Message de Georges Pompidou au Parlement le 3 avril 1973 (extrait)

Il ne m'appartient pas, mesdames et messieurs, de définir devant vous les réformes que nous proposera le gouvernement. Il en est une cependant que je dois évoquer, car elle touche directement ma fonction. Je veux parler de la durée du mandat présidentiel. Hostile à la coïncidence des élections législatives et présidentielles que le droit de dissolution rend d'ailleurs illusoire, je n'en crois pas moins depuis longtemps que le septennat n'est pas adapté à nos institutions nouvelles, et ma propre expérience m'a confirmé dans cette idée. Il va de soi toutefois que je ne pourrais envisager sa réduction, à compter de l'élection de 1976, et par les voies de l'article 89 de la Constitution, que si un accord suffisant était conclu entre les membres des deux Assemblées pour que le projet de loi ne soit pas encombré et du même coup condamné par des propositions annexes, si tentantes qu'elles puissent apparaître à certains. Dans ce cas, tout serait remis en question et ne pourrait être repris éventuellement et le moment venu que par une autre voie, alors que la coopération du gouvernement et du parlement, telle que je viens de la souhaiter, devrait sur un tel sujet trouver à bref délai l'occasion de se manifester de façon éclatante.

Exposé des motifs de la loi constitutionnelle portant modification de l'article 6 de la Constitution

C'est, on le sait, pour des raisons purement circonstancielles que le mandat du président de la République a été fixé à sept ans, il y a exactement cette année un siècle. Toutefois, cette règle est devenue une tradition de la IIIe et de la IVe République, la durée même de ce mandat permettant au président de la République d'être un élément de permanence et de stabilité à l'écart des luttes politiques.

Lors de la préparation de la Constitution de la Ve République, et même à l'occasion du référendum du 28 octobre 1962, l'on n'a pas jugé utile de soulever un problème qui pouvait sembler accessoire eu égard aux grands changements institutionnels intervenus, dont l'objet était justement d'assurer la permanence de l'Etat en renforçant la fonction présidentielle. Au cours des deux campagnes présidentielles, et en dernier lieu au mois de juin 1969, les candidats à une fonction dont le titulaire est doté désormais de larges pouvoirs ont été tout naturellement amenés à définir devant le peuple les grands objectifs d'une politique.

Compatible avec la conception que l'on pouvait avoir du rôle du Chef de l'Etat sous les régimes précédents, ayant aidé aussi à la mise en place et à l'affermissement des institutions nouvelles, la règle du septennat ne correspond plus au rôle que le président de la République joue dans la définition des orientations générales de la politique nationale.

Les événements et leur évolution doivent permettre aux Français de se prononcer sur ces orientations à intervalles plus fréquents. Aussi est-il souhaitable de ramener le mandat présidentiel à l'avenir à cinq ans, sans pour autant lier la date des élections à l'Assemblée nationale, ce qui remettrait en cause l'esprit même des institutions et l'équilibre des pouvoirs publics.