité de santé, chargée notamment de revoir les protocoles d'admission aux ALD, ne semble pas vouloir se saisir de ce sujet et reste pour l'instant en « stand by ».

M. Michel Braunstein a ajouté sur ce point le constat selon lequel il existe aujourd'hui une répartition incohérente des ALD sur l'ensemble du territoire. Certaines régions présentent des taux deux fois plus élevés que d'autres, sans justification épidémiologique convaincante.

En concluant sur la question de la régulation des dépenses de santé, Mme Rolande Ruellan a rappelé que l'un des principaux gisements d'économies réside également dans le mode de gouvernance de l'hôpital. Il s'agit d'une conviction profonde de la Cour des comptes, qui aura l'occasion d'en reparler dans un proche avenir.

Interrogée ensuite sur l'existence d'un espace d'autonomie pour la protection sociale au sein des finances publiques, Mme Rolande Ruellan a répondu par l'affirmative, soulignant une nouvelle fois la nécessité de distinguer protection sociale et budget de l'Etat.

La protection sociale a un périmètre plus large que la sécurité sociale. Schématiquement, elle intègre aussi l'aide et l'assistance sociales, ainsi que la protection complémentaire, obligatoire et facultative. La comptabilité nationale rassemble toutes ces composantes qui interagissent les unes sur les autres : quand la sécurité sociale réduit sa protection, elle reporte des dépenses sur les deux autres composantes. Pendant des décennies, cependant, les progrès de la sécurité sociale avaient conduit à diminuer les dépenses d'aide sociale et aussi de minima sociaux. La tendance apparaît aujourd'hui inversée : quand l'Unedic réduit le champ du chômage indemnisé, un report de charges s'effectue sur la prestation d'assistance financée par l'Etat ou sur le RMI financé par les départements.

Ce constat de l'existence de vases communicants ne plaide pour autant pas pour une fusion de l'ensemble dans un seul budget, ne serait-ce que parce que la protection complémentaire, même obligatoire, ne relève pas de la loi de financement de la sécurité sociale et que l'aide sociale est de la compétence des collectivités territoriales. Mais il est incontestablement nécessaire d'avoir un pilotage commun de l'ensemble des composantes de la protection sociale.

Puis Mme Rolande Ruellan a considéré qu'il n'est pas opérationnel de fonder la distinction entre protection sociale et budget de l'Etat sur la distinction de base entre contributif/assurantiel, d'une part, et dépenses relevant d'une pure logique de solidarité, de l'autre. La distinction solidarité/assurance ne permet pas de fonder des frontières logiques. Le vrai critère est celui du caractère général de la protection : est-elle liée à la résidence en France ou à une condition d'activité professionnelle minimale ?

Il reste cependant nécessaire de procéder à une réflexion logique, indépendante dans un premier temps des aspects de financement, afin de mieux définir la nature des prestations. Par exemple, l'allocation de parent isolé (API), prestation familiale aux termes de la loi, est depuis quelques années financée par le budget de l'Etat, alors qu'elle est strictement de même nature que le RMI. La question est donc posée de savoir si elle doit subsister en tant que prestation autonome.

Ainsi, une fiscalisation plus claire et plus simple est nécessaire pour certaines branches ou prestations, mais pas la budgétisation ni la fongibilité, qui entraîneraient une gestion de la sécurité sociale sous l'autorité de l'Etat, ce qui est contraire à toutes les évolutions actuelles. Le rôle de celui-ci n'est pas d'être gestionnaire des prestations.

Envisageant d'autres pistes pour aller dans le sens d'une simplification et d'une plus grande transparence des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, Mme Rolande Ruellan a plaidé pour un financement de la sécurité sociale à partir de recettes propres bénéficiant d'un dynamisme suffisant pour couvrir l'évolution des dépenses. L'idée de ce point de vue serait que la sécurité sociale soit financée par un nombre limité de prélèvements dont il suffirait d'ajuster les taux pour garantir l'équilibre du système.

Si l'on doit considérer comme un progrès l'augmentation des taxes affectées au détriment des subventions, force est toutefois de constater que les ITAF ne donnent pas une garantie totale de couverture de ses besoins pour la sécurité sociale. Le caractère aléatoire de l'évolution de la taxe sur les tabacs au cours des prochaines années montre bien que cette ressource n'est sans doute pas complètement satisfaisante, pour s'en tenir à ce seul exemple.

Interrogée sur les propositions de la Cour en vue d'améliorer la coordination de la préparation des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale, Mme Rolande Ruellan a indiqué que la Cour n'a pas travaillé sur ce sujet, dans la mesure où une mission Igas/IGF avait déjà produit un rapport en 2005 et où une nouvelle mission de ces deux inspections a repris la question au début 2007.

En ce qui concerne l'utilisation des instruments de bonne gouvernance mis en place par la loi organique de 2005, elle a estimé que ce texte a apporté des améliorations notables mais que, jusqu'à présent, les annexes sont insuffisantes pour expliquer les hypothèses retenues pour le calcul de l'Ondam. D'ailleurs, la simple observation des données récentes montre que ces hypothèses ne sont pas réalistes, sauf mesures drastiques d'économies. Les outils existent, mais ce sont les hypothèses retenues et l'absence de décision pour les respecter qui posent un problème.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que cette analyse est partagée par la commission des affaires sociales, qui avait fait part de ses réserves au Gouvernement, lors de l'examen de la dernière loi de financement.

Interrogée enfin sur l'idée de généraliser le principe de l'Ondam et du mécanisme du comité d'alerte mis en oeuvre pour la branche maladie, Mme Rolande Ruellan a souligné le fait que l'Ondam est construit avec des dépenses d'assurance maladie et d'accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) qui peuvent en principe faire l'objet de mesures d'encadrement ou dont les volumes doivent pouvoir être contenus. Il a donc théoriquement un caractère opérationnel et, à l'origine, il pouvait en cas de dérapage déboucher sur des sanctions à l'égard des médecins. Mais tel n'a jamais été le cas : l'Ondam n'est en effet une enveloppe fermée ni à l'égard des assurés sociaux qui ont des droits, ni à l'égard des médecins, sur lesquels il était illusoire d'envisager de récupérer la totalité des dépassements. Le comité d'alerte participe de la logique de l'Ondam : en cas de dérapage des dépenses, des actions sont possibles en cours d'année, comme tel fut le cas à l'automne 2006.

Pour les autres branches en revanche, il ne peut y avoir d'équivalent de l'Ondam, car il n'y a pas de réglage infra-annuel possible, sauf sur les dépenses d'action sociale et encore, dans la seule branche famille. Un comité d'alerte serait sans doute utile, mais uniquement pour mettre en évidence une insuffisance de recettes et la nécessité de préparer des mesures d'ajustement dont l'effet, en tout état de cause, ne pourrait être immédiat.