Loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs ( Journal officiel du 22 août 2007).

Ce projet de loi , déposé sur le Bureau du Sénat, l' urgence étant déclarée, tend à garantir un service minimum aux usagers des services publics de transport. À cette fin, il propose, d'une part, des mesures destinées à prévenir les conflits dans ce secteur et introduit, d'autre part, des dispositions relatives à l'organisation du service en cas de grève ou de perturbation prévisible de trafic.

Le projet de loi, tout en préservant la validité des accords de prévention des conflits déjà mis en oeuvre, prévoit l'ouverture d'une négociation obligatoire dans les entreprises de transport devant aboutir, avant le 1 er janvier 2008, à la signature d'un accord-cadre permettant de limiter les risques de grève et de fixer la procédure de prévention des conflits. Par ailleurs, le projet de loi interdit la pratique des « préavis glissants » et rappelle le principe du non-paiement des jours de grève. En cas de conflit, le projet de loi impose aux salariés dont la présence détermine directement l'offre de service d'informer préalablement l'entreprise de leur intention de participer à un mouvement de grève, sous peine de sanctions, et prévoit qu'au-delà de huit jours de grève une consultation peut être organisée à la demande de l'employeur ou de toute organisation syndicale représentative.

Pour ce qui concerne l'organisation du service en cas de grève ou d'autre perturbation prévisible du trafic, le projet de loi définit les conditions dans lesquelles l'autorité organisatrice de transport fixe les priorités de desserte, notamment celles correspondant à un besoin essentiel de la population en prenant en compte non seulement le respect du droit de grève, mais également celui d'autres droits constitutionnellement protégés tels que le droit d'accès aux services publics, la liberté d'aller et de venir, la liberté du commerce et de l'industrie et la liberté du travail. En fonction de ces critères, chaque entreprise doit élaborer un plan de transport adapté et un plan d'information des usagers et négocie des accords de prévisibilité applicables en cas de grève ou d'autre perturbation prévisible du trafic.

Le projet de loi prévoit enfin la possibilité d'un remboursement total ou partiel des titres de transport aux usagers par les entreprises de transport.

Première lecture.

Au cours de la discussion générale en première lecture, le Sénat a successivement entendu M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission spéciale, M. Charles Revet, président de la commission spéciale, puis MM. Philippe Arnaud, Alain Gournac, Aymeri de Montesquiou, Philippe Dominati, Michel Billout, Yves Krattinger, Charles Biwer, Hugues Portelli, Gilbert Barbier, Mme Nicole Bricq, MM. Philippe Nogrix, Christian Cambon, Mme Gisèle Printz, MM. Hubert Haenel, Jean Desessard, Pierre Hérisson et Roland Ries.

Le Sénat a tout d'abord examiné la motion déposée et présentée par Mme Annie David et les membres du groupe CRC tendant à opposer l' exception d'irrecevabilité , fondée sur les atteintes portées au droit de grève résultant de l'alourdissement de la procédure découlant de l'allongement du délai de préavis, de la mise en cause du principe de l'exercice collectif du droit de grève et des menaces de sanctions disciplinaires à l'encontre des salariés créées par la procédure de déclaration individuelle préalable de grève et enfin de la violation du principe d'égalité résultant de l'instauration de priorités de desserte. Cette motion, ayant reçu un avis défavorable de la commission spéciale et du Gouvernement, n'a pas été adoptée.

De même, le Sénat a repoussé la motion présentée par Mme Christiane Demontès et les membres du groupe socialiste et défendue par M. Claude Domeizel tendant à opposer la question préalable , au motif que le projet de loi restreint l'exercice du droit de grève lequel reste « la dernière possibilité offerte aux salariés après de multiples tentatives de dialogue, de se faire entendre, de voir leurs préoccupations prises en compte » et qu'il limite les possibilités de dialogue social tout en remettant en cause le rôle des organisations syndicales et en risquant d'opposer les salariés les uns aux autres et de susciter une confrontation entre usagers et salariés.

Lors de l' examen des articles sont intervenus MM. Jacques Gillot, Nicolas Alfonsi, Jean-Luc Mélenchon, Bruno Retailleau, Josselin de Rohan, Robert Bret, Guy Fischer, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Annie David, Brigitte Gonthier-Maurin, Évelyne Didier, MM. Michel Teston, Michel Mercier, René Beaumont, Mmes Isabelle Debré, Adeline Gousseau, M. Laurent Béteille, Mmes Bariza Khiari, Bernadette Dupont, MM. Michel Houel, François Gerbaud, Christian Cointat et Pierre Laffitte.

Les principales modifications ont concerné les articles présentés ci-dessous.

À l' article 1 er (Champ d'application de la loi et définition de l'entreprise de transport et de l'autorité organisatrice de transport), le Sénat, sur la proposition de M. Hugues Portelli et plusieurs de ses collègues, a fait mention des principes constitutionnels pouvant être mis en oeuvre grâce aux services publics de transport terrestre régulier de personnes à vocation non touristique, à savoir, la liberté d'aller et de venir, la liberté d'accès aux services publics notamment sanitaires, sociaux et d'enseignement, la liberté de travail et la liberté de commerce et d'industrie. 1 ( * )

À l' article 2 (Accord-cadre de prévention des conflits dans les entreprises de transport), il a été précisé, sur la proposition de la commission spéciale, que :

- la négociation ouverte avant le dépôt d'un préavis ne concernait que la direction et les seules organisations syndicales représentatives qui envisagent le dépôt d'un préavis de grève (sagesse du Gouvernement) ;

- les négociations de branche devaient aboutir avant le 1 er janvier 2008 à la signature d'un accord-cadre de prévention des conflits pour les petites entreprises qui n'ont pas de structures de négociation ;

-  les accords-cadres déjà signés s'appliquaient jusqu'au 1 er janvier 2009 (sagesse du Gouvernement).

À l' article 4 (Plan de transport adapté et plan d'information des usagers), le Sénat a tout d'abord rejeté par scrutin public n° 114 demandé par le groupe CRC et par le groupe socialiste, les amendements de suppression présentés par M. Yves Krattinger et les membres du groupe socialiste, d'une part, et par M. Michel Billout et les membres du groupe CRC, d'autre part (avis défavorables de la commission et du Gouvernement). Sur la proposition de la commission spéciale, le Sénat a précisé la notion de « perturbation prévisible » comme étant celle résultant de grèves, d'incidents techniques, d'aléas climatiques ou de tout événement porté à la connaissance de l'entreprise de transport. Il a introduit la possibilité de prévoir des niveaux de service en rapport avec l'importance de la perturbation, a complété la liste des droits préservés en faisant référence aux transports scolaires et à l'accès au service public de l'enseignement, en particulier les jours d'examens, a prévu l'information du préfet aux différents stades du processus et a permis à celui-ci, en cas de carence de l'autorité organisatrice de transport (AOT), de définir le service prioritaire ou d'approuver les propositions de l'entreprise organisatrice de transports. Ces propositions de la commission spéciale ont été sous-amendées par M. Charles Revet afin de préciser les conditions d'organisation de la consultation des usagers, par M. Pierre Hérisson afin de prévoir que sont concernés les déplacements quotidiens de la population, par M. Hugues Portelli afin de souligner que la liberté d'accès aux services publics constitue en elle-même une liberté à préserver et par le Gouvernement afin de préciser que l'autorité organisatrice de transport fixe les fréquences et les plages horaires pour chaque niveau de transport et de spécifier que le niveau minimal de service correspond à la couverture des besoins essentiels de la population.

À l' article 5 (Accord sur la prévisibilité du service en cas de grève devant intervenir avant le 1 er janvier 2008 et obligation pour les salariés d'informer leur hiérarchie de leur intention de suivre la grève), le Sénat, sur la proposition de la commission spéciale, a prévu d'étendre la portée de cet accord aux cas de perturbations de service, a indiqué qu'en cas de grève le personnel appelé à intervenir était non gréviste et a supprimé l'obligation de faire figurer la déclaration d'intention de grève dans l'accord collectif de prévisibilité. Par scrutin public n° 115 demandé par le groupe socialiste, le Sénat a repoussé les amendements présentés par M. Yves Krattinger et les membres du groupe socialiste et par M. Michel Billout et les membres du groupe CRC tendant à supprimer l'obligation faite aux salariés de déclarer quarante-huit heures à l'avance leur intention de faire grève (avis défavorables de la commission et du Gouvernement).

À l' article 6 (Consultation des salariés sur la poursuite de la grève au-delà de huit jours), le Sénat, après avoir repoussé par scrutin public n° 116 demandé par le groupe socialiste les amendements de suppression présentés par M. Yves Krattinger et les membres du groupe socialiste et par M. Michel Billout et les membres du groupe CRC (avis défavorables de la commission et du Gouvernement), a adopté l'amendement de la commission spéciale donnant aux parties au conflit la possibilité, dès le début de celui-ci, de désigner un médiateur chargé de trouver un règlement amiable et lui donnant la possibilité, au-delà de huit jours de grève, de décider de l'organisation d'une consultation sur la poursuite du mouvement au même titre que l'employeur ou une organisation syndicale représentative (sagesse du Gouvernement).

À l' article 7 (Droit de l'usager du service public de transport terrestre à une information précise et fiable sur le service assuré), le Sénat, sur la proposition de la commission spéciale, a prévu que l'autorité organisatrice de transport serait également informée de toute perturbation ou risque de perturbation dans le fonctionnement des transports et a clairement établi une distinction entre les perturbations prévisibles et celles qui ne le sont pas.

Sur la proposition de M. Hubert Haenel et de plusieurs de ses collègues, le Sénat a introduit un article 7 bis concernant l'établissement par l'entreprise de transport d'un bilan annuel détaillé de l'exécution du plan de transport adapté et du plan d'information des usagers et de sa communication à l'AOT.

Le Sénat a retenu une nouvelle rédaction de l' article 8 (Indemnisation des usagers) proposée par la commission spéciale sous-amendée par M. Pierre Hérisson et plusieurs de ses collègues, d'une part, et par M. Charles Revet, d'autre part, tendant à fixer le principe du remboursement directement dans la loi sans recourir à un décret en Conseil d'État, à conditionner le remboursement du titre de transport au défaut d'exécution du plan adapté de transport ou du plan d'information des usagers, à le rendre obligatoire sauf en cas de force majeure pour l'entreprise de transport en précisant les modalités de ce remboursement : prolongation, échange ou remboursement du titre de transport non utilisé par l'usager correspondant strictement à la période d'utilisation dont il a été privé.

À l' article 9 (Rappel du principe du non-paiement des jours de grève), par scrutin public n° 117 demandé par le groupe socialiste, le Sénat a repoussé les amendements de suppression présentés par M. Yves Krattinger et les membres du groupe socialiste et par M. Michel Billout et les membres du groupe CRC (avis défavorables de la commission et du Gouvernement). Puis, par scrutin public n° 118 demandé par le groupe socialiste, le Sénat a adopté l'amendement de la commission spéciale disposant que les versements effectués par les entreprises aux salariés visant à compenser directement ou indirectement la retenue sur traitement ou salaire correspondant aux jours de grève étaient réputés sans cause, excluant ainsi la possibilité que la solution du conflit permette le règlement de tout ou partie des jours de grève.

Sur la proposition de la commission spéciale, le Sénat a introduit un article 9 bis prévoyant le dépôt devant le Parlement, avant le 1 er octobre 2008, d'un rapport faisant le bilan d'application de la loi et permettant, notamment, d'examiner l'opportunité de l'extension des dispositions prévues aux autres modes de transport (avis défavorable du Gouvernement portant sur cette possibilité d'extension).

Le Sénat a par ailleurs apporté des modifications rédactionnelles sur l'intitulé du titre III consacré à l'organisation de la continuité du service public en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève ou de coordination sur l'article 5.

Le Sénat a adopté sans le modifier l' article 3, concernant l'interdiction de la pratique des préavis glissants et prévoyant que lorsqu'un préavis de grève a été déposé un nouveau préavis ne pourra être déposé par la ou les mêmes organisations syndicales pour les mêmes motifs, avant l'échéance du préavis en cours et avant la mise en oeuvre de la procédure de négociation. Sur cet article, le Sénat a repoussé par scrutin public n° 113 demandé par le groupe socialiste les amendements de suppression présentés par M. Yves Krattinger et les membres du groupe socialiste et par M. Michel Billout et les membres du groupe CRC (avis défavorables de la commission et du Gouvernement).

Après avoir entendu les explications de vote de MM. Alain Gournac, Pierre Laffitte, Michel Billout, Jean-Pierre Godefroy, Jean Desessard, Jean-Luc Mélenchon, Philippe Nogrix, de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et de M. Charles Revet, le Sénat , par scrutin public n° 119 demandé par le groupe socialiste, a adopté le présent projet de loi ainsi modifié qui été transmis pour examen à l'Assemblée nationale.

En première lecture, l' Assemblée nationale a retenu les principales modifications introduites au Sénat et a décidé de fixer au 1 er janvier 2008, au lieu du 1 er janvier 2009, le délai dans lequel la RATP et la SNCF devront mettre en conformité avec la loi leurs procédures actuelles de prévention des conflits ; d'inclure les plans de travaux dans la liste des perturbations prévisibles de trafic ; d'informer les collectivités territoriales sur les plans de transport adapté et d'information des usagers ; de préciser le point de départ du délai de quarante-huit heures dans lequel doit intervenir la déclaration d'intention de faire grève ; d'établir le principe de gratuité de l'information des usagers ; et de prévoir de dresser, sous forme de bilan annuel, la liste des investissements requis pour permettre la mise en oeuvre des plans de transport adapté.

Commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire, qui s'est réunie au Sénat le 2 août 2007, est parvenue à l' élaboration d'un texte commun sur les treize articles de ce projet de loi restant en discussion.

Elle a adopté dans le texte de l'Assemblée nationale l' article 1 er (définition du champ d'application de la loi), l' article 3 (condition de dépôt de préavis préalables à la cession concertée du travail), l' article 5 (mesures tendant à assurer la prévisibilité du service) et l' article 9 (régime de réduction de la rémunération des salariés participant à une grève).

À l' article 6 , la commission mixte paritaire a rétabli la disposition, introduite par le Sénat, prévoyant que l'initiative de la consultation pouvant intervenir au-delà de huit jours de grève appartient à l'employeur, à une organisation syndicale représentative ou au médiateur, et non au seul employeur.

À l' article 12 , introduit par l'Assemblée nationale, concernant le rapport sur l'évolution du dialogue social dans les autres modes de transports publics de voyageurs, la commission mixte paritaire a ajouté que le rapport prévu proposerait « les mesures législatives nécessaires à la mise en oeuvre d'un dispositif de continuité dans les autres modes de transports publics de voyageurs ».

La CMP a apporté des modifications rédactionnelles aux autres dispositions restant en discussion : à l' article 2 (négociation collective en vue d'organiser une procédure de prévention des conflits), à l' article 4 (dessertes prioritaires, plan de transport adapté et plan d'information des usagers), à l' article 7 (droit des usagers à l'information), à l' article 7 bis (bilan annuel des plans de transport adapté et des plans d'information des usagers), à l' article 8 (indemnisation des usagers), à l' article 10 (rapport d'évaluation sur l'application de la loi) et à l' article 11 (critères sociaux et environnementaux de qualité de service).

Conseil constitutionnel.

Saisi les 6 et 7 août 2007, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs, le Conseil constitutionnel a déclaré non contraires à la Constitution les articles 2 à 6 et 9 de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs sans aucune réserve d'interprétation. Le Conseil n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la Constitution.

Travaux préparatoires

Sénat (première lecture)

Projet de loi (n° 363, 2006-2007)

Rapport de Mme Catherine Procaccia, au nom de la commission spéciale (n° 385, 2006-2007)

Discussion les 17 à 19 juillet 2007 et adoption, après déclaration d'urgence, le 19 juillet 2007 (T.A. n° 112, 2006-2007)

Amendements déposés 87

Amendements adoptés 26

Amendements retenus par l'A.N. 23

(Scrutins n°s 113 à 119)

Assemblée nationale (première lecture)

Projet de loi adopté par le Sénat (n° 101)

Rapport de M. Jacques Kossowski , au nom de la commission spéciale (n° 107)

Discussion les 30 et 31 juillet et 1 er août 2007 et adoption le 1 er août 2007 (T.A. n° 24)

Sénat (commission mixte paritaire)

Projet de loi modifié par l'Assemblée nationale (n° 430, 2006-2007)

Rapport de Mme Catherine Procaccia, au nom de la commission mixte paritaire (n° 431, 2006-2007)

Discussion et adoption le 2 août 2007 (T.A. n° 132, 2006-2007)

Assemblée nationale (commission mixte paritaire)

Rapport de M. Jacques Kossowski, au nom de la commission mixte paritaire (n° 123)

Discussion et adoption le 2 août 2007 (T.A. n° 25)

Conseil constitutionnel

Décision n° 2007-556 DC du 16 août 2007 ( Journal officiel du 22 août 2007).

Table de concordance

Numérotation articles en cours de navette

Numérotation articles texte définitif

1 er à 7

Idem

7 bis

8

8

9

9

10

10

11

11

12

12

13