Cyber-débat avec Alain Lambert, Sénateur de l'Orne

Didier : Que pensez-vous des dispositions prises par Lionel Jospin en matière fiscale ?

Baisser les impôts sans baisser les dépenses, mais au contraire en les augmentant porte un nom : la démagogie, et entraîne une conséquence directe de l'accroissement de la dette. Lionel Jospin nous joue un remake de la gestion Rocard 10 ans après en pire.

Sophie : Que représente la dette publique par Français ?

Environ 90.000 francs par Français, soit plus de trois années d'un RMISTE ou une année de travail pour une personne qui gagne 7500 francs par mois. La dette publique est la dette de tous les Français, elle s'ajoute à leurs propres emprunts. Ceux qu'ils ont souscrits pour leur maison ou leur voiture.

Greg : Lionel Jospin ne tente il pas de profiter d'un effet d'annonce ?

Il s'agit d'une opération de communication puisque le montant total de la baisse des impôts annoncée sera immédiatement emprunté par l'État.

Olivier : Quel est le rôle de la commission des finances au Sénat. Prenez-vous concrètement des décisions ?

Le rôle de la Commission : nous expliquons au Sénat les textes financiers qui lui sont proposés et essayons de voter une législation plus stable, plus claire que celle de l'Assemblée nationale et nous contrôlons le Gouvernement. L'épisode burlesque de la cagnotte est né d'un contrôle du Sénat.

Zizou : Très honoré de pouvoir discuter avec vous M. Lambert. Intervenez-vous dans les décisions de la Banque de France lors de l'établissement des taux d'intérêts ? Ou avez vous plutôt un rôle consultatif ?

La Banque de France est indépendante depuis 1993 et le Parlement comme le Gouvernement n'ont aucune influence sur ses décisions.

Emma : Faut-il vraiment s'inquiéter pour nos retraites? Je pense que l'on essaie de nous faire peur pour nous obliger à travailler plus !

Sur les retraites, le problème est gravissime même s'il ne se posera qu'en 2005. Les mesures à prendre sont difficiles : allonger la durée de la vie active, augmenter les cotisations et réduire les pensions : ce ne sont pas des mesures populaires, mais c'est à ce prix qu'on peut sauver le régime de retraite des Français.

Solange : Combien de fonctionnaires dans notre beau pays de France ?

5 millions de personnes ont un statut public en France, mais l'État ne sait toujours pas avec précision combien il emploie de salariés.

Bertrand : qui est champion pour les impôts, Juppé ou Jospin ?

Jospin a augmenté les impôts de 400 milliards en deux ans et demi. Juppé de 150 milliards en 2 ans. Je rappelle que Lionel Jospin avait promis de réduire les impôts de 120 milliards en trois ans. Mais depuis 1997 nous attendons toujours.

Philippe : La Grande-Bretagne vient de ravir la 4è place de puissance mondiale à la France. Qu'en pensez-vous ?

Cela dépend du critère de classement. Mais il est vrai que la liberté économique en vigueur en Grande-Bretagne rend plus performant ce pays.

Philippe : Dans une récente interview, vous exigez de la part du Gouvernement la vérité sur les impôts et les dépenses. Où en êtes-vous ? Pensez-vous aboutir ?

Je dialogue avec les ministres Sautter et Parly. J'ai déjà obtenu plus de transparence de la part de Bercy. Mais si je n'obtiens pas d'ici la fin du mois des informations que j'ai demandées, la commission des finances du Sénat se transformera en commission d'enquête qui fera déposer les ministres sous serment.

Julie : Que pensez vous du procès en " ringardisation " fait au Sénat?

C'est un procès caricatural, sans lien réel avec la réalité. Le travail de fond accompli par le Sénat est remarquable, chacun en convient, mais la difficulté consiste à le faire savoir. Je rappelle, par exemple, que c'est notre commission qui a révélé la première la cagnotte fiscale.

Olivier : Pourquoi un remake de Rocard ? Pensez vous que les conjonctures économique de 1989 et de l'an 2000 soient différentes ?

Dans les deux cas c'est l'été de la croissance et les deux gouvernements : celui de Rocard comme de Jospin en consomment les fruits sans réduire la dette et sans préparer l'avenir. Je rappelle qu'après Rocard, il y a eu l'effondrement économique de 1992.

Nicolas : vous semblez agacé par la "cagnotte". Que pensez-vous de l'annonce de son montant par M. Sautter? S'agit-il d'une manœuvre politique ?

Le mot "cagnotte" est mal choisi puisque notre déficit reste important : plus de 200 milliards. Contrairement à ce qu'a affirmé le Premier ministre, il va constituer un trou dans la caisse France en empruntant pour financer des baisses d'impôts.

Job : Envisagez-vous à l'avenir de consulter le citoyen par le biais de forums électroniques ?

C'est une excellente idée. En ayant l'honnêteté de reconnaître que les internautes ne sont pas le reflet exact de la Nation et que nous devrons pondérer leur point de vue.

Anne : Bonjour M. Lambert, j'aimerais savoir combien coûte le Sénat a chaque Français par an et combien gagnez-vous ?

Le sénat coûte 28 francs par an pour chaque Français, soit 1 heure de travail payée au SMIC ou un paquet de cigarettes et demi. Chaque parlementaire perçoit 35.000 francs par mois environ. Le Sénat assure les frais de secrétariat du sénateur à hauteur de 30.000 francs par mois.

Simon : Quelles ont été les principales raisons invoquées justifiant le rejet par le Sénat du projet de loi organique visant à augmenter le nombre de sièges de sénateurs. Il semblait pourtant que ce projet ouvrait la voie à une réforme tenant compte des évolutions démographiques dans notre pays !

Ce n'est pas une question financière. Encore que... Réduire les dépenses publiques appellent à ne pas créer des sièges de sénateurs supplémentaires. Les variations démographiques peuvent être prises en compte à nombre de sénateur constant.

Pipo : Vous êtes maire, on dit que le Sénat représente les mairies. J'ai une petite maison, je paie beaucoup plus d'impôts locaux que d'impôts sur le revenu. Ce n'est pas normal. Que comptez-vous faire?

Vous payez davantage de TVA, de CSG, et de taxe sur l'essence. Mais vous n'en connaissez pas le montant. Si vous êtes salarié, sur 10 francs payés par votre employeur, vous ne recevrez que 6 francs. Il y a urgence à alléger les charges sur le travail. Croyez-moi, les impôts locaux ne sont pas les plus lourds.

Simon : Je vois que les débats sont très marqués par cette fameuse cagnotte... Il est très dommage que peu de gens n'aient pris la peine de préciser que pour qu'il y ait cagnotte, il faut qu'existe un excédent budgétaire. Bref, l'État n'est pas plus riche, il est seulement moins pauvre !

Cela ne suffit pas pour retrouver un équilibre budgétaire. CQFD : nous dépensons trop.

Job : Sur quel sujet, par exemple, ces consultations électroniques?

Les consultations électroniques pourraient aider à prendre la température sur les questions de société.

Laurent : L'idéal avec la cagnotte était de baisser les dettes de l'État, les français s’y intéressent-ils ?

Les questions financières sont mal connues des Français. Il est urgent de leur expliquer que le drame de la France est le montant des dépenses publiques : la preuve, même en accablant les Français d'impôts, le déficit subsiste et la dette s'accroît.

Nicolas : vous cumulez les responsabilités politiques (Sénateur-maire d'Alençon), professionnelles, familiales, associatives (cyber-ducs d'Alençon). N'est-ce pas là un cumul excessif ?

Toutes ces responsabilités m'ont été confiées par les électeurs. Faut-il leur supprimer leur liberté de choix ?

Greg : la croissance ne va-t-elle pas entraîner de nouveaux excédents qui vont compenser cette "manne" de Jospin ?

Il faut réduire rapidement le déficit pour réduire la dette et alors les impôts pourront baisser.

Job : Six commissions parlementaires : est-ce trop ou pas assez au regard du volume du travail législatif ? Êtes-vous favorable à la proposition de Laurent Fabius visant à la création de commissions supplémentaires ?

Je pense que le nombre actuel est suffisant. Il faut simplement que l'exécutif en France apprenne à respecter le Parlement parce que c'est la démocratie.

Henri : L'Internet est-il selon vous un moyen de rétablir le contact entre élus et électeurs ? Est-ce un outil de démocratie ?

Oui, mais ça n'est pas le seul. Il faut alterner entre tous les moyens de communication, y compris la rencontre directe sur le terrain.

Parma : Votre vision de la cyber-démocratie est-elle partagée par un grand nombre de vos collègues ?

Le sénat est au top en matière d'Internet. Mais la démocratie c'est la parole à tous les Français et ils ne sont pas tous internautes aujourd'hui.

Fernand : Les élus sont-ils assez présents sur le terrain, en dépit des lourdeurs du calendrier parlementaire ?

La session unique se révèle une fausse bonne idée. La session parlementaire ne devrait pas dépasser 6 mois pour laisser le temps au contact sur le terrain.

Porchia : Votre vision de l'utilisation des fruits de la croissance passerait par quelles mesures concrètes ?

1/ réduction des déficits à 170 milliards, 2/ réduction des charges sur les bas salaires, 3/ baisse des impôts sur le revenu. Seulement quand les deux premières mesures seront effectives.

Larusso : votre opinion sur l'action du président Chirac en matière de promotion des nouvelles technologies ?

Il est bon que le Président d'un grand pays délivre lui-même des messages de portée historique et faire de la France le champion des nouvelles technologies. C'est un devoir national.

Louis : c'est presque fini pour vous M. le sénateur. Merci beaucoup du temps que vous avez pris. C'était très intéressant. Cette expérience est à poursuivre. Peut on vous écrire par mail ?

Je réponds personnellement à tous les mails qui me sont adressés : a.lambert@senat.fr.

Monsieur Lambert merci , le mot de la fin?

Bonne fin de journée à tous. Un bonjour de Bruxelles. C'est une expérience à rééditer.