M. CLÉMENT -

En 1800, Napoléon crée des représentants directs de l'Etat dans les départements, les « préfets » ; il aurait dit : « Je veux que de ce jour date le bonheur des Français » (Sourires) Aujourd'hui, nous tournons le dos à cette vision.

Ce texte, après le vote au Parlement, a donné lieu à une vaste consultation nationale, associant élus, citoyens, associations. Ce débat n'aurait pas intéressé les Français ? Les assises ont montré que les Français savent que la décentralisation offre une chance de réforme de l'Etat et d'amélioration des services publics.

Certes, cela a un coût, et certains craignent une hausse des impôts locaux. Aussi faut-il transférer des impôts dynamiques correspondant aux compétences transférées : par exemple, les départements chargés de la politique sociale pourraient recevoir une part de CSG. Mais surtout pas de hausse fiscale : la décentralisation doit entraîner des économies et donner à l'Etat la possibilité de se recentrer sur ses compétences.

Le nouvel article 72 de la Constitution clarifie les nouvelles répartitions des compétences, autour d'une subsidiarité qui n'est pas celle de l'Union européenne mais qui s'inscrit dans un Etat unitaire : c'est un principe dynamique, du haut vers le bas, qui appelle une nouvelle distribution des moyens. Mais, les moyens en personnels doivent évidemment être transférés, pour éviter les compétences croisées. Ces transferts devront se faire dans la concertation, et garantir la neutralité de la fonction publique.

Cette révision n'est cependant qu'une première étape ; l'Etat central doit évoluer, comme le notait Michel Crozier dès 1992, faire preuve d'initiative et d'imagination en préservant la solidarité.

Les Français sont attachés à la décentralisation. Le groupe UMP de l'Assemblée Nationale soutiendra le Gouvernement avec enthousiasme dans la poursuite d'une réforme que les Français appellent de leurs voeux. (Vifs applaudissements)

Mme ROYAL -

(Applaudissements) Nous sommes là à cause d'un renoncement : celui du chef de l'Etat qui a renoncé au référendum.

PLUSIEURS VOIX -

Eh oui !

Mme ROYAL -

Pourquoi ? De quoi le gouvernement a-t-il eu peur ? A l'Assemblée Nationale, nous nous sommes d'abord réjouis de voir la droite nous rejoindre, mais nous sommes finalement déçus et inquiets. Rien de concret sur le terrain... sinon la réforme du mode de scrutin ! Vous avez rendu service à l'UMP ; pourquoi n'avoir pas plutôt choisi de rendre service à la France ? (Applaudissements)

M. CLÉMENT -

Quel niveau ! Et le PS ?

Mme ROYAL -

Proximité ? Quid de la présence des services publics sur le terrain, à l'école notamment ? Consultation ? Qui avez-vous consulté avant d'annoncer le transfert des ATOS ? Où est la discussion de fond sur leur rôle ? Péréquation ? Parlons-en ! Vous avez affaibli la DSU ! Clarté ? Nous ne savons toujours pas quels seront les transferts de compétences ! A Rouen, tout y est passé, (Applaudissements et exclamations) plus une couche d'expérimentation et un zeste de dérogation et c'est le grand bazar, comme l'a dit M. Debré ! L'exemple de la santé scolaire, c'est la pagaille ! Et encore le financement par les régions des équipements hospitaliers : quelles inégalités à venir entre les territoires ! (Applaudissements ; exclamations ; interruptions) Les malades devront-ils se déplacer ? Et encore : les routes nationales, décentralisées pour faire plaisir à certains !

M. ADNOT -

Ce n'est pas digne du Congrès ! C'est un discours de préau !

Mme ROYAL -

Une chose est claire : dans ce grand bazar, tout le monde s'occupe de tout du moment que l'Etat réduit ses dépenses ! (Applaudissements) Mais qu'adviendra-t-il des impôts locaux ?

N'êtes-vous pas en train d'instaurer l'insécurité territoriale ? (Exclamations) Nous demandions des transferts évolutifs et un rattrapage : pas de réponse, sinon une vague référence à la péréquation et à l'autonomie fiscale -ce qui veut dire moins de pouvoirs pour les plus pauvres des collectivités ! Quid de la solidarité entre elles ? Cela s'appelle tout simplement la République ! (Applaudissements ; exclamations)

M. ADNOT -

On a vu depuis 1981 !

Mme ROYAL -

Vous voulez transférer la TIPP : n'avez-vous pas entendu le Président de la République à Johannesburg, qui s'est engagé à lutter contre l'effet de serre et à réduire la consommation des énergies fossiles ? (Exclamations)

M. CLÉMENT -

Quel vent ! On va vous taxer comme éolienne !

Mme ROYAL -

Le groupe socialiste vous dit, monsieur le Premier ministre : ressaisissez-vous ! (Rires et exclamations) Retrouvez cette belle idée solidaire de la décentralisation et nous serons à vos côtés ; mais vous avez fait le choix de l'idéologie. Les socialistes attachés à la République ne pourront vous suivre ! (Applaudissements prolongés)

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