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N° 120

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 décembre 1995.

PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

tendant à reconnaître le vote par procuration au bénéfice des députés, conseillers régionaux ou conseillers généraux membres du collège électoral sénatorial,

PRÉSENTÉE

Par M. Patrice GÉLARD,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement)

Élections et référendums. - Conseillers généraux - Conseillers régionaux - Députés - Élections sénatoriales - Vote par procuration.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Le vote par procuration est expressément consacré à l'article L. 71 du code électoral (loi n° 75-1329 du 31 décembre 1975). Il permet de pallier tout empêchement ponctuel d'un électeur en l'autorisant à désigner un mandataire chargé d'accomplir, en son nom et dans des conditions précises, son devoir électoral et ce, quel que soit le type d'élection considéré.

Cette technique répond à la louable volonté de faciliter la participation civique des citoyens dont la disponibilité ne saurait être toujours exigée le jour d'une échéance électorale. La prise en compte de tout empêchement est, à cet égard, largement acceptée puisque la loi n° 93-894 du 6 juillet 1993 (reprise à l'article L. 71 -III du code électoral) accorde le droit de vote par procuration aux « électeurs qui ont quitté leur résidence habituelle pour prendre des vacances ».

Plus généralement, la procuration concerne les « électeurs qui établissent que des obligations dûment constatées les placent dans l'impossibilité d'être présents dans leur commune d'inscription le jour du scrutin » (art. L. 71-1 du code précité) ou les électeurs appartenant à des catégories très particulières comme les gardiens de phare, les titulaires d'une pension militaire d'invalidité dont le taux est égal ou supérieur à 85 %, les détenus purgeant une peine n'entraînant pas une incapacité électorale, etc. (art. L. 71-11).

Aucun homme n'étant doué d'ubiquité, le législateur a étendu le bénéfice du vote par procuration aux différents élus lors de la désignation des délégués et des suppléants au collège électoral sénatorial. C'est l'article R. 139 du code électoral (décret n° 91-653 du 15 juillet 1991) qui le prévoit pour les députés, les conseillers régionaux, les conseillers à l'assemblée de Corse et conseillers généraux :

- soit en cas de maladie dûment constatée ;

- soit lorsqu'ils sont retenus hors de la commune par des obligations découlant de l'exercice de leur mandat ou de missions qui leur ont été confiées par le Gouvernement.

Le cas des conseillers municipaux relève, quant à lui, de l'article L. 121-12 du code des communes qui énonce notamment les conditions d'exercice de ce vote par procuration.

A l'exception des délégués des communes qui sont complétés par des suppléants, le code électoral n'étend pas le recours au vote par procuration à l'ensemble du processus électoral sénatorial si l'on en juge de par le silence des articles concernant la dernière phase dudit processus, à savoir l'élection des sénateurs par les membres du collège électoral.

Faut-il en conclure que ces « grands électeurs », dès lors qu'ils agissent en cette qualité, deviennent des citoyens de second ordre, disposant d'un statut juridique marqué par une plus grande précarité et une inégalité patente (rappelons qu'ils disposent du bénéfice du vote par procuration avant cette phase) ? Cette question revêt un intérêt d'autant plus certain que l'article L. 318 du code électoral dispose que « tout membre du collège électoral qui, sans cause légitime, n'aura pas pris part au scrutin, sera condamné à une amende de 30 F par le tribunal de grande instance du chef-lieu, sur les réquisitions du ministère public ».

Il paraît tout à fait regrettable de sanctionner financièrement (même si la somme reste toutefois modique) ces élus sans prendre en considération leurs éventuelles difficultés matérielles de nature à rendre impossible leur présence le jour du scrutin.

Il devient alors nécessaire de combler pareille lacune juridique des plus contestables en introduisant le recours au vote par procuration pour les membres du collège électoral lors du scrutin de désignation des sénateurs. Les cas justifiant cette dérogation, principe du vote personnel, doivent demeurer limités et ne concernent en conséquence que les maladies, les accidents, les événements familiaux (c'est-à-dire les cas de force majeure), les missions confiées par le Gouvernement (cela vise essentiellement les députés) ou la collectivité de rattachement, la participation à des travaux parlementaires (cela vise encore les députés) et l'exercice du service national (tous les membres du collège électoral sont concernés puisque l'âge minimum requis pour l'éligibilité s'élève à vingt-trois ans pour les députés en vertu de l'article L. 44 du code électoral, dix-huit ans pour les conseillers municipaux selon l'article L. 228 alinéa 1 dudit code, vingt et un ans pour les conseillers régionaux en vertu de l'article L. 339 alinéa 1 du même code et les conseillers généraux en application de l'article L. 194 du code précité).

La proposition de loi organique présentée ci-dessous répond à cette attente, c'est pourquoi nous vous demandons, Mesdames, Messieurs de bien vouloir l'adopter.

PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

Article unique.

Après l'article L. 318 du code électoral, il est inséré un article L.O. 318-1 ainsi rédigé :

« Art. L.O. 318-1. - Tout député, conseiller régional ou conseiller général membre du collège électoral sénatorial, empêché de participer au scrutin tendant à désigner les sénateurs, peut donner à un collègue de son choix, relevant de la même catégorie, pouvoir écrit de voter en son nom.

« Un même membre dudit collège ne peut être porteur que d'un seul mandat.

« Le mandat est toujours révocable.

« Les cas d'empêchement justifiant la mise en place d'un vote par procuration sont les suivants :

« - maladie, accident ou événement familial grave et dûment constaté de nature à empêcher tout déplacement de l'intéressé ;

« - mission temporaire confiée par le Gouvernement ou la collectivité locale de rattachement ;

« - participation aux travaux des Assemblées internationales en vertu d'une désignation faite par l'Assemblée nationale ;

« - service militaire. »

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