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N° 489

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 27 juin 1996.

Enregistré à la Présidence du Sénat le 11 juillet 1996.

PROPOSITION DE LOI

tendant à améliorer la qualité de l'air par le remboursement à tout propriétaire de taxi du coût d'achat et d'installation de l'équipement permettant à leur véhicule de fonctionner au gaz de pétrole liquéfié ou au gaz naturel véhicules.

PRÉSENTÉE

Par MM. Bertrand DELANOË, Claude ESTIER, Michel CHARZAT

et Mme Danièle POURTAUD,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution

éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Environnement. - Air - Code général des impôts - Gaz naturel véhicules (G.N.V.) - Gaz de pétrole liquéfié (G.P.L.) - Pollution.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Aujourd'hui, tous les scientifiques s'accordent pour faire ce double constat :

- La qualité de l'air constitue un véritable enjeu de santé publique. La pollution atmosphérique a des effets néfastes non seulement sur l'environnement « naturel » (écosystème, dépérissement forestier...) et bâti (patrimoine culturel), mais aussi et surtout sur la santé. Elle a notamment un rôle de cofacteur dans le déclenchement et l'aggravation de nombreuses pathologies respiratoires et cardio-vas-culaires chez les populations dites sensibles - enfants, insuffisants respiratoires et personnes âgées. Une étude récente de la Société française de santé publique montre même que la pollution de l'air entraînerait une mortalité cardio-vasculaire prématurée de 260 à 350 décès par an dans l'agglomération parisienne.

- En vingt ans, la pollution atmosphérique a changé de nature : ce ne sont plus désormais les émissions des sources fixes, donc industrielles, qui constituent le facteur le plus important de pollution, mais les sources mobiles, à savoir le trafic routier, notamment en zone urbaine. C'est ainsi qu'on estime que la pollution de l'air en ville est imputable pour les quatre-cinquièmes aux véhicules, qu'ils soient utilitaires ou de tourisme.

La lutte contre la pollution atmosphérique doit donc constituer une priorité de l'action des pouvoirs publics, tout particulièrement dans les grandes agglomérations. Elle nécessite une volonté politique forte, des moyens financiers, une autre façon de penser l'aménagement de l'espace ainsi que nos déplacements. Les élus socialistes et apparentés du Conseil de Paris, de même que les sénateurs socialistes, ont, à plusieurs reprises, fait des propositions pour changer le cours des choses. Ils considèrent notamment que l'amélioration de la qualité de l'air en zone urbaine passe avant tout par la réduction de l'espace physique accordé à l'automobile, et par conséquent par un développement quantitatif et qualitatif des transports en commun peu polluants.

Tel n'est pas pour l'heure le choix opéré par le Gouvernement, ni même la majorité municipale parisienne. Le projet de loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie actuellement en cours d'examen au Parlement est à ce sujet quelque peu décevant. Il vaut avant tout pour sa portée symbolique. Il ne prône nullement une nouvelle poli tique des transports s'appuyant sur un développement massif des U transports collectifs « propres », ni ne propose une remise à plat de la fiscalité des carburants. Il ne diminuera pas sensiblement la pollution. Il pourra tout au plus améliorer les outils pour la mesurer.

Parmi les mesures incitatives du projet de loi, certaines sont d'ordre fiscal, comme celles visant à encourager l'utilisation de carburants « propres » comme le gaz de pétrole liquéfié (G.P.L.) ou le gaz naturel véhicules (G.N.V.). Rappelons que ces carburants présentent de nombreux avantages pour lutter contre les pollutions de toutes sortes : le G.P.L. ne contient ni plomb ni benzène et très peu de souffre. Il n'émet pas de particules mesurables à la différence des véhicules fonctionnant au gazole. Et enfin, les nuisances sonores d'une automobile roulant au G.P.L. sont moindres que celles émises par une voiture essence (deux décibels de moins). Pour toutes ces raisons, nombreux sont les pays qui encouragent l'utilisation de ce genre de carburants. C'est le cas de l'Italie, des Pays-Bas ou encore du Japon, soit quatre millions de véhicules dans le monde.

En France, l'utilisation de ces carburants demeure encore trop marginale pour permettre une amélioration de la qualité de l'air. L'objet de cette proposition de loi est donc de créer les conditions d'un développement progressif du G.P.L. et du G.N.V. à une plus grande échelle pour mieux lutter contre la pollution atmosphérique. Il est proposé de rembourser à tout propriétaire de taxi le coût d'achat et d'installation du « kit » permettant à leurs véhicules de fonctionner au G.P.L. ou au G.N.V., dans la limite de 10 000 F par équipement. Les collectivités locales concernées pourraient prendre en charge le financement complémentaire éventuel, associé à une telle opération.

Ce dispositif présente plusieurs avantages :

- Tout d'abord, il s'adresse à une population qui, jusqu'alors, a peu été destinataire de mesures visant à améliorer la qualité de l'air bien qu'assurant un service de transport au public, à savoir les taxis. Ceux-ci sont pourtant à la fois vecteurs de la pollution urbaine, mais aussi victimes, puisqu'ils subissent quotidiennement les effets des émanations des gaz d'échappement. Citons simplement la mesure proposée à l'article 23 du projet de loi sur l'air qui n'est pas encore définitivement adoptée par le Parlement et qui prévoit le remboursement partiel de la taxe intérieure sur les produits pétroliers sur le G.P.L. et le G.N.V. aux taxis, dans la limite de 6 500 litres par véhicule, soit une économie de 2 693 F pour le G.P.L. On peut douter du caractère véritablement incitatif de cette mesure, sachant que le coût du « kit-G.P.L. » est estimé à environ 15 000 F. L'adoption de cette proposition de loi permettrait de rendre réellement attractif l'usage du G.P.L. auprès des chauffeurs de taxi. Rappelons que le coût « à la pompe » de ce carburant est intéressant puisqu'il est le moins cher du marché : 2,55 F/1 en moyenne.

- Ensuite, bien que modeste, ce dispositif est avant tout pragmatique, incitatif et d'application immédiate. En effet, beaucoup de solutions avancées ne sont valables qu'à partir du moment où le parc automobile est renouvelé. Or, ce processus n'arrivera à son terme, pour les véhicules les plus anciens toujours en circulation, qu'au mieux dans une dizaine d'années. L'adjonction d'un équipement permettant à une voiture essence de fonctionner au G.P.L. est une opération facile à réaliser. Son coût varie entre 8 000 F et 15 000 F selon les véhicules, ce qui ne constitue pas une charge extrême pour le budget de l'État, comparé à l'exonération forfaitaire que celui-ci accorde annuellement aux taxis, soit 11 000 F pour le gazole et 22 000 F pour l'essence. Par ailleurs, compte tenu de la modestie du réseau G.P.L. en France (environ 700 stations), le système de la bicarburation, par rapport à la monocarburation, a l'avantage de ne pas pénaliser les chauffeurs de taxi, et plus particulièrement les artisans pour qui le taxi est tout autant un outil de travail qu'un véhicule à usage personnel : ils pourront utiliser le G.P.L. pour leur activité professionnelle et, par une simple manipulation au tableau de bord, la carburation essence dès lors que la distribution de G.P.L. sera moins présente.

- Enfin, cette mesure permettrait aux taxis, au même titre que les autres flottes assurant un service de transport au public, d'être à la pointe de la lutte contre la pollution atmosphérique et ainsi de contribuer à un changement progressif dans les choix énergétiques des véhicules circulant en milieu urbain.

Telles sont les raisons pour lesquelles, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs les sénateurs, de bien vouloir adopter cette proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article unique.

I. - A compter du 1 er janvier 1997, les propriétaires de taxi faisant équiper leurs véhicules de systèmes leur permettant de fonctionner au gaz de pétrole liquéfié (G.P.L.) ou au gaz naturel véhicules (G.N.V.) bénéficient du remboursement du coût d'achat et d'installation de l'équipement, dans la limite de 10 000 F par véhicule. Les systèmes ouvrant droit à remboursement doivent être agréés par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du budget et de l'environnement.

II. - Les pertes de recettes résultant du paragraphe I sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des tarifs du droit de consommation sur les tabacs prévu aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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