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N° 300

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 28 mars 1996.

PROJET DE LOI

ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE,

portant modification de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945
relative à l
'enfance délinquante,

TRANSMIS PAR

M. LE PREMIER MINISTRE

À

M. LE PRÉSIDENT DU SÉNAT

(Renvoyé à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

L'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, après déclaration d'urgence, le projet de loi dont la teneur suit :

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10 è législ.) : 2573, 2655 et TA . 512.

Délinquance et criminalité.

Article premier.

L'article 5 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est ainsi modifié :

1 ° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsqu'il saisira ledit juge des enfants ou ledit président par requête, il pourra requérir la comparution à délai rapproché du mineur en application de l'article 8-2. » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Le procureur de la République pourra également donner instruction à un officier ou un agent de police judiciaire de notifier au mineur contre lequel il existe des charges suffisantes d'avoir commis un délit une convocation à comparaître devant le juge des enfants qui en sera immédiatement avisé, aux fins d'application de l'article 8-1. Cette convocation qui vaudra citation à personne entraînera l'application des délais prévus à l'article 552 du code de procédure pénale. » ;

3° Au quatrième alinéa, les mots : « l'interrogatoire de première comparution » sont remplacés par les mots : « l'audience » ;

4° Après le septième alinéa, il est ajouté deux alinéas ainsi rédigés :

« La victime sera avisée par tout moyen de la date de comparution du mineur devant le juge des enfants.

« La convocation mentionnée aux alinéas précédents peut être également délivrée en vue de la mise en examen du mineur. »

Art. 2.

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 précitée, il est inséré un article 8-1 ainsi rédigé :

« Art. 8-1. - I. - Lorsqu'il sera saisi dans les conditions définies aux troisième à sixième alinéas de l'article 5, le juge des enfants constatera l'identité du mineur et s'assurera qu'il est assisté d'un avocat.

« Si les faits ne nécessitent aucune investigation supplémentaire, le juge des enfants statuera sur la prévention par jugement en chambre du conseil et, s'il y a lieu, sur l'action civile.

« Lorsqu'il estime que l'infraction est établie, le juge des enfants pourra :

« - s'il constate que des investigations suffisantes sur la personnalité du mineur ont déjà été effectuées, prononcer immédiatement l'une des mesures prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 8, ou encore, ordonner une mesure ou une activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime avec l'accord de celle-ci ou dans l'intérêt de la collectivité ;

« - s'il constate que des investigations suffisantes sur la personnalité du mineur ont déjà été effectuées mais envisage de prononcer une autre mesure que celles prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 8, renvoyer l'affaire à une prochaine audience de la chambre du conseil, qui devra avoir lieu au plus tard dans les six mois ;

« - s'il constate que les investigations sur la personnalité du mineur ne sont pas suffisantes, renvoyer l'affaire à une prochaine audience de la chambre du conseil, qui devra avoir lieu au plus tard dans les six mois. Il recueillera des renseignements sur la personnalité du mineur et sur la situation matérielle et morale de la famille dans les conditions prévues aux quatrième et cinquième alinéas de l'article 8.

« Dans le cas où le juge des enfants fait application des dispositions de l'un ou l'autre des deux alinéas qui précèdent, il pourra ordonner à l'égard du mineur, à titre provisoire, son placement dans un établissement public ou habilité à cet effet, une mesure de liberté surveillée préjudicielle ou une mesure ou activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime, avec son accord, ou dans l'intérêt de la collectivité.

« II. - Si la complexité de l'affaire nécessite des investigations approfondies, le juge des enfants procédera comme il est dit aux articles 8 et 10. »

Art. 2 bis (nouveau).

Après le premier alinéa de l'article 10 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Quelles que soient les procédures de comparution, le mineur et les parents, le tuteur, la personne qui en a la garde ou son représentant, sont simultanément convoqués pour être entendus par le juge. Ils sont tenus informés de l'évolution de la procédure. »

Art. 3.

L'article 12 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 précitée est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, les mots : « l'éducation surveillée » sont remplacés par les mots : « la protection judiciaire de la jeunesse » ;

2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce service doit également être consulté avant toute décision du juge des enfants au titre de l'article 8-1 et toute réquisition du procureur de la République au titre de l'article 8-2. »

Art. 4.

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 précitée, il est inséré un article 8-2 et un article 8-3 ainsi rédigés :

« Art. 8.2. - En matière correctionnelle, le procureur de la République pourra, s'il constate que les diligences et investigations prévues par l'article 8 ont déjà été accomplies, le cas échéant à l'occasion d'une procédure antérieure et qu'elles sont suffisantes, et si des investigations sur les faits ne sont pas nécessaires, requérir du juge des enfants, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 5, qu'il ordonne la comparution du mineur devant le tribunal pour enfants ou devant la chambre du conseil dans un délai qui ne pourra être inférieur à un mois ni supérieur à trois mois.

« Dans ce cas, le mineur sera immédiatement présenté au juge des enfants qui constatera son identité et l'informera qu'il a droit à l'assistance d'un avocat de son choix ou commis d'office. Lorsque le mineur ou ses représentants légaux n'auront pas fait le choix d'un avocat, le juge des enfants fera désigner sur-le-champ par le bâtonnier un avocat d'office. L'avocat pourra consulter le dossier et communiquer librement avec le mineur. Le magistrat notifiera au mineur les faits retenus à son encontre ainsi que leur qualification juridique et, l'avocat choisi ou désigné d'office ayant été entendu, recueillera ses déclarations par procès-verbal.

« Si le juge des enfants fait droit, à l'issue de la présentation mentionnée au deuxième alinéa, aux réquisitions du procureur de la République, il notifiera au mineur le lieu, la date et l'heure de l'audience. Cette notification sera mentionnée au procès-verbal, dont copie sera remise sur-le-champ au mineur et à son avocat. Les représentants légaux du mineur en seront avisés par tout moyen. Jusqu'à la comparution du mineur, le juge des enfants pourra, le cas échéant, ordonner les mesures prévues aux articles 8, 10 et 11. Il versera au dossier les mesures d'investigations sur la personnalité du mineur diligentées avant l'engagement des poursuites.

« Si le juge des enfants ne fait pas droit aux réquisitions du procureur de la République, il rendra, à l'issue de la présentation du mineur, une ordonnance motivée dont copie sera remise sur-le-champ au mineur, à son avocat et au procureur de la République. Les représentants légaux du mineur en seront avisés par tout moyen.

« Le procureur de la République pourra interjeter appel de cette ordonnance au plus tard le jour suivant la notification de la décision. Cet appel sera notifié au mineur, à ses représentants légaux et à son avocat. Il sera porté devant le président de la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel ou son remplaçant qui statuera au plus tard dans les quinze jours de sa saisine. La transmission du dossier de la procédure pourra être faite par tout moyen et, notamment, par télécopie.

« Le mineur, ses représentants légaux et son avocat pourront présenter au président de la chambre spéciale des mineurs toutes observations utiles par écrit.

« Le président de la chambre spéciale des mineurs pourra, soit confirmer l'ordonnance du juge des enfants, soit ordonner la comparution du mineur devant le tribunal ou devant la chambre du conseil. Le juge des enfants sera aussitôt avisé de la décision. Lorsque le renvoi aura été ordonné, le procureur de la République devra citer le mineur à comparaître dans le délai fixé par le président de la chambre spéciale des mineurs. Jusqu'à la comparution du mineur, le juge des enfants demeurera compétent pour ordonner, le cas échéant, les mesures prévues aux articles 8, 10 et 11.

« Art. 8-3. - En matière correctionnelle, le procureur de la République pourra, à tout moment de la procédure, faire application des dispositions de l'article 8-2, sous réserve que les conditions prévues au premier alinéa de cet article soient remplies.

« Le juge des enfants devra statuer dans les cinq jours de la réception de ces réquisitions. Son ordonnance sera susceptible d'appel dans les conditions prévues par les cinquième et sixième alinéas de l'article 8-2.

« Le procureur de la République pourra saisir le président de la chambre spéciale des mineurs lorsque le juge des enfants n'aura pas statué dans le délai de cinq jours. Cette saisine sera notifiée au mineur, à ses représentants légaux et à son avocat qui pourront présenter au président de la chambre spéciale des mineurs toutes observations utiles par écrit. »

Art. 5.

La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.

Délibéré en séance publique, à Paris, le 27 mars 1996.

Le Président,

Signé : PHILIPPE SÉGUIN

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