Par ordonnance du 17 septembre 1943 se crée à Alger une Assemblée consultative provisoire chargée de préparer les institutions de la France après la Libération. Les membres de cette assemblée ne sont pas élus mais choisis. Parmi eux et pour la première fois, une femme : Marthe Simard. Française du Canada, elle est désignée par les représentants des mouvements de la résistance extérieure. On sait très peu de choses sur elle. Nommée le 20 octobre 1943, elle intervient dans un débat de politique étrangère le 15 mai 1944, puis repart, probablement vers le Canada.

Une autre femme a également été choisie pour participer aux débats de l'Assemblée consultative provisoire : Lucie Aubrac, représentant les mouvements de la résistance intérieure ; mais réfugiée à Londres, elle ne peut se rendre à Alger.

"Une fois l'ennemi chassé du territoire, tous les hommes et toutes les femmes de chez nous éliront l'Assemblée nationale qui décidera souverainement des destinées du pays". Cette déclaration du général de Gaulle date du 23 juin 1942. Maurice Schumann sur les ondes de Radio-Londres lui fait écho le 16 décembre 1943 :"Si, dans la dernière guerre, la femme a donné des centaines d'héroïnes à la liberté, pour la première fois, dans cette guerre, elle lui a donné des centaines de milliers de combattantes... La délivrance de la patrie entraînera l'émancipation de la Française."

Maurice Schumann (à droite) en 1945En cette fin d'année 1943, au sein de l'Assemblée consultative provisoire, se met en place une commission de la législation et de la réforme de l'État chargée d'examiner les propositions d'organisation des élections à la future Assemblée constituante.

L'économiste François de Menthon vient présenter celles du Comité français de libération, et le vote des femmes en fait partie. Le président de la commission, Paul Giacobbi, intervient aussitôt : "pensez-vous qu'il soit très sage dans une période aussi troublée que celle que nous allons traverser de nous lancer ex abrupto dans l'aventure que constitue le suffrage des femmes ?"

Les arguments sont identiques à ceux invoqués en 1922 et 1932. Cependant la commission retient à l'unanimité moins une voix le principe du vote des femmes, en différant son application au retour des prisonniers dans leurs foyers. Quant aux élections locales, la commission admet l'éligibilité des femmes en la différant également, mais leur refuse le droit de vote...