Loi n° 2008-125 du 13 février 2008 autorisant la ratification du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l' Union européenne , le traité instituant la Communauté européenne et certains actes connexes (Journal officiel du 14 février 2008 ).

Adopté par l' Assemblée nationale le 7 février 2008, le projet de loi autorisant la ratification du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne, le traité instituant la Communauté européenne et certains actes connexes a été examiné et adopté en termes identiques par le Sénat le même jour.

Après l'approbation, par le Parlement réuni en Congrès le 4 février 2008, de la loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution, le projet de loi tend à autoriser la ratification du traité de Lisbonne du 13 décembre 2007. Ce traité confère la personnalité juridique à l'Union européenne. Sans intégrer le texte de la Charte des droits fondamentaux de l'Union, il la rend juridiquement contraignante. Il établit pour la première fois une répartition des compétences entre l'Union et les Etats membres. Il substitue une présidence stable, exercée à plein-temps, à la présidence semestrielle tournante instaurée par le traité de Rome ainsi que le système dit de « la double majorité » à celui de la pondération des droits de vote entre les Etats. Il prévoit la réduction d'un tiers, à partir de 2014, de l'effectif de la Commission européenne et la désignation par le Conseil européen d'un Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité ayant rang de vice-président de la Commission européenne. Afin de combler le déficit démocratique pesant sur l'Union, le traité, d'une part, généralise la procédure de codécision alignant les pouvoirs législatifs et budgétaires du Parlement européen sur ceux du Conseil des ministres, le dernier mot en matière budgétaire revenant au Parlement, d'autre part, instaure un droit d'initiative citoyen et, enfin, dispose que si un tiers des parlements nationaux estime que la Commission européenne n'a pas respecté le principe de subsidiarité, l'examen du texte incriminé devra être repris.

Dans la discussion générale au Sénat , se sont exprimés, à la suite de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes :

- M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, pour se féliciter que le traité de Lisbonne mette « fin à une période de trouble et d'immobilité en Europe » et pour rendre hommage « au Président de la République de s'être employé avec ardeur et conviction, dès son élection, à rechercher les moyens de sortir de l'impasse et, tout en tenant compte du vote des Français, à donner un nouveau départ à l'Europe » ainsi qu'au Chancelier d'Allemagne d'avoir su convaincre nos partenaires d'aboutir à un règlement acceptable par tous ;

- M. Jean François-Poncet, rapporteur de la commission des affaires étrangères, pour déclarer qu'avec le traité de Rome de 1957 qui avait créé une union douanière entre les six pays du marché commun, l'Acte unique européen de 1986 qui avait créé un espace économique sans frontières et le traité de Maastricht de 1992 qui avait fait naître la monnaie unique et lancé la coopération européenne en matière de politique étrangère, de défense, de justice et de police, le traité de Lisbonne méritait « d'être considéré comme le quatrième texte fondateur » car adaptant « les institutions de l'Union au choc de l'élargissement ». Le rapporteur a estimé que la ratification par voie parlementaire se justifiait par le fait que le traité de Lisbonne ne reprenait que la partie la plus consensuelle du traité constitutionnel rejeté par référendum, relative aux institutions, et qu'il s'agissait d'un traité réformateur, modifiant les textes existants. Il a enfin observé que le traité, dont il a rappelé la teneur, dotait « l'Union des moyens qui permettent à une Europe élargie de fonctionner et de progresser », sauf à achopper sur les rivalités internes, le succès tenant à la fidélité à la devise « unis dans la diversité » ;

- M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne, pour estimer que le traité de Lisbonne répondait à la double question de la mise en oeuvre d'une nouvelle dimension politique de l'Union et de la préservation de l'efficacité du processus de décision dans une Europe élargie, constituant une « avancée considérable vers une Europe plus démocratique ». Il a observé que l'Union, ainsi redessinée, n'était « pas vraiment fédérale, pas vraiment confédérale », mais « un système mixte évolutif dont les équilibres dépendront largement des personnalités qui seront choisies pour les différentes fonctions ». Il a souligné « la place considérable qu'auront désormais les parlements dans la vie de l'Union », le Parlement européen par son nouveau pouvoir de décision comme les parlements nationaux par leur rôle de surveillance du respect du principe de subsidiarité, avec pour effet d'introduire « un relais entre l'Europe et les citoyens » et de « recentrer l'action de l'Union sur ses vraies missions ». Désormais acteurs à part entière de la construction européenne, il a estimé que les parlements devraient se doter des « instruments nécessaires » à l'examen des questions européennes.

Dans la suite de la discussion générale, sont également intervenus MM. Jacques Blanc, Robert Bret, Bernard Seillier, Michel Mercier, Bruno Retailleau, Pierre Mauroy, Jean Bizet et Nicolas Alfonsi ainsi que Mme Marie-Christine Blandin.

Puis le Sénat a successivement rejeté par les scrutins publics n os 82 et 83, tous deux demandés par la commission des affaires étrangères :

- une motion tendant à opposer l' exception d'irrecevabilité , présentée par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et le groupe CRC, arguant de la similitude entre le traité de Lisbonne et le traité constitutionnel précédemment repoussé par voie référendaire ;

- et une motion tendant à opposer la question préalable présentée par M. Jean-Luc Mélenchon, au motif que la ratification par voie parlementaire constituait un démenti à ce que le peuple avait tranché par référendum et que le contenu du traité ne favoriserait pas nécessairement l'émergence d'une Europe plus démocratique.

Après avoir repoussé par le scrutin public n° 84 demandé par le groupe socialiste le seul amendement déposé sur l'article unique par MM. Michel Charasse et Jean-Luc Mélenchon ayant pour objet de préciser que « tout acte européen contraire aux décisions du Conseil constitutionnel des 19 novembre 2004 et 20 décembre 2007 est nul et de nul effet à l'égard de la France », le Sénat a entendu les explications de vote sur l'ensemble de MM. Jean Desessard et Pierre-Yves Collombat avant d' adopter sans modification, par le scrutin public n° 85 demandé par la commission des affaires étrangères, le projet de loi , le rendant définitif .