Colomba et son frère OrsoC'est certainement avec Carmen la plus connue des nouvelles de Mérimée. Elle est née de ce voyage en Corse, des rencontres faites dans l'île : à Sartène, Mérimée est l'hôte d'un homme qui le même jour a tué d'un coup double deux de ses ennemis et à Fozzano, il séjourne chez Colomba Bartoli, "qui excelle dans la fabrication des cartouches et qui s'entend même fort bien à les envoyer aux personnes qui ont eu le malheur de lui déplaire". Son inspiration, Mérimée la trouve également dans les nombreux livres qu'il a parcourus avant son voyage afin de s'imprégner de l'âme corse.

 

Rassemblant faits réels, légendes et coutumes corses, il brosse le portrait d'une jeune fille toute entière tournée vers le passé, attachée aux traditions ancestrales, passionnée, farouche et attachante : "avec Colomba, le génie corse en personne apparaît et ne vous quitte plus" (Sainte-Beuve).

Le 7 juin, le récit est terminé, mais Mérimée souhaite le soumettre pour avis à son amie Valentine Delessert. Celle-ci n'apprécie pas la fin : une espèce de guet-apens organisé par Colomba pour obliger la jeune Anglaise, témoin de la vengeance, à épouser son frère. Ce mélange de "vues intéressées" et de "sentiments nobles" lui semble incompréhensible. Mérimée modifie son manuscrit "laissant dans le vague les desseins de Colomba... J'ai outré dans la scène de la fin la passion de la vendetta".

Publiée le 1er juillet 1840 dans la Revue des Deux-Mondes, la nouvelle rencontre un succès immédiat. "La Colomba de Mérimée est un chef d'oeuvre qui a réuni tous les suffrages, écrit Sainte-Beuve. On n'a parlé que de cela pendant quinze jours en tous les lieux. Je ne connais rien de lui de si beau, de si parfait, de si fin."